1. La situation Ă partir de 1802
AprĂšs la rĂ©introduction de lâesclavage en Guadeloupe au cours de lâĂ©tĂ© 1802, les rĂ©pressions Ă©taient lourdes. Ă premiĂšre vue, la situation avant 1794 semble avoir Ă©tĂ© restaurĂ© et 80 % de la population sous contrĂŽle. Mais secrĂštement, les mĂ©thodes connus avant 1794 seront bientĂŽt utilisĂ©es Ă nouveau pour obtenir un affranchissement dâune maniĂšre ou dâune autre (artisan de talent, mariage).
Il est difficile de trouver des traces, par qui, oĂč et comment la pratique des affranchissements a redĂ©marrĂ©. Il ne semble pas que des exemplaires de protocole du Conseil de la Guadeloupe antĂ©rieurs Ă 1826 aient survĂ©cu.
En principe, chaque titre lĂ©gal dâaffranchissement avait dĂ» passer par le bureau du Gouverneur. NĂ©anmoins, en faisant des recherches pour la pĂ©riode entre 1781 et 1794, jâai trouvĂ© des notaires de Basse-Terre qui sâĂ©taient spĂ©cialisĂ©s dans le fait de dresser des actes dâaffranchissements. Donc jâestime, si jamais on devait se mettre Ă la recherche de dĂ©voiler lâampleur des affranchissements, on devrait exploiter le notariat de la Guadeloupe entre 1802 et 1826 â ou disons au plus tard 1835, car des actes civils (achat, vente, contrat de mariage, testamentâŠ) pouvaient suivre longtemps aprĂšs un affranchissement. Je suppose quâon pourrait y trouver des clients qui sâidentifient avec un titre dâaffranchissement rĂ©digĂ© entre 1802 et 1830 (Le processus sâinstalle beaucoup mieux Ă partir de 1832). Peut-ĂȘtre on trouverait de nouveau des notaires qui sâĂ©taient spĂ©cialisĂ©s dans les affranchissements, mĂȘme si le titre nâĂ©tait valable que signĂ© par le Gouverneur.
Il est envisageable que le gouverneur britannique ait forcé les affranchissements - soit par dignité humaine, soit afin de remettre "un levain en germination" aux Français lors de la remise de la Guadeloupe, qu'ils doivent ensuite gérer.
Donc on devrait trouver des indices sur la pratique dans les archives du secrétariat des gouverneurs français, anglais et suédois.
Finalement, jâimagine que des traces puissent ĂȘtre trouvĂ©s dans lâĂ©tat civil en ligne (ANOM IREL) soit pour les mariages soit pour la reconnaissance dâenfants. Les citoyens ont dĂ» se lĂ©gitimer par leur acte de naissance ou leur affranchissement.
Une chose est certaine : Au cours des premiĂšres dĂ©cennies du 19e siĂšcle, la dichotomie esclavage / libertĂ© / droits de lâhomme a Ă©tĂ© discutĂ© de nouveau et a gagnĂ© de lâampleur au cours des annĂ©es 1830 avec la volontĂ© du roi Louis-Philippe.
Ce travail intĂ©ressant nâa pas encore Ă©tĂ© fait, il faudrait une Ă©quipe de chercheurs et volontaires qui se mettent au travail. Ainsi, je me restreins Ă lâespace entre 1826 et avant mai 1848 qui est mieux accessible. Jâessayerais de dresser un premier tableau de la sociĂ©tĂ© affranchie de la Guadeloupe Ă partir de la comparaison de la liste dâaffranchissements du Conseil de la Guadeloupe, la version imprimĂ©e et lâinscription des nouveaux citoyens Ă la mairie â un travail qui nâa pas encore Ă©tĂ© fait jusquâĂ maintenant.
Sandra Willendorf Cologne, septembre 2021
2. Vers lâaffranchissement
Pendant que les marrons « sâaffranchissent eux-mĂȘmes », il y a encore le moyen dâaffranchissement lĂ©gale :
Il y avait deux types dâaffranchissements. DâaprĂšs la premiĂšre variante, lâaffranchissement a Ă©tĂ© accordĂ© par le gouverneur ou le directeur de la colonie. L'esclave Ă©tait libre de droit dĂšs la rĂ©ception du certificat, si son ancien propriĂ©taire avait payĂ© la taxe Ă la Caisse des libertĂ©s pour obtenir la libertĂ©.
Selon la deuxiĂšme variante, l'esclave a reçu une clause de non-responsabilitĂ© en tant que propriĂ©tĂ© de son prĂ©cĂ©dent propriĂ©taire sur son droit Ă lâesclave (dĂ©sistement). Dans ce cas, l'esclave Ă©tait de facto libre et devait payer la taxe Ă la Caisse des libertĂ©s lui-mĂȘme, afin de se libĂ©rer de jure. Entre-temps, jusqu'Ă ce qu'il ait rĂ©glĂ© les frais, il Ă©tait sous le haut patronage de son ancien propriĂ©taire. Pour cette raison, les anciens esclaves y figuraient toujours dans les inventaires (cf. RĂ©gent 2007 : 542-548 sur les types de libĂ©ration). Cet avis de non-responsabilitĂ© a Ă©tĂ© prononcĂ© lors de la libĂ©ration gĂ©nĂ©rale en 1794 - tous messieurs sur leurs esclaves, sans annexer de disposition d'exĂ©cution. L'abolition a Ă©tĂ© annoncĂ©e par des panneaux d'affichage. La mise en Ćuvre a eu lieu dans le prĂ©lĂšvement massif pour le bataillon des Antilles. Les travailleurs agricoles restants devraient ĂȘtre conservĂ©s dans les plantations avec le deuxiĂšme type de mise en Ćuvre pour garantir les rĂ©coltes et le revenu au gouvernement (cf. PĂ©rotin-Dumon 2000 : 685).
Le droit civil en tant que prĂ©tendant libre nâĂ©tait pas exĂ©cutoire. Les revendications de propriĂ©tĂ© prĂ©cĂ©dentes des maĂźtres nâavaient plus de base lĂ©gale. Dans la vie de tous les jours de la majoritĂ© des nouveaux livres, travailleurs agricoles comme travailleurs forcĂ©s, cela nâa eu pratiquement aucun effet. Pour eux, rien ne change par rapport Ă avant. En raison de lâexode des jeunes hommes et de lâeffondrement des rĂ©coltes et des revenus des planteurs, leur situation est plutĂŽt pire quâauparavant. Par rapport Ă lâAncien RĂ©gime, ils ne peuvent mĂȘme pas se rĂ©fĂ©rer au Code Noir car celui-ci avait Ă©tĂ© suspendu (cf. Eichmann 2019).
En examinant les dĂ©crets du Bulletin de la Guadeloupe de 1828-1848, les deux variantes se rĂ©vĂšlent : le gouverneur peut dĂ©clarer la libĂ©ration par dĂ©cret. Les autres cas apparaissent Ă©galement ici, car dans certains dĂ©crets, il est Ă©galement question d'un montant prĂ©alablement fixĂ© Ă la Caisse des libertĂ©s. Dans certains cas, la redevance a Ă©tĂ© fixĂ©e trop haut par un prĂ©dĂ©cesseur, n'a pas pu ĂȘtre payĂ©e et a ensuite Ă©tĂ© annulĂ©e ou rĂ©duite aprĂšs plusieurs annĂ©es (cf. Bulletin de la Guadeloupe n ° 24 / dĂ©cembre 1829, dĂ©cret n ° 282 du 10 dĂ©cembre 1829, p. 594). Certains dossiers sont simplement restĂ©s en suspens et ont Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©s des annĂ©es plus tard (cf. Bulletin de la Guadeloupe n ° 18/19 juin / juillet 1833, dĂ©cret n ° 226, pp. 526 ss.), Dans treize cas: la matiĂšre avec laquelle le certificat de libĂ©ration garantit a Ă©tĂ© fixĂ©e au 6 novembre 1828, suspendue depuis lors, a Ă©tĂ© rappelĂ©e le 15 avril et le 1er juin 1831, Ă©tait toujours suspendue et a Ă©tĂ© annoncĂ©e le 5 juillet 1833 avec effet immĂ©diat et les frais ont Ă©tĂ© levĂ©s en raison de l'erreur de procĂ©dure commise par le gouverneur. Un autre cas Ă©tait en suspens depuis le 20 septembre 1809 et le 4 fĂ©vrier 1832, la libĂ©ration gratuite est prononcĂ©e pour les mĂȘmes raisons, cf. Bulletin de la Guadeloupe n ° 2 / fĂ©vrier 1832, dĂ©cret n ° 31 du 4 fĂ©vrier 1832, p. 49).
Le processus, jusqu'Ă ce quâun affranchissement soit dĂ©finitif, prenait plusieurs semaines, des mois, voire des annĂ©es. Un exemple : Le dĂ©cret d'octobre 1831 se rĂ©fĂšre intĂ©gralement Ă toutes les dĂ©cisions antĂ©rieures et dĂ©clare : En gĂ©nĂ©ral, un public doit ĂȘtre Ă©tabli afin que la procĂ©dure elle-mĂȘme puisse se dĂ©rouler conformĂ©ment aux rĂšgles et que tous les demandeurs et participants soient informĂ©s. C'est pourquoi :
Chaque demande de libĂ©ration doit avoir Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e de trois publications, qui incluent l'Ăąge, le sexe et le nom de l'esclave ainsi que le nom, le lieu de rĂ©sidence et la profession du maĂźtre ou du demandeur. Cette publication doit avoir lieu Ă la Gazette officielle de la Guadeloupe. Il y a un dĂ©lai minimum de cinq jours entre les publications. La libĂ©ration ne peut ĂȘtre accordĂ©e que trois mois aprĂšs la derniĂšre publication. Il peut Ă©galement ĂȘtre publiĂ© d'office par le ministĂšre des Affaires publiques sans frais. (âŠ)
Toute objection Ă la libĂ©ration envisagĂ©e peut ĂȘtre formulĂ©e dans ce dĂ©lai. Cet appel est adressĂ© au Seigneur et au tribunal gĂ©nĂ©ral, qui en tient un registre. (âŠ)
Toute rĂ©clamation sera poursuivie d'office et la question ne pourra ĂȘtre tranchĂ©e tant que ces rĂ©clamations n'auront pas Ă©tĂ© rĂ©solues.
Au terme de ces démarches, le dossier est présenté au gouverneur: preuve des trois publications sous forme de journal imprimé, attestation du tribunal qu'aucune objection ni réclamation n'a été formulée par des tiers, extrait d'une liste la plus récente possible (inventaire ou similaire) sur lequel l'esclave apparaßt; un certificat du commandant de district, donnant des informations sur la disposition de l'esclave et comment il a l'intention de gagner sa vie; une confirmation du tribunal que l'esclave n'a été impliqué dans aucun litige.
Les personnes libĂ©rĂ©es devraient pouvoir gagner leur vie elles-mĂȘmes. S'il peut ĂȘtre estimĂ© sur la base de la situation financiĂšre actuelle que cela est incertain, la personne libĂ©rante est responsable d'une garantie Ă vie pour la personne libĂ©rĂ©e. La personne libĂ©rĂ©e ne peut pas ĂȘtre prise en charge (aucun frais ne peut ĂȘtre pris en charge par la colonie). Cette garantie doit ĂȘtre versĂ©e sous forme de pension ou en nature, par exemple en cas d'invaliditĂ©, de maladie ou de vieillesse.
Avant que les esclaves mĂąles ne soient libĂ©rĂ©s, ils peuvent ĂȘtre obligĂ©s de faire un service militaire ou communautaire de cinq ou dix ans. Pour cela, ainsi que pour les forces de police, une autorisation est requise du gouverneur, qui dĂ©termine la durĂ©e des annĂ©es de service. Toutes les annĂ©es travaillĂ©es avant peuvent ĂȘtre prises en compte. La libĂ©ration peut ĂȘtre donnĂ©e tĂŽt pour des raisons spĂ©ciales ou s'il est certain que le service local continuera d'ĂȘtre fourni. Ă la fin de cette pĂ©riode, les esclaves sont libĂ©rĂ©s par le gouverneur. Toutes vacances seront accordĂ©es. Si un esclave dĂ©cĂšde pendant un devoir et qu'il n'a pas perdu ses services, sa femme et de ses enfants bĂ©nĂ©ficiera de son affranchissement.
Tous les contenus contraires à ce décret de décisions antérieures sont supprimés.
Ce décret sera publié au Journal officiel et publié ou affiché partout ou nécessaire. (cf. Bulletin de la Guadeloupe 1831, décret n ° 768 du 20 octobre 1831, pp. 545-548).
Ce décret fournit le cadre juridique des années 1830. On ne sait pas dans quelle mesure les procédures étaient auparavant réglementées en détail.
C'Ă©tait une nĂ©gociation de toutes les personnes impliquĂ©es dans le but ultime de la libĂ©ration et n'Ă©tait en fait que dans cette direction. En 1831, il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© dans un cas rare qu'une libĂ©ration avait Ă©tĂ© retirĂ©e. Un planteur de Morne-Ă -lâEau - et il y avait un dĂ©cret du 29 avril 1831 - fit libĂ©rer Jean-Charles, son esclave, et le soutint. Le 2 juin 1831, cependant, un autre citoyen des Abymes s'avança pour demander que la libĂ©ration dĂ©jĂ accordĂ©e soit retirĂ©e. Il a utilisĂ© des documents pour prouver que Jean-Charles Ă©tait son esclave. Il y a eu un litige devant le tribunal de Pointe-Ă -Pitre au sujet de la propriĂ©tĂ© de l'esclave, qu'elle provienne des droits du citoyen de Morne-Ă -l'Eau ou des Abymes. Le citoyen des Abymes a obtenu le droit et la libĂ©ration a Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©e rĂ©versible. De plus, le citoyen des Abymes s'est vu accorder des dommages et intĂ©rĂȘts d'un montant de 3 168 Livres, selon le texte on parle d'une succession. La relation a Ă©tĂ© montrĂ©e sous une forme si courte qu'une troisiĂšme personne est entrĂ© dans le jeu dans le cadre de cette rĂ©clamation d'argent ou de transfert de crĂ©ances, car la succession n'Ă©tait pas expliquĂ©e et ce qu'elle avait Ă voir avec Jean-Charles (cf. Bulletin de la Guadeloupe 1831 , DĂ©cret n ° 690 du 10 juin 1831, page 440 en liaison avec le dĂ©cret du 29 avril 1831, rendu public Ă l'occasion de la cĂ©lĂ©bration du trĂŽne du roi, dĂ©cret n ° 648, p. 351: Jean-Charles, nĂšgre, 50 ans, de Morne-Ă -L'Eau, libĂ©ration demandĂ©e par M. Arnaud Barbe.). En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, cependant, dans les annĂ©es 1830, le gouverneur Ă©tait lâexĂ©cuteur de la volontĂ© politique de Louis-Philippe et se prononçait gĂ©nĂ©ralement en faveur de la libĂ©ration si toutes les conditions Ă©taient remplies et qu'aucune revendication de tiers n'existait.
3. Le rÎle des personnes affranchies avant 1848 dans la société de la Guadeloupe
Au cours de notre travail au sein de la liste de gĂ©nĂ©alogistes (GH CaraĂŻbe), nous nous sommes posĂ© la question du rĂŽle des affranchis avant 1848 : Une bibliographie sur un champ de recherche comme âles affranchis de la Guadeloupe avant 1848â nâa pas donnĂ© des considĂ©rations en profondeur de ce groupe important. Il semble y exister un espace v...