Tout n'est pas si facile
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Tout n'est pas si facile

Ambitions, illusions et réalités du HipHop

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Ambitions, illusions et réalités du HipHop

About this book

Conversations HipHop est une sĂ©rie de livres d'entretiens qui mettent en Ă©vidence la diversitĂ© des expĂ©riences des points de vue et des personnalitĂ©s du HipHop, mais aussi la multiplicitĂ© et la convergence des aspirations, des visions et initiatives liĂ©es a cette culture. Il s agit, a travers ce projet, d explorer et exposer ce que signifie etre HipHop et vivre le HipHop, hier, aujourd'hui, et demain.*Le rap vaut-il le prix de ma vie?Reginald, enseignant et formateur, a Ă©tĂ©, dans les annĂ©es 1990, une figure incontournable du rap (sous le nom de MC Solda et avec son groupe les MC AssociĂ©s) et du HipHop dans la rĂ©gion Nord Pas de Calais (aujourd'hui Hauts de France). Il revient sur son parcours en tant que MC, nous explique pourquoi il a decidĂ© d arrĂȘter le rap et tout activisme dans le HipHop, et rappelle comment cette culture lui est utile dans son activitĂ© professionnelle aujourd'hui.*Comment professionnaliser le HipHop au niveau rĂ©gional?Au dĂ©but des annĂ©es 2000, Call 911, une association lilloise spĂ©cialisĂ©e dans la culture HipHop s'est distinguĂ©e. Pendant prĂšs d une dĂ©cennie, Call 911 a montrĂ© un des chemins Ă  suivre pour l'indĂ©pendance et la professionnalisation du HipHop mais aussi pour le dĂ©veloppement de cette culture au niveau local et dans une perspective nationale. En 2002, Mourad Senouci, son fondateur, exposait sa vision et sa stratĂ©gie.*Qu'est-il arrive a la Zulu Nation?Pendant longtemps, la Zulu Nation a Ă©tĂ© le porte-parole du HipHop dans le monde et plus particuliĂšrement en Europe, au point que Zulu Nation et HipHop sont devenus synonymes. Mais alors que les enjeux sociaux et politiques devenaient de plus en plus importants pour les jeunes gĂ©nĂ©rations HipHop, la Zulu Nation semblait se faire de plus en plus discrĂšte. Pourquoi? DĂ©fi J et Phil One, les reprĂ©sentants de la Zulu Nation en Europe s'en expliquent.*Militants associatifs et acteurs du HipHop: Un rendez-vous manque?SaĂŻd Bouamama, sociologue, est charge de recherche Ă  l'IFAR (Intervention, Formation, Action, Recherche) et militant associatif. Il est auteur de plusieurs ouvrages sur les questions de domination, de l immigration dans la sociĂ©tĂ© française et de la gĂ©opolitique africaine, entre autres. Dans cet entretien, il apporte un Ă©clairage sur le rendez-vous manque entre militants associatifs et les acteurs du HipHop au moment de l'Ă©mergence de cette culture en France.

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Information

Year
2021
Print ISBN
9782956563051
eBook ISBN
9782956563068
Edition
1
Subtopic
Music

REGINALD AKA MC SOLDA

Le rap vaut-il le prix de ma vie ?
Reginald, enseignant et formateur, a Ă©tĂ©, dans les annĂ©es 1990, une figure incontournable du rap (sous le nom de MC Solda et avec son groupe les MC AssociĂ©s) et du HipHop dans la rĂ©gion Nord Pas de Calais (aujourd’hui Hauts de France). Il revient sur son parcours en tant que MC, nous explique pourquoi il a dĂ©cidĂ© d’arrĂȘter le rap et tout activisme dans le HipHop, et rappelle comment cette culture lui est utile dans son activitĂ© professionnelle aujourd’hui.
VHH: Comment es-tu «entré» dans le HipHop? Qu’est-ce qui t’a donnĂ© envie d’écrire?
RĂ©ginald : Mes premiers pas dans le HipHop ? C’est un peu comme tout le monde, j’écrivais des textes chez moi, sur des choses de la vie, j’écoutais des groupes de rap et puis je me suis reconnu dans leurs paroles. J’ai essayĂ© d’écrire des textes par rapport Ă  ma vie et Ă  ce que je voyais dans la rue

En fait, je dirais qu’écrire est une forme d’auto-thĂ©rapie, quand on Ă©crit, c’est une maniĂšre d’extĂ©rioriser tout ce qu’on a en soi, tout ce qu’on n’aime pas. C’est un cri de colĂšre, mais cela peut ĂȘtre un cri d’amour aussi. Tout ce qu’on a envie d’exprimer, on l’exprime Ă  travers les textes en fait. Il y a des gens qui vont voir des psys, d’autres Ă©crivent des livres
 Avec le recul, je me suis rendu compte qu’écrire, ça soulage et permet d’ĂȘtre bien dans sa peau.
Tu avais quel ùge quand tu as commencé à rapper?
J’avais 18/19 ans. J’ai commencĂ© Ă  rapper trĂšs tard. J’écris mes textes, je rappe dans mon coin. AprĂšs, je rencontre des gens qui font des Ă©missions de radio ou qui connaissent des DJs, et par le biais des rencontres, des associations se crĂ©ent. Moi, je me suis associĂ© avec un DJ (DJ KĂ©o) qui animait une Ă©mission de radio et qui m’avait proposĂ© de rapper sur ses musiques
 Au fur et Ă  mesure, je me suis rendu compte que ça plaisait aux gens. Il y a des amis qui vous disent « tiens, c’est bien ce que tu fais, tu devrais en faire quelque chose », donc, on a commencĂ© Ă  s’enregistrer, mais pas de maniĂšre professionnelle, bien sĂ»r, sur des petits magnĂ©tos. AprĂšs, on a envie de diffuser ses textes. Alors, on va dans les autres Ă©missions de radios avec nos cassettes, on diffuse notre musique, et on est Ă©coutĂ©. Et petit Ă  petit, la reconnaissance commence Ă  arriver.
Personne ne t’a appris à rapper, à structurer un morceau ? Comment as-tu appris tout cela ?
Non, personne. Je pense qu’il y en a qui l’apprennent, maintenant je prĂ©sume que ça doit s’apprendre puisqu’il existe des centres pour ça. Mais, non, moi, je me suis inspirĂ© des autres artistes et de toute façon, aprĂšs ça se fait tout seul, on arrive Ă  structurer ses rimes
 D’abord, j’ai commencĂ© en anglais, aprĂšs on a envie que les gens comprennent ce qu’on dit, quand on rappe en anglais, c’est beau, c’est gĂ©nial, mais les gens ne comprennent pas. Quand, c’est en français, c’est un dĂ©fi, c’est une autre Ă©tape. Parce que la reconnaissance qu’on avait Ă©ventuellement avant, elle peut ĂȘtre mise Ă  mal. Parce que d’un seul coup en français, ton rap a un vĂ©ritable sens, et les jeunes peuvent critiquer, de maniĂšre positive ou nĂ©gative, et peuvent dire ce qu’ils en pensent vraiment. Et en français, il y a un flow diffĂ©rent, on fait des jeux de mots
 mais non, je n’ai pas eu de tuteur ou de mec qui vient nous guider, en nous disant, non ça ne se fait pas comme ça, etc
 Cela se fait tout seul, on se corrige rĂ©guliĂšrement, disons qu’on peut peut-ĂȘtre tenir compte de l’avis des autres, dans notre entourage, parce qu’on demande l’avis des autres aussi. A fur et Ă  mesure qu’on s’enregistre, qu’on se réécoute et qu’on fait Ă©couter, on finit par arriver Ă  quelque chose qu’on croit « carrĂ© » et une semaine aprĂšs on se dit, tout compte fait, ce n’est pas bien. On n’est jamais satisfaits. On est toujours en quĂȘte de perfection. On Ă©crit, on s’entraĂźne, on s’enregistre. Ça ne s’arrĂȘte jamais.
C’était quoi le rap, ton loisir du moment ? Tu faisais ça aprĂšs les cours ?
Au dĂ©but, je n’étais pas Ă  fond dedans tous les jours, mais rĂ©guliĂšrement quand mĂȘme. Mais comme, personnellement, je n’avais pas d’autres loisirs, je ne faisais pas de sport Ă  cĂŽtĂ©, je ne faisais rien d’autre
 Et finalement, le rap a pris une place importante dans ma vie. Parce qu’on n’est plus soi-mĂȘme. On devient celui qui fait du rap, on est prĂ©sentĂ© tel quel. MĂȘme dans la famille, « lui, il fait du rap », tout ça
 Et aprĂšs, on n’a mĂȘme plus le temps de faire d’autres loisirs, parce que ce qui est important, c’est la musique. Et puis, il y a la reconnaissance, les gens parlent de vous, vous prĂ©sentent Ă  d’autres personnes, vous reconnaissent parce que vous faites du rap. Petit Ă  petit, ça devient un mode de vie. Et je ne vis que pour le rap ! AprĂšs, je dirai, ça s’aggrave !
Faire du rap, cela se reprĂ©sentait quoi ? Est-ce qu’on te prenait pour un guignol ou un pionnier ?
Au dĂ©part, on a Ă©tĂ© trĂšs vite reconnus en tant qu’artiste. On faisait de tout, en mĂȘme temps, on rappe, on tague, on se met Ă  danser dans les soirĂ©es. Moi, j’ai tout de suite eu une reconnaissance. J’ai rencontrĂ© des gens qui m’ont dit: « nous, on t’a donnĂ© de la crĂ©dibilitĂ© parce que dans mon pseudonyme, il y avait MC. C’est aussi bĂȘte que ça
 Je m’appelais MC Solda. Le fait d’avoir moi-mĂȘme choisi, MC (MaĂźtre de CĂ©rĂ©monies), oui, ça m’a donnĂ© une crĂ©dibilitĂ©. Aujourd’hui, encore, il y a des gens qui ne connaissent pas mon vrai prĂ©nom et m’appellent MC. C’est assez particulier, parce qu’en mĂȘme temps, on est amateur aprĂšs tout. Mais, c’était Ă  l’époque vers 89/90, maintenant, ça doit ĂȘtre diffĂ©rent, parce qu’il y a beaucoup plus de monde.
A part toi, il y avait-il d’autres rappeurs ?
Oui, il y en avait d’autres, on n’était pas nombreux, mais on Ă©tait quelques groupes « phares », quelques groupes soi-disant reprĂ©sentant du vivier du Nord Pas de Calais. Nous Ă©tions des pionniers, nous Ă©tions peut-ĂȘtre 4 ou 5 groupes, il y en avait sĂ»rement d’autres, qui ne se faisaient pas entendre, ou qui ne faisaient pas de concerts
 AprĂšs, ça s’enchaĂźne, on commence par avoir une reconnaissance, on est prĂ©sentĂ©s Ă  d’autres personnes. On veut faire bouger les choses, on va vers les structures qui organisent les concerts, on essaie d’ĂȘtre connus Ă  une plus grande Ă©chelle, on ne veut plus ĂȘtre limitĂ©s aux quelques personnes de notre entourage.
Le monde HipHop Ă  la fin des annĂ©es 80 et aux dĂ©buts des annĂ©es 90, c’était quoi, c’était qui ?
Il y avait Ă  l’époque un code vestimentaire. On se reconnaissait par la tenue vestimentaire. On n’était pas nombreux. On se rencontrait dans les disquaires par exemple, Ă  la FNAC, pour ne pas la citer, par exemple, dans le rayon HipHop. C’est comme ça qu’on se parlait, tu prends un disque, tiens, qu’est-ce que t’en penses ? C’est comme cela que les contacts se nouaient. AprĂšs la personne que tu rencontres te prĂ©sente Ă  d’autres personnes et ainsi de suite, c’est comme ça que ça se faisait. Il y avait aussi d’autres lieux de rencontres, notamment la place Rihour Ă  Lille, la place Catinat aussi. Dans des endroits comme ça, on savait qu’on pouvait rencontrer des gens de la mouvance HipHop. AprĂšs des soirĂ©es tag Ă©taient organisĂ©es, des soirĂ©es HipHop ont commencĂ© Ă  se mettre en place dans les maisons de quartiers. Ce n’était pas une musique qui faisait peur comme c’est le cas actuellement, et il n’y avait pas de violence en tant que telle, mais il y avait plus une concurrence entre les diffĂ©rents groupes, entre les diffĂ©rents taggueurs. C’était plutĂŽt positif en mĂȘme temps. Il y a eu bien entendu, comme dans toute chose, des petits conflits mais pas comme il y en a actuellement. A l’époque, c’était encore gĂ©rable.
Puis aprĂšs, des structures se sont créées, comme l’ARA (Autour des Rythmes Actuels) qui a permis aux groupes de faire de la musique. Il y a eu un conseiller municipal qui a fini par s’intĂ©resser Ă  nous. Parce qu’un moment donnĂ©, l’administration s’intĂ©resse Ă  cette mouvance qui s’appelle HipHop et dont on ne connaĂźt pas vraiment les objectifs et ce qu’ils font. Tout ce qu’on sait, c’est qu’il y a des plaintes et des particuliers qui sont dĂ©rangĂ©s par des attroupements de jeunes qui se rĂ©unissent dans les lieux publics et des graffitis sur les volets, les murs. Ce conseiller a essayĂ© de nous connaĂźtre, de savoir qui Ă©tait cette micro-mouvance, ce que nous faisons et ce que la mairie pouvait nous offrir en contrepartie d’une collaboration.
Pour moi, le rap c’était un passage. Beaucoup ont pensĂ© Ă  tort que j’espĂ©rais y faire carriĂšre dans la musique. On ne peut pas tous ĂȘtre rappeur et moi, c’est pour cela d’ailleurs, que j’ai arrĂȘtĂ© parce que je me suis dit, en tant qu’africain, on ne peut pas tous ĂȘtre rappeurs ou sportifs, il faut quand mĂȘme qu’il y en ait d’autres qui soient prĂ©sents dans diffĂ©rents secteurs Ă©conomiques et dans diffĂ©rentes catĂ©gories socioprofessionnelles. MĂȘme si, ça nous a ouvert des portes.
Est-ce que, vous-mĂȘmes, vous vous connaissiez vraiment ? Votre lien c’était le HipHop, mais en dehors de cela, est-ce que vous saviez ce que l’autre faisait dans sa vie, d’oĂč il venait, Ă©tiez-vous des amis?
En fait, dans le monde du HipHop, il n’y a pas d’amitiĂ©s. C’est comme dans le monde de la nuit maintenant, on va en boĂźte, tout le monde s’entend bien, tout le monde est content de se voir mais en fait, il n’a pas d’amitiĂ©, il n’y a pas de lien. On se moque de ce que la personne fait de sa vie. On ne connaissait mĂȘme pas nos vrais prĂ©noms. C’était trĂšs rare que quelqu’une t’appelle par ton vrai prĂ©nom, puisqu’il ne le connaissait pas de toute façon. On te connaĂźt sous ton pseudo. On sait d’oĂč tu viens, de quel quartier, dans quel coin tu habites, mais le vrai prĂ©nom, rien que ça, on ne le savait pas alors le nom !!!
Notre point commun, ce qui nous ralliait, c’était l’amour, la passion pour le HipHop. Quand on se voyait, on ne parlait que de ça. Effectivement au dĂ©part, on pense qu’on va se faire des amis. On se dit que grĂące au HipHop, on rencontre des gens qui partagent la mĂȘme passion. Il y a des affinitĂ©s, mais sans plus, parce qu’en mĂȘme temps, les choses ont trĂšs vite dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©. Je parlais de concurrence, et bien, la concurrence a créé des conflits entre diffĂ©rents groupes de Lille. AprĂšs, mĂȘme au niveau du graffiti, il y a des gens qui tagguaient sur les tags des autres, l’entente n’a pas durĂ© longtemps. Et puis en mĂȘme temps, Ă  l’époque, - bon, cela existe encore maintenant sauf que maintenant ça va beaucoup plus loin dans la violence -, il y avait beaucoup de malentendus, qu’on te disait que quelqu’un t’avais critiquĂ©, il fallait aller rĂ©gler son compte Ă  la personne. Il fallait se faire respecter, il ne fallait pas se faire marcher dessus.
Tu as commencĂ© tardivement, mais une fois devenu acteur, l’ascension a Ă©tĂ© rapide, les scĂšnes sont vite arrivĂ©es, les mixtapes se sont dĂ©veloppĂ©es. Comment expliques-tu le fait que tout soit allĂ© trĂšs vite pour toi ?
Parce qu’à l’époque, il y avait, effectivement un intĂ©rĂȘt des municipalitĂ©s pour cette musique, je pense qu’il y avait aussi des subventions allouĂ©es pour cela. C’était beaucoup plus facile pour faire des concerts ou dĂ©marcher des mairies, puisque quelque part, ils ne connaissaient pas. Je dirai que maintenant, ils prennent un risque. Alors qu’à l’époque, c’étaient des jeunes qui venaient et proposaient quelque chose et on leur donnait les moyens d’y arriver. MĂȘme au niveau des mĂ©dia, c’était plus facile, ils s’intĂ©ressaient Ă  quelque chose qu’ils ne connaissaient pas. C’est d’ailleurs comme ça que j’ai animĂ© une Ă©mission de radio. On nous donnait l’opportunitĂ© de nous exprimer. Et puis, nous Ă©tions aussi tout le temps Ă  la recherche de plans : comment faire pour « graffer » Ă  tel endroit ? Comment faire pour faire un concert Ă  tel endroit ?
Il y a beaucoup plus d’opportunitĂ©s aujourd’hui, parce qu’il y a beaucoup plus de groupes et beaucoup plus de structures. Mais Ă  l’époque, avec le peu de structures qu’il y avait, ce n’était pas beaucoup plus facile, mais on arrivait quand mĂȘme Ă  faire des premiĂšres parties de groupes, ce qui ne se fait plus ou presque plus maintenant. A l’époque, il y avait des festivals avec tous les styles de musique dont le rap. Alors que maintenant, dans un festival Rock, il n’y aura pas spĂ©cialement de groupes de rap prĂ©sents. Avant, il y avait aussi beaucoup de concerts gratuits en plein air, chose qui existe moins aujourd’hui. Maintenant quand ils font des concerts en plein air, c’est avec des grands groupes, des tĂȘtes d’affiche. A l’époque, on faisait en mĂȘme temps appel aux groupes locaux, sĂ»rement pour drainer le public local.
Vers 1990 ou 1991, il n’y avait pas beaucoup de groupes de rap. Mais il y avait une Ă©mission Ă  la radio sur FrĂ©quence Nord (aujourd’hui France Bleu Nord), qui s’appelait « Black, blanc, beur ». C’est comme si aujourd’hui, France Bleu faisait une Ă©mission de rap. C’est impensable. A l’époque, il y avait donc Ă  Lille, SylvĂšre-Henry CissĂ©, qui animait cette Ă©mission de rap, tous les jours pendant 45 minutes et qui faisait venir des grands groupes comme NTM, IAM mais aussi des groupes locaux. Il a pris contact avec des Ă©diteurs, il y a eu un livre qui est sorti, « Rap en Nord » avec les biographies et les textes de groupes de rap. Donc, Ă  l’époque, c’est surprenant, mais il y avait beaucoup d’intĂ©rĂȘt pour cette culture. Parce que c’était nouveau, et certainement aussi parce qu’il n’y avait pas encore cette relation Rap et Violence. Contrairement Ă  maintenant, oĂč on a l’impression de prendre un risque, le rap ne faisait pas peur, Ă  l’époque, on laissait la part belle Ă  cette nouvelle musique, qui intĂ©ressait beaucoup les jeunes mĂȘme si c’était encore flou. En mĂȘme temps, il y avait des associations qui se crĂ©aient au sein des mairies, des ateliers de rap, de danse Ă©taient mis en place.
Est-ce que vous vous ĂȘtes dit Ă  un moment que vous n’étiez pas prĂȘts ou est-ce que vous vous ĂȘtes jetĂ©s sur les occasions sans rĂ©flĂ©chir ?
On ne se posait pas la question de savoir si nous Ă©tions prĂȘts ou pas. On rĂ©pĂ©tait avant et une fois que nous Ă©tions satisfaits de notre rĂ©pĂ©tition, on montait sur scĂšne. Les portes Ă©taient ouvertes et on saisissait toutes les opportunitĂ©s. DĂšs qu’il y avait un plan concert, on contactait la personne et on rĂ©pĂ©tait en consĂ©quence, on essayait de faire des trucs diffĂ©rents Ă  chaque fois. On croyait en nous, on avait cette force-lĂ . On fonçait. On a appris le jeu de scĂšne en regardant les autres, on se basait sur tout ce qu’on voyait. Un exemple, j’ai une fois refusĂ© de faire un atelier proposĂ© par l’ARA. Si on voulait prendre des heures de sampling pour pouvoir crĂ©er nos morceaux, on Ă©tait obligĂ© de prendre des sĂ©ances de chorĂ©graphies, enfin des ateliers pou...

Table of contents

  1. À propos du livre
  2. Epigraphe
  3. Sommaire
  4. AVANT-PROPOS La récupération du pouvoir de notre voix
  5. REGINALD AKA MC SOLDA Le rap vaut-il le prix de ma vie ?
  6. MOURAD SENOUCI (CALL 911) Comment professionnaliser le HipHop au niveau régional ?
  7. DEFI J & PHIL ONE (ZULU NATION BELGIQUE) Qu’est-il arrivĂ© Ă  la Zulu Nation ?
  8. SAID BOUAMAMA Militants associatifs et acteurs du HipHop : Un rendez-vous manqué ?
  9. LA VOIX DU HIPHOP
  10. Page de copyright