Marie Calumet
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Marie Calumet

Nouvelle Ă©dition. Le texte de 1904

Rodolphe Girard

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Marie Calumet

Nouvelle Ă©dition. Le texte de 1904

Rodolphe Girard

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Le 28 juin 1860, Marie Calumet arrive Ă  Saint-Ildefonse pour remettre de l'ordre dans les affaires du curĂ© Flavel. Ses qualitĂ©s de mĂ©nagĂšre et, bien vite, d'administratrice de la paroisse lui attirent l'amour du bedeau et de l'homme engagĂ© du curĂ©, duo d'idiots qui se livrent une lutte homĂ©rique pour conquĂ©rir son cƓur. Quant Ă  Suzon, la niĂšce du curĂ©, elle rĂȘve des libertĂ©s dont elle pourrait jouir si elle Ă©tait un homme, or son Ă©veil sentimental se bute Ă  la vĂ©hĂ©mence des interdits religieux, rĂ©vĂ©lant les mƓurs d'une Ă©poque asphyxiante et l'emprise du clergĂ© sur la vie intime.
Roman paysan comique issu d'une chanson populaire, satire sociale rabelaisienne, Marie Calumet apporte en 1904 une bouffĂ©e d'air frais Ă  une littĂ©rature nationale qui sent le renfermĂ© et n'a de cesse d'idĂ©aliser une paysannerie dĂ©vote et sans relief. Mais l'archevĂȘque de MontrĂ©al ne l'entend pas ainsi et met aussitĂŽt le livre Ă  l'Index. Il faut attendre quarante-deux ans avant qu'en 1946 ne reparaisse le roman – dans une version censurĂ©e, qui deviendra le texte de rĂ©fĂ©rence aux dĂ©pens de l'originale. La prĂ©sente Ă©dition restitue enfin la version de 1904 et redonne accĂšs Ă  une Ɠuvre qu'on commente depuis plus d'un siĂšcle sans l'avoir vraiment lue.

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Information

Publisher
Le Quartanier
Year
2020
ISBN
9782896985043
Postface
I
Histoire
Un roman gros de conséquences
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L’auteur de Marie Calumet
Joseph-Louis-Octave-Rodolphe Girard dit Rodolphe Girard naĂźt en 1879 Ă  Trois-RiviĂšres dans un milieu modeste, d’un pĂšre dont on ne sait pas grand-chose et d’une mĂšre Ă  qui il doit sa passion pour les contes populaires. Au terme d’un parcours scolaire qui le fera passer chez les FrĂšres des Écoles chrĂ©tiennes, Ă  l’AcadĂ©mie commerciale catholique et au Petit SĂ©minaire de MontrĂ©al, il entre chez les PĂšres dominicains Ă  Saint-Hyacinthe. Dieu seul sait ce qui se produit durant ce court laps de temps, mais la vocation ne le retiendra pas plus d’une semaine. Sans doute, en effet, y avait-il mieux Ă  faire de sa vie.
Rodolphe Girard marche sur ses vingt ans quand il devient journaliste Ă  La Patrie. Entre fĂ©vrier 1899 et avril 1900, il publie Florence en feuilleton dans Le Monde illustrĂ©. Il reprendra ce premier roman en volume, Ă  compte d’auteur, dĂšs l’achĂšvement du dernier fascicule. Presque aussi vite, il se retrouve Ă  l’emploi de La Presse, le plus grand quotidien de l’époque. C’est lĂ  qu’il rencontre Albert Laberge, qui deviendra son ami et son confident. La visibilitĂ© de ce nouveau poste permet Ă  Girard de s’illustrer en 1902 avec des miscellanĂ©es allant du conte Ă  la comĂ©die, qu’il rassemble, cette fois-ci chez DĂ©om FrĂšres, sous le titre MosaĂŻque. La Presse donne alors un sĂ©rieux coup de pouce Ă  son employĂ© en affirmant le 2 aoĂ»t, dans un article avec photo, que son ouvrage « fait honneur Ă  la littĂ©rature du pays, et enrichira la collection des bibliophiles ». Honorer le pays, cela tombe sous le sens quand on considĂšre le post-scriptum qui clĂŽt tous les premiers textes de Rodolphe Girard dans Le Trifluvien cinq ans plus tĂŽt : « Pro Deo et Canada semper », pour Dieu et le Canada, toujours.
À vingt-trois ans, en 1902, Girard voit le ThĂ©Ăątre National jouer pour la premiĂšre fois une de ses piĂšces. Fleur de lys, un drame historique en cinq actes, porte sur Madeleine de VerchĂšres, cette toute jeune hĂ©roĂŻne de la Nouvelle-France plus cĂ©lĂšbre pour avoir tenu le fort, comme on dit, que pour avoir possĂ©dĂ© des esclaves. En 1903, c’est au tour du Conscrit impĂ©rial d’ĂȘtre prĂ©sentĂ©e. Cette piĂšce en un acte connaĂźtra deux levers de rideau : d’abord au ThĂ©Ăątre National puis au Monument-National, Ă  l’occasion d’une soirĂ©e d’honneur organisĂ©e par les Ă©tudiants en droit de l’UniversitĂ© Laval Ă  Mont­rĂ©al. Sur le programme du gala oĂč cette piĂšce doit divertir la crĂšme du Canada français, on annonce la publication prochaine de Marie Calumet.
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Il ne fit que paraĂźtre, il n’était dĂ©jĂ  plus
Rodolphe Girard s’enhardit de l’accueil rĂ©servĂ© Ă  MosaĂŻque et profite de son poste Ă  La Presse pour orchestrer une campagne de publicitĂ© visant Ă  faire mousser les ventes par souscription de Marie Calumet. On trouve un entrefilet anonyme dans le quotidien le 30 mai 1903 : « L’un de nos hommes de lettres est Ă  se documenter prĂ©sentement sur cette fameuse Marie Calumet qui a eu les honneurs d’une chanson populaire au Canada mais dont l’histoire n’a jamais Ă©tĂ© Ă©crite. Son livre sera, paraĂźt-il, une Ă©tude de mƓurs comme jamais il n’en a Ă©tĂ© publiĂ© encore en notre pays. »
Girard produit Ă©galement des affiches et fait parvenir aux journaux des cartes postales par lesquelles il annonce l’envoi prochain d’un exemplaire. En rĂ©ponse Ă  l’une de ces cartes, La Presse lui offre la seule occasion qu’il aura de prĂ©senter son roman avant parution. Le 4 janvier 1904, sous le titre « Le premier livre de 1904 au Canada », on rapporte longuement les paroles de Girard, qui semble mettre en garde ses futurs lecteurs :
D’aucuns, peut-ĂȘtre, pour la trivialitĂ© apparente des expressions dont se servent mes personnages, m’accuseront d’avoir fait un livre de patois. Je ne songerai pas Ă  m’en dĂ©fendre autrement, adepte que je suis de cette Ă©cole rĂ©aliste qui met la vĂ©ritĂ© historique au-dessus du conventionnalisme littĂ©raire.
Le pĂ©ril de Marie Calumet ne tiendrait-il qu’à une simple question d’école littĂ©raire? Rodolphe Girard passe pourtant pour ĂȘtre assez au fait des choses de la religion.
Non moins Ă©trange, en clĂŽture de cette tribune accordĂ©e Ă  son journaliste, La Presse se distancie dĂ©jĂ  de l’Ɠuvre :
C’est sous toute rĂ©serve que nous donnons cet aperçu de Marie Calumet, obtenu de l’auteur lui-mĂȘme. Comme l’a si bien dit Monsieur Girard : « le public jugera », et nous entendons bien nous prĂ©valoir de ce droit dĂšs l’apparition du livre dont le dernier fascicule est actuellement sous presse.
Le public jugera, en effet.
Marie Calumet paraĂźt finalement dans la semaine du 25 janvier 1904. Tous les exemplaires s’envolent en quelques jours Ă  peine, incluant le tirage de luxe destinĂ© Ă  financer l’impression de ce livre auto­éditĂ©. La condamnation suit sans tarder. La Presse la premiĂšre s’afflige d’avoir « donnĂ© toute la chance possible Ă  M. Rodolphe Girard de faire connaĂźtre Ă  l’avance la publication de son nouveau roman » et dĂ©savoue l’auteur de cet « essai Ă  la Zola » dĂšs le 30 janvier. Le quotidien semble surtout soucieux qu’on ne l’associe pas Ă  « des immoralitĂ©s et des persiflages grossiers ». Le 8 fĂ©vrier, c’est au tour de La Semaine religieuse d’épuiser le dictionnaire des saintes insultes pour disqualifier Rodolphe Girard et son livre aux « pages aussi sottement et grossiĂšrement conçues, aussi niaisement et salement Ă©crites » qu’elles constituent un « danger de perversion morale, esthĂ©tique et littĂ©raire ». L’organe du clergĂ© clame mĂȘme dans son Ă©reintement que Jean Richepin « a trouvĂ© [Marie Calumet] d’une langue tellement grasse, l’aveu est de lui, qu’il semble en avoir tout le premier Ă©prouvĂ© un irrĂ©pressible haut-le-cƓur 1 ». L’archevĂȘque de MontrĂ©al Paul BruchĂ©si, quant Ă  lui, regarde les choses s’envenimer. Et il entend bien porter le coup de grĂące, que dis-je : il part en guerre. Le clerc grimpe en chaire pour interdire le roman. Dans sa circulaire du 15 fĂ©vrier, il salue le gĂ©nie du commentaire de La Semaine religieuse : Marie Calumet reprĂ©sente en effet un « livre aussi grossier qu’immoral et impie ». Paul BruchĂ©si ne se contente toutefois pas de mettre le livre Ă  l’Index. Il exige que La Presse congĂ©die le mĂ©crĂ©ant. Ce sera fait plus tĂŽt que tard.
Rodolphe Girard a faim et un enfant, bientĂŽt deux : RĂ©gine, sa femme, attend. Il ne peut pas se priver d’un revenu trĂšs longtemps. Il sollicite donc un entretien auprĂšs de Paul BruchĂ©si, qui lui enjoint de dĂ©savouer son livre dans les journaux. Girard lui fait parvenir une lettre de rĂ©tractation qu’il date du 4 mars 1904. Cependant sans nouvelles de l’archevĂȘque aprĂšs quelques jours, il s’enquiert de son avenir auprĂšs de TrefflĂ© Berthiaume, le propriĂ©taire de La Presse. Ce dernier n’a pas reçu l’ordre de le rembaucher, pas l’intention de dĂ©fier monseigneur non plus. BernĂ©, incapable en outre de renouer contact avec Paul BruchĂ©si, Rodolphe Girard renonce finalement Ă  publier son mea culpa. Lorsqu’il tente d’entrer comme journaliste au Canada, il comprend l’ostracisme auquel le soumet la condamnation de Marie Calumet. On lui explique qu’à l’intĂ©grer dans ses rangs, le quotidien devrait vite fermer ses portes.
Rodolphe Girard est forcĂ© de s’exiler Ă  Ottawa pour retrouver du travail. Il devient d’abord rĂ©dacteur en chef au Temps, un journal de second ordre, sans moyens. Il racontera en 1949 dans les souvenirs qu’il publie dans Le Petit Journal que, l’hiver venu, lui et ses collĂšgues du Temps avaient dĂ» brĂ»ler les escaliers menant Ă  la cave pour se garder du froid. Simple parole de conteur? Quoi qu’il en soit, il quitte ce poste aprĂšs moins d’un an pour devenir fonctionnaire, puis traducteur, puis militaire. Il ne reviendra au QuĂ©bec qu’une fois sonnĂ© l’ñge de sa retraite.
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Un irrĂ©pressible haut-le-cƓur (excursus)
En 1904, Marie Calumet s’ouvre sur la reproduction d’une lettre de Jean Richepin, que nous donnons aussi dans la prĂ©sente Ă©dition. Place de choix, s’il en est, pour ce curieux document qui n’aura pourtant jamais soulevĂ© cette question selon moi essentielle : pourquoi diable, entre tous, Jean Richepin?
Cet Ă©crivain français, il est vrai, jouit au tournant du xxe siĂšcle d’une renommĂ©e importante couplĂ©e d’une image de rebelle. Sa rĂ©putation lui vient en partie du scandale liĂ© Ă  la censure en 1876 de La chanson des gueux, un premier recueil oĂč des parias racontent, souvent en argot, leur vie de misĂšre et de plaisirs bas. Ces poĂšmes valent Ă  leur auteur d’ĂȘtre mis aux fers pour outrage Ă  la pudeur et aux bonnes mƓurs, mais c’est le prix d’une cĂ©lĂ©britĂ© que Jean Richepin semble vouloir Ă©pouser. Il entretiendra cette image avec la publication subsĂ©quente d’autres ouvrages volontiers provocateurs, comme Les morts bizarres, Les caresses et Les blasphĂšmes.
Au moment oĂč Rodolphe Girard frĂ©quente encore le Petit SĂ©minaire de MontrĂ©al, Jean Richepin remporte aussi de bons succĂšs avec des romans oĂč lyrisme et romantisme priment sur les accents naturalistes, pourtant bien lĂ , comme dans Miarka, la fille Ă  l’ourse, qui paraĂźt en 1888. Au thĂ©Ăątre, aprĂšs La glu et Nana Sahib en 1883, oĂč il interprĂšte le rĂŽle-titre aux cĂŽtĂ©s de Sarah Bernhardt, Jean Richepin se voit pratiquement consacrĂ© avec Le chemineau en 1897. Si bien qu’à la fin de l’automne 1903, il est invitĂ© Ă  assister aux rĂ©pĂ©titions et Ă  la premiĂšre new-yorkaise, Ă  Broadway, de sa Mam’selle Napoleon.
L’Alliance française annonce alors que l’auteur profitera de l’occasion pour donner une sĂ©rie de confĂ©rences en AmĂ©rique, qui le conduiront vraisemblablement Ă  MontrĂ©al Ă  l’hiver 1904. Certains journaux libĂ©raux (Les DĂ©bats le 13 septembre 1903, Le Peuple le 18 septembre, La Presse le 21 octobre, Le Canada le 19 octobre) saluent la venue d’un auteur prolifique, mais il n’en faut pas plus pour que s’active la propagande catholique : « Que nos amis soient en garde contre l’Alliance française », peut-on lire dans le dernier numĂ©ro de novembre de La VĂ©ritĂ©. Dans La Croix, Marc Bonin dĂ©clare la guerre Ă  l’Alliance française et Ă  ses membres « plus ou moins tarĂ©s », se souciant moins, prĂ©tend-il, du fait que la dĂ©cision d’inviter Jean Richepin vienne « d’un Français dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© ou d’un vrai Français de race, d’un Français catholique ou d’un athĂ©e franc-maçon et enjuivĂ© » que de la nature de la faute elle-mĂȘme. Car « Richepin est un impie notoire », lit-on encore dans La VĂ©ritĂ©, voire « un des plus dangereux Ă©crivains de la France » (cette fois, c’est L’enseignement primaire qui parle), dont l’Ɠuvre « est absolument mauvaise » et « d’un athĂ©isme carnavalesque et forain » (Bonin, encore).
Jean Richepin, il est vrai, engage dans sa jeunesse une rĂ©volte contre le Parnasse, contre la religion et la morale bourgeoise, rĂ©volte qui n’échappe pas aux bons catholiques du Canada français. Mais il faut aussi se rappeler son passĂ© pour le moins bohĂšme : il a lui-mĂȘme Ă©tĂ© franc-tireur, matelot, vagabond, et il entend rendre compte de ces autres vies dans l’écriture. L’Ɠuvre populiste qui en dĂ©coule travaille surtout Ă  rendre leur bagout aux marginaux et aux gueux, Ă  faire vivre leur langue. À ce titre, s’il remarquait dans un avertissement au glossaire de La chanson des gueux la valeur Ă  la fois « curieuse » et « terrible » que prendrait un vĂ©ritable dictionnaire d’argot, Richepin aura eu le bonheur de prĂ©facer le premier ouvrage de ce genre, celui de Georges Delesalle, qui paraĂźt en 1896. Son attachement Ă  la langue et Ă  la vie des gens modestes rappelle Ă  bien des Ă©gards une certaine tentation ethnographique qu’on pourrait prĂȘter Ă  Girard, son intĂ©rĂȘt pour une philologie trĂšs intuitive.
Cette parentĂ© d’esprit, plus que les hauts cris des journaux conservateurs, aura pu inciter Rodolphe Girard Ă  commander une prĂ©face Ă  Jean Richepin en prĂ©vision d’une Ă©ventuelle rencontre Ă  l’Alliance française. Or, au moment oĂč il signe plutĂŽt une lettre de refus, Richepin demeure c...

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