Roger-la-Honte
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Roger-la-Honte

About this book

En juillet 1872, celui que l'on surnomme le pere Larouette est assassiné dans sa villa de Ville-d'Avray. Tout accuse Roger Laroque. La femme et la fille de Roger Laroque ont été témoins du meurtre mais la mere fait promettre a la fillette qu'elle ne dira rien... Victoire, la nouvelle bonne, a entendu la mere et la fille au moment ou elles reconnaissaient l'assassin et, lorsqu'elle est interrogée, elle dénonce son patron. C'est l'ami de Laroque, Lucien de Noirville, qui se charge de sa défense. Au cours du proces, il est établi que Laroque, victime d'un contexte économique difficile, avait contracté des dettes importantes qu'il avait, apres avoir épuisé toutes les autres ressources - y compris un emprunt a un financier privé -, décidé de rembourser grùce a des gains au jeu. Ces dettes sont bien réelles mais, en fait, Laroque ne peut rembourser ce preteur parce qu'il a avancé une somme a son ancienne maßtresse, ce qu'il ne peut pas dévoiler sans divulguer le nom de cette femme, chose contraire a l'honneur. En cour d'assises, coup de théùtre: alors qu'il défend Laroque, l'avocat reçoit un pli lui expliquant qu'il est en train de défendre l'ancien amant de sa femme! A la lecture du message, l'avocat est pris d'un malaise qui lui est fatal...

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Information

Chapitre 1

Au coin de la ruelle du Montalais, qui descend au lac, et Ă  deux pas du bois de Ville-d’Avray, s’élevait une maison de campagne, fraĂźche et coquette au possible derriĂšre ses clĂ©matites et ses plantes grimpantes : vrai nid d’amoureux qui dĂ©testent le bruit et d’amants Ă©goĂŻstes pour qui le monde finit Ă  leur amour.
La villa Montalais avait été achetée quelques années auparavant par M. Roger Laroque, un ingénieur-mécanicien, trÚs connu, dont les ateliers de constructions étaient rue Saint-Maur et qui avait, en outre, un appartement particulier, boulevard Malesherbes, 117.
L’hiver, il habitait boulevard Malesherbes ; l’étĂ©, il se rĂ©fugiait Ă  Ville-d’Avray, avec sa femme et sa fille ; mais chaque matin ses affaires le rappelaient Ă  Paris, rue Saint-Maur ; il y dĂ©jeunait et rentrait le soir, vers sept heures, pour dĂźner en famille.
Le soir oĂč commence notre rĂ©cit – en juillet 1872 – Ă  huit heures, contre son habitude trĂšs rĂ©guliĂšre, Roger Laroque n’était pas encore rentrĂ©.
Le dĂźner Ă©tait prĂȘt. La lampe suspendue venait d’ĂȘtre allumĂ©e dans une ravissante salle Ă  manger communiquant avec une serre et tout encombrĂ©e de fleurs. Au salon, dont les fenĂȘtres ouvraient sur une large terrasse, non plus qu’à la salle Ă  manger, personne. Et l’on eĂ»t dit, sans les lumiĂšres, que cette maison Ă©tait inhabitĂ©e, tant elle semblait calme et comme endormie au milieu des fleurs dans la nuit envahissante.
Pourtant, à gauche du salon, deux voix chuchotent. De ce cÎté, se trouve la chambre de Mme Laroque, encore plongée dans la demi-obscurité du crépuscule.
Deux voix, l’une superbe, grave et douce, de celles qui font aimer une femme sans la connaütre, l’autre, enfantine, pareille au son du cristal, appelant le rire, les jeux et l’insouciance. C’est la mùre et la fille, Henriette Laroque et Suzanne.
Mme Laroque a traĂźnĂ© une chaise longue auprĂšs de la fenĂȘtre entrouverte. Elle s’y est assise. Elle a attirĂ© Suzanne auprĂšs d’elle. Elles sont blondes toutes deux. L’une a vingt-cinq ans. Elle est en pleine floraison de sa beautĂ©. L’autre a sept ans et n’est pas encore au printemps de sa vie. Elles se ressemblent.
Bien que huit heures aient sonnĂ© et que depuis plus d’une heure son mari devrait ĂȘtre lĂ , Mme Laroque n’est pas trop inquiĂšte. De quoi s’inquiĂ©terait-elle ? Ne sait-elle pas que Roger l’adore autant qu’elle l’aime ?
Cependant, plus que d’autre jour, elle dĂ©sirerait ce soir-lĂ  qu’il ne fĂ»t point en retard. Henriette et Suzanne l’attendent avec impatience et la maison elle-mĂȘme, avec ses fleurs Ă  profusion, son air souriant de fĂȘte, semble Ă©tonnĂ©e de ce silence et de cette solitude.
C’est que, justement, il y a sept ans que Suzanne est nĂ©e : Suzanne, l’unique enfant, l’enfant gĂątĂ©e, l’adoration du pĂšre.
Et, dans les longues heures de la journĂ©e, depuis l’avant-veille, Henriette lui fait rĂ©citer quelques mots qu’elle lui apprend par cƓur et par lesquels Suzanne va souhaiter la bienvenue Ă  Roger, dans un instant, lorsqu’il entrera.
Écoutez la voix grave de la mùre et le cristal pur de la petite fille, chuchotant, n’osant parler haut, afin de conserver bien à elles, pour quelques minutes encore, le mystùre de leur douce surprise.
– Tu n’as pas oubliĂ©, chĂšre enfant ?
– Oh ! non, mĂšre, je n’ai rien oubliĂ©.
– Que diras-tu à ton pùre, lorsqu’il t’embrassera ?
– Je lui dirai : « PĂšre, je t’aime depuis sept ans. Je t’aime autant que maman. Je sais que tu consacres ta vie Ă  prĂ©parer la mienne, et que tu te fatigues pour que je sois heureuse plus tard. Mais, pĂšre chĂ©ri, je ne suis jamais si heureuse que quand tu m’embrasses. Je sais que tu es indulgent pour moi, et tous les jours je t’aime davantage, parce que, tous les jours, je vois combien tu es bon. Si je t’ai fait de la peine, pĂšre chĂ©ri, c’est sans le savoir
 et je t’en demande pardon ! »
– Et tu penses ce que tu dis, n’est-ce pas, mon enfant ?
– Oh ! mùre, dit la mignonne en jetant les deux bras autour du cou d’Henriette, c’est vrai, sais-tu bien que je l’aime autant que toi !
La demie de huit heures sonna.
Henriette eut un geste de surprise.
– Ton pùre ne dünera pas avec nous ce soir, dit-elle, viens. Je ne veux pas que tu attendes plus longtemps.
Elles passĂšrent dans la salle Ă  manger.
Mme Laroque sonna pour qu’on servĂźt. Il n’y avait, Ă  la villa, pour tout domestique, qu’un cocher, une cuisiniĂšre et une femme de chambre, Victoire, laquelle Ă©tait au service d’Henriette depuis deux jours seulement.
Le dĂźner fut silencieux.
MalgrĂ© elle, un vague sentiment de crainte oppressait le cƓur de la jeune femme. À deux ou trois reprises, Roger s’était trouvĂ© ainsi en retard, mais il avait eu soin de tĂ©lĂ©graphier. Ce soir, rien. Pourquoi ?
Elles revinrent Ă  la chambre Ă  coucher.
Une heure s’écoula. Roger ne rentrait pas.
Henriette rĂȘvait devant la fenĂȘtre, demi-couchĂ©e sur la chaise longue.
Victoire avait voulu allumer. Elle s’y Ă©tait opposĂ©e. À quoi bon ? Elle n’avait pas envie de lire, et il faisait un clair de lune magnifique. Le ciel Ă©tait d’un bleu transparent, laissant deviner de lointains infinis.
Dix heures sonnĂšrent.
– Tu ne dors pas, chĂ©rie ? fit Henriette.
– Non, mĂšre, dit l’enfant dont les yeux Ă©taient grands ouverts.
– Tu ne veux pas te coucher ?
– Oh ! non, je voudrais embrasser petit pĂšre auparavant. Henriette, tourmentĂ©e, alla s’appuyer sur le balcon, regardant vers le chemin par oĂč Roger, venant de la gare, avait coutume d’arriver. Suzanne, auprĂšs d’elle, regardait aussi.
La villa Montalais est isolĂ©e de Ville-d’Avray par des jardins et des arbres. En face d’elle, dans les marronniers et un peu sur la gauche, est une petite maison proprette, aux contrevents verts, donnant de plain-pied sur la rue, alors que la villa, au contraire, est sĂ©parĂ©e de la rue par une pelouse constamment rafraĂźchie par un jet d’eau.
La maisonnette Ă©tait Ă©clairĂ©e ; les fenĂȘtres ouvertes laissaient voir une chambre meublĂ©e d’acajou, ayant une table au milieu et, dans le fond, une sorte de bureau-secrĂ©taire poussĂ© contre le mur.
Onze heures sonnĂšrent non loin de lĂ , Ă  l’église du village.
– Mon Dieu ! dit-elle, que s’est-il donc passĂ© ?
Et, s’adressant à sa fille :
– Tu n’as pas froid ? Tu ne t’endors pas ?
– Oh ! non, mùre ! il fait si bon, et je voudrais tant voir petit pùre !
Dans la maison d’en face, devant les fenĂȘtres, un homme de moyenne taille venait de passer et s’asseyait Ă  son secrĂ©taire qu’il ouvrait. On le voyait distinctement et Henriette et Suzanne le regardaient. C’était le locataire, le pĂšre Larouette.
– Notre nouveau voisin est rentrĂ©, dit la petite.
L’homme avait tirĂ© de sa redingote un portefeuille gonflĂ©, l’avait vidĂ© et Ă©parpillait devant lui les liasses de billets de banque, des rouleaux de louis, une fortune qu’il se mit Ă  ranger mĂ©thodiquement, comptant et recomptant avec un plaisir visible.
Henriette et Suzanne le voyaient de profil ; et, tel qu’il Ă©tait placĂ©, Larouette tournait le dos Ă  la porte d’entrĂ©e de sa chambre.
– Qu’est-ce qu’il fait, notre voisin ? interrogea Suzanne.
– Il compte de l’argent qu’il vient de recevoir, sans doute.
On entendit le premier quart de onze heures, au carillon de l’église.
Henriette se pencha sur sa fille, et l’embrassa au front, longuement.
– Je vais appeler Victoire pour qu’elle te dĂ©shabille et te couche, dit-elle.
– Oh ! mùre, encore un instant
 Papa ne peut tarder

– Non, mignonne, il se fait tard
 Tu serais fatiguĂ©e.
Et la jeune femme appuya sur le bouton d’une sonnette Ă©lectrique communiquant avec l’office et se remit au balcon.
Suzanne regardait dans la rue, le plus loin qu’elle pouvait voir.
Victoire entra.
– Allumez une lampe et la veilleuse, dit Henriette, puis vous prendrez Suzanne.
Au mĂȘme instant, la fillette se penchait en dehors du balcon en battant des mains, riant et appelant, dans un cri de joie :
– PĂšre ! pĂšre ! nous t’attendons
 Je ne suis pas couchĂ©e !

Un homme, en effet, remontait la rue, Ă  quelques pas de lĂ . Il Ă©tait de haute stature, coiffĂ© d’un chapeau gris clair et vĂȘtu d’un pardessus d’étĂ© Ă©galement gris, avec une pĂšlerine sur les Ă©paules.
Au cri de Suzanne, il se jeta dans les marronniers, devant la maison.
Henriette, en se penchant, l’avait vu aussi.
– Roger ! Roger ! dit-elle, pourquoi es-tu en retard ?
 Dans quelle inquiĂ©tude tu nous as mises, si tu savais !

Mais l’homme, qu’il eĂ»t entendu ou non, ne rĂ©pondait rien. Il se coulait maintenant, le dos baissĂ©, dans les arbres, de tronc en tronc, en se rapprochant de la maison de Larouette.
Tout Ă  coup, il eut Ă  franchir un sentier. La lune l’éclaira encore

– C’est Roger !
 murmura Henriette, que fait-il donc ? oĂč va-t-il ?
Suzanne, Ă©tonnĂ©e, se taisait, mais ses yeux suivaient son pĂšre avec une curiositĂ© inquiĂšte
 Et la mĂšre ne respirait plus
 le cƓur tordu par une angoisse
 les mains crispĂ©es au fer du balcon
 trĂšs pĂąle
 les dents serrĂ©es
 presque mĂ©connaissable

L’homme dĂ©passa les arbres et pĂ©nĂ©tra furtivement dans la maison.
– Tiens ! fit Suzanne, pùre qui va chez le voisin !

Quelques secondes se passÚrent. Larouette se levait, et, debout prÚs de son secrétaire, refermait les tiroirs à clef avec méthode et lenteur.
Tout à coup, il se passa derriùre lui une chose qu’il ne vit pas, mais que, de leur balcon, distinguùrent Suzanne et Henriette.
La porte du fond venait de s’ouvrir doucement, sans aucun bruit, puisque Larouette n’avait pas entendu, et un homme qui paraissait de haute taille, trĂšs robuste, apparut soudain derriĂšre lui, tournant le dos Ă  la fenĂȘtre.
La moitié du corps projetée hors du balcon, les yeux dilatés, Henriette regardait.
Qu’allait-il donc se passer lĂ  ? Est-ce que c’était Roger, vraiment ?

L’homme leva les deux bras
 les poings fermĂ©s
 sur la tĂȘte nue de Larouette

Henriette voulut crier, prĂ©venir
 mais une force supĂ©rieure Ă  elle-mĂȘme retint le cri dans sa gorge ; elle n’eut qu’un soupir rauque, une sorte de rĂąle d’épouvante et dit seulement :
– Roger ! Roger ! Juste Dieu !

La scùne qui suivit ne dura qu’une seconde.
Les deux poings levĂ©s s’étaient abattus, mais Larouette au mĂȘme instant se retournait, esquivant le coup. Il jeta un cri, un seul : « À l’assassin ! »
Il y eut une courte et atroce lutte. Le chapeau du meurtrier tomba – un chapeau d’étĂ©, gris, ornĂ© d’un large ruban noir.
La lampe roula sur la table, mais, avant qu’elle ne s’éteignĂźt, une brune figure, couverte d’une Ă©paisse barbe trĂšs noire, Ă©tait apparue comme dans un Ă©clair.
Du reste, pas d’autre bruit. Les tĂ©nĂšbres s’étaient faites dans la chambre. Larouette, chĂ©tif, tenta de se dĂ©fendre. Le meurtrier Ă©tait un colosse. Pourtant la crainte de mourir dĂ©cupla les forces de la victime. Larouette se dĂ©battit, essaya de crier.
Alors, il y eut une vive lumiÚre, puis une détonation sourde. Et ce fut tout

Henriette s’était reculĂ©e. Ses dents claquaient. De grosses gouttes de sueur mouillaient son front. Elle avait le regard d’une folle
 Et elle rĂ©pĂ©tait, haletante, dans un dĂ©chirement affreux de toute sa vie :
– Roger ! Se peut-il ! Lui !
 C’est horrible !
Et voilĂ  tout Ă  coup qu’au milieu de son Ă©garement lui vient la pensĂ©e de sa fille, de sa fille qu’elle a oubliĂ©e pendant les cinq minutes qu’a durĂ© ce terrible drame
 de sa fille qui, la premiĂšre, avait reconnu Roger.
– Suzanne ! dit-elle.
– Mùre ! fait une voix trùs faible, derriùre elle.
Alors Henriette prend l’enfant dans ses bras avec une farouche douleur.
– Tu n’as rien vu
 dit-elle, haletante, dans le dĂ©sordre de son esprit
 tu n’as rien vu
 tu n’as rien entendu
 Écoute-moi bien et comprends-moi
 Il faut que tu n’aies rien vu et rien entendu.
– Non, mùre, je n’aurai rien vu
 je n’aurai rien entendu

Ce n’était plus la voix de cristal pur, argentine et frĂȘle
 c’était la voix grave de la mĂšre ; grandie soudain par un abominable spectacle, la fillette distinguait clairement l’avenir.
– Tu ne diras jamais rien ?
– Jamais
 que sur un ordre de toi, mùre.
– C’est bien
 que Dieu t’épargne la douleur
 qu’il me frappe, mais qu’il ait pitiĂ© de ta faiblesse et de ton innocence !

Elle ne pleurait pas. Seulem...

Table of contents

  1. Titre
  2. Chapitre 1
  3. Chapitre 2
  4. Chapitre 3
  5. Chapitre 4
  6. Chapitre 5
  7. Chapitre 6
  8. Chapitre 7
  9. Chapitre 8
  10. Chapitre 9
  11. Chapitre 10
  12. Chapitre 11
  13. Chapitre 12
  14. Chapitre 13
  15. Chapitre 14
  16. Notes de bas de page