Le Retour du bon sauvage
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Le Retour du bon sauvage

La matrice religieuse de l'écologisme

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Le Retour du bon sauvage

La matrice religieuse de l'écologisme

About this book

Voici un livre étonnant, dérangeant et nécessaire. Jérôme Blanchet-Gravel rappelle d'abord que l'écologie est une science de l'environnement qui propose des solutions de rechange rationnelles au modèle économique actuel. Cependant, depuis que l'Occident est considéré comme le principal, sinon comme l'unique responsable du dérèglement du climat, l'écologie a engendré une dérive persistante: l'écologisme. L'écologisme est une religion politique dont les grands prêtres font les manchettes en réclamant le retour du bon sauvage. La logique est la suivante: si le modèle de développement occidental est à l'origine de la crise environnementale, appelons en renfort la culture orientale et les pratiques primitives pour contrer la dégradation des écosystèmes. L'écologisme s'inscrit aussi dans une dynamique apocalyptique et réactionnaire. Le fondamentalisme environnemental prophétise la fin des temps, confond la droite et la gauche, invente l'écoféminisme, s'habille des oripeaux du multiculturalisme et tend à placer la nature au-dessus de l'homme. Pour certains, la conversion aux religions païennes pourrait même permettre à l'Occident de mettre un terme à la culture matérialiste dont il serait l'unique représentant.Il est temps, écrit Jérôme Blanchet-Gravel, de revenir à la science pour affronter la réalité.

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chapitre 1
Un nouveau clivage gauche-droite
L’arrivée sur la scène politique d’un mouvement écologiste ouvertement hostile aux idéaux de la civilisation occidentale nous oblige à nous questionner sur la validité actuelle du clivage gauche-droite. En renonçant globalement à l’humanisme qui place l’émancipation humaine au premier plan, et ce, souvent au détriment de l’environnement, l’écologisme entend renouer avec une conception païenne de l’univers qui fait des hommes de simples éléments naturels parmi tant d’autres. La crise existentielle dont est victime la société moderne s’accompagne d’une humilité nouvelle devant la Création. Les rêves prométhéens s’essoufflent au profit d’un enracinement qui vient contrebalancer les effets destructeurs du désenchantement du monde.
En effet, l’écologisme rime avec un grand retour du religieux, ce qui nous incite à réfléchir sur la manière dont nous étiquetons les idéologies politiques. À travers diverses organisations écologistes comme Greenpeace à l’international, la Fondation David Suzuki au Canada et Équiterre au Québec, une antique conception du monde a été redéployée en réaction à la dégradation constante des écosystèmes, au réchauffement climatique et à la pollution atmosphérique. Bien plus qu’un simple mouvement politique, l’écologisme est une cosmogonie qui contient à la fois une idéologie apocalyptique, une vision édénique de la biosphère et une forte dose de romantisme politique. À divers degrés et souvent inconsciemment, la plupart des groupes écologistes sont à la recherche active de cette authenticité qui s’enracine dans la tradition. Un certain nombre d’entre eux sont fascinés par une myriade de cultures traditionnelles dont la conservation est perçue comme le moyen le plus efficace de faire face à l’artificialisation du monde. Les écologistes prophétisent la fin du monde à des fins punitives et salvatrices pour que la nature puisse enfin se régénérer. Paradoxalement, les plus radicaux utilisent le langage de la tradition judéo-chrétienne dans leur projet de revalorisation polythéiste des éléments du cosmos.
Dans son ensemble, l’imaginaire écologiste demeure tributaire d’une conception de l’univers qui est réapparue en Occident lors de l’émergence du romantisme européen à la fin du xixe siècle. La plupart des écologistes s’inscrivent dans une filiation intellectuelle qui trouve son fondement dans le romantisme politique opposé à la conception universaliste de la Révolution française ayant permis l’émergence des droits de la personne. Le romantisme politique est un courant réactionnaire qui s’est historiquement opposé aux projets visant à transformer durablement la société. Il fait appel à un imaginaire de la continuité, par opposition à l’imaginaire de la rupture qui semble avoir dominé l’histoire occidentale.
Globalement, le romantisme mise sur l’enracinement de l’individu qui doit refléter son « milieu naturel » dans l’expression de sa culture. Les productions biologiques prisées par divers environnementalistes encouragent ainsi un renouveau du régionalisme et du retour à la terre. L’écologisme véhicule une vision contraire à l’universalisme en refusant que les pays en voie de développement profitent des bienfaits de l’émancipation qui ont souvent pour corollaire une certaine domination de la nature. L’élévation du niveau de vie qui coïncide fréquemment avec le respect des droits de la personne ne nécessite-t-elle pas une certaine exploitation des ressources naturelles ?
Si, à la base, le romantisme politique apparaît comme la tentative de conjuguer la Révolution française et l’héritage antérieur de la France, il s’est surtout développé en Allemagne où, à quelques nuances près, il a pris la forme du conservatisme1. Comme le souligne l’historien américain George L. Mosse, le romantisme allemand avait développé une conception païenne de l’univers et refusait le progrès technique et la modernisation de l’Europe qui en découlait. Ouvrant la voie au darwinisme social en raison de son aversion profonde pour les idées égalitaristes, le romantisme européen reste le courant idéologique majeur à l’origine de l’idéologie völkisch – l’ancêtre de l’idéologie nazie2. Autant d’éléments qui nous font douter de la nature « progressiste » d’un écologisme qui, sur certains plans, réanime quelques-uns des idéaux les plus puissants du romantisme.
En réalité, il est impossible de classer l’écologisme à gauche pour deux raisons principales. Premièrement, l’écologisme s’accompagne d’un retour du religieux qui rompt avec la tradition athée ou laïque de la gauche. La crise écologique engendre un nouveau rapport à l’expérience religieuse qui contraste beaucoup avec les discours progressistes des siècles derniers condamnant l’obscurantisme religieux. Deuxièmement, l’écologisme fait l’apologie des cultures traditionnelles. Les écologistes témoignent d’un net attachement envers la tradition, historiquement rangée à droite. Puisqu’on vise la stabilité, les cultures étrangères privées de l’influence occidentale sont perçues comme des modèles à suivre en vue de protéger la biodiversité.
Origines et caractéristiques du clivage gauche-droite
Le clivage gauche-droite remonte à la Révolution française. À la suite de la convocation des États généraux durant l’été de 1789, la mise sur pied d’une Assemblée constituante destinée à élaborer une Constitution pour la France met en présence deux camps opposés, soit la « gauche » et la « droite ». Ceux qui se tiendront à la gauche du président de l’Assemblée marqueront symboliquement leur opposition à la monarchie et au statu quo. Quant à ceux qui se trouveront à la droite du président, ils se montreront favorables au maintien ou au renforcement de la prérogative royale d’élaborer des lois. Cette façon de faire a laissé son empreinte sur l’histoire. Depuis, les catégories « gauche » et « droite » sont indispensables à l’analyse des idées politiques.
Le clivage gauche-droite est évidemment imparfait, car son utilisation comporte un lot d’inexactitudes conceptuelles. Il est impossible d’insérer à la perfection une idéologie dans un filet théorique. Rendant la chose encore plus complexe, au simple clivage gauche-droite peuvent aussi se substituer d’autres clivages importants dans les pays où le contexte politique l’impose. Par exemple, au Québec, à la tension gauche-droite s’ajoute la tension exercée entre l’idée d’indépendance et le fédéralisme canadien. Ainsi, le Québec est aux prises avec un double clivage : celui de la gauche-droite et celui opposant les forces indépendantistes aux forces fédéralistes.
Cela dit, la diffusion de l’écologisme impose de revoir notre façon de classer les idéologies politiques. Se pourrait-il que certaines idées « de gauche » soient dorénavant considérées comme étant « de droite » et vice versa ? Une idéologie vouée à la préservation du monde peut-elle être qualifiée de progressiste ?
Selon les politologues québécois Danic et Ian Parenteau, la gauche et la droite sont alimentées par des conceptions du monde opposées qui se trouvent dans leurs programmes politiques respectifs. La gauche et la droite obéissent à des « idées maîtresses » qui se traduisent dans des principes de légitimation3. Les idéologies de gauche partagent une conception du monde qui met l’accent sur « le caractère inéquitable de l’ordre établi ». Pour les tenants de la gauche, un déséquilibre entre les « dominants » et les « dominés » est observable non seulement à l’échelle internationale mais également à l’intérieur même de tous les pays. À la gauche anti-impérialiste des années 1960 de tradition marxiste se superpose une gauche altermondialiste qui prend aujourd’hui la défense des minorités en tout genre (immigrants, minorités sexuelles, etc.). Globalement, les programmes « de gauche » visent à changer le monde.
Quant à la conception du monde à laquelle souscrit globalement la droite, elle est fondée sur la perception de la légitimité de l’ordre du monde. Dans la grande famille de droite se trouvent différentes branches allant de la droite conservatrice à la droite religieuse – lesquelles entretiennent toutefois une complicité. Il existe également une « droite économique » vouée à l’entretien du capitalisme et une droite « sociale-darwiniste » valorisant un modèle hiérarchique de la société. Chose certaine, la droite repose globalement sur l’idée que la stabilité est moralement supérieure à l’instabilité. Cyclique, la droite s’oppose au déséquilibre.
Toute conception du monde véhiculée par la droite s’appuie aussi sur l’idée qu’il existe une menace pour la société ou un danger (le réchauffement climatique) mettant en péril l’équilibre mondial. Conformément à la peur du danger et à la valorisation de la continuité, l’imaginaire écologiste baigne dans cet univers craintif où il n’existe pas de véritable confiance en l’homme. À cet effet, l’œuvre du philosophe écologiste Hans Jonas témoigne d’une véritable phobie pour toute société en mouvement. L’écologisme est humanophobe puisqu’il souhaite retirer à l’humanité sa capacité à exploiter l’environnement, comme si l’humanité était un parasite dangereux.
Le clivage gauche-droite est en profonde mutation depuis l’apparition de l’idéologie écologiste dans le monde, aux alentours des années 1970. Si cette dernière aspire à transformer l’humanité dans un esprit de gauche, c’est précisément pour la rendre compatible avec la préservation d’un ordre naturel dans un esprit de droite. L’écologisme n’est progressiste que dans la mesure où il emprunte des schémas révolutionnaires pour justifier un combat conservateur. Notre époque se laisse berner par de puissants stéréotypes qui font des tam-tams et des produits biologiques les symboles d’une pseudo-guérilla qui n’a de vraiment progressiste que son aversion pour le système capitaliste.
L’écologisme fait de l’Occident la menace principale à l’ordre naturel et, conséquemment, à l’ordre mondial. Le programme des environnementalistes vise moins à délivrer l’humanité du poids de la tradition qu’à favoriser le retour du religieux de manière concomitante avec le multiculturalisme. Si l’écologisme est largement perçu comme un courant de gauche dans la société, il est évident qu’il ne saurait être réduit à un quelconque progressisme. L’eschatologie écologiste veut faire la révolution pour rétablir la société traditionnelle.
Conceptions du temps de la gauche et de la droite
Les conceptions du temps sont cruciales pour comprendre les idées politiques qu’elles sous-tendent. La droite et la gauche reposent sur des visions opposées de l’avenir qui doivent être prises en compte pour saisir adéquatement le sens de leurs revendications. Il faut d’abord réaliser que le retour du bon sauvage s’accompagne de la valorisation des cultures traditionnelles axées sur le temps cyclique.
Pendant les deux derniers siècles, l’Occident s’est représenté l’histoire sur un grand axe dont la progression symbolisait l’émancipation humaine. Mais une grande désillusion collective a sonné le glas de l’optimisme temporel dont faisait preuve la civilisation occidentale. Dans un essai important sur la philosophie de l’histoire, le philosophe Maurice Lagueux remarquait que les rêves progressistes de l’Occident avaient buté contre un mur avec les événements tragiques du xxe siècle4. Avant la Shoah, le communisme, le fascisme – bref, avant le totalitarisme et les nombreux conflits armés qui ont engendré tant d’horreurs –, la plupart des intellectuels pensaient que le temps se déployait de manière linéaire.
Face à la décadence du modèle occidental, la redécouverte des...

Table of contents

  1. Page couverture
  2. Les Éditions du Boréal
  3. Faux-titre
  4. Titre
  5. Crédits
  6. Dédicace
  7. Exergue
  8. Introduction
  9. Chapitre 1 • Un nouveau clivage gauche-droite
  10. Chapitre 2 • Nazisme et écologisme radical : une étrange concordance
  11. Chapitre 3 • L’écoféminisme : la fin de la pilule contraceptive ?
  12. Chapitre 4 • Un millénarisme antichrétien
  13. Chapitre 5 • De la biodiversité au multiculturalisme
  14. Chapitre 6 • L’interprétation de l’histoire
  15. Chapitre 7 • Les droits des animaux : entre marxisme et réenchantement
  16. Chapitre 8 • Al Gore et la crise de l’environnement
  17. Chapitre 9 • Les nouveaux visages de l’orientalisme
  18. Chapitre 10 • Le développement durable : le défi de la conciliation
  19. Épilogue • Le film Avatar et le réenchantement du monde
  20. Remerciements
  21. Table des matières
  22. Crédits et remerciements
  23. Fin
  24. Quatrième de couverture