Culture Générale - concours 2021-2022

Mouchet Nelly

• Publisher: Editions Ellipses
• Year: 2020
• ISBN:
  9782340046450
• Topic: Education
• Subtopic: Counseling in Career Development

Les éléments d'actualité des trois ou quatre dernières années constituent un facteur déterminant dans les épreuves de culture générale, notamment dans le cadre des différents concours de la fonction publique, des écoles de commerce et des IEP.

L'objectif de cet ouvrage, et de la collection à laquelle il appartient, est donc de proposer un ensemble de fiches thématiques portant sur des sujets traités à partir de leur actualité

• les questions sont présentées sous forme d'une synthèse théorique,
• des développements d'actulité viennent les renforcer.

Ces fiches s'adressent à tous ceux qui souhaitent préparer les concours administratifs de catégorie A et B de la Fonction publique, ainsi qu'aux étudiants en cours de scolarité au sein des classes préparatoires aux grandes écoles ou des Instituts d'études politiques.

Questions contemporaines

12

Les secrets de l’histoire :
secrets d’État et usages politiques
du secret

« Il est bon de cacher le secret du roi, mais il est honorable
de révéler et publier les œuvres de Dieu »

TOBIE, 12 :6.

Introduction

En 2013, Edward SNOWDEN renverse la NSA et la surveillance qu’elle exerce sur les citoyens américains, mais aussi sur le portable d’Angela MERKEL ou encore sur 190 pays. Le journal The Intercept publie en février 2015 la réalité de l’espionnage réalisé par les renseignements américains et britanniques sur les cartes SIM de 450 opérateurs de téléphonie. Le secret semble alors menacé à l’image des prémonitions qui étaient celles de George ORWELL dont la fiction 1984, englobant la plupart des dérives des régimes politiques, autoritaires comme démocratiques, semble se réaliser. Cependant, les tiroirs de l’histoire renferment encore quelques secrets politiques qui ont donné aux historiens une raison d’être.

Une approche politique du secret et de l’évolution de ses usages à travers différents régimes politiques, de la république romaine à l’empire, puis sous la monarchie en France du Moyen Âge à l’époque moderne, pour terminer par ces applications contemporaines en régimes totalitaires et démocratiques permet de montrer la pérennité de son usage.

Concepts/notions

¡ Gestapo : police secrète créée en 1933, composée de 15 000 hommes au maximum, chargée de lutter contre les ennemis de la communauté nationale allemande et les opposants au régime nazi (F. MC DONOUGH, 2017).

¡ Graecostasis : du grec stasis qui signifie se tenir debout et du latin graeco désignant les Grecs (G. STOUDER, 2018), le terme désigne le lieu, à Rome, où se tenaient les légats grecs venus négocier puis l’ensemble des légats de l’empire.

¡ Information : processus de mise en forme des données par enquête ainsi que leur communication. Elle se produit, s’utilise, se réutilise et se conserve (J.-B. SANTAMARIA, 2018).

¡ Mythe : récit imaginaire dont les faits ne sont pas attestés historiquement. Il transmet oralement des généralités d’ordre philosophique, métaphysique ou social.

¡ NKVD : Commissariat du peuple interne, organisme de l’URSS chargé de « combattre le crime et maintenir l’ordre public ».

¡ Secret : désigne ce que l’on ne peut connaître, ce qui est caché. Par extension, il devient ce qui n’est connu que de peu de personnes et il perd alors son essence.

Chronologie

¡ 1405 : Christine de PIZAN rédige un manuel d’éducation à destination des princesses, le Livre des Trois vertus, dans lequel elle fait du secret une vertu des princesses qui se doivent d’être d’une grande discrétion en toutes circonstances.

¡ 1410 : Christine de PIZAN dans le Livre des faits d’armes et de chevalerie enseigne au dauphin, le duc de Guyenne, combien l’usage du secret est utile en temps de guerre et légitime la figure du prince manipulateur.

¡ 1513 : MACHIAVEL dans Le Prince (1532) invoque la « raison d’État » pour justifier les entraves au droit et l’usage du secret par le prince.

¡ 1576 : Étienne de LA BOÉTIE dans son Discours de la servitude volontaire montre que si l’on ne veut pas tomber dans la servitude, il ne faut rien donner au tyran, surtout pas ses secrets.

¡ 1946 : création du SDECE en France (Service de documentation externe et de contre-espionnage) qui devient la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure).

¡ 1949 : publication de 1984 de George ORWELL qui décrit dans une fiction toutes les facettes du pouvoir qui permettent le contrôle des consciences, dont la surveillance.

¡ 1950 : création de la Stasi, police secrète, d’espionnage et de contre-espionnage de RDA (République démocratique allemande).

¡ 1952 : création de la NSA (National Security Agency), Agence nationale de la sécurité chargée du renseignement numérique et de la sécurité des systèmes d’information du gouvernement américain.

¡ 1960 : création du SAC (Service d’action civique) pour protéger DE GAULLE et son parti.

¡ 1978 : loi française relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

¡ 2008 : réforme du renseignement intérieur en France ; apparition de la DCRI (Direction centrale du renseignement intérieur) devenue DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure) qui fusionne le contre-espionnage et les Renseignements généraux.

¡ 2018 : loi française sur l’adaptation de la loi de 1978 au cadre juridique européen. Elle instaure le Règlement général pour la protection des données (RGPD) sur la transparence et l’usage des données et en établissant des sanctions en cas de non-respect des règles.

¡ 2020 : annulation de l’accord de 2016 sur le transfert des données personnelles entre l’Union européenne et les Etats-Unis.

Les secrets politiques de l’histoire antique

La diplomatie du secret : un usage du secret dans les négociations de la res publica romaine à l’Empire (IIe siècle a. è.-Ve siècle p. è.)

Rome, de la République à l’Empire, trouve à son service des diplomates chargés de négocier avec les peuples qui menacent son intégrité. Cette diplomatie secrète peut être analysée, dans un premier temps, à travers le rôle qu’ont joué les relations secrètes dans la construction et la pérennité de l’empire territorial romain sous la République devenue Empire du IIe siècle a. è. au IIIe siècle p. è. Dans un second temps, les IVe et Ve siècles voient la perpétuation de l’usage d’une diplomatie secrète face aux menaces des peuples barbares avec qui l’Empire va devoir négocier après s’être battu, jusqu’à sa capitulation finale.

L’une des premières difficultés pour appréhender la diplomatie secrète, essentiellement orale, en histoire romaine tient à la question des sources. Les sources écrites sont peu nombreuses et proviennent des archives politiques. Ensuite, le mot « diplomatie » n’existe pas et il n’y a ni ambassade ni appareil d’État dédiés à la diplomatie à Rome. Les faits diplomatiques sont donc rapportés par des historiographes un ou deux siècles après. Par exemple, Tite Live (59 a. è, 17 p. è.) a transcrit les archives du Sénat et traite d’évènements diplomatiques. Par ailleurs, Polybe au IIe siècle a. è., raconte la rencontre entre Flamininus, un général romain et Philippe V de Macédoine en 197 a. è. qui donne lieu à un moment de diplomatie secrète après une méfiance de Philippe V de Macédoine vis-à-vis de Rome et de ses alliés Grecs. Plus tard, en 63 a. è., le secret de la conjuration de Catilina est rapporté par Cicéron dans ses discours appelés Catilinaires, puis par l’historien Salluste (La Conjuration de Catilina, 43 a. è.). Le complot politique visant à porter au pouvoir le sénateur romain Catilina est révélé par la présence à Rome d’une ambassade d’Allobroges. Ils sont venus du Sud-Est de la Gaule après des décennies de révoltes contre Rome. Arrivés à Rome, ils sont faciles à convaincre de se soulever contre elle. Ils rencontrent les complotistes et doivent porter un message à Catilina. Alors que leur secret a été dénoncé auprès de Cicéron, celui-ci les fait arrêter et leurs messages sont interceptés. Les noms des conjurés sont livrés et le secret levé. Ainsi à Rome, il demeure toujours une méfiance vis-à-vis des ambassadeurs. Ce sont des diplomates qui à l’origine sont des prêtres ou des légats. Les premiers font entrer les dieux dans les négociations et peuvent les utiliser comme caution ou moyen de pression, alors que les seconds négocient la diplomatie formelle et informelle avec les puissances de l’empire ou de l’e...