Fruits du Québec (Les)
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Fruits du Québec (Les)

Histoire et traditions des douceurs de la table

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Fruits du Québec (Les)

Histoire et traditions des douceurs de la table

About this book

Qui se souvient de la pêche et du melon de Montréal? De la poire Bon-Chrétien, à la chair granitée? De la pomme Fameuse, appelée aussi Pomme de neige, qu'on exportait autrefois en Angleterre par pleins barils? De la cerise de Montmorency, issue de la famille des griottes? Et de la prune de Damas, aussi appelée petite prune d'habitant, dont la parfumerie française utilise encore la fragrance unique? Qui se rappelle que nos ancêtres se désaltéraient d'eaux de cerises, de ratafias de framboises et de vins de gadelles? Qu'ils cueillaient aussi noisettes et noix tendres? Chacun de ces fruits, et bien d'autres, a donc son histoire qui remonte loin dans le temps, même avant l'arrivée des premiers Français en ce qui touche les fruits sauvages. Les Fruits du Québec. Histoire et traditions des douceurs de la table lève le voile sur une partie fascinante de nos rapports avec la nature. Paul-Louis Martin montre la place primordiale qu'ont occupée les communautés religieuses et leurs vergers dans le développement de la culture fruitière et dans la protection de la richesse que constituent ces essences. À la fois page d'histoire de l'agriculture et de nos traditions alimentaires, Les Fruits du Québec nous invite à redécouvrir les saveurs anciennes et surtout à conserver un patrimoine végétal aussi original que précieux.

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SECONDE PARTIE

Les fruits

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Les fruits à pépins

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La poire

« […] nous en parlerons à souppé entre la poire et le fromage » (Charles Sorel de Souvigny, La Vraie Histoire comique de Francion, 1623).
Originaire d’Asie mineure, comme beaucoup de fruits, la poire y est cultivée depuis le néolithique et s’étend progressivement au bassin méditerranéen, puis à l’Europe tempérée. Le port d’Athènes, le Pirée (en grec Peiraieus), devrait son nom aux poiriers qui couvraient le Péloponnèse, à moins que le nom latin du fruit (pirus) provienne du grand chef de guerre Pyrrhus, de sanglante mémoire, qui en répandit la culture jusqu’en Italie, où Pline l’Ancien dénombre pas moins de soixante variétés, au début de notre ère. D’ailleurs, la variété dite Bergamot d’automne proviendrait, dit-on, des jardins de l’ancienne Rome. La culture du poirier conquiert ensuite la France, la Belgique et quelques régions au climat doux de l’Europe centrale. D’une dizaine de variétés de poires, répertoriées par les auteurs français du Moyen Âge, la liste s’allonge à plus de cent cinquante dans L’Instruction pour les jardins fruitiers… de La Quintinie (1690), mentionnée en première partie, puis à près de mille cinq cents aujourd’hui. C’est dire un peu la complexité de l’écheveau d’identification et aussi l’engouement relativement récent pour ce fruit au goût délicat, nettement moins populaire que la pomme et ce, en raison de sa grande fragilité. Souvent associée aux grands jardins fruitiers et à une conduite arboricole experte et attentive, la poire figure d’abord sur la table des souverains, dans des circonstances exceptionnelles, puis au menu des grands repas aristocratiques, avant d’apparaître, au début du XIXe siècle, dans l’ordinaire des nouveaux bourgeois des temps modernes. En Belgique flamande autant que wallonne, d’où provient d’ailleurs notre variété Fondante des Bois, ou Beauté flamande, la culture de la poire connaît une telle popularité qu’un catalogue de 1851 en dénombre 818 variétés, dont 71 nouvellement créées cette année-là. Rien de tel au Québec cependant où les rigueurs du climat ont longtemps limité les succès de cette culture à la partie sud du territoire et aux environs de Montréal, jusqu’à ce qu’on introduise des cultivars très rustiques qui vont réussir à végéter à l’est de Québec. Même en faible proportion, la poire est néanmoins présente dans nos jardins et nos vergers depuis le milieu du XVIIe siècle.

De la « Bon-Chrétien » à la « Savignac » : enquête sur un fruit bien défendu

Ce sont sans doute les Jésuites et ensuite les Sulpiciens qui introduisent en Nouvelle-France les premiers poiriers. Les chroniqueurs et les observateurs du XVIIe siècle s’accordent pour dire que les essais tentés dans la région de Québec ont mené à l’échec, mais qu’en revanche le climat de Montréal autorise les plantations de poiriers, de vignes et même de pêchers. Qui sont donc les auteurs de ces expériences ? S’agit-il des Jésuites, dans les jardins de leur couvent de Québec ? Ou à leur ferme de Notre-Dame-des-Anges ? Ne serait-ce pas plutôt dans les petits vergers qui entourent leurs « réductions », à Sillery, à l’île d’Orléans, à Trois-Rivières ? Il n’y a encore aucune certitude, toutefois l’hypothèse reste valable si l’on se rappelle que ces bons missionnaires auraient implanté des poiriers aussi loin qu’à Sainte-Marie-aux-Hurons, selon les travaux récents de chercheurs ontariens. Quoi qu’il en soit, des poiriers apparaissent à Montréal, dans les jardins du fort des Messieurs de Saint-Sulpice, dès la fin du XVIIe siècle. Et leur culture s’étend à d’autres enclos : les Frères Hospitaliers possèdent six poiriers dans leur jardin, en 1720. Il en va probablement ainsi des Récollets, dont on vante la beauté des jardins, et de quelques autres communautés religieuses. Ne dit-on pas au siècle suivant que les poires des Dames de la Congrégation comptent parmi les meilleurs fruits du pays ? De passage au Sault-au-Récollet, en 1749, le botaniste finlandais Pehr Kalm note lui aussi la présence de pommes et de poires « toutes fort belles ».
Dans un court essai sur la culture de la poire, publié en 1877 par la Société d’agriculture et d’horticulture de Montréal, l’auteur anonyme rapporte ceci :
Il est de fait notoire que les premiers colons Français plantèrent un grand nombre de poiriers tout à fait propres au climat, car ils se développèrent hardiment et vécurent aussi longtemps que sous les climats considérés comme leur milieu naturel, et pendant deux ou trois générations successives ils donnèrent d’abondantes récoltes. Ces arbres magnifiques, qui, jusqu’à une période de cinquante années passées, paraissaient promettre une existence d’encore un siècle, ont tous disparu, et je ne sache pas qu’il en existe un seul représentant dans Montréal où on les comptait naguère par centaines.
Que s’est-il passé autour des années 1825-1830 pour provoquer un tel recul de la culture du poirier ? Une série d’hivers rigoureux ? La disparition des vergers des faubourgs avalés par la croissance urbaine ? Qui peut apporter une réponse ? On sait toutefois avec certitude que les arboriculteurs fruitiers ont déjà commencé à migrer au sud-est et au sud-ouest de la Montérégie : au recensement de 1901, les deux districts montréalais de Jacques-Cartier et de côte Saint-Antoine, qui rapportent encore respectivement 702 et 579 boisseaux de poires, sont suivis de près par Missisquoi (388), Huntingdon (256), Laprairie-Napierville (121) et Beauharnois (108). Trente ans plus tard, on n’en récolte plus guère que dans Huntingdon, Missisquoi et Rouville, et encore partout moins de 150 boisseaux. Les poires d’Ontario et des États-Unis, plus hâtives, ont littéralement enfoncé la production québécoise, la repoussant à la marge.
La poire est un fruit qu’il faut défendre avec soin contre plusieurs ennemis : le froid et les gelées tardives qui affectent les fleurs extrêmement fragiles et sensibles, les excès d’humidité au sol qui font s’emporter le bois des rameaux, les tailles mal conduites qui retardent la mise à fruit — un vieux dicton avance d’ailleurs que « celui qui plante des poiriers les plante pour ses héritiers » (R. Brodie, SPQ, 1896 : 27). Et comme il importe finalement de soustraire les fruits à l’appétit des rôdeurs et des pilleurs de jardins, c’est surtout adossée ou à l’abri de hauts murs et soigneusement enclos que se pratique avec succès la culture des variétés anciennes de poiriers, comme la Bon-Chrétien et la Doyenne blanche. Plus tard, au milieu du XIXe siècle, on voit apparaître des variétés de hauts-vents, telles la William’s, la Favorite de Clapp et la Beauté flamande qui se trouvent encore aujourd’hui dans quelques vergers.
TARTE À LA CHAIRE
DE POMMES ET DE POIRES
(Le Pâtissier français, 1700)
1 abaisse de pâte feuilletée
60 ml (1/4 tasse) de sucre glace
4 pommes pelées, épépinées et tranchées mince
60 g (2oz) de raisins secs
le zeste de la moitié d’un citron
2 ml (1/2 c. à thé) de cannelle en poudre
4 poires pelées, épépinées et tranchées mince
60 g (2 oz) de beurre frais coupé en dés
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Foncer une assiette à tarte de l’abaisse. Saupoudrer de la moitié du sucre. Ajouter les pommes, les raisins, l’écorce de citron et saupoudrer de cannelle. Recouvrir de poires. Saupoudrer l’autre moitié de sucre et couvrir de dés de beurre. Recouvrir la tarte de bandes de pâte. Cuire dans un four préalablement chauffé pendant 10 minutes à 230°C (450°F), puis baisser la température à 175°C (350°F). Cuire encore 30 à 40 minutes.
Marc Lafrance et Yvon Desloges, Goûter à l’histoire. Les origines de la gastronomie québécoise. Service canadien des parcs et Les Éditions de la Chenelière inc., 1989, p. 22.
Certaines variétés de poires ont une histoire assez particulière. Ainsi la poire dite Bon-Chrétien, introduite ici au XVIIe siècle, évoque un célèbre ermite du Moyen Âge, François de Paule, surnommé le Bon Chrétien, qui vivait aux environs de Naples. Appelé par le pape Sixte IV à se rendre au chevet du roi de France, Louis XI, le saint homme apporte au monarque un petit poirier d’Italie, lui demandant de le faire fructifier et d’en consommer les fruits, aptes à le soulager de ses « maux d’eczéma et de ses douleurs d’entrailles ». Le moine avait sans doute compris que la conduite d’un arbre fruitier aurait autant d’effets thérapeutiques sur l’esprit du roi que la consommation encore lointaine de ses fruits. Après avoir attendu pendant un an ces poires qu’il croyait miraculeuses, le roi meurt en août 1483, sans avoir pu goûter aux fruits tant convoités. La Bon-Chrétien est aussi l’ancêtre de la William’s et le jardinier de Louis XIV, Jean de La Quintinie, la place en tête des variétés les plus estimables de son époque (J.-M. Pelt, 1994 : 111). On la retrouvait encore dans quelques vergers, dont celui du manoir des Aulnaies, en 1918.
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La poire Savignac. Il pourrait s’agir d’une des très anciennes variétés cultivées à Montréal, depuis la fin du XVIIe siècle. De petite taille, ronde et de forme globulaire, elle a une chair croquante, juteuse et parfumée. On la retrouve encore dans quelques vergers polyvalents, entre autres chez Raoul Ferland, à Compton.
Photo : Denis Faucher.
Quant à la poire Savignac (ci-contre) qu’on cultive toujours et avec grand soin à Compton (verger Ferland), elle porte le nom du frère Armand Savignac (1898-1994), clerc de Saint-Viateur et pionnier de l’horticulture biologique (voir l’encart, page 10). Selon son biographe, Paul Beaupré, dans les années 1940, le frère Savignac se serait procuré des rejets ou des greffons de poiriers, de pruniers mont Royal et Mirabelles, de cerisiers de France, ainsi que des plants de vigne et de tomates provenant probablement de la région de Montréal, qu’il plante et élève biologiquement dans ses parcelles expérimentales de la Maison provinciale de Joliette, puis derrière le Centre de réflexion chrétienne, au lieu-dit Base-de-Roc. Dès 1948, afin de payer ses traitements chiropratiques, il commence à offrir en vente plants de vigne, de tomates et d’arbres fruitiers issus de ces premiers sujets, dont bien sûr les poiriers qui portent dorénavant son nom (Beaupré, 1994 : 15). Des recherches plus poussées dém...

Table of contents

  1. Introduction
  2. Première partie - La culture fruitière et l’histoire
  3. Seconde partie - Les fruits
  4. Conclusion
  5. Bibliographie
  6. Remerciements