Les Partitions d'une époque, Volume 1

Les pièces d'André Paiement et du Théâtre du Nouvel-Ontario ( 1971-1976)

André Paiement

• Publisher: Éditions Prise de parole
• Year: 2012
• eBook ISBN: 9782894235706
• Topic: Literature
• Subtopic: Canadian Drama
• Index: Literature

Pendant cinq ans, André Paiement et ses collaborateurs ont veillé à la création de cinq pièces de théâtre produites par la Troupe de l'université Laurentienne et par le Théâtre du Nouvel-Ontario. Ces pièces mettaient en scène pour la première fois, les réalités des communautés françaises du Nouvel-Ontario. Affirmation identitaire, elles ont servi de point de ralliement à l'expression culturelle franco-ontarienne moderne.Pour commémorer ce jaillissement créateur, mais également dans le but de donner à cet auteur et à son œuvre – ainsi qu'à tous ceux qui l'ont appuyé, qui y ont contribué – la place qu'ils méritent, Prise de parole offre cette nouvelle édition, fouillée et de qualité, qui regroupe dans le volume 1: les pièces « Moé j'viens du Nord, 'stie » (1971), « Et le septième jour… » (1971), « À mes fils bien-aimés » (1972) et « La vie et les temps de Médéric Boileau » (1973); et dans le volume 2: « Lavalléville » (1974) et l'adaptation du « Malade imaginaire » de Molière (1975). Les volumes sont complétés d'une préface de Joël Beddows, de documents photographiques, d'un choix de jugements critiques, d'une biographie de l'auteur, d'une bibliographie détaillée ainsi que des partitions musicales des chansons.

À mes fils bien-aimés

Une pièce d’expression franco-ontarienne

Scénario de Daniel Jacques, Michael Gallagher et André Paiement

Texte d’André Paiement

Acte 1

Tom.

Dans le noir, l’on entend une note continue de violoncelle. Fade-in lent sur la scène. Joffre est couché par terre. Il ne bouge pas. Sa tête est appuyée sur les genoux de Tom qui le berce comme un enfant. Tom parle au ralenti. Sa voix, à peine audible, est étrangement chantante comme un disque qui tourne au ralenti. Tom fera également ses mouvements au ralenti.

TOM

Tu m’as fait peur.

J’ai peur des couteaux.

J’ai peur de perdre.

J’ai peur que tu gagnes.

Pourquoi tu veux toujours gagner?

Fernand voulait te laisser gagner. Comprends-tu? P’pa t’a fait gagner.

C’est juste parce que j’le veux pas que tu vas gagner.

Pendant que Tom parle, le violoncelle se fait entendre de plus en plus fort et les dernières paroles de Tom se perdent. Tom se lève, prend Joffre par les pieds et le traîne vers la boîte au centre. À mesure que le volume de la musique augmente, l’éclairage diminue. Fondu au noir. La note de violoncelle continue un peu et s’arrête. Un court silence, puis on entend une musique de Bach pendant que le générique est projeté sous forme de diapositives.

Acte ii, scène 1

Tom et Fernand.

La musique s’éteint avec le dernier mot du générique. La scène reste noire. On entend des bruits de pas sur les planches.

TOM

J’vois absolument rien.

FERNAND

(En riant.) Tu m’dis pas.

TOM

Arrête de fourrer l’chien, Fernand. As-tu une allumette ou quequ’chose?

FERNAND

(Toujours en riant.) Non. Envoye! Vas-y!

TOM

Attends une minute, O.K. T’sais jamais, une vieille bâtisse comme ça, y pourrait y avoir des planches de pourries. On pourrait aussi ben passer à travers le plancher.

FERDINAND

Tom! C’est pas une si vieille bâtisse que ça et puis le plancher m’a l’air ben solide.

TOM

Comment tu sais?

FERNAND

Tiens, Tom! ( Il saute sur le plancher.) J’viens de sauter assez fort là, que j’aurais dû passer au travers du plancher. Comme tu vois, j’t’encore icitte. Envoye! Avance!

TOM

Fernand! Pousse pas!

FERNAND

Ton problème, Tom, c’est qu’t’as peur d’la noirceur. Comment ça se fait qu’à ton âge, t’as peur d’la noirceur comme ça?

TOM

C’est pas que j’aie si peur d’la noirceur. (Temps.) C’est juste que j’vois rien.

Fernand rit.

FERNAND

Maudit que t’es drôle. Viens-t’en. Suis-moé.

TOM

(En sursautant) Qu’est-ce que c’est ça?

FERNAND

(Impatient.) C’est correct, Tom. Ça t’mangera pas. C’est juste du câble. (Un court temps.) Maudit pissoux!

TOM

On est où, tu penses?

FERNAND

Sur la scène, probablement.

TOM

(Il se cogne sur un objet.) Ayoye! Je l’savais! Je l’savais! Maudit, je l’savais!

FERNAND

Es-tu tombé dans l’plancher?

TOM

Ben drôle! J’me suis cogné la jambe sur quequ’chose.

FERNAND

Veux-tu que j’y donne un bec?

TOM

Essaie d’être sérieux là, une minute. Trouve les lumières.

FERNAND

Tom, j’le sais pas plus que toé où y sont les lumières.

TOM

On va les trouver avant que j’me casse le cou.

FERNAND

O.K., pars sur ton côté pis essaie de trouver un mur.

TOM

Pis après?

FERDINAND

Ben, cherche un panneau électrique.

TOM

O.K. O.K. J’sais pas si y a des toiles d’araignées sur les...

FERNAND

(L’interrompant.) Envoye! Cherche!

TOM

Maudit qu’y fait noir! Oh!

On entend Tom tomber.

FERNAND

Es-tu tombé dans l’plancher, là?

TOM

Non! J’ai trouvé l’mur!

FERNAND

Y a-tu un panneau électrique?

TOM

Pas encore... oui. Tiens, j’ai quequ’chose.

Les lumières s’allument.

Scène 2

Fernand et Tom.

FERNAND

Yé Tom! Bravo! Encore, encore!

Fernand rit. Tom revient des coulisses.

TOM

Arrête-toé donc! (Il est surpris et excité.) Hé, maudit! C’est grand! Fernand, as-tu vu?

FERNAND

C’est pas mal. C’est pas mal.

TOM

C’est pas mal? C’est parfait! Juste la scène, c’est grand en masse pour donner tes cours. On peut bâtir un mur mobile entre la salle pis la scène, avec un écran roulant sur l’autre côté pour mes films. C’est trop beau! (Il saute sur le plancher.) Le plancher est ben solide.

FERNAND

Tu m’dis pas, Tom.

TOM

Ah! T’as donc toujours raison.

Tom a l’air sérieux. Fernand le regarde et se met à rire. Tom ne peut s’empêcher de rire lui aussi.

FERNAND

Y est-tu drôle le père, d’avoir acheté ça, hein?

TOM

Tu me l’dis, surtout juste avant de mourir comme ça.

FERNAND

Moi, j’dis encore qu’y aurait dû nous laisser l’argent.

TOM

Ben oui, mais ça icitte, c’est aussi bon. Y savait qu’on avait de besoin d’une place.

FERNAND

J’pense pas que c’était sa seule raison, moé.

TOM

Comment?

FERNAND

J’pense qu’y voulait pas donner son argent à cause de Joffre.

TOM

Joffre? Pourquoi qu’y aurait pas voulu y donner de l’a...

Table of contents

• Première de couverture
• Du même auteur
• Page titre
• Dépôt légal - Catalogage
• Remerciements
• André paiement, revu et corrigé?
• À l’origine du monument, une école de théâtre
• Note de l’éditeur
• Moé j’viens du nord, ’stie
• Et le septième jour…
• À mes fils bien-aimés
• La vie et les temps de Médéric Boileau
• Manifester
• « Is what we be »
• Partitions musicales
• Table des matières
• Quatrième de couverture