Le Souverainisme de province
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Le Souverainisme de province

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Le Souverainisme de province

About this book

Plus de cinquante ans aprĂšs l'Ă©mergence de l'idĂ©e d'indĂ©pendance, le QuĂ©bec est toujours une province canadienne. Le souverainisme n'est plus aujourd'hui qu'une question d'humeur populaire, de calendrier, mais aussi d'art oratoire et de marketing. Il a quittĂ© le registre du politique pour embrasser celui de l'idĂ©al, d'un idĂ©al lointain dont l'avĂšnement dĂ©pend du rĂ©sultat d'un Ă©ventuel rĂ©fĂ©rendum. PlutĂŽt que de se consacrer Ă  rompre avec le rĂ©gime canadien, qui condamne le QuĂ©bec Ă  son inachĂšvement, il s'y est confortablement installĂ©. Comment le mouvement souverainiste a-t-il pu en arriver lĂ ? Comment a-t-il pu renier ce qui Ă©tait fondamentalement sa raison d'ĂȘtre? Simon-Pierre Savard-Tremblay, aprĂšs avoir retracĂ© la genĂšse du mouvement indĂ©pendantiste, propose l'hypothĂšse selon laquelle c'est au cours de la dĂ©cennie 1970 que s'est opĂ©rĂ© le basculement du souverainisme vers une logique provincialiste. Il redonne toute leur importance aux acteurs des Ă©vĂ©nements qu'il examine – les RenĂ© LĂ©vesque, Jacques Parizeau, Claude Morin et Camille Laurin. Il nous invite Ă  reconsidĂ©rer en profondeur notre conception d'un pan essentiel de l'histoire du QuĂ©bec depuis la RĂ©volution tranquille.

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CHAPITRE III
Le souverainisme et l’épreuve Ă©lectorale (1970-1973)
Nulle pierre ne peut ĂȘtre polie sans friction, nul homme ne peut parfaire son expĂ©rience sans Ă©preuve.
CONFUCIUS
RenĂ© LĂ©vesque venait de quitter une formation traditionnelle pour mettre sur pied un parti « antisystĂšme » visant Ă  briser le monopole bipartite des « bleus » et des « rouges », des caisses occultes et de l’acceptation des contraintes imposĂ©es par le rĂ©gime provincial. Mais, contrairement Ă  d’autres initiatives1, la formation souverainiste pouvait sĂ©rieusement prĂ©tendre Ă  constituer – dans un futur proche – un gouvernement. Cependant, tout « antisystĂšme » que fĂ»t le parti dans son essence, la prioritĂ© de LĂ©vesque Ă©tait de donner une « respectabilitĂ© » Ă  sa formation, d’en faire un acteur lĂ©gitime du dĂ©bat public. Le souverainisme, Ă  la fin des annĂ©es 1960, voulait profiter de la dynamique rĂ©volutionnaire tranquille d’affirmation nationale et de l’établissement d’un État quĂ©bĂ©cois dont les institutions serviraient de rĂ©fĂ©rents pour la nation dans son ensemble. En mĂȘme temps, la pensĂ©e lĂ©vesquienne tentait de rĂ©pondre aux craintes des QuĂ©bĂ©cois en donnant un vernis rĂ©formiste pour ceux qui croyaient – ils Ă©taient nombreux – Ă  un renouvellement du fĂ©dĂ©ralisme.
Le MSA : « Ce pays qu’on peut bĂątir »
RenĂ© LĂ©vesque, disions-nous Ă  la fin du prĂ©cĂ©dent chapitre, a quittĂ© les rangs du Parti libĂ©ral, qui avait donnĂ© au QuĂ©bec son Ă©lan le plus fĂ©cond depuis son existence comme province, mais qui s’était rĂ©vĂ©lĂ© incapable d’ébranler des paramĂštres bien prĂ©cis, ceux du statut de parti traditionnel. PlutĂŽt que de faire office d’éternel rebelle, LĂ©vesque se retrouvait dĂ©sormais en position de meneur, guidant un troupeau avec lequel il Ă©tait parfois difficile de composer. Il fonde en octobre 1967, en compagnie d’une vingtaine de personnalitĂ©s qui partagent ses convictions, le Mouvement souverainetĂ©-association. Le MSA a su obtenir trĂšs rapidement un grand nombre d’adhĂ©rents. En janvier 1968, l’organisation comptait 700 contributeurs et 1 300 sympathisants n’ayant pas encore fait de don2.
Au moment de tenir son premier congrÚs, le 19 avril 1968, le MSA compte 7 274 membres cotisants. La moitié des 1 700 délégués à ce congrÚs avaient moins de trente ans et le quart étaient des étudiants. Vingt-et-un pour cent étaient des professionnels, dix-neuf pour cent des cols blancs, dix-sept pour cent des travailleurs et dix pour cent des commerçants. Fait notable : les trois quarts viennent de la métropole3.
Le dĂ©bat linguistique a toujours Ă©tĂ© un sujet chaud au sein des troupes souverainistes et les positions tranchĂ©es des uns et des autres dĂ©montrent bien de l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© du mouvement. On constate que les visions peuvent parfois diffĂ©rer non seulement quant aux moyens, mais quant aux cadres de rĂ©flexion. La protection de la langue avait relevĂ©, au cours de la « Survivance », de la sociĂ©tĂ© civile ; la RĂ©volution tranquille ayant transfĂ©rĂ© vers l’État les enjeux des Canadiens français auparavant laissĂ©s Ă  eux-mĂȘmes, il allait de soi que la situation du français deviendrait une question d’ordre public. Le mouvement souverainiste, qui s’affiche comme la forme la plus accomplie du nationalisme rĂ©volutionnaire-tranquille par rapport Ă  l’autonomisme de l’Union nationale et au nĂ©onationalisme libĂ©ral, ne pouvait que dĂ©velopper une position plus ferme sur cet enjeu que celle des partis d’obĂ©dience fĂ©dĂ©raliste. L’objectif Ă©tait de faire de la langue française le creuset de la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise et le facteur central de socialisation transmise par les institutions publiques.
Il fallait donc s’attendre Ă  ce que le MSA se penche dĂšs son premier congrĂšs sur la question linguistique. François Aquin, l’ancien collĂšgue libĂ©ral de LĂ©vesque, propose une rĂ©solution faisant du français la seule langue officielle de l’État, du travail et de l’école publique, mais maintenant un secteur scolaire anglophone subventionnĂ© par les fonds gouvernementaux, sans oublier le fait que la « minoritĂ© » pourrait utiliser l’anglais dans ses interactions avec l’administration publique. Surgit dĂšs lors le premier d’une longue sĂ©rie de conflits entre LĂ©vesque et une frange non-nĂ©gligeable de ses militants.
Pour François Aquin, les prĂ©tendus « droits » n’étaient en fait que des privilĂšges. Aquin proposa Ă©galement un amendement visant Ă  supprimer du libellĂ© « ce peuple du QuĂ©bec doit aussi se faire un point d’honneur de tĂ©moigner un grand respect pour les droits de son importante minoritĂ© linguistique aux racines fort anciennes4 ». Le rĂ©sultat fut sans appel : 418 personnes se positionnĂšrent en faveur de l’amendement contre 240 qui optĂšrent pour le maintien de la proposition de base.
Aquin tenta d’aller plus loin en proposant un second amendement, stipulant que « seul le systĂšme d’éducation publique de langue française Ă  tous les niveaux sera subventionnĂ© par l’État », n’interdisant donc pas l’accĂšs aux institutions d’enseignement de langue anglaise, mais visant Ă  ce que leur accĂšs soit assurĂ© aux seuls frais du client.
Cette fois-ci, LĂ©vesque n’a pu se rĂ©signer Ă  laisser passer la proposition5, mettant son poste en jeu, chose qu’il ne manqua pas de rĂ©pĂ©ter au cours des dĂ©cennies suivantes. Le chef s’est alors dĂ©placĂ© au micro pour dĂ©clarer que « l’amendement est un aveu d’infĂ©rioritĂ© et d’impuissance et une condamnation Ă  terme de la minoritĂ© anglaise du QuĂ©bec. Un QuĂ©bec souverain et libre ne saurait exister sans ĂȘtre juste envers sa minoritĂ© anglophone ». AprĂšs quelques huĂ©es, LĂ©vesque parvient Ă  terminer son intervention : « Adopter l’amendement Ă©quivaudrait Ă  fermer les portes du MSA Ă  des milliers de nos compatriotes. Le rĂ©sultat du vote va demander une pĂ©riode de rĂ©flexion de ma part
 Je suis libre de rentrer chez moi6. »
Le message Ă©tait lancĂ© et les dĂ©lĂ©guĂ©s l’entendirent, battant la proposition par 481 votes contre 243. Aquin se rallia sur le coup mais ne devint jamais par la suite une figure importante du MSA ou du PQ, se dĂ©tachant des activitĂ©s militantes. La proposition Aquin semblait pourtant en pleine cohĂ©rence avec la conception lĂ©vesquienne de l’identitĂ© nationale, faisant de la culture le fruit de l’histoire et de la langue française son mode d’expression devant s’incarner Ă  travers les institutions communes au nom du vivre-ensemble. La crainte de LĂ©vesque tĂ©moigne d’une non-volontĂ© de traduire cet Ă©noncĂ© de principe en politique.
Quoi qu’il en soit, ce vote indique l’existence – Ă  l’aube des annĂ©es 1970 – d’une aile plus radicale sur les objectifs comme sur les moyens Ă  employer, qui conçoit l’État comme un outil devant ĂȘtre mobilisĂ© en vue de faire en sorte que les QuĂ©bĂ©cois assument leur statut de majoritĂ©.
Si le souverainisme Ă©tait fondĂ© sur le procĂšs du rĂ©gime canadien, le MSA n’en avait pas moins le dĂ©fi de dĂ©finir une doctrine qui inspirerait l’action gouvernementale Ă  venir, un ensemble de politiques s’inscrivant dans une logique de rupture irrĂ©versible.
Le 16 fĂ©vrier 1968, LĂ©vesque avait dĂ©clarĂ© au quotidien Le Soleil qu’il fallait « dĂšs le dĂ©but tĂącher d’ériger une hypothĂšse qui soit acceptable par les partenaires actuels, de sorte que la libertĂ© politique ne soit pas synonyme de dĂ©gĂąts sociaux et Ă©conomiques7 ». Le ton Ă©tait donnĂ© : les souverainistes du MSA allaient mettre de la chair autour de l’os du concept de l’association.
L’organisation s’est dotĂ©e d’une commission politique prĂ©sidĂ©e par Reynald Brisson et a fait des modalitĂ©s d’accession Ă  la souverainetĂ© une prioritĂ©. Sa principale tĂȘte pensante fut Jacques Brossard8, professeur de droit Ă  l’UniversitĂ© de MontrĂ©al.
Dans les semaines qui suivirent le congrĂšs, le MSA publia le document Ce pays qu’on peut bĂątir9. La brochure rĂ©itĂ©rait certains principes d’Option QuĂ©bec tout en s’aventurant sur le terrain d’un embryonnaire programm...

Table of contents

  1. Page couverture
  2. Les Éditions du BorĂ©al
  3. Faux-titre
  4. Titre
  5. Crédits
  6. Dédicace
  7. Exergue
  8. Introduction
  9. Chapitre Premier
  10. Chapitre II
  11. Chapitre III
  12. Chapitre IV
  13. Chapitre V
  14. Chapitre VI
  15. Conclusion
  16. Épilogue
  17. Remerciements
  18. Crédits et Remerciements
  19. Fin
  20. QuatriĂšme de couverture