Couturières de Montréal au XVIIIe siècle (Les)
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Couturières de Montréal au XVIIIe siècle (Les)

Suzanne Gousse

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Couturières de Montréal au XVIIIe siècle (Les)

Suzanne Gousse

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Cette enquête sur les couturières jette la lumière sur une pratique artisanale peu connue et dont la compréhension repose sur des approximations. Exploitant une variété de sources, Suzanne Gousse prend comme point de départ les livres de comptes d'un marchand du XVIIIe siècle qui nomme les femmes avec lesquelles il fait affaire. Les vêtements tout faits n'étaient vendus dans la vallée du Saint-Laurent aux XVIIe et XVIIIe siècles que sur le marché de l'usagé. Le prêt-à-porter est apparu à Montréal pour fournir le marché de la traite des fourrures, dont la clientèle était essentiellement amérindienne et non pas coloniale.Contrairement à une idée largement répandue, les couturières n'étaient pas nécessairement pauvres, du moins au XVIIIe siècle, intégrées qu'elles étaient au milieu des artisans aisés et des commerçants. La formation en dessin de mode de l'auteure ainsi que son expérience dans la confection de vêtements historiques lui ont permis de mieux saisir toutes les dimensions de la pratique des couturières de Montréal présentes dans les sources écrites.«C'est en posant des questions inédites aux documents qu'on peut placer les femmes dans l'histoire, car les femmes sont dans l'histoire». - Micheline Dumont, extrait de la préfaceFormée en dessin de mode et en haute couture, Suzanne Gousse a d'abord travaillé dans des ateliers de costumes de théâtre, puis dans la confection privée sur mesure. Entre 1992 et 2005, elle s'est lancée dans la reproduction de l'habillement des anciens Canadiens pour les musées et les sites historiques. Elle a obtenu une maîtrise en histoire à l'Université de Montréal en 2009. Elle poursuit actuellement au doctorat.

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COMMENT VIVENT LES COUTURIÈRES ?
De condition sociale variée, la très grande majorité étant toutefois issue du milieu des artisans, des petits commerçants et des habitants, les couturières et les tailleuses affichent des comportements qui le sont tout autant et qui varient dans le temps. Ici, j’interrogerai la documentation renseignant sur le comportement démographique, d’une part, et sur la présence devant les notaires et la justice, d’autre part. Ce sont deux domaines où de nombreuses études ont recensé des tendances qui témoignent grossièrement de schémas sociaux particuliers. La mise en nourrice est un comportement considéré comme plus typique de l’élite que des artisans. La présence féminine devant le notaire ou le juge ne serait pas socialement neutre non plus.
Le comportement démographique
Les études démographiques sur la Nouvelle-France fournissent soit les paramètres pour l’ensemble de la population coloniale[210], soit ceux pour une ville en particulier[211]. On ne dispose actuellement d’aucune étude ni d’aucune synthèse sur les comportements démographiques des artisans de la période coloniale française. Les études historiennes n’abordent pas ce thème, se préoccupant surtout des aspects socioéconomiques de la vie des artisans. On a aussi étudié les nobles et les bourgeois, groupes qui sont souvent largement ou exclusivement urbains[212]. La bourgeoisie du XVIIIe siècle se démarquait par le mariage de femmes jeunes avec des hommes plus âgés, une espérance de vie plus courte et une fécondité élevée liée à la mise en nourrice. On se doute que le comportement des couturières sera, dans l’ensemble, plus « populaire » : espérance de vie plus longue, mariage plus tardif permettant d’amasser dot et trousseau, moins de naissances et plus espacées. Quelques couturières ayant des liens avec les marchands pourraient toutefois avoir adopté le comportement de l’élite et avoir eu recours à la mise en nourrice. Des indicateurs (l’espérance de vie et les intervalles génésiques de divers groupes sociaux) seront comparés avec ceux des couturières. Voyons d’abord l’âge au décès.
L’espérance de vie et l’âge au décès
La relative longévité de la majorité des couturières démontre que, dans l’ensemble, leurs vies n’auraient pas été marquées par des privations de toutes sortes. Statistiquement, les couturières vivent plus longtemps que la majorité des Canadiennes de la même période. Près des trois quarts des couturières, dont l’âge au décès est connu, meurent après soixante ans. C’est l’âge moyen au décès des Canadiennes nées avant 1750 qui a été calculé par Bertrand Desjardins pour le PRDH[213]. La moyenne d’âge au décès de toutes les générations de couturières se situe à 67,2 ans et la médiane à 71,0 ans. Les couturières de la quatrième génération, qui semblent moins avantagées financièrement et qui ont traversé des périodes de guerre, survivent même à plusieurs de leurs enfants adultes. Ces moyennes, comme celles du PRDH, tiennent cependant compte à la fois des quadragénaires et des femmes décédées très jeunes et ne distinguent pas les femmes mariées des célibataires.
Tableau 22
DONNÉES SUR L’ÂGE AU DÉCÈS DES COUTURIÈRES*
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* Les célibataires sont incluses dans ces statistiques. Il manque les dates des décès de celles qui sont retournées en France.
Calculée à partir de la date d’entrée en observation, l’espérance de vie s’avère un meilleur outil de comparaison pour voir si les couturières ont connu une mortalité plus faible que les autres femmes. À vingt ans, l’espérance de vie étant alors de 38,6 années, les Canadiennes pouvaient espérer vivre jusqu’à 58,6 ans[214]. Les femmes de la bourgeoisie auraient une espérance de vie plus courte[215], mais nous savons déjà qu’à l’exception de quelques épouses de marchands, les couturières n’en font pas partie. Déterminons d’abord le moment de l’entrée en observation.
Tableau 23
ESPÉRANCE DE VIE DES CANADIENNES AU XVIIIe SIÈCLE*
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* Les données qui ont permis d’élaborer ce tableau ont été fournies par B. Desjardins du PRDH.
Pour les démographes, c’est généralement la date de la première mention d’un individu dans un document qui est prise en compte dans le calcul de l’espérance de vie. Ce peut être la date de la naissance ou du baptême, dans les pays catholiques. Carles Simo Noguera a inclus dans sa base de données tous les hommes identifiés comme bourgeois à un moment ou à un autre de leur existence. Pour ma part, j’ai considéré qu’une femme est couturière à compter de sa formation et qu’elle le demeure ensuite toute sa vie. Presque toutes les couturières de la première génération, dont quelques veuves, avaient déjà atteint la quarantaine quand elles figurent dans les cahiers de Monière. Ces femmes faisaient probablement partie du réseau personnel du marchand, âgé de trente-neuf ans en 1719, et de sa sœur plus âgée, Marie Anne Lemoine. Celles du deuxième groupe avaient entre 21 et 53 ans lorsque Monière les mentionne pour la première fois et plus de la moitié sont mariées depuis quinze ans[216]. Les femmes de la troisième génération avaient entre 16 et 50 ans. Monière, dont les activités se sont intensifiées dans les années 1740, semble désormais faire affaire non seulement avec les épouses et les veuves des membres de son réseau, mais aussi avec leurs filles. C’est le cas d’Angélique Chevreuil, fille de Louise Domingo, et de Charlotte Fily, âgée d’à peine seize ans lorsque son compte se trouve lié à celui de madame Mennesson. Les couturières de cette deuxième génération étaient des femmes mariées, à l’exception de Louise Giguère, une « catherinette » qui a convolé à 43 ans, et de cinq autres qui se sont mariées après la première mention dans les cahiers. Pour leur part, le nom des filles de la dernière génération proviennent de contrats d’engagement. Elles avaient alors entre 11 et 16 ans. Il semble raisonnable de supposer que les couturières ont pratiqué leur métier avant et après que Monière les mentionne, qu’on les retrouve chez le notaire ou devant la justice. Par souci d’uniformité, le jour du mariage a été choisi comme date d’entrée en observation.
Tableau 24
DONNÉES SUR L’ESPÉRANCE DE VIE DES COUTURIÈRES*
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* L’espérance de vie a été calculée individuellement à partir de l’âge au mariage. Les célibataires sont exclues de ces statistiques.
L’impression générale est que les grossesses et les accouchements mettaient en péril la vie des femmes des siècles passés. Les démographes considèrent le décès de la mère à moins de soixante jours d’une naissance comme résultant des suites de l’accouchement. Voyons ce qu’il en est. À l’exception d’une couturière, les femmes mariées de la première génération ont toutes dépassé l’espérance de vie calculée pour chacune d’elles. Seule de cette génération tôt décédée, Catherine Patissier est morte à l’âge de 33 ans à l’Hôtel-Dieu de Québec, cinq mois après le décès de sa propre mère à Sainte-Anne-de-Beaupré. Ayant survécu à de nombreuses grossesses, souvent vues comme un facteur de risque, huit couturières ont même atteint 70 ans. Une seule femme de la deuxième génération est morte avant d’atteindre 45 ans. Il s’agit de Catherine Guillemot, épouse d’un maître charpentier, identifiée à 25 ans dans les cahiers de Monière. Elle a eu quatorze enfants très rapprochés dont seulement deux ont survécu jusqu’à l’adolescence. Elle est morte à 43 ans, moins d’un an après avoir accouché de son dernier enfant. Quatre épouses ont vécu jusqu’à 65 ans et sept d’entre elles ont atteint 70 ans. Plus des deux tiers de ces femmes ont dépassé leur espérance de vie individuelle de dix à trente ans.
Sept couturières de la troisième cohorte ont vécu 70 ans, mais six femmes mariées n’ont pas atteint 45 ans. Résultat : la moyenne de cette génération est la plus basse de toutes (61,2 ans). Malgré cela, à l’exception de celles qui sont décédées autour de la quarantaine, les autres ont dépassé leur espérance de vie individuelle d’au moins dix ans. Autre constat intéressant : ce n’est pas la maternité qui a fauché les plus jeunes femmes puisqu’une seule est décédée moins de deux mois après la naissance de sa fille. Seulement trois des femmes de la dernière génération, qui semble l’avoir eu plus dure, n’ont pas atteint l’espérance calculée[217]. Les autres couturières, malgré un nombre élevé de grossesses, ont dépassé leur espérance individuelle de cinq à vingt-sept ans, la majorité des écarts se situant autour d’une douzaine d’années.
Les couturières célibataires, des « filles majeures », ont vécu plus longtemps que plusieurs des femmes mariées. Marie Anne Trottier Desauniers est repartie en France avec ses deux sœurs et on ignore la date de son décès. À l’exception de Charlotte Fily décédée à l’aube de la soixantaine, les autres filles majeures avaient entre 75 et 90 ans à leur décès. Cela donne une moyenne de 78,3 ans et une médiane de 79,5 ans. L’écart entre l’âge moyen au décès des célibataires et des femmes mariées est de plus de 12 ans et celui des médianes est de 9,5 ans. Malgré le petit nombre, ces données tendent à confirmer que le fait d’être épouse et mère pouvait réduire l’espérance de vie même lorsque la mère ne mourait pas à la suite de ses couches. Cependant, célibataires ou mariées, les couturières ont passé allègrement le cap de la soixantaine, âge moyen au décès des Canadiennes de la même période. À une exception près, les couturières mariées ne sont pas décédées en couches et elles ont généralement survécu à leurs conjoints. Lorsqu’on utilise l’âge au mariage comme point de départ, la majorité des couturières dépasse l’espérance de vie calculée par le PRDH pour les Canadiennes au XVIIIe siècle.
La vie de couple
Soixante couturières ont pris un ou plusieurs époux. Le mariage est donc l’état civil de la très grande majorité d’entre elles. Les couturières de la première génération se sont toutes mariées, sans exception. Cela correspond au marché matrimonial du XVIIe siècle, très marqué par la rareté des femmes de souche française. Dans le deuxième groupe, il y a trois célibataires, dont l’une deviendra religieuse, et le même nombre de filles majeures dans la troisième cohorte. Alors que les guerres ont rendu le déséquilibre entre les sexes semblable à celui de la première période, une seule couturière de la dernière période demeure célibataire.
L’ÂGE DES MARIÉS ET LA PROVENANCE DES CONJOINTS
En premières noces, la majorité des couturières a épousé des célibataires. Une seule femme de la deuxième génération ainsi que quatre des dix-huit fiancées de la troisième génération ont convolé d’abord avec un ve...

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