La Terre de Tom Tiddler
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La Terre de Tom Tiddler

About this book

Des voyageurs rencontrent l'ermite Tom Tiddler et lui racontent... C'est ainsi que nous découvrons la réconcilation d'un pere d'avec son fils, l'évasion de deux forçats, le destin d'un enfant né sur un navire le meme jour qu'un autre, la poursuite a travers l'Amérique d'un voleur de portefeuille...

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Information

Chapitre 1 Suie et cendres

– Et pourquoi appelle-t-on cela la Terre de Tom Tiddler ? demanda le voyageur.
– Parce qu’il jette des sous aux mendiants et aux vagabonds qui, naturellement, les ramassent, rĂ©pondit l’aubergiste. Et comme il fait cette aumĂŽne sur sa propre terre qui Ă©tait, vous le remarquerez, avant d’ĂȘtre Ă  lui, celle de sa famille, vous n’avez qu’à considĂ©rer les sous comme de l’or ou de l’argent et Ă  changer le nom de la propriĂ©tĂ© en celui du propriĂ©taire et vous saurez sur le bout de vos doigts le nom de la plaisanterie des enfants, et cela est juste aussi, dit l’aubergiste, avec son habitude favorite de regarder dans l’espace Ă  travers la table et la croisĂ©e, par-dessous la jalousie Ă  moitiĂ© tirĂ©e. Du moins, cela Ă©tait considĂ©rĂ© ainsi par plusieurs des gentlemen qui ont pris des tasses de thĂ© dans cette humble salle.
Le voyageur en ce moment prenait le thĂ© avec l’aubergiste qui tirait directement Ă  boulet rouge sur lui.
– Et vous l’appelez l’ermite ? dit le voyageur.
– C’est ainsi qu’on l’appelle, reprit l’hĂŽte, Ă©vitant de prendre aucune responsabilitĂ© personnelle, et on le considĂšre gĂ©nĂ©ralement comme tel.
– Qu’est-ce qu’un ermite ? demanda le voyageur.
– Ce que c’est, rĂ©pĂ©ta l’hĂŽte, en se passant la main sous le menton.
– Oui, qu’est-ce que c’est.
L’hĂŽte se baissa de nouveau pour voir d’une vue plus Ă©tendue dans l’espace, par-dessous la jalousie, et, avec l’air embarrassĂ© d’un homme peu accoutumĂ© Ă  une dĂ©finition, il ne fit point de rĂ©ponse.
– Je vais vous dire mon idĂ©e Ă  ce sujet, rĂ©pliqua le voyageur : « C’est une abominable et sale chose. »
– M. Mopes est sale, on ne saurait le nier, dit l’hîte.
– Et d’une suffisance insupportable.
– M. Mopes est, dit-on, infatuĂ© de la vie qu’il mĂšne, reprit l’hĂŽte, comme faisant une autre confession.
– Un stupide et affreux renversement des lois de la nature humaine, riposta le voyageur, et par Ă©gard pour ceux qui travaillent Ă  l’Ɠuvre de Dieu d’une maniĂšre utile, tout Ă  la fois morale et physique, je mettrais la chose sous la roue d’un moulin, si je le pouvais, et partout oĂč je la trouverais, soit sur une colonne, soit dans un trou, ou sur la Terre de Tom Tiddler, soit dans les États du Pape, sur la terre d’un fakir hindou ou sur n’importe quelle terre.
– Je ne saurais mettre M. Mopes sous la roue d’un moulin, dit l’hĂŽte en secouant la tĂȘte trĂšs sĂ©rieusement, mais il n’y a point de doute qu’il ne possĂšde de riches propriĂ©tĂ©s.
– À quelle distance peut ĂȘtre la terre de Tom Tiddler ? demanda le voyageur.
– On la met Ă  cinq milles, rĂ©pondit l’hĂŽte.
– Bien, quand j’aurai dĂ©jeunĂ©, je m’y rendrai. Je suis venu ici ce matin pour le trouver et le voir.
– Il y en a beaucoup qui font ainsi, observa l’hîte.
La conversation se passait au cƓur de l’étĂ© d’une annĂ©e de grĂące peu Ă©loignĂ©e, au milieu des vallĂ©es agrĂ©ables et des riviĂšres poissonneuses d’un verdoyant comtĂ© d’Angleterre. N’importe quel comtĂ©. Il suffit que vous y puissiez chasser, tirer, pĂȘcher, parcourir ses longues voies romaines recouvertes de gazon, ouvrir d’anciennes barriĂšres, voir de nombreux arpents de terre richement cultivĂ©s et entretenir une conversation toute arcadienne avec de braves paysans, l’orgueil de leur pays, qui vous diront (si vous avez besoin de le savoir) comment vous vous procurerez une table pastorale Ă  neuf schillings par semaine.
Le voyageur se mit Ă  dĂ©jeuner dans le petit salon sablĂ© du cabaret du village du Peal-of-Bells, les souliers encore recouverts de la rosĂ©e et de la poussiĂšre d’une promenade faite de grand matin Ă  travers la route, la prairie et le taillis, et qui l’avait gratifiĂ© de petits brins d’herbes, de fragments de foin nouveau, et de beaucoup d’autres tĂ©moignages odorants de la fraĂźcheur et des richesses de l’étĂ©. La fenĂȘtre Ă  travers laquelle l’aubergiste avait plongĂ© les regards dans l’espace, Ă©tait ombragĂ©e par une jalousie, parce que le soleil du matin Ă©tait chaud et dardait dans la rue du village. Cette rue ressemblait Ă  celles de la plupart des autres villages : large pour sa hauteur, silencieuse pour son Ă©tendue, et paisible au plus haut degrĂ©, et les moindres de ses petites habitations avaient d’énormes volets pour fermer. Rien avec autant de soin que si elles eussent Ă©tĂ© la Monnaie ou la Banque d’Angleterre.
Tout d’abord, la maison du docteur attirait les regards avec sa plaque d’airain sur sa porte, et ses trois Ă©tages ; elle Ă©tait aussi remarquable et aussi diffĂ©rente des autres, que le docteur lui-mĂȘme, avec son grand habit de drap, au milieu de ses malades en sarrau.
Les habitations du village semblaient s’ĂȘtre fait une loi de rivaliser de mauvais goĂ»t, car une vingtaine de cabanes en lattes et en plĂątre Ă©taient entassĂ©es confusĂ©ment autour de la maison en briques rouges du Procureur, qui, avec son brillant perron et son Ă©norme dĂ©crottoir, paraissait en quelque sorte vouloir les Ă©craser. Elles Ă©taient aussi variĂ©es que les laboureurs qui les occupaient, les uns ayant les Ă©paules hautes, le cou de travers et des rhumatismes, – les autres Ă©tant borgnes, louches, cagneux, boiteux et cassĂ©s.
Quelques-unes des petites maisons de commerçants, telles que la boutique de l’épicier et du sellier, avaient dans le milieu du pignon un Ɠil-de-bƓuf unique Ă  un pouce ou deux du sommet, donnant Ă  supposer que c’était par lĂ  que quelque malheureux apprenti de la campagne devait, comme un ver, se glisser horizontalement dans l’appartement, quand il se retirait pour se reposer.
Autant la contrĂ©e environnante Ă©tait riche et abondante, autant le village Ă©tait pauvre et chĂ©tif, ce qui faisait penser que ceux qui l’habitaient avaient plantĂ© tout ce qu’ils possĂ©daient pour le convertir en rĂ©coltes. Ceci expliquerait la nuditĂ© des petites boutiques, la nuditĂ© de quelques planches et trĂ©teaux dans un coin de la rue, dĂ©signĂ© pour tenir le marchĂ©, la nuditĂ© de la vieille auberge et de sa cour avec sa sinistre inscription : « Bureau de l’accise », non encore effacĂ©e de la porte, semblant indiquer la derniĂšre chose que la pauvretĂ© pouvait encore acquitter. Ceci expliquerait aussi l’abandon dĂ©terminĂ© du village par un chien Ă©garĂ©, mourant de faim, qui se dirige du cĂŽtĂ© des blancs poteaux et de l’étang, et sa conduite dans l’hypothĂšse oĂč, par un suicide, il irait se convertir en engrais et devenir en quelque sorte partie intĂ©grante des navets et des Ă©pinards.
Le voyageur ayant fini son dĂ©jeuner et payĂ© son modeste Ă©cot, franchit le seuil du Peal-of-Bells, et, suivant la direction que l’hĂŽte lui indiquait du doigt, il partit pour l’ermitage en ruines du solitaire M. Mopes.
M. Mopes, en laissant tout tomber en ruines autour de lui, en s’enveloppant dans une couverture attachĂ©e par une brochette, et en se roulant dans la suie, la graisse, et d’autres saletĂ©s, avait acquis un grand renom dans la contrĂ©e, renom beaucoup plus grand qu’il n’eĂ»t jamais pu l’obtenir par lui-mĂȘme, si sa carriĂšre eĂ»t Ă©tĂ© celle d’un chrĂ©tien ordinaire ou d’un hottentot dĂ©cent. Il s’était roulĂ© et sali de suie et de graisse jusqu’à illustrer son nom dans les journaux de Londres. Et il Ă©tait curieux d’observer, comme le fit le voyageur, en s’arrĂȘtant afin de prendre une nouvelle direction pour arriver Ă  cette ferme ou Ă  cette chaumiĂšre qu’il longeait, avec quel soin le maladif Mopes avait comptĂ© sur la faiblesse de ses voisins pour orner sa demeure.
Une espĂšce de nuage merveilleux et romanesque entourait Mopes, et, comme dans tous les nuages, les proportions rĂ©elles des vĂ©ritables objets atteignaient ici des hauteurs extravagantes. Il avait, dans un accĂšs de jalousie, tuĂ© la belle crĂ©ature qu’il adorait, et il en faisait pĂ©nitence ; il avait fait un vƓu sous l’influence de son chagrin ; il avait fait un vƓu sous l’influence d’un accident fatal ; il avait fait un vƓu sous l’influence de la religion ; il avait fait un vƓu sous l’influence de la boisson ; il avait fait un vƓu sous l’influence du dĂ©sappointement ; ou plutĂŽt il n’avait jamais fait de vƓu, mais il avait Ă©tĂ© poussĂ© Ă  vivre ainsi, par la possession d’un secret puissant et redoutable ; il Ă©tait Ă©normĂ©ment riche, Ă©tonnamment charitable et profondĂ©ment instruit : il voyait des spectres, connaissait et pouvait faire toutes sortes de choses merveilleuses. Les uns disaient qu’il errait toutes les nuits, et que des voyageurs Ă©pouvantĂ©s l’avaient rencontrĂ© marchant fiĂšrement le long des chemins obscurs ; d’autres disaient qu’il ne sortait jamais ; ceux-ci savaient que sa pĂ©nitence serait bientĂŽt finie, d’autres affirmaient positivement que sa vie de rĂ©clusion n’était point du tout une pĂ©nitence, et qu’elle ne finirait qu’avec lui-mĂȘme. Si vous en veniez au simple fait de son Ăąge, Ă  la durĂ©e de sa sordide existence, depuis qu’il vivait dans une couverture, vous ne pouviez obtenir aucune information de quelque consistance de ceux qui auraient pu le savoir, s’ils l’avaient voulu. On le reprĂ©sentait comme ayant tous les Ăąges, depuis 25 jusqu’à 60 ans, et comme Ă©tant ermite depuis sept, douze, vingt ou trente ans, bien que vingt ans fĂ»t le chiffre gĂ©nĂ©ralement adoptĂ©.
– Bien, bien ! se dit le voyageur, voyons Ă  tout prix Ă  quoi ressemble un ermite rĂ©ellement vivant

Alors le voyageur continua, et approcha toujours jusqu’à ce qu’il arrivñt à la terre de Tom Tiddler.
C’était un enfoncement auquel menait un chemin rustique ; le gĂ©nie de Mopes l’avait rendu aussi complĂštement dĂ©sert que s’il fĂ»t nĂ© empereur ou conquĂ©rant. Le centre Ă©tait occupĂ© par une habitation suffisamment solide dont toutes les vitres avaient Ă©tĂ© depuis longtemps dĂ©truites par le gĂ©nie surprenant de Mopes et dont toutes les fenĂȘtres Ă©taient barricadĂ©es de piĂšces de bois raboteuses clouĂ©es Ă  l’extĂ©rieur. Une cour, couverte d’un tas de dĂ©bris de vĂ©gĂ©taux et de ruines, contenait des bĂątiments dont le chaume s’était facilement envolĂ© au souffle de tous les vents des quatre saisons de l’annĂ©e, et dont les planches et les poutres Ă©taient peu Ă  peu tombĂ©es en pourriture. Les gelĂ©es et les brouillards de l’hiver et les chaleurs de l’étĂ© avaient dĂ©jetĂ© ce qui avait Ă©chappĂ© aux tempĂȘtes. En sorte que pas un pilier, pas une planche, ne conservait la place qu’ils auraient dĂ» occuper et chaque chose Ă©tait, comme le propriĂ©taire, hors de sa place, dĂ©gradĂ©e et abaissĂ©e. Dans l’habitation du fainĂ©ant, derriĂšre la haie en ruines, et s’enfonçant parmi des dĂ©bris d’herbes et d’orties, se voyaient les derniers fragments de certains monceaux, qui, gĂątĂ©s par la nielle, s’étaient affaissĂ©s au point de ressembler Ă  un tas de rayons de miel pourris ou d’éponges sales. La terre de Tom Tiddler pouvait mĂȘme montrer les restes de ses eaux, car il y avait un Ă©tang visqueux dans lequel Ă©taient tombĂ©s deux ou trois arbres, un tronc d’arbre pourri, et quelques branches gisaient encore dedans ; cette eau, malgrĂ© cette accumulation d’herbes stagnantes, malgrĂ© sa noire dĂ©composition, sa pourriture et sa saletĂ©, eĂ»t Ă©tĂ© presque une consolation, Ă©tant regardĂ©e comme la seule eau qui pĂ»t reflĂ©ter cet affreux endroit sans paraĂźtre souillĂ©e par cet emploi abject.
Le voyageur promenait ses regards tout autour de lui sur la terre de Tom Tiddler ; il aperçut Ă  la fin un chaudronnier tout poudreux couchĂ© parmi les herbes et les tas de gazon, Ă  l’ombre de l’habitation. Un bĂąton raboteux gisait sur le sol Ă  cĂŽtĂ© de lui, et sa tĂȘte reposait sur une petite besace. Il rencontra les yeux du voyageur sans relever la tĂȘte, en baissant simplement un peu le menton (il Ă©tait couchĂ© sur le dos), pour mieux le voir.
– Bonjour ! dit le voyageur.
– Bonjour aussi, si cela vous fait plaisir, rĂ©pondit le chaudronnier.
– Cela ne vous plaĂźt donc pas ? Il fait une journĂ©e superbe.
– Je ne m’intĂ©resse point au temps, reprit le chaudronnier en bĂąillant.
Le voyageur s’approcha de la place oĂč il Ă©tait couchĂ© et, en le regardant, il lui dit :
– Voici un curieux endroit.
– Ah ! je le suppose ! fit le chaudronnier. La « Terre de Tom Tiddler », comme on l’appelle.
– La connaissez-vous bien ?
– Je ne l’ai jamais vue avant aujourd’hui, dit le chaudronnier en bĂąillant de nouveau, et je ne me soucie pas de jamais la revoir. Il y avait ici Ă  l’instant un homme qui m’a dit que c’était comme cela qu’on l’appelait. Si vous avez besoin de voir Tom lui-mĂȘme, vous devez passer par cette porte.
Et par un faible mouvement de menton il indiqua une petite porte en bois, tout en ruines, sur le cĂŽtĂ© de l’habitation.
– Avez-vous vu Tom ?
– Non, et je n’ai point intĂ©rĂȘt Ă  le voir ?
 Je puis voir n’importe oĂč un homme sale

– Il n’habite point dans cette maison, alors ? dit le voyageur en jetant de nouveau les yeux sur l’habitation.
– L’homme qui m’a appris sa demeure, reprit le chaudronnier d’un air irritĂ©, Ă©tait ici Ă  l’instant. La terre sur laquelle vous ĂȘtes, camarade, est la terre de Tom Tiddler. Si vous avez besoin de voir Tom lui-mĂȘme, entrez par cette porte. L’homme Ă©tait sorti lui-mĂȘme par cette porte et il doit donc savoir si Tom y est.
– Certainement, dit le voyageur.
– Et peut-ĂȘtre, s’écria le chaudronnier, si Ă©tonnĂ© de la clartĂ© de sa propre idĂ©e qu’elle produisit sur lui un effet Ă©lectrique et lui fit relever la tĂȘte d’un pouce ou deux, peut-ĂȘtre est-ce un menteur. Celui qui Ă©tait ici tout Ă  l’heure auprĂšs de Tom, m’a affirmĂ© Ă  plusieurs reprises qu’il Ă©tait ici et m’a dit : « Camarade, quand Tom ferme la maison pour aller courir le monde, les lits sont tout faits comme si quelqu’un devait les occuper. Si vous passiez maintenant Ă  travers les chambres, vous verriez les draps pourris se soulever comme des vagues. Et soulevĂ©s par quoi ? par les rats qui y pullulent

– Je voudrais avoir dĂ©jĂ  vu cet homme, fit le voyageur.
– Vous auriez Ă©tĂ© heureux de le voir, si vous aviez Ă©tĂ© Ă  ma place, grommela le chaudronnier ; c’était un homme bien ennuyeux.
Non sans un certain ressentiment dans le souvenir, le chaudronnier ferma lentement les yeux. Le voyageur, jugeant que le chaudronnier était un homme facilement ennuyé dont il ne pourrait tirer de plus amples renseignements, se dirigea vers la porte.
La porte tourna sur ses gonds rouillĂ©s et le voyageur se trouva dans une cour oĂč il n’y avait autre chose Ă  voir qu’un bĂątiment adossĂ© Ă  l’édifice en ruine et muni d’une fenĂȘtre fermĂ©e par des barreaux. Comme il y avait sous cette fenĂȘtre des traces de pas encore tout rĂ©cents, et comme elle Ă©tait basse et non vitrĂ©e, le voyageur put regarder Ă  l’intĂ©rieur. Il s’assura ainsi qu’il avait devant lui un ermite rĂ©ellement vivant, et put juger comment un ermite peut pourtant paraĂźtre rĂ©ellement mort.
Il Ă©tait couchĂ© sur un amas de suie et de cendres, par terre, en face d’une sale cheminĂ©e.
Il n’y avait rien autre dans cette noire petite cuisine, ou cave, ou quel que pĂ»t ĂȘtre l’usage primitif de cet antre, qu’une table recouverte d’un tas de vieilles bouteilles. Un rat, qui remuait parmi ces bouteilles, sauta Ă  terre, passa, en allant Ă  son trou, sur l’ermite rĂ©ellement vivant ; sans cela l’homme dans son propre trou n’eĂ»t pas Ă©tĂ© aussi facile Ă  distinguer. ChatouillĂ© Ă  la figure par la queue du rat, le propriĂ©taire du domaine de Tom Tiddler ouvrit les yeux, vit le voyageur, et s’élança Ă  la fenĂȘtre.
– Bon ! pensa le voyageur, en se reculant des barreaux d’un pas ou deux. Un gibier de potence, un Ă©chappĂ© de Bedlam, un prisonnier pour dĂ©lits de la pire esp...

Table of contents

  1. Titre
  2. Chapitre 1 - Suie et cendres
  3. Chapitre 2 - Les ombres du soir
  4. Chapitre 3 - Rencontre d’un mauvais sujet
  5. Chapitre 4 - Des épaves sur la mer
  6. Chapitre 5 - Ramassant un portefeuille
  7. Chapitre 6 - Mademoiselle Kimmeens
  8. Chapitre 7 - Le chaudronnier
  9. À propos de cette Ă©dition Ă©lectronique