Sonnez, merveilles !
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Sonnez, merveilles !

Kent Nagano, Inge Kloepfer, Isabelle Gabolde

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  1. 374 páginas
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Sonnez, merveilles !

Kent Nagano, Inge Kloepfer, Isabelle Gabolde

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La musique classique a-t-elle encore un sens aujourd'hui? Kent Nagano croit qu'il est important que nous tentions de répondre avec franchise à cette question. En cette époque où les institutions culturelles traditionnelles sont menacées, où les orchestres symphoniques et les maisons d'opéra sont appelés à « gérer la décroissance », maestro Nagano lance un vibrant appel pour que nous prenions conscience de l'immense trésor que constitue la musique classique et de la manière très concrète dont elle peut nous aider à régler quelques-uns des problèmes les plus urgents de notre société.Il retrace pour nous son parcours, qui l'a amené, lui, petit-fils de modestes immigrants ayant grandi dans un petit village côtier de la Californie, à diriger les plus prestigieux orchestres et maisons d'opéra. Il raconte comment la musique lui a permis de trouver sa place, non seulement au sein de sa propre communauté, mais partout dans le monde.Loin d'être une activité réservée à l'élite, la musique classique, selon Nagano, est un formidable instrument de rapprochement et de dialogue entre les hommes. À la fois mémoires et brûlant plaidoyer pour la survie de la musique classique et des arts, « Sonnez, merveilles! » s'adresse à tous ceux qui croient encore en l'importance de la culture dans le monde d'aujourd'hui.

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Información

Año
2015
ISBN
9782764643983
chapitre 1
Labours et trompettes
Le langage parlé est fait d’énoncés et d’arguments, de questions et de réponses. Le langage musical est autre. Aucun argument ne s’y trouve ; la musique est libre et toujours prête à être partagée, à devenir une partie de chacun.
Wachtang Korisheli
Un mélodieux village de pêcheurs
Je fais un rêve. Il serait certes trompeur que la première phrase de ce livre me range sans équivoque parmi les rêveurs. Je ne suis pas un rêveur, je suis un réaliste. Aussi, j’écris ce livre. Pour mon rêve. Ce rêve m’emporte loin, vers mon enfance passée au bout du monde, dans les années 1950 et 1960. Il m’emporte sur la côte ouest des États-Unis, au milieu d’un terrain presque désertique, long de quatre cents milles, entre Los Angeles et San Francisco. Aujourd’hui, il suffirait de sept heures pour parcourir cette distance par la route.
Sur la côte pittoresque et sauvage, à environ mi-chemin entre les deux métropoles, se trouve Morro Bay, lieu modeste, alors simple village de pêcheurs de deux mille habitants peut-être, venus des quatre coins du monde. Lorsque je songe à mon enfance dans ce village, de la musique résonne toujours dans mes souvenirs – les cantates, les préludes et les fugues de Bach, les symphonies de Beethoven et de Mozart, les grandes œuvres chorales. Il n’est bien sûr pas inhabituel pour un chef d’orchestre que ses souvenirs soient indissociables de la musique ; elle est ce qui définit son quotidien. Qui ne connaît la force de suggestion des mélodies, leur pouvoir d’évoquer des paysages, des situations, des personnes, de ressusciter des pans entiers du passé ?
Or ce n’est pas ce dont il est question ici. La musique que j’entends, c’est celle que jouait notre orchestre et que chantaient nos chœurs, inlassablement. La présence continue de la musique classique régissait en effet, avec naturel et évidence, le quotidien de notre village. Elle était une partie intrinsèque de notre existence, omniprésente – à la fois objet d’étude, passe-temps, moyen de reconnaissance sociale, partage d’une expérience. La vie de mes sœurs, mon frère, mes amis, mes camarades de classe, la mienne, était purement inconcevable sans musique. Nous faisions de la musique pour la musique ; aucun de nous, enfants d’agriculteurs, ne songeait alors à une carrière de musicien. Rien ne laissait présager, au cours de mon enfance et de mon adolescence, que je gagnerais un jour ma vie comme chef d’orchestre.
Les répétitions du chœur et de l’orchestre, les cours de piano, de solfège rythmaient les sept jours de la semaine, sans que nous voyions là, mon frère, mes sœurs et moi, quelque chose de singulier. Presque tous les membres de notre communauté rurale étaient engagés d’une manière ou d’une autre dans la vie musicale. Les enfants des agriculteurs autant que ceux des pêcheurs, des artisans, des professeurs, des épiciers ou du directeur de l’école. Tel un village musical, situé entre les rochers, les champs et le Pacifique, Morro Bay avait quelque chose d’étrange et d’unique. L’intensité avec laquelle les enfants se consacraient à la musique et entraînaient leurs parents dans le monde du classique rendait notre village quelque peu inhabituel, peut-être même rare. La musique nous reliait les uns aux autres, nous qui formions une société d’immigrants d’origines ethniques et culturelles si différentes. Le recul me le fait voir presque comme un rêve.
Peut-être devrais-je en dire ici un peu plus : mes grands-parents paternels et maternels ont émigré du Japon vers les États-Unis à la fin du xixe siècle et se sont installés comme paysans maraîchers sur la côte Ouest pour construire leur bonheur dans le pays de tous les possibles. Notre famille vit en Amérique depuis plus de cent vingt ans, c’est-à-dire depuis à peu près la moitié de la durée d’existence des États-Unis. Je suis donc pleinement américain. Mes grands-parents exploitaient une ferme que mon père et ses frères reprirent après qu’une grave maladie eut atteint mon grand-père. Ni mon père ni ma mère n’étaient destinés à devenir cultivateurs. Tous deux devaient, selon la volonté de leurs parents, apprendre un métier qui leur ouvrirait un horizon au-delà de l’agriculture. Ils suivirent dès lors un parcours professionnel tout autre : mon père étudia les mathématiques et l’architecture à l’Université de Californie à Berkeley, où ma mère obtint ses diplômes de microbiologiste et de pianiste.
Et ils se firent néanmoins fermiers – par nécessité, mon grand-père n’ayant plus la force de cultiver seul ses terres. Ce n’est que plus tard, en 1976, qu’ils eurent la possibilité d’exercer le métier qu’ils avaient choisi. À cette époque, une entreprise agroalimentaire acheta nos terres agricoles après qu’elles eurent été transformées en terrain constructible dans le cadre d’un programme de développement régional. Des bâtiments recouvrent, aujourd’hui, nos champs d’alors. Ma mère travailla par la suite comme microbiologiste pour les autorités sanitaires, mon père conçut et construisit non seulement des maisons, mais également de grands centres commerciaux. À ce moment-là, je ne vivais plus à Morro Bay depuis longtemps.
Je suis, pour ainsi dire, enfant d’agriculteurs, l’enfant d’un planteur d’artichauts, que son père a peu vu, car il passait aux champs le plus clair de son temps. Une fois rentré, le soir, il se consacrait à l’architecture, dessinait des projets qui sont devenus par la suite – et de plus en plus fréquemment – des commandes. Il avait commencé très tôt à monter un petit bureau d’architecture, en plus de son travail d’agriculteur, et se retirait souvent dans son « atelier », où il dessinait ses ébauches et donnait libre cours à ses rêves. Ma mère veillait avec beaucoup d’attention à ce que nous, les enfants, ne le dérangions jamais dans son travail. Elle était une scientifique passionnée, qui jouait merveilleusement du piano. Extrêmement érudite, ma mère faisait vivre, au cœur de notre famille, sa fascination pour les sciences et son amour des arts, de la musique et de la littérature.
La campagne nous entourait, vaste et rocailleuse. Les métropoles californiennes de San Francisco, au nord, et de Los Angeles, au sud, se trouvaient chacune à deux cents milles de Morro Bay et étaient donc, dans les années 1950, quasiment inaccessibles pour nous, les enfants. Nous nous y rendions si rarement qu’il s’agissait chaque fois d’une escapade tout à fait extraordinaire. Nous vivions à l’extrême limite des États-Unis, là où la côte escarpée se jette dans l’océan, où le paysage rocailleux alterne avec de longues plages sur lesquelles déferlent d’immenses vagues les jours de tempête. Petits, mes sœurs, mon frère et moi n’allions que rarement au bord de l’océan, qui s’étendait pourtant devant notre porte. Notre vie se déroulait essentiellement dans les deux microcosmes que formaient la maison et l’école.
Le sérieux de la mère
Ma mère me mit au piano à l’âge de quatre ans. Elle le fit avec cette certitude qui était la sienne lorsqu’elle lisait avec nous des livres ou nous emmenait à l’église, le dimanche, sans le moindre doute sur le fait qu’il nous fallait supporter avec patience même les prêches les plus ennuyeux. Nous avons chacun commencé notre apprentissage avec elle au même âge. La question de savoir si nous le désirions ne fut jamais posée ; et nous, enfants, ne nous la sommes pas plus posée. Nous faisions les exercices qu’elle nous enseignait. Nous apprenions à lire les notes et à écouter – à nous écouter nous-mêmes et à écouter les autres. Nous intériorisions la différence entre le bruit, le pianotage et la vraie musique.
La musique était une activité sérieuse, elle revêtait de l’importance pour ma mère. Plus qu’un simple jeu, elle était aussi essentielle que la lecture, l’écriture ou le calcul. S’y exercer faisait partie de notre quotidien d’enfants, tel un fait indiscutable que nous ne remettions jamais en question. Peut-être parce que l’intention de ma mère ne fut jamais de nous éduquer dès l’âge de quatre ans comme des enfants prodiges ou, plus tard, de faire de nous des artistes. Pour elle, la musique faisait partie de l’éducation de ses enfants ; elle appartenait de manière naturelle à toute formation humaniste et, dès lors, à notre quotidien. Elle n’a jamais été un moyen de parvenir à une quelconque fin.
Je ne voudrais pas prétendre que nous étions, nous autres enfants, démesurément motivés par nos exercices quotidiens au piano. Si nous avons étudié avec plaisir ? Ce ne fut pas mon cas. Je ne m’y suis pas non plus opposé ; quand quelqu’un exige de vous, avec une calme certitude, ce dont il offre l’exemple au quotidien, une certaine docilité s’installe naturellement. Peut-être était-ce ce qu’on appellerait aujourd’hui de la violence douce, lorsque, face à certaines questions, on décide à la place des enfants plutôt que de leur donner le choix. La musique n’était pas un choix, elle faisait simplement partie intégrante de notre vie. Lorsque j’y songe, je nous trouve, mes sœurs, mon frère et moi, étonnamment dociles en comparaison d’autres enfants d’alors.
Mes parents étaient un peu insolites dans ce contexte rural. Cela ne tenait pas uniquement à la prédilection de ma mère pour les arts ; la vocation véritable de mon père occupait également une place importante dans notre vie familiale. Des esquisses, des plans, des maquettes d’architecte se trouvaient partout dans notre maison. Lorsque nous fûmes un peu plus grands, il nous a emmenés de plus en plus souvent sur ses chantiers. Il nous expliquait la construction des bâtiments et ne laissait aucun doute sur le fait qu’il entendait l’architecture comme un art reflétant son époque sur le plan esthétique, façonnant son temps et, dans le meilleur des cas, le dépassant.
Ma sœur, ma cadette de trois ans, et moi jouions surtout du piano. Mon frère, lui, a assez tôt exprimé une préférence pour les cuivres et a appris à jouer du trombone. Ma sœur la plus jeune jouait de l’alto. Aucun de nous n’a jamais pensé à cesser de jouer d’un instrument. Cela ne nous serait simplement pas venu à l’esprit, d’autant que notre quotidien ne nous offrait que peu de distractions. Nous vivions à l’écart et ne faisions donc pas partie d’équipes sportives ; nous allions simplement de temps à autre à la plage, où nous essayions d’apprendre à surfer en imitant les grands. Au milieu des années 1950, mes parents ont acheté une télévision. Mais il n’y avait pas grand-chose à regarder : la qualité de la réception à Morro Bay, avec les montagnes à l’est et l’eau à l’ouest, est restée médiocre pendant des années. La télévision intéressait mon père en raison du bulletin météorologique quotidien, indispensable pour son travail aux champs ; les prévisions lui permettaient une meilleure planification. Pourtant, le plus souvent, il s’en remettait à la radio.
La musique classique a certes joué très tôt un grand rôle au sein de notre famille. Cela tenait simplement à l’amour que ma mère portait à la musique. À cela près, nous ne nous distinguions guère de nos voisins ou des autres membres de notre communauté dans l’Amérique relativement traditionnelle des années 1950 et 1960, où la messe, les visites familiales, les rencontres entre amis rythmaient le quotidien, tout autant que l’école et, parfois, en fin de semaine, la plage, voire la montagne.
On entend les histoires les plus folles sur l’enfance des artistes – à maints égards malheureuse selon les représentations modernes. Elle ressemble à celle des sportifs de haut niveau. Ici, le père, sévère, exige de son fils un engagement sans faille, de longues heures d’entraînement et d’étude, jour après jour, sans aucun égard pour les conséquences physiques et psychologiques de pareille torture. De tels exemples sont nombreux dans le domaine de la musique classique. Là, c’est la mère qui, inflexible sous prétexte qu’un de ses enfants a montré un certain talent ou tout du moins un certain intérêt pour la musique, veut absolument en faire un soliste. Quand il s’agit de leurs enfants, l’imagination des parents s’enflamme facilement. Dès lors, tout s’enchaîne : une représentation entraîne la suivante, les enfants sont envoyés à des concours, sont présentés à des musiciens et à des professeurs de renom. Ce phénomène n’est pas propre à notre époque, il existe depuis des siècles.
Enfant, Wolfgang Amadeus Mozart suivit les leçons de son père, chaque jour, de longues heures durant. Il fut présenté, exhibé au monde entier au cours de longs voyages, et ce, jusqu’aux limites de l’épuisement. Il en fut de même pour le jeune Ludwig van Beethoven que son père, farouchement ambitieux, serait allé jusqu’à faire passer pour plus jeune qu’il n’était, afin que l’enfant prodige brillât plus encore au piano. On ne parle pas volontiers des souffrances des enfants prodiges, dont témoignent pourtant bien des autobiographies. Le perfectionnisme peut ravager en peu de temps l’insouciance de l’enfance. La jeunesse de certaines stars de la musique classique ou du sport, d’hier ou d’aujourd’hui, fut loin d’être idyllique. Toutefois, à Morro Bay, nous vivions dans un monde différent, qui, avec le recul, me semble parfois presque irréel.
Le miracle de Morro Bay
Ce fut l’arrivée d’un pédagogue au talent exceptionnel qui marqua le début du miracle musical de notre village de pêcheurs. Wachtang Korisheli, celui que nous tous, ses élèves, appelions et appelons aujourd’hui encore avec affection et admiration « professeur Korisheli », était géorgien de naissance. Dans mon souvenir, il surgit de nulle part au volant d’une petite Volkswagen pétaradante. Il fut soudain simplement là et commença à métamorphoser notre école primaire en une sorte de laboratoire musical. C’était en 1957, j’avais à peine six ans.
Korisheli, à trente-six ans, avait déjà derrière lui une vie plus que mouvementée. Il était originaire de Tbilissi, où il était né en 1921 – l’année de l’annexion militaire de la Géorgie par l’Union soviétique. Ses parents étaient acteurs. Son père était rapidement devenu une personnalité phare de la scène théâtrale. Connu dans toute l’URSS, il avait attiré l’attention de Staline, en l’honneur duquel il donna même une représentation à Moscou. L’état de grâce ne dura pas : il fut bientôt déclaré opposant géorgien à la suprématie soviétique et ennemi de l’État ; arrêté par le KGB, il fut interné et exécuté en 1936. Son fils, Wachtang, avait alors quinze ans. Il avait rencontré Staline du temps où son père avait encore la faveur du dictateur. Staline était allé jusqu’à mettre son bras autour des épaules du petit Wachtang et avait échangé quelques mots avec lui. Le fils et sa mère eurent à peine vingt minutes avant l’exécution du père pour lui faire leurs adieux à travers les barreaux de sa cellule.
En URSS, l’enfant d’un ennemi de l’État n’avait aucun avenir. Il lui était simplement impossible de songer à une carrière de musicien. Staline s...

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