Entre solitudes et réjouissances
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Entre solitudes et réjouissances

Les francophones et les fêtes nationales (1834-1982)

Marcel Martel, Joel Belliveau

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  1. 332 pages
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Les francophones et les fêtes nationales (1834-1982)

Marcel Martel, Joel Belliveau

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Les fêtes nationales rythment chaque année la vie des communautés et sont souvent synonymes de congés fériés. Si ces fêtes sont profondément inscrites dans les mœurs, elles sont toutefois un phénomène relativement récent dans l'histoire. Les premières célébrations organisées par des États pour marquer leur naissance ne sont en effet apparues qu'à la fin du XIXe siècle, y compris au Canada. Pourquoi fêter sa nationalité? Pourquoi commémorer la naissance d'un pays?Dans cet ouvrage collectif, les différentes contributions retracent les origines et l'évolution de fêtes nationales célébrées à quatre moments de l'année: autour du 24 mai (la fête de la Reine, la fête de l'Empire et la fête de Dollard-des-Ormeaux), le 24 juin (la Saint-Jean-Baptiste, qui deviendra la fête nationale du Québec, mais que les autres communautés d'origine canadienne-française ne cesseront également de revendiquer), le 1er juillet (la « fête de la Confédération », devenue assez tardivement la « fête du Canada ») et le 15 août (l'Assomption, désormais la « fête nationale des Acadiens »).Les autrices et auteurs se concentrent exclusivement sur les Canadiens d'expression française et sur la variété de leur ancrage politique au pays. Ils cherchent ainsi à comprendre l'expérience festive de ces communautés dont la langue française est au cœur de la vie. Ils jettent un nouvel éclairage sur les identités nationales au Canada en examinant les interactions entre la vie citoyenne et les mises en scène ritualisées que sont les fêtes nationales.

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Information

Year
2021
ISBN
9782764646618
Le 24 mai
chapitre 1
Célébrer, consommer ou partir en vacances :
la fête de la reine Victoria, 1845-1982
Marcel Martel et Joel Belliveau
On l’appelle tantôt « la fête de la Reine » tantôt « la fête de l’Empire ». Aux jeunes elle apporte l’idée d’amusements tapageurs à l’aide de pièces pyrotechniques. Aux plus vieux, l’attrait irrésistible d’une sortie au grand air, parmi les bourgeons et les fleurs d’une nature qui s’éveille.
Publicité du Canadien National,
Le Progrès du Saguenay, 28 mai 1929
Des Canadiens, à l’image des sujets de plusieurs autres royaumes et empires, ont très tôt eu coutume de célébrer l’anniversaire de leur monarque. Le 24 mai, jour anniversaire de la naissance de la reine Victoria (elle accède au trône en 1837), ne fait pas exception. C’est durant son règne que la tradition commence son processus d’institutionnalisation, puisque c’est dès 1845 que le Parlement de la province du Canada adopte un projet de loi déclarant le 24 mai jour de fête.
Les organisateurs de la célébration cherchent à renforcer le sentiment d’attachement à la monarchie et à l’Empire britannique, quelques années après les rébellions dans les deux Canadas et l’Acte d’Union, ainsi qu’à démarquer l’Amérique du Nord britannique de la république états-unienne au sud. Ce message n’est pas destiné uniquement aux Canadiens d’origine britannique ou immigrante. Il en existe une variante pour les Canadiens français, à qui la reine et son empire sont présentés comme garants des libertés dont ils jouissent et qui incluent le droit d’utiliser leur langue, de pratiquer leur religion et de sauvegarder leur culture.
Malgré tout, les célébrations n’ont pas lieu partout dans la colonie. Au Canada français, en particulier, la fête passe inaperçue ; peu d’activités officielles sont organisées. En réaction à ce manque de ferveur, l’Ontarienne Clementina Trenholme Fessenden propose au bout de quelques décennies la création d’une fête célébrant l’appartenance à l’Empire. Les provinces récupèrent cette initiative citoyenne en instituant le jour de l’Empire en 1899. Les festivités du Victoria Day, mais surtout celles de la journée de l’Empire, qui se déroulent habituellement le 23 mai, démontrent une volonté de renforcer les liens entre le dominion du Canada et la métropole.
Dans le sillage du 60e anniversaire de l’accession au trône de Victoria, fêté en grande pompe au Canada en 1897, et à la suite de son décès en janvier 1901, la journée dédiée à cette souveraine devient une fête légale cette année-là. Au nom de l’attachement du Canada à sa souveraine, le gouvernement du dominion se distinguera en continuant d’observer le 24 mai. Or, pour la population, la fête de la Reine représente avant tout l’occasion de profiter d’un congé et marque le début officieux de l’été.
La fête de la Reine : congé printanier par excellence
Après l’union des colonies du Bas-Canada et du Haut-Canada qui fait suite aux rébellions de 1837 et 1838, les Canadiens français se retrouvent à devoir évoluer dans la « province du Canada » qui, à compter de 1845, célèbre officiellement la reine Victoria. Une loi du Parlement de cette colonie institue le 24 mai comme jour férié pour les employés de la fonction publique et ceux du secteur bancaire. Les autres travailleurs travaillent, mais s’ils souhaitent eux aussi profiter d’un congé, ils peuvent faire pression sur leur conseil municipal pour qu’il décrète le 24 mai jour férié, ce que plusieurs font en Ontario1.
Une première tentative de faire de la fête de la Reine un jour férié pour l’ensemble du pays a lieu en 1897. Les parlementaires fédéraux tablent sur la vague de sympathie suscitée par le jubilé de diamant de la reine. Le projet de loi privé présenté à cet effet soulève toutefois de l’opposition au cours de son débat à la Chambre des communes. Des députés affirment qu’un nouveau congé nuirait non seulement aux activités des entreprises, mais aussi aux travailleurs qui perdraient une journée de revenus. Le projet de loi meurt finalement au feuilleton.
Quatre ans plus tard, le vent tourne lorsque Victoria décède. Sous la pression de quotidiens ontariens de langue anglaise et des conseils municipaux de Toronto et d’Hamilton, les parlementaires adoptent un projet de loi visant à commémorer son souvenir. Le 24 mai devient dès lors une fête légale dans l’ensemble du pays. La perspective peu alléchante d’avoir à observer en plein automne la fête du nouveau roi Édouard VII, né un 9 novembre, joue un rôle certain dans cette décision. Certains votent en faveur car ils croient aux bienfaits économiques du congé, notamment pour l’industrie pyrotechnique, puisque les Canadiens achètent beaucoup de feux d’artifice lors de ces célébrations. D’autres parlementaires estiment encore une fois qu’une nouvelle fête légale aura des conséquences économiques négatives pour le pays puisque les entreprises et les commerces fermeront leurs portes pendant une journée, ce qui nuira à leur chiffre d’affaires2.
Durant les dernières décennies du xixe siècle, la fête de la Reine a un objectif précis : renforcer l’identité commune et le sentiment d’appartenance au Canada, à ses symboles, notamment la monarchie et l’Empire. Il faut dire que la jeune fédération a été secouée par d’importantes crises depuis 1867. Les rapports sont tendus entre les francophones et les anglophones ainsi qu’entre les catholiques et les protestants. La crise scolaire au Nouveau-Brunswick lance le bal des récriminations, peu de temps après la Confédération. En 1871, le gouvernement de cette province a en effet décidé de ne financer que les écoles publiques, c’est-à-dire celles fréquentées par les protestants. Les catholiques doivent financer eux-mêmes leurs écoles, appelées « séparées » dans la Constitution canadienne, s’ils souhaitent continuer à donner à leurs enfants une éducation fidèle à leurs convictions religieuses. Cette politique touche particulièrement les Acadiens, en très grande majorité catholiques, mais aussi la p...

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