Notre-Dame de Paris
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Notre-Dame de Paris

Victor Hugo

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Notre-Dame de Paris

Victor Hugo

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Dans le Paris du XVe siĂšcle, le poĂšte Gringoire nous entraĂźne du Quartier latin Ă  la sinistre place de GrĂšve, oĂč se dressent gibet et pilori, pour revenir toujours Ă  Notre-Dame de Paris, cette « vaste symphonie de pierre» qui se dresse dans la CitĂ©. Gringoire est, lui aussi, fascinĂ© par la gracieuse bohĂ©mienne Esmeralda, Ă  qui Quasimodo, le sonneur de cloches difforme, voue une vĂ©ritable dĂ©votion. Esmeralda n'a d'yeux que pour le beau capitaine Phaebus... EnlevĂ©e, accusĂ©e de sorcellerie, pourra-t-elle ĂȘtre sauvĂ©e des intrigues du sombre archidiacre Frollo qui la convoite?

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Information

Year
2019
ISBN
9782322111244
Edition
1

II

La place de GrĂšve

Il ne reste aujourd’hui qu’un bien imperceptible vestige de la place de GrĂšve telle qu’elle existait alors ; c’est la charmante tourelle qui occupe l’angle nord de la place, et qui, dĂ©jĂ  ensevelie sous l’ignoble badigeonnage qui empĂąte les vives arĂȘtes de ses sculptures, aura bientĂŽt disparu peut-ĂȘtre, submergĂ©e par cette crue de maisons neuves qui dĂ©vore si rapidement toutes les vieilles façades de Paris.
Les personnes qui, comme nous, ne passent jamais sur la place de GrĂšve sans donner un regard de pitiĂ© et de sympathie Ă  cette pauvre tourelle Ă©tranglĂ©e entre deux masures du temps de Louis XV, peuvent reconstruire aisĂ©ment dans leur pensĂ©e l’ensemble d’édifices auquel elle appartenait, et y retrouver entiĂšre la vieille place gothique du quinziĂšme siĂšcle.
C’était, comme aujourd’hui, un trapĂšze irrĂ©gulier bordĂ© d’un cĂŽtĂ© par le quai, et des trois autres par une sĂ©rie de maisons hautes, Ă©troites et sombres. Le jour, on pouvait admirer la variĂ©tĂ© de ses Ă©difices, tous sculptĂ©s en pierre ou en bois, et prĂ©sentant dĂ©jĂ  de complets Ă©chantillons des diverses architectures domestiques du Moyen Âge, en remontant du quinziĂšme au onziĂšme siĂšcle, depuis la croisĂ©e qui commençait Ă  dĂ©trĂŽner l’ogive, jusqu’au plein cintre roman, qui avait Ă©tĂ© supplantĂ© par l’ogive, et qui occupait encore, au-dessous d’elle, le premier Ă©tage de cette ancienne maison de la Tour-Roland, angle de la place sur la Seine, du cĂŽtĂ© de la rue de la Tannerie. La nuit, on ne distinguait de cette masse d’édifices que la dentelure noire des toits dĂ©roulant autour de la place leur chaĂźne d’angles aigus. Car c’est une des diffĂ©rences radicales des villes d’alors et des villes d’à prĂ©sent, qu’aujourd’hui ce sont les façades qui regardent les places et les rues, et qu’alors c’étaient les pignons. Depuis deux siĂšcles, les maisons se sont retournĂ©es.
Au centre du cĂŽtĂ© oriental de la place, s’élevait une lourde et hybride construction formĂ©e de trois logis juxtaposĂ©s. On l’appelait de trois noms qui expliquent son histoire, sa destination et son architecture : la Maison-au-Dauphin, parce que Charles V, dauphin, l’avait habitĂ©e ; la Marchandise, parce qu’elle servait d’hĂŽtel de ville ; la Maison-aux-Piliers (domus ad piloria), Ă  cause d’une suite de gros piliers qui soutenaient ses trois Ă©tages. La ville trouvait lĂ  tout ce qu’il faut Ă  une bonne ville comme Paris : une chapelle, pour prier Dieu ; un plaidoyer, pour tenir audience et rembarrer au besoin les gens du roi ; et, dans les combles, un arsenac plein d’artillerie. Car les bourgeois de Paris savent qu’il ne suffit pas en toute conjoncture de prier et de plaider pour les franchises de la citĂ©, et ils ont toujours en rĂ©serve dans un grenier de l’HĂŽtel de ville quelque bonne arquebuse rouillĂ©e.
La GrĂšve avait dĂšs lors cet aspect sinistre que lui conservent encore aujourd’hui l’idĂ©e exĂ©crable qu’elle rĂ©veille et le sombre HĂŽtel de ville de Dominique Bocador, qui a remplacĂ© la Maison-aux-Piliers. Il faut dire qu’un gibet et un pilori permanents, une justice et une Ă©chelle, comme on disait alors, dressĂ©s cĂŽte Ă  cĂŽte au milieu du pavĂ©, ne contribuaient pas peu Ă  faire dĂ©tourner les yeux de cette place, fatale, oĂč tant d’ĂȘtres pleins de santĂ© et de vie ont agonisé ; oĂč devait naĂźtre cinquante ans plus tard cette fiĂšvre de Saint-Vallier, cette maladie de la terreur de l’échafaud, la plus monstrueuse de toutes les maladies, parce qu’elle ne vient pas de Dieu, mais de l’homme.
C’est une idĂ©e consolante, disons-le en passant, de songer que la peine de mort qui, il y a trois cents ans, encombrait encore de ses roues de fer, de ses gibets de pierre, de tout son attirail de supplices, permanent et scellĂ© dans le pavĂ©, la GrĂšve, les Halles, la place Dauphine, la croix du Trahoir, le marchĂ© aux pourceaux, ce hideux Montfaucon, la barriĂšre des Sergents, la place aux chats, la porte Saint-Denis, Champeaux, la porte Baudets, la porte Saint-Jacques, sans compter les innombrables Ă©chelles des prĂ©vĂŽts, de l’évĂȘque, des chapitres, des abbĂ©s, des prieurs ayant justice ; sans compter les noyades juridiques en riviĂšre de Seine ; il est consolant qu’aujourd’hui, aprĂšs avoir perdu successivement toutes les piĂšces de son armure, son luxe de supplices, sa pĂ©nalitĂ© d’imagination et de fantaisie, sa torture Ă  laquelle elle refaisait tous les cinq ans un lit de cuir au Grand-ChĂątelet, cette vieille suzeraine de la sociĂ©tĂ© fĂ©odale, presque mise hors de nos lois et de nos villes, traquĂ©e de code en code, chassĂ©e de place en place, n’ait plus dans notre immense Paris qu’un coin dĂ©shonorĂ© de la GrĂšve, qu’une misĂ©rable guillotine, furtive, inquiĂšte, honteuse, qui semble toujours craindre d’ĂȘtre prise en flagrant dĂ©lit, tant elle disparaĂźt vite aprĂšs avoir fait son coup !

III

Besos para golpes

Lorsque Pierre Gringoire arriva sur la place de GrĂšve, il Ă©tait transi. Il avait pris par le pont aux Meuniers pour Ă©viter la cohue du pont au Change et les drapelets de Jehan Fourbault ; mais les roues de tous les moulins de l’évĂȘque l’avaient Ă©claboussĂ© au passage, et sa souquenille Ă©tait trempĂ©e. Il lui semblait en outre que la chute de sa piĂšce le rendait plus frileux encore. Aussi se hĂąta-t-il de s’approcher du feu de joie qui brĂ»lait magnifiquement au milieu de la place. Mais une foule considĂ©rable faisait cercle Ă  l’entour.
– DamnĂ©s Parisiens ! se dit-il Ă  lui-mĂȘme, car Gringoire en vrai poĂšte dramatique Ă©tait sujet aux monologues, les voilĂ  qui m’obstruent le feu ! Pourtant j’ai bon besoin d’un coin de cheminĂ©e. Mes souliers boivent, et tous ces maudits moulins qui ont pleurĂ© sur moi ! Diable d’évĂȘque de Paris avec ses moulins ! Je voudrais bien savoir ce qu’un Ă©vĂȘque peut faire d’un moulin ! est-ce qu’il s’attend Ă  devenir d’évĂȘque meunier ? S’il ne lui faut que ma malĂ©diction pour cela, je la lui donne, et Ă  sa cathĂ©drale, et Ă  ses moulins ! Voyez un peu s’ils se dĂ©rangeront, ces badauds ! Je vous demande ce qu’ils font lĂ  ! Ils se chauffent ; beau plaisir ! Ils regardent brĂ»ler un cent de bourrĂ©es ; beau spectacle !
En examinant de plus prĂšs, il s’aperçut que le cercle Ă©tait beaucoup plus grand qu’il ne fallait pour se chauffer au feu du roi, et que cette affluence de spectateurs n’était pas uniquement attirĂ©e par la beautĂ© du cent de bourrĂ©es qui brĂ»lait.
Dans un vaste espace laissé libre entre la foule et le feu, une jeune fille dansait.
Si cette jeune fille Ă©tait un ĂȘtre humain, ou une fĂ©e, ou un ange, c’est ce que Gringoire, tout philosophe sceptique, tout poĂšte ironique qu’il Ă©tait, ne put dĂ©cider dans le premier moment, tant il fut fascinĂ© par cette Ă©blouissante vision.
Elle n’était pas grande, mais elle le semblait, tant sa fine taille s’élançait hardiment. Elle Ă©tait brune, mais on devinait que le jour sa peau devait avoir ce beau reflet dorĂ© des Andalouses et des Romaines. Son petit pied aussi Ă©tait andalou, car il Ă©tait tout ensemble Ă  l’étroit et Ă  l’aise dans sa gracieuse chaussure. Elle dansait, elle tournait, elle tourbillonnait sur un vieux tapis de Perse, jetĂ© nĂ©gligemment sous ses pieds ; et chaque fois qu’en tournoyant sa rayonnante figure passait devant vous, ses grands yeux noirs vous jetaient un Ă©clair.
Autour d’elle tous les regards Ă©taient fixes, toutes les bouches ouvertes ; et en effet, tandis qu’elle dansait ainsi, au bourdonnement du tambour de basque que ses deux bras ronds et purs Ă©levaient au-dessus de sa tĂȘte, mince, frĂȘle et vive comme une guĂȘpe, avec son corsage d’or sans pli, sa robe bariolĂ©e qui se gonflait, avec ses Ă©paules nues, ses jambes fines que sa jupe dĂ©couvrait par moments, ses cheveux noirs, ses yeux de flamme, c’était une surnaturelle crĂ©ature.
– En vĂ©ritĂ©, pensa Gringoire, c’est une salamandre, c’est une nymphe, c’est une dĂ©esse, c’est une bacchante du mont MĂ©nalĂ©en !
En ce moment, une des nattes de la chevelure de la « salamandre » se détacha, et une piÚce de cuivre jaune qui y était attachée roula à terre.
– Eh non ! dit-il, c’est une bohĂ©mienne.
Toute illusion avait disparu.
Elle se remit Ă  danser. Elle prit Ă  terre deux Ă©pĂ©es dont elle appuya la pointe sur son front, et qu’elle fit tourner dans un sens tandis qu’elle tournait dans l’autre. C’était en effet tout bonnement une bohĂ©mienne. Mais, quelque dĂ©senchantĂ© que fĂ»t Gringoire, l’ensemble de ce tableau n’était pas sans prestige et sans magie ; le feu de joie l’éclairait d’une lumiĂšre crue et rouge qui tremblait toute vive sur le cercle des visages de la foule, sur le front brun de la jeune fille, et au fond de la place jetait un blĂȘme reflet mĂȘlĂ© aux vacillations de leurs ombres, d’un cĂŽtĂ© sur la vieille façade noire et ridĂ©e de la Maison-aux-Piliers, de l’autre sur les bras de pierre du gibet.
Parmi les mille visages que cette lueur teignait d’écarlate, il y en avait un qui semblait plus encore que tous les autres absorbĂ© dans la contemplation de la danseuse. C’était une figure d’homme, austĂšre, calme et sombre. Cet homme, dont le costume Ă©tait cachĂ© par la foule qui l’entourait, ne paraissait pas avoir plus de trente-cinq ans ; cependant il Ă©tait chauve ; Ă  peine avait-il aux tempes quelques touffes de cheveux rares et dĂ©jĂ  gris ; son front large et haut commençait Ă  se creuser de rides, mais dans ses yeux enfoncĂ©s Ă©clatait une jeunesse extraordinaire, une vie ardente, une passion profonde. Il les tenait sans cesse attachĂ©s sur la bohĂ©mienne, et, tandis que la folle jeune fille de seize ans dansait et voltigeait au plaisir de tous, sa rĂȘverie, Ă  lui, semblait devenir de plus en plus sombre. De temps en temps un sourire et un soupir se rencontraient sur ses lĂšvres, mais, le sourire Ă©tait plus douloureux que le soupir.
La jeune fille, essoufflĂ©e, s’arrĂȘta enfin, et le peuple l’applaudit avec amour.
– Djali ! dit la bohĂ©mienne.
Alors Gringoire vit arriver une jolie petite chĂšvre blanche, alerte, Ă©veillĂ©e, lustrĂ©e, avec des cornes dorĂ©es, avec des pieds dorĂ©s, avec un collier dorĂ©, qu’il n’avait pas encore aperçue, et qui Ă©tait restĂ©e jusque-lĂ  accroupie sur un coin du tapis et regardant danser sa maĂźtresse.
– Djali, dit la danseuse, à votre tour.
Et, s’asseyant, elle prĂ©senta gracieusement Ă  la chĂšvre son tambour de basque.
– Djali, continua-t-elle, Ă  quel mois sommes-nous de l’annĂ©e ?
La chĂšvre leva son pied de devant et frappa un coup sur le tambour. On Ă©tait en effet au premier mois. La foule applaudit.
– Djali, reprit la jeune fille en tournant son tambour de basque d’un autre cĂŽtĂ©, Ă  quel jour du mois sommes-nous ?
Djali leva son petit pied d’or et frappa six coups sur le tambour.
– Djali, poursuivit l’égyptienne toujours avec un nouveau manĂšge du tambour, Ă  quelle heure du jour sommes-nous ?
Djali frappa sept coups. Au mĂȘme moment l’horloge de la Maison-aux-Piliers sonna sept heures.
Le peuple était émerveillé.
– Il y a de la sorcellerie lĂ -dessous, dit une voix sinistre dans la foule. C’était celle de l’homme chauve qui ne quittait pas la bohĂ©mienne des yeux.
Elle tressaillit et se retourna ; mais les applaudissements Ă©clatĂšrent et couvrirent la morose exclamation.
Ils l’effacĂšrent mĂȘme si complĂštement dans son esprit qu’elle continua d’interpeller sa chĂšvre.
– Djali, comment fait maütre Guichard Grand-Remy, capitaine des pistoliers de la ville, à la procession de la Chandeleur ?
Djali se dressa sur ses pattes de derriĂšre et se mit Ă  bĂȘler, en marchant avec une si gentille gravitĂ©, que le cercle entier des spectateurs Ă©clata de rire Ă  cette parodie de la dĂ©votion intĂ©ressĂ©e du capitaine des pistoliers.
– Djali, reprit la jeune fille enhardie par ce succĂšs croissant, comment prĂȘche maĂźtre Jacques Charmolue, procureur du roi en cour d’église ?
La chĂšvre prit sĂ©ance sur son derriĂšre, et se mit Ă  bĂȘler, en agitant ses pattes de devant d’une si Ă©trange façon que, hormis le mauvais français et le mauvais latin, geste, accent, attitude, tout Jacques Charmolue y Ă©tait.
Et la foule d’applaudir de plus belle.
– sacrilùge ! profanation ! reprit la voix de l’homme chauve.
La bohémienne se retourna encore une fois.
– Ah ! dit-elle, c’est ce vilain homme ! Puis, allongeant sa lĂšvre infĂ©rieure au-delĂ  de la lĂšvre supĂ©rieure, elle fit une petite moue qui paraissait lui ĂȘtre familiĂšre, pirouetta sur le talon, et se mit Ă  recueillir dans un tambour de basque les dons de la multitude.
Les grands-blancs, les petits-blancs, les targes, les liards Ă  l’aigle pleuvaient. Tout Ă  coup elle passa devant Gringoire. Gringoire mit si Ă©tourdiment la main Ă  sa poche qu’elle s’arrĂȘta. – Diable ! dit le poĂšte en ...

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