Écrits d'une insoumise
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Écrits d'une insoumise

Voltairine de Cleyre

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Écrits d'une insoumise

Voltairine de Cleyre

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Emma Goldman tenait Voltairine de Cleyre (1866-1912) pour «la femme anarchiste la plus douée et la plus brillante que l'Amérique ait jamais produit», et ce jugement avancé il y a près d'un siècle n'a toujours pas été infirmé.Pionnière du féminisme américain, poétesse, musicienne, celle qui se définissait comme une «anarchiste sans qualificatif» propose une réflexion originale qui touche à un très large éventail de sujets – notamment l'économie, la libre pensée, la philosophie, la religion, la criminologie, la littérature et l'action directe non violente.L'œuvre d'envergure de cette militante passionnée expose les raisons de sa révolte, témoigne de son espérance d'un monde meilleur et demeure, aujourd'hui encore, d'une brûlante actualité.Cet ouvrage, réalisé sous la direction de Normand Baillargeon et de Chantal Santerre, réunit 16essais majeurs qui couvrent l'ensemble de son parcours ainsi que 14poèmes.

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Information

Publisher
Lux Éditeur
Year
2018
ISBN
9782895967330

PREMIÈRE PARTIE

ESSAIS

1

LA TENDANCE ÉCONOMIQUE DE LA LIBRE PENSÉE[1]

Mes amis,
À la page 286 de l’édition Belford-Clarke des Rights of Man, vous retrouverez des mots qui délimitent l’objet de ce discours. Faisant allusion aux changements apportés en France par la révolution de 1793, Thomas Paine écrit: «L’esprit de la nation a préalablement changé et un nouvel ordre des choses a naturellement suivi un nouvel ordre de pensée.»
Il y a 289 ans, un homme – il était étudiant, érudit, penseur et philosophe – a été brûlé vif pour son amour de Dieu et pour la préservation de l’autorité de l’Église; au fur et à mesure que les flammes consumaient la chair du martyr Bruno[2], léchant son sang de leurs langues dévorantes, elles jetaient les ombres de la perspective d’un «nouvel ordre des choses»: elles ont mis feu au champ de bataille où la liberté a gagné sa première révolte contre l’autorité.
Le champ de bataille était sans conteste celui de la pensée. La liberté de religion était alors la question à l’ordre du jour. «Liberté de conscience! Liberté de conscience! Non-ingérence entre celui qui vénère et ce qui est vénéré!» Tel était le cri qui émergeait des cachots et des lieux obscurs sous les pieds des princes et des ecclésiastiques. Et pourquoi? Parce que le despotisme autoritaire était en ces temps-là un despotisme ecclésiastique; parce que l’emprise agressive de l’Église écrasait tous les droits humains sous son talon, et tous les autres petits despotes n’étaient que des outils entre les mains de la prêtrise; parce que la tyrannie tendait vers cet idéal et écrasait l’existence de la citadelle de la liberté – l’individualité de la pensée; l’ecclésiologie avait mis les idées sous les verrous.
Mais la liberté de penser ne peut être tuée. Elle peut être silencieuse, certes, mais sûrement, tel un brin d’herbe qui pousse sans bruit, elle offre sa perpétuelle et indomptable opposition aux dictats de l’autorité. La liberté de penser est cette chose silencieuse et indomptable, qui menace et contrarie les desseins de Dieu, l’obligeant à utiliser la torture, la vis à oreilles, le pilori, la pendaison, la noyade, le bûcher ardent et d’autres instruments de son «infinie miséricorde». Au XVIIe siècle, elle a gagné la bataille contre l’autorité qui prétendait contrôler cette forteresse de la liberté. Elle a établi son droit d’exister. Elle a anéanti cette partie de l’autorité qui voulait diriger l’intelligence humaine. Elle abattait les cloisons qui nous encerclent. Elle affirmait et défendait l’anarchie dans la pensée, c’est-à-dire sa non-réglementation.
Vous qui avez si peur du mot «an-archie», souvenez-vous! Ce combat du XVIIe siècle dont vous êtes si fier et auquel vous ne cessez de vous référer a été mené dans le seul but de réaliser l’anarchie dans le domaine de la pensée.
Elle ne fut pas aisée cette bataille de penseurs silencieux contre ceux qui détenaient le pouvoir, la force du nombre et la puissance de la torture! Ce n’était pas facile pour eux de parler franchement au milieu des flammes d’un fagot: «Nous avons d’autres croyances et nous en avons le droit.» Mais à leur côté se tenait la Vérité! Et il y a une grande inégalité entre la vérité et l’erreur: la force est du côté de la vérité, la faiblesse du côté du mensonge et cette inégalité est plus grande encore que toute cette affreuse disparité de pouvoir entre le despote et sa victime. Ils finirent par l’emporter et ont pavé la voie vers le grand combat politique du XVIIIe siècle.
Notez que le XVIIe siècle a permis l’émergence du XVIIIe siècle par un nouvel ordre de pensée qui a donné naissance à un nouvel ordre des choses. Ce n’est qu’en destituant les prêtres et en déracinant leur autorité qu’il est devenu logique d’attaquer la tyrannie des rois: sous l’ancien régime, la royauté avait toujours été l’outil de la prêtrise et, selon l’ordre des choses, n’était donc qu’une réalité secondaire. Mais avec la chute de la prêtrise, il est devenu évident que la royauté était maintenant le despote prééminent, et c’est toujours contre le despote prééminent que la révolte se soulève.
Les instigateurs de cette révolte ont naturellement été ceux qui ont transposé la logique de la libre pensée dans le camp même du nouvel oppresseur dominant. Ils furent ceux et celles qui pensaient, parlaient et écrivaient librement contre le fétichisme politique, tout comme leurs prédécesseurs avaient raillé la religion et n’ont pas perdu leur temps à savourer leur victoire dans le camp des ennemis morts. Ceux-là ont fait face aux questions du jour et ont prolongé la victoire des martyrs de la religion en continuant la bataille pour la liberté en des termes plus significatifs pour les personnes de leurs temps et places. Le résultat a été le rejet du principe de royauté. (Certes, tous les royaumes n’ont pas été rejetés, mais trouvez-moi un seul habitant sur cent d’un royaume qui ne tournera pas en dérision l’idée que les monarques soient les représentants de Dieu.) Ainsi a été forgé un nouvel ordre de la pensée.
Je crois qu’à aucun moment Giardino Bruno ou Martin Luther n’auraient pu prévoir toutes les conséquences qu’aurait leur conception du jugement individuel. En se fondant sur l’expérience humaine acquise jusqu’alors, il était tout simplement impossible de prévoir la gigantesque influence que ces idées auraient sur le XVIIIe siècle et encore moins sur le XIXe siècle. Il n’était pas non plus possible que ces courageux auteurs, qui ont attaqué cette folie qu’est «le pouvoir héréditaire», aient pu calculer les répercussions qu’ils auraient sur la société au fur et à mesure que leur pensée prenait forme et s’inscrivait au sein du corps social. De même, je pense qu’il est impossible à un cerveau quel qu’il soit de prédire le parcours qu’aura une pensée dans le futur ou de pleinement en développer sa logique, jusqu’à son point culminant. Mais je suis également forcée de dire que plusieurs qui pensent, ou qui pensent qu’ils pensent, ne suivent même pas leur syllogisme jusqu’à sa première conclusion. S’ils le faisaient, les libres penseurs d’aujourd’hui ne creuseraient pas, comme des taupes, à travers le substrat des chemins sans issue; ils ne perdraient pas leurs énergies à fouiller les cendres de feux éteints deux siècles auparavant; ils ne perceraient pas d’un coup de lance des artères qui saignent déjà; ils n’aligneraient pas non plus un bataillon de cerveaux contre un fantôme mutilé qui s’étend par terre de lui-même aussi rapidement qu’il peut décemment le faire, pendant qu’un monstre absolument pas fantomatique et presque aussi vigoureux que l’ours russe, que le rhinocéros armé ou que le tigre Hyrcan, semblable à un terrible anaconda aux muscles d’acier et à la mâchoire de fer, s’enroule de ses plis horribles autour des corps de l’humanité et souffle son haleine dévorante à la face des enfants. S’ils poussaient leur syllogisme jusqu’à sa première conclusion, ils comprendraient que la question la plus importante à l’heure actuelle n’est ni politique ni religieuse, mais bien économique. Il existe, en ce moment même, un pressant besoin de mettre de l’avant un ensemble de principes qui rendront pour toujours impossible qu’un être humain en contrôle un autre en contrôlant ses moyens de subsistance. Et si le mouvement en faveur de la libre pensée n’a aucune utilité pratique et ne contribue pas à rendre la vie plus tolérable, s’il ne contient aucun principe dont le déploiement permettra de nous libérer de tous les tyrans oppresseurs, alors il est un mensonge tout aussi grossier et énorme que les immenses farces du miracle chrétien ou des mythes païens.
Nous vivons à l’ère de l’utilité pratique et le libre penseur qui s’approcherait de la masure de la pauvreté en lançant des spéculations métaphysiques sur la continuité de la vie, la transformation de la matière, etc., et qui dirait: «Mon cher ami, votre frère chrétien est dans l’erreur; vous n’êtes pas condamné à un enfer perpétuel; votre condition est votre malheur: on ne peut rien y faire, mais lorsque vous serez mort, vous en verrez la fin», ce libre penseur présente aussi peu d’intérêt dans le monde que l’irrationalisme religieux. De la masure de la pauvreté, et c’est bien compréhensible, lui parviendrait cette réponse: «À moins que vous ne soyez en mesure de me montrer qu’il y a quelque chose dans la libre pensée qui puisse être utile à ceux de ma race, quelque chose qui améliorera mon sort, qui fera choir le puissant de son piédestal, allez prendre place aux côtés du prêtre et du roi et débattez de vos opinions métaphysiques avec ceux qui se moquent de notre sort digne de pitié.»
La question est de savoir si oui ou non la libre pensée contient un tel principe. On me permettra ici d’introduire un supplément d’information provenant d’un passage, je crois, d’une récente lettre du cardinal Manning – et si ce n’est du cardinal Manning, d’un de ces gentilshommes coiffés d’un bonnet d’âne qui ont récemment déversé leur fiel sur un monument élevé à Bruno. Le Cardinal disait: «La libre pensée conduit à l’athéisme, à la destruction de l’ordre social et civil et au renversement du gouvernement.» J’accepte l’énoncé de ce gentilhomme. Je lui reconnais une perspicacité intellectuelle que nombre de libres penseurs n’ont pas. Acceptant cela, je devrai faire de mon mieux pour le prouver et faire tout en mon possible pour montrer que ce principe très iconoclaste est le salut des esclaves de l’économie par la destruction de la tyrannie économique.
Premièrement: la libre pensée conduit-elle à l’athéisme?
La libre pensée, définie largement, est le droit de croire conformément à ce que les faits et la raison qui se présentent à l’esprit conduisent à croire. Cela implique de prendre en compte les faits et les raisonnements qui sont pertinents sur les différents sujets dont il est question. Parmi les sujets dont on pourra discuter, la chose est désormais admise, il y a l’existence de Dieu.
Cette idée de Dieu est, pour commencer, une immense contradiction. L’idée de Dieu, nous affirment les déistes, a été inventée pour exprimer l’inexprimable, l’incompréhensible et l’infini! Cela dit, ils entreprennent immédiatement de le définir. Ces définitions s’avèrent aussi contradictoires et en opposition les unes aux autres que l’absurdité dont ils sont partis pour la formuler. Mais il y a une série d’attributs qui forment une sorte de plateforme commune à toutes ces définitions. Les déistes nous disent que Dieu possède la sagesse suprême, la justice suprême et le pouvoir suprême. (Dans toutes les litanies de toutes les croyances, je n’en ai jamais trouvé une seule qui n’avait pas pour point central l’omnipotence divine.)
Allons à présent à la rencontre du déiste sur son propre terrain et prouvons-lui que son Dieu est ou bien limité quant à la sagesse ou limité quant à la justice, ou limité quant à la puissance – ou qu’il n’existe rien de tel que la justice.
Dieu, étant infiniment juste, souhaite établir la justice; étant infiniment sage, il sait ce qu’est la justice; étant infiniment puissant, il peut la faire exister. Pourquoi l’injustice existe-t-elle en ce cas? Soit votre Dieu peut rendre la justice et ne le fait pas ou il ne sait pas ce qu’est la justice ou il ne peut la rendre.
La première réponse à cet argumentaire est de dire: «Ce qui apparaît comme injuste à vos yeux peut bien, du point de vue de l’omniscience, être justice. Les voies de Dieu ne sont pas les nôtres.»
Mais s’Il est sagesse, elles devraient l’être! Ce qui est assez bon pour Dieu doit être bon pour l’humain et ce qui est trop mauvais pour l’humain ne sera pas acceptable pour Dieu. Autrement, il n’existerait pas une chose telle que la justice ou l’injustice, et tous les meurtres, tous les vols, tous les mensonges, tous les crimes inscrits au calendrier de l’existence seraient justes et seulement sur la base de cette prémisse de l’autorité suprême, on pourrait bouleverser tous les faits du monde.
Quel droit avez-vous de condamner un meurtrier si vous assumez que cela fait partie des «plans de Dieu»? Quelle logique peut commander de rendre des biens volés ou de châtier un voleur si le Tout-Puissant le décrète? Ici encore, le déiste est pris dans un dilemme: c’est que le fait de supposer que le crime est nécessaire à l’accomplissement du plan divin conduit ou bien à mettre en doute sa sagesse ou à nier son omnipotence en montrant que ses moyens sont limités. Tout se joue ici autour de l’autorité divine, comme attribut central de Dieu.
Mais vous vous demandez ce que cela a à voir avec la tendance économique de la libre pensée. Tout. Car cette idée d’une autorité suprême est à la base de toutes les tyrannies qui ont été élaborées. Pourquoi? Si Dieu existe, aucun être humain ni aucune créature vivante n’a jamais eu de droit! Il a tout simplement joui d’un privilège, d’une faveur qui lui a été octroyée, offerte, donnée, concédée par Dieu, et cela pour la durée qu’Il aura décidée.
Telle est la logique des textes saints, la logique du catholicisme: c’est la seule logique que connaisse l’autoritarisme. L’Église catholique dit: «Vous qui êtes aveugle, soyez reconnaissant parce que vous pouvez entendre: Dieu aurait pu également vous rendre sourd. Vous qui avez faim, rendez grâce du fait que vous pouvez respirer: Dieu aurait pu vous priver d’air autant que de nourriture. Vous qui êtes malade, soyez reconnaissant de n’être pas mort: Dieu est miséricordieux de vous laisser vivre. En tout temps et en toute circonstance, soyez satisfait de ce que vous avez et soyez reconnaissant.» Tels sont les bienfaits et les privilèges accordés par l’autorité.
Notez la différence qu’il y a entre un droit et un privilège. Un droit, abstraitement, est un fait: ce n’est pas quelque chose que l’on peut donner, établir ou échanger; cela est. Le pouvoir peut bien me priver de l’exercice d’un droit: du droit lui-même, jamais. Le privilège, abstraitement, n’existe pas. Sitôt que les droits sont reconnus, les privilèges sont abolis.
Mais, d’un point de vue pratique, dès l’instant où vous admettez une autorité suprême, vous niez les droits. En pratique, ce qui est posé comme suprême a tous les droits et ce que la race humaine possède, elle ne le doit qu’au bon vouloir de l’autorité. L’exercice de la fonction respiratoire n’est alors pas un droit, mais un privilège accordé par Dieu; de même, l’utilisation du sol n’est pas un droit, mais une généreuse permission accordée par la divinité; et la possession du fruit de son travail n’est pas un droit, mais une faveur. Et le vol de l’air pur, l’interdiction d’utiliser la terre, le vol du labeur ne sont pas des injustices (puisque si vous n’avez aucun droit, vous ne pouvez pas être victime d’injustice): ce sont de simples bénédictions accordées par «Le grand distributeur» au voleur d’air, au propriétaire terrien et au voleur des fruits du travail.
Et c’est pourquoi le libre penseur, qui reconnaît la science de l’astronomie, la science mathématique ainsi que la science, elle aussi positive, de la justice, est logiquement conduit à nier toute autorité suprême. Tout être humain qui observe et réfléchit ne peut admettre un tyran suprême et garder le respect de lui-même. Aucun cerveau humain ne peut admettre simultanément le dogme du despotisme divin et la doctrine de l’éternelle justice: ils se contredisent l’un l’autre et cela prendrait deux cerveaux pour les admettre. Le Cardinal a raison: la libre pensée mène logiquement à l’athéisme, si par athéisme on veut dire la négation de l’autorité suprême.
Je vais maintenant aborder son troisième énoncé, laissant le deuxième pour le moment. La libre pensée, dit-il, mène au renversement du gouvernement. Je suis sensible au fait que la majorité d’entre vous seriez prêts à nier avec indignation les affirmations du Cardinal: je sais que de leur propre aveu, la plupart de mes amis athées répugnent fortement à faire toute allusion qui semble être une attaque contre le gouvernement; je sais que plusieurs d’entre vous pourraient avec empressement utiliser cette plateforme pour parler «des droits glorieux et des privilèges de la citoyenneté américaine»; pour discourir «du noble rempart de nos libertés – la Constitution»; pour défendre «l’arme pacifique de la réforme, le scrutin»; pour s’enthousiasmer à propos «du drapeau étoilé qui flotte au-dessus de la terre de la liberté et des braves». Nous sommes si braves et si libres! Nous ne pendons plus des Bruno pour avoir tenu des propos hérétiques sur des sujets religieux. Non! Mais nous emprisonnons des hommes parce qu’ils débattent des questions sociales et nous pendons des hommes parce qu’ils discutent des questions économiques! Nous sommes tellement libres et braves dans ce pays! «Ah!» disons-nous dans notre XIXe siècle de liberté et de bravoure, «c’était un Dieu affaibli, un Dieu pauvre, misérable, un Dieu tremblant, que celui dont l’autorité devait être préservée par la mort tortueuse d’une créature»! La question religieuse est morte, et le bûcher n’est plus au goût du jour. Mais si c’est un État fort, un État brave, un État fier, dont l’autorité exige la mort de cinq créatures? L’échafaud est-il mieux que le bûcher? Un esprit libre pourra-t-il lire cet infâme éditorial du Herald de Chicago: «Il n’est pas nécessaire d’établir que Parsons[3] a été légalement, correctement ou sagement pendu: il a été rondement pendu. L’État, souverain, n’a pas à donner de raisons; l’État n’a à se soumettre à aucune loi, l’État est la loi!» Lire cela et ap...

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