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Sur l'eau
Guy de Maupassant
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- 134 pages
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Sur l'eau
Guy de Maupassant
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About This Book
Il y a peu de grands livres consacrés à la navigation de plaisance. Sur l'eau (1888) relate une croisiÚre de Maupassant en Méditerranée, à bord de son yacht Bel-Ami. Ce n'est pas seulement un récit de voyage, une description des paysages saisis dans leur authenticité de jadis, une peinture de la vie maritime, mais aussi une confession. Maupassant nous parle de la vie littéraire, de ses tourments intimes, de la société, des femmes, de la politique, autant que de la mer et du vent.
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Information
III
Quand on a lu les quatre plus habiles, les quatre plus ingĂ©nieux, il est inutile dâen ouvrir un autre. Et on ne sait rien de plus. Ils ne peuvent, eux aussi, ces hommes, quâimiter lâhomme. Ils sâĂ©puisent en un labeur stĂ©rile. Car lâhomme ne changeant pas, leur art inutile est immuable. Depuis que sâagite notre courte pensĂ©e, lâhomme est le mĂȘme ; ses sentiments, ses croyances, ses sensations sont les mĂȘmes, il nâa point avancĂ©, il
nâa point reculĂ©, il nâa point remuĂ©. Ă quoi me sert dâapprendre ce que je suis, de lire ce que je pense, de me regarder moi-mĂȘme dans les banales aventures dâun roman ?
Ah ! si les poĂštes pouvaient traverser lâespace, explorer les astres, dĂ©couvrir dâautres univers, dâautres ĂȘtres, varier sans cesse pour mon esprit la nature et la forme des choses, me promener sans cesse dans un inconnu changeant et surprenant, ouvrir des portes mystĂ©rieuses sur des horizons inattendus et merveilleux, je les lirais jour et nuit. Mais ils ne peuvent, ces impuissants, que changer la place dâun mot, et me montrer mon image, comme les peintres. Ă quoi bon ?
Car la pensĂ©e de lâhomme est immobile.
Les limites prĂ©cises, proches, infranchissables, une fois atteintes, elle tourne comme un cheval dans un cirque, comme une mouche dans une bouteille fermĂ©e, voletant jusquâaux parois oĂč elle se heurte toujours.
Et pourtant, à défaut de mieux, il est doux de penser, quand on vit seul.
Sur ce petit bateau que ballotte la mer, quâune vague peut emplir et retourner, je sais et je sens combien rien nâexiste de ce que nous connaissons, car la terre qui flotte dans le vide est encore plus isolĂ©e, plus perdue que cette barque sur les flots. Leur importance est la mĂȘme, leur destinĂ©e sâaccomplira. Et je me rĂ©jouis de comprendre le nĂ©ant des croyances et la vanitĂ© des espĂ©rances quâengendra notre orgueil dâinsectes !
Je me suis couchĂ©, bercĂ© par le tangage, et jâai dormi dâun profond sommeil comme on dort sur lâeau jusquâĂ lâheure oĂč Bernard me rĂ©veilla pour me dire :
- Mauvais temps, monsieur, nous ne pouvons pas partir ce matin. »
Le vent est tombé, mais la mer, trÚs grosse au large, ne permet pas de faire route vers Saint-Raphaël.
Encore un jour Ă passer Ă Cannes.
Vers midi, le vent dâouest se leva de nouveau, moins fort que la veille, et je rĂ©solus dâen profiter
pour aller visiter lâescadre au golfe Juan.
Le Bel-Ami , en traversant la rade, dansait comme une chĂšvre et je dus gouverner avec grande attention pour ne pas recevoir Ă chaque vague qui nous arrivait presque par le travers, des paquets dâeau par la figure. Mais bientĂŽt je gagnai lâabri des Ăźles et je mâengageai dans le passage sous le chĂąteau fort de Sainte-Marguerite.
Sa muraille droite tombe sous les rocs battus du flot, et son sommet ne dĂ©passe guĂšre la cĂŽte peu Ă©levĂ©e de lâĂźle. On dirait une tĂȘte enfoncĂ©e entre deux grosses Ă©paules.
On voit trĂšs bien la place oĂč descendit Bazaine. Il nâĂ©tait pas besoin dâĂȘtre un gymnaste habile pour se laisser glisser sur ces rochers complaisants.
Cette Ă©vasion me fut racontĂ©e en grand dĂ©tail par un homme qui se prĂ©tendait et qui pouvait ĂȘtre bien renseignĂ©.
Bazaine vivait assez libre, recevant chaque jour sa femme et ses enfants. Or, Mme Bazaine,
nature Ă©nergique, dĂ©clara Ă son mari quâelle sâĂ©loignerait pour toujours avec les enfants sâil ne sâĂ©vadait pas, et elle lui exposa son plan. Il hĂ©sitait devant les dangers de la fuite et les doutes sur le succĂšs ; mais quand il vit sa femme dĂ©cidĂ©e Ă accomplir sa menace, il consentit.
Alors, chaque jour, on introduisit dans la forteresse des jouets pour les petits, toute une minuscule gymnastique de chambre. Câest avec ces joujoux que fut fabriquĂ©e la corde Ă nĆuds qui devait servir au marĂ©chal. Elle fut confectionnĂ©e lentement, pour ne pas Ă©veiller de soupçons, puis cachĂ©e avec soin dans un coin du prĂ©au par une main amie.
La date de lâĂ©vasion fut alors fixĂ©e. On choisit un dimanche, la surveillance ayant paru moins sĂ©vĂšre ce jour-lĂ .
Et Mme Bazaine sâabsenta pour quelque temps.
Le marĂ©chal se promenait gĂ©nĂ©ralement jusquâĂ huit heures du soir dans le prĂ©au de la prison, en compagnie du directeur, homme aimable dont le commerce lui plaisait. Puis il
rentrait en ses appartements, que le geÎlier chef verrouillait et cadenassait en présence de son supérieur.
Le soir de la fuite, Bazaine feignit dâĂȘtre souffrant et voulut rentrer une heure plus tĂŽt. Il pĂ©nĂ©tra en effet en son logement ; mais dĂšs que le directeur se fut Ă©loignĂ© pour chercher son geĂŽlier et le prĂ©venir dâenfermer immĂ©diatement le captif, le marĂ©chal ressortit bien vite et se cacha dans la cour.
On verrouilla la prison vide. Et chacun rentra chez soi.
Vers onze heures, Bazaine sortit de sa cachette muni de lâĂ©chelle. Il lâattacha et descendit sur les rochers.
Au jour levant un complice détacha la corde et la jeta au pied du mur.
Vers huit heures et demie, le directeur de Sainte-Marguerite sâinforma du prisonnier, surpris de ne pas le voir encore, car il sortait tĂŽt chaque matin. Le valet de chambre de Bazaine refusa dâentrer chez son maĂźtre.
- neuf heures enfin, le directeur força la porte et trouva la cage abandonnée.
Mme Bazaine de son cĂŽtĂ©, pour exĂ©cuter ses projets, avait Ă©tĂ© trouver un homme Ă qui son mari avait rendu jadis un service capital. Elle sâadressait Ă un cĆur reconnaissant, et elle se fit un alliĂ© aussi dĂ©vouĂ© quâĂ©nergique. Ils rĂ©glĂšrent ensemble tous les dĂ©tails ; puis elle se rendit Ă GĂȘnes sous un faux nom et loua, sous prĂ©texte dâune excursion Ă Naples, un petit vapeur italien au prix de mille francs par jour, en stipulant que le voyage durerait au moins une semaine et quâon pourrait le prolonger dâun temps Ă©gal aux mĂȘmes conditions.
Le bĂątiment se mit en route ; mais Ă peine eut-il pris la mer que la voyageuse parut changer de rĂ©solution, et elle demanda au capitaine sâil lui dĂ©plaisait dâaller jusquâĂ Cannes chercher sa belle-sĆur. Le marin y consentit volontiers et jeta lâancre, le dimanche soir, au golfe Juan.
Mme Bazaine se fit mettre Ă terre en recommandant que le c...