
- 400 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
À propos de ce livre
pubOne.info present you this new edition. Quamquam animus meminisse horret, luctuque refugit incipiam.........
Foire aux questions
Oui, vous pouvez résilier à tout moment à partir de l'onglet Abonnement dans les paramètres de votre compte sur le site Web de Perlego. Votre abonnement restera actif jusqu'à la fin de votre période de facturation actuelle. Découvrez comment résilier votre abonnement.
Pour le moment, tous nos livres en format ePub adaptés aux mobiles peuvent être téléchargés via l'application. La plupart de nos PDF sont également disponibles en téléchargement et les autres seront téléchargeables très prochainement. Découvrez-en plus ici.
Perlego propose deux forfaits: Essentiel et Intégral
- Essentiel est idéal pour les apprenants et professionnels qui aiment explorer un large éventail de sujets. Accédez à la Bibliothèque Essentielle avec plus de 800 000 titres fiables et best-sellers en business, développement personnel et sciences humaines. Comprend un temps de lecture illimité et une voix standard pour la fonction Écouter.
- Intégral: Parfait pour les apprenants avancés et les chercheurs qui ont besoin d’un accès complet et sans restriction. Débloquez plus de 1,4 million de livres dans des centaines de sujets, y compris des titres académiques et spécialisés. Le forfait Intégral inclut également des fonctionnalités avancées comme la fonctionnalité Écouter Premium et Research Assistant.
Nous sommes un service d'abonnement à des ouvrages universitaires en ligne, où vous pouvez accéder à toute une bibliothèque pour un prix inférieur à celui d'un seul livre par mois. Avec plus d'un million de livres sur plus de 1 000 sujets, nous avons ce qu'il vous faut ! Découvrez-en plus ici.
Recherchez le symbole Écouter sur votre prochain livre pour voir si vous pouvez l'écouter. L'outil Écouter lit le texte à haute voix pour vous, en surlignant le passage qui est en cours de lecture. Vous pouvez le mettre sur pause, l'accélérer ou le ralentir. Découvrez-en plus ici.
Oui ! Vous pouvez utiliser l’application Perlego sur appareils iOS et Android pour lire à tout moment, n’importe où — même hors ligne. Parfait pour les trajets ou quand vous êtes en déplacement.
Veuillez noter que nous ne pouvons pas prendre en charge les appareils fonctionnant sous iOS 13 ou Android 7 ou versions antérieures. En savoir plus sur l’utilisation de l’application.
Veuillez noter que nous ne pouvons pas prendre en charge les appareils fonctionnant sous iOS 13 ou Android 7 ou versions antérieures. En savoir plus sur l’utilisation de l’application.
Oui, vous pouvez accéder à Histoire de Napoleon et de la Grande-Armee pendant l'annee 1812 Tome II par en format PDF et/ou ePUB ainsi qu'à d'autres livres populaires dans Literature et Classics. Nous disposons de plus d'un million d'ouvrages à découvrir dans notre catalogue.
Informations
Sujet
LiteratureSujet
ClassicsCHAPITRE II.
Ces trois journées étaient glorieuses. Witgenstein
repoussé, Steinheil battu, dix mille Russes et six généraux tués ou
hors de combat. Mais Saint-Cyr était blessé, l'offensive perdue,
l'orgueil, la joie et l'abondance dans le camp ennemi, la tristesse
et le dénuement dans le nôtre; on reculait. Il fallait un chef à
l'armée; de Wrede prétendait l'être; mais les généraux français
refusèrent même de se concerter avec ce Bavarois, alléguant son
caractère et croyant tout accord avec lui impossible; leurs
prétentions s'entre-choquaient. Saint-Cyr, quoique hors de combat,
fut donc forcé de garder la direction de ces deux corps.
Alors, ce maréchal ordonna la retraite vers
Smoliany, par toutes les routes qui pouvaient y conduire. Lui se
tint au centre, réglant l'une sur l'autre la marche de ces
différentes colonnes. C'était un système de retraite tout contraire
à celui que venait de suivre Napoléon.
Le but de Saint-Cyr était de trouver plus de vivres,
de marcher plus librement, avec plus d'ensemble, enfin d'éviter une
confusion trop ordinaire dans les colonnes trop considérables,
quand les hommes, les canons et les bagages sont entassés sur une
même route. Il réussit. Dix mille Français, Suisses et Croates,
ayant en queue cinquante mille Russes, se retirèrent sur quatre
colonnes, lentement, sans se laisser entamer, et forçant
Witgenstein et Steinheil à n'avancer, en huit jours, que de trois
journées.
En reculant ainsi vers le sud, ils couvraient le
flanc droit de la route d'Orcha à Borizof, par laquelle l'empereur
revenait de Moskou. Une seule colonne, celle de gauche, reçut un
échec. C'était celle de de Wrede et de ses quinze cents Bavarois,
augmentés d'une brigade de cavalerie française, qu'il gardait
malgré les ordres de Saint-Cyr. Il marchait à volonté. Son orgueil
blessé ne se pliait plus à l'obéissance. Il lui en coûta tous ses
bagages. Puis, sous prétexte de mieux servir la cause commune, en
couvrant la ligne d'opération de Wilna à Vitepsk, que l'empereur
avait abandonnée, il se sépara du deuxième corps, se retira par
Klubokoë sur Vileïka, et se rendit inutile.
Le mécontentement de de Wrede datait du 19 août. Ce
général pensait avoir eu une grande part à la victoire du 18, et
qu'on la lui avait fait trop petite sur le rapport du lendemain.
Depuis, il s'aigrit de plus en plus par ce souvenir, par ses
plaintes et par les conseils d'un frère qui, dit-on, servait dans
l'armée autrichienne. On ajoute aussi que, dans les derniers momens
de la retraite, le général saxon Thielmann l'entraîna dans ses
projets d'affranchissement de l'Allemagne.
Cette défection fut à peine sentie. Le duc de
Bellune et vingt-cinq mille hommes accouraient de Smolensk. Le 31
octobre, il se réunissait à Saint-Cyr devant Smoliany, dans
l'instant même où Witgenstein, ignorant cette jonction, et se fiant
à sa supériorité, traversait la Lukolmlia, s'adossait imprudemment
à des défilés et attaquait nos avant-postes. Il ne fallait qu'un
effort simultané des deux corps français pour le détruire. Les
soldats, les généraux du deuxième corps brûlaient d'ardeur. Mais
quand la victoire était dans leurs cœurs, et que, la croyant devant
leurs yeux, ils demandaient le signal du combat, Victor donna celui
de la retraite.
On ignore si cette prudence, qu'on jugea
intempestive, vint de la défiance que lui inspirait un terrain
qu'il voyait pour la première fois, et des soldats qu'il n'avait
pas encore éprouvés. Il se peut qu'il n'ait pas cru devoir risquer
une bataille dont la perte eût, il est vrai, entraîné celle de la
grande-armée et de son chef.
Après s'être replié derrière la Lukolmlia et s'y
être défendu tout le jour, il profita de la nuit pour gagner
Sienno. Le général russe s'apercevait alors du danger de sa
position. Elle était si critique, qu'il ne profita de notre
mouvement rétrograde et du découragement dont il fut suivi, que
pour se retirer.
Les officiers qui nous donnèrent ces détails,
ajoutèrent que, depuis ce moment, Witgenstein n'avait plus songé
qu'à reprendre Vitepsk et à se défendre. Probablement, il crut trop
téméraire de tourner la Bérézina par ses sources, pour se joindre à
Tchitchakof; car un bruit sourd, qui déjà se répandait, nous
menaçait de la marche de cette armée du midi, sur Minsk et Borizof,
et de la défection de Schwartzenberg.
Ce fut à Mikalewska, le 6 novembre, dans ce jour de
malheur où Napoléon venait de recevoir la nouvelle de la
conjuration de Mallet, qu'il apprit la jonction du deuxième et du
neuvième corps et le combat désavantageux de Czazniki. Il s'irrita,
et fit dire au duc de Bellune de rejeter sur-le-champ Witgenstein
derrière la Düna; que le salut de l'armée en dépendait. Il ne
dissimula pas à ce maréchal qu'il arrivait à Smolensk avec une
armée harassée et une cavalerie toute démontée.
Ainsi, les jours heureux étaient passés; de toutes
parts arrivaient des nouvelles désastreuses. D'un côté, Polotsk, la
Düna, Vitepsk perdus, et Witgenstein déjà à quatre journées de
Borizof; de l'autre, vers Elnia, Baraguay-d'Hilliers culbuté. Ce
général s'est laissé enlever la brigade Augereau, des magasins, et
cette route d'Elnia, par laquelle Kutusof peut désormais nous
prévenir à Krasnoé, comme il l'a fait à Viazma.
En même temps, de cent lieues en avant de nous,
Schwartzenberg annonçait à l'empereur qu'il couvrait Varsovie,
c'est-à-dire, qu'il découvrait Minsk et Borizof, le magasin, la
retraite de la grande-armée, et que peut-être l'empereur d'Autriche
livrait son gendre à la Russie.
Dans le même moment, derrière et au milieu de nous,
le prince Eugène était vaincu par le Wop; les chevaux de trait qui
nous avaient attendus à Smolensk, étaient dévorés par les soldats;
ceux de Mortier enlevés dans un fourrage; les troupeaux de Krasnoé
pris; d'affreuses maladies se déclaraient dans l'armée, et dans
Paris, le temps des conspirations paraissait revenu: tout enfin se
réunissait pour accabler Napoléon.
Chaque jour, les états de situations qu'il reçoit de
chacun de ces corps sont comme des bulletins de mourans: il y voit
son armée conquérante de Moskou, réduite de cent quatre-vingt mille
hommes à vingt-cinq mille combattans encore en ordre. À cette foule
de malheurs il n'oppose qu'une résistance inerte. Sa figure reste
la même: il ne change rien à ses habitudes, rien à la forme de ses
ordres; à les lire, on croirait qu'il commande encore à plusieurs
armées. Il ne hâte même pas sa marche. Seulement, irrité contre la
prudence du maréchal Victor, il lui renouvelle l'ordre d'attaquer
Witgenstein, et d'éloigner ce danger qui menace sa retraite. Quant
à Baraguay-d'Hilliers, qu'un officier vient d'accuser, il le fait
comparaître, et ce général, dépouillé de ses distinctions, part
pour Berlin, où il préviendra son jugement en mourant de
désespoir.
Mais ce qui surprenait davantage, c'était que
l'empereur laissât la fortune lui arracher tout, plutôt que de
sacrifier une partie pour sauver le reste. Ce fut sans ordre que
les chefs de corps brûlèrent des bagages et détruisirent leur
artillerie: pour lui, il laissa faire. S'il donna quelques
instructions pareilles, elles lui furent arrachées: ils semblait
qu'il s'attachât sur-tout à ce que rien de lui n'avouât sa défaite,
soit qu'il crût ainsi faire respecter son malheur, et, par cette
inflexibilité, dicter aux siens un courage inflexible; soit fierté
des hommes long-temps heureux, qui précipite leur perte.
Toutefois, cette Smolensk, deux fois fatale à
l'armée, était un lieu de repos pour quelques-uns. Pendant ce
sursis accordé à leurs souffrances, ceux-là se demandèrent:
«comment il se pouvait qu'à Moskou tout eût été oublié; pourquoi
tant de bagages inutiles; pourquoi tant de soldats déjà morts de
faim et de froid sous le poids de leurs sacs, chargés d'or au lieu
de vivres et de vêtemens, et sur-tout si trente-trois journées de
repos n'avaient pas suffi pour préparer aux chevaux de cavalerie,
de l'artillerie et à ceux des voitures, des fers qui eussent rendu
leur marche plus sûre et plus rapide?
»Alors, nous n'eussions pas perdu l'élite des hommes
à Viazma, au Wop, au Dnieper et sur toute la route; enfin
aujourd'hui, Kutusof, Witgenstein, et peut-être Tchitchakof,
n'auraient pas le temps de nous préparer de plus funestes
journées!
»Mais pourquoi, à défaut d'ordre de Napoléon, cette
précaution n'avait-elle pas été prise par des chefs, tous rois,
princes et maréchaux? L'hiver n'avait-il donc pas été prévu en
Russie? Napoléon, habitué à l'industrieuse intelligence de ses
soldats, avait-il trop compté sur leur prévoyance? le souvenir de
la campagne de Pologne, pendant un hiver aussi peu rigoureux que
celui de nos climats, l'avait-il abusé; ainsi qu'un soleil brillant
dont la persévérance, pendant tout le mois d'octobre, avait frappé
d'étonnement jusqu'aux Russes eux-mêmes? De quel esprit de vertige
l'armée, comme son chef, a-t-elle donc été frappée? Sur quoi chacun
a-t-il compté? car en supposant qu'à Moskou l'espoir de la paix eût
ébloui tout le monde, il eût toujours fallu revenir, et rien
n'avait été préparé, même pour un retour pacifique! »
La plupart ne pouvaient s'expliquer cet aveuglement
de tous que par leur propre incurie, et parce que dans les armées,
comme dans les états despotiques, c'est à un seul à penser pour
tous: aussi, celui-là seul était-il responsable, et le malheur, qui
autorise la défiance, poussait chacun à le juger. On remarquait
déjà que, dans cette faute si grave, dans cet oubli si
invraisemblable pour un génie actif, pendant un séjour si long et
si désœuvré, il y avait quelque chose de cet esprit d'erreur,
De la chute des rois funeste
avant-coureur. Napoléon était dans Smolensk depuis cinq jours.
On savait que Ney avait reçu l'ordre d'y arriver le plus tard
possible, et Eugène celui de rester deux jours à Doukhowtchina. «Ce
n'était donc pas la nécessité d'attendre l'armée d'Italie qui
retenait! À quoi devait-on attribuer cette stagnation, quand la
famine, la maladie, l'hiver, quand trois armées ennemies marchaient
autour de nous?
»Pendant que nous nous étions enfoncés dans le cœur
du colosse russe, ses bras n'étaient-ils pas restés avancés et
étendus vers la mer Baltique et la mer Noire? les laisserait-il
immobiles aujourd'hui que, loin de l'avoir frappé mortellement,
nous étions frappés nous-mêmes? n'était-il pas venu le moment fatal
où ce colosse allait nous envelopper de ses bras menaçans?
croyait-on les lui avoir liés, les avoir paralysés, en leur
opposant des Autrichiens au sud, et des Prussiens au nord, c'était
bien plutôt les Polonais et les Français, mêlés à ces alliés
dangereux, qu'on avait ainsi rendus inutiles.
»Mais, sans aller chercher au loin des causes
d'inquiétude, l'empereur a-t-il ignoré la joie des Russes, quand,
trois mois plus tôt, il se heurta si rudement contre Smolensk, au
lieu de marcher, à droite, vers Elnia, où il eût coupé l'armée
ennemie de sa capitale; aujourd'hui que la guerre est ramenée sur
les mêmes lieux, ces Russes imiteront-ils sa faute dont ils ont
profité? se tiendront-ils derrière nous, quand ils peuvent se
placer en avant de nous, sur notre retraite?
Répugne-t-il à Napoléon de supposer l'attaque de
Kutusof plus habile ou plus audacieuse que ne l'a été la sienne?
Augereau et sa brigade enlevés sur cette route ne l'éclairent-ils
point? qu'avait-on à faire dans cette Smolensk brûlée, dévastée,
que d'y prendre des vivres, et de passer vite?
Mais, sans doute, l'empereur croit, en datant cinq
jours de cette ville, donner à une déroute l'apparence d'une lente
et glorieuse retraite! Voilà pourquoi il vient d'ordonner la
destruction des tours d'enceinte de Smolensk, ne voulant plus,
a-t-il dit, être arrêté par ces murailles! comme s'il s'agissait de
rentrer dans cette ville, quand on ignorait si l'on en pourrait
sortir.
Croira-t-on qu'il veut donner le loisir aux
artilleurs de ferrer leurs chevaux contre la glace? comme si l'on
pouvait obtenir un travail quelconque d'ouvriers exténués par la
faim, par les marches; de malheureux à qui le jour entier ne suffit
pas pour trouver des vivres, pour les préparer, dont les forges
sont abandonnées ou gâtées, et qui d'ailleurs manquent des
matériaux indispensables pour un travail si considérable.
Mais peut-être l'empereur a-t-il voulu se donner le
temps de pousser en avant de lui, hors du danger et des rangs,
cette foule embarrassante de soldats devenus inutiles, de rallier
les meilleurs, et de réorganiser l'armée? comme s'il était possible
de faire parvenir un ordre quelconque à des hommes si épars, ou de
les rallier, sans logemens? sans distributions, à des bivouacs;
enfin, de penser à une réorganisation pour des corps mourans, dont
l'ensemble ne tient plus à rien, que le moindre attouchement peut
dissoudre. »
Tels étaient, autour de Napoléon, les discours de
ses officiers, où plutôt leurs réflexions secrètes, car leur
dévouement devait se soutenir tout entier deux ans encore, au
milieu des plus grands malheurs, et de la révolte générale des
nations.
L'empereur tenta pourtant un effort qui ne fut pas
tout-à-fait infructueux: ce fut le ralliement, sous un seul chef,
de tout ce qui restait de cavalerie; mais, sur trente-sept mille
cavaliers présens au passage du Niémen, il ne s'en trouva que huit
cents encore à cheval. Napoléon en donna le commandement à
Latour-Maubourg. Personne ne réclama, soit fatigue ou estime.
Quant à Latour-Maubourg, il reçut cet honneur ou ce
fardeau sans joie et sans regret. C'était un être à part: toujours
prêt sans être empressé, calme et actif, d'une sévérité de mœurs
remarquable, mais naturelle et sans ostentation; du reste simple et
vrai dans ses rapports, n'attachant la gloire qu'aux actions et non
aux paroles. Il marcha toujours avec le même ordre et la même
mesure, au milieu d'un désordre démesuré; et pourtant, ce qui fait
honneur au siècle, il arriva aussi vite, aussi haut et aussitôt que
les autres.
Cette faible réorganisation, la distribution d'une
partie des vivres, le pillage du reste, le repos que prirent
l'empereur et sa garde, la destruction d'une partie de l'artillerie
et des bagages, enfin l'expédition de beaucoup d'ordres, furent à
peu près tout le fruit qu'on retira de ce funeste séjour. Du reste
tout le mal prévu arriva. On ne rallia quelques centaines d'hommes
que pour un instant. L'explosion des mines fit à peine sauter
quelques pans de murailles, et ne servit, au dernier jour, qu'à
chasser hors de la ville les traîneurs qu'on n'avait pas pu mettre
en mouvement.
Des hommes découragés, des femmes, et plusieurs
milliers de malades et de blessés furent abandonnés, et à l'instant
où le désastre d'Augereau près d'Elnia faisait trop voir que
Kutusof, poursuivant à son tour, ne s'attachait pas exclusivement à
la grande route; que de Viazma il marchait directement, par Elnia,
sur Krasnoé; lorsqu'enfin on aurait dû prévoir qu'on allait avoir à
se faire jour au travers de l'armée russe, ce fut le 14 novembre
seulement que la grande-armée, ou plutôt trente-six mille
combattans, commencèrent à s'ébranler.
La vieille et jeune garde n'avaient plus alors que
neuf à dix mille baïonnettes et deux mille cavaliers; Davoust et le
premier corps, huit à neuf mille; Ney et le troisième corps, cinq à
six mille; le prince Eugène et l'armée d'Italie, cinq mille;
Poniatowski, huit cents; Junot, les Westphaliens, sept cents;
Latour-Maubourg et le reste de la cavalerie, quinze cents; on
pouvait compter encore mille hommes de cavalerie légère, et cinq
cents cavaliers démontés que l'on était parvenu à réunir.
Cette armée était sortie de Moskou forte de cent
mille combattans; en vingt-cinq jours, elle était réduite à
trente-six mille hommes. Déjà l'artillerie avait perdu trois cent
cinquante canons, et pourtant, ces faibles restes étaient toujours
divisés en huit armées, que surchargeaient soixante mille traîneurs
sans armes, et une longue trainée de canons et de bagages.
On ne sait si ce fut cet embarras d'hommes et de
voitures, ou, ce qui est plus vraisemblable, une fausse sécurité,
qui conduisit l'empereur à mettre un jour d'intervalle entre le
départ de chaque maréchal. Mais enfin lui, Eugène, Davoust et Ney
ne sortirent de Smolensk que successivement. Ney ne devait en
partir que le 16 ou le 17. Il avait l'ordre de faire scier les
tourillons des pièces qu'on abandonnait, de les faire enterrer, de
détruire leurs munitions, de pousser tous les traîneurs devant lui,
et de faire sauter les tours d'enceinte de la ville.
Cependant, Kutusof nous attendait à quelques lieues
de là, et ces restes de corps d'armée ainsi distendus et morcelés,
il allait les faire passer tour à tour par les armes.
CHAPITRE III.
Ce fut le 14 novembre, vers cinq heures du matin, que la colonne impériale sortit enfin de Smolensk. Sa marche était encore décidée, mais morne et taciturne comme la nuit, comme cette nature muette et décolorée au milieu de laquelle elle s'avançait.
Ce silence n'était interrompu que par le retentissement des coups dont on accablait les chevaux, et par des imprécations courtes et violentes, quand les ravins se présentèrent, et que, sur ces pentes de glace, les hommes, les chevaux et les canons roulèrent dans l'obscurité les uns sur les autres. Cette première journée fut de cinq lieues. Il fallut à l'artillerie de la garde vingt-deux heures d'efforts pour les parcourir.
Néanmoins, cette première colonne arriva, sans une grande perte d'hommes, à Korythnia, que dépassa Junot avec son corps d'armée westphalien, réduit à sept cents hommes. Une avant-garde avait été poussée jusqu'à Krasnoé. Des blessés et des hommes débandés étaient même près d'atteindre Liady. Korythnia est à cinq lieues de Smolensk; Krasnoé, à cinq lieues de Korythnia; Liady, à quatre lieues de Krasnoé. De Korythnia à Krasnoé, à deux lieues, à droite, du grand chemin, coule le Borysthène.
C'est à la hauteur de Korythnia qu'une autre route, celle d'Elnia à Krasnoé, se rapproche du grand chemin. Ce jour-là même, elle nous amenait Kutusof: il la couvrait tout entière avec quatre-vingt-dix mille hommes; il côtoyait, il dépassait Napoléon, et, par des chemins qui vont d'une route à l'autre, il envoyait des avant-gardes traverser notre retraite.
L'une, qu'Osterman, dit-on, commandait, parut en même temps que l'empereur vers Korythnia, et fut repoussée.
Une seconde vint se poster, à trois lieues en avant de nous, vers Merlino et Nikoulina, derrière un ravin qui borde le côté gauche de la grande route; et là, embusquée sur le flanc de notre retraite, elle attendait notre passage, c'était Miloradowitch avec vingt mille hommes.
Au même moment, une troisième atteignait Krasnoé, qu'elle surprit pendant la nuit, mais dont elle fut chassée par Sébastiani, qui venait d'y arriver. Enfin, une quatrième, lancée encore plus avant, s'interposa entre Krasnoé et Liady, et enleva, sur la grande route, plusieurs généraux et autres militaires qui marchaient isolément.
En même temps Kutusof, avec le gros de son armée, s'acheminait et s'établissait en arrière de ces avant-gardes et à portée de toutes, s'applaudissant du succès de ses manœuvres, que sa lenteur lui aurait fait manquer sans notre imprévoyance; car ce fut un combat de fautes, où les nôtres ayant été plus graves, nous pensâmes tous périr. Les chos...
Table des matières
- HISTOIRE
- TOME SECOND.
- LIVRE HUITIÈME.
- CHAPITRE II.
- CHAPITRE III.
- CHAPITRE IV.
- CHAPITRE V.
- CHAPITRE VI.
- CHAPITRE VII.
- CHAPITRE VIII.
- CHAPITRE IX.
- CHAPITRE X.
- CHAPITRE XI.
- LIVRE NEUVIÈME.
- CHAPITRE I.
- CHAPITRE II.
- CHAPITRE III.
- CHAPITRE IV.
- CHAPITRE V.
- CHAPITRE VI.
- CHAPITRE VII.
- CHAPITRE VIII.
- CHAPITRE IX.
- CHAPITRE X.
- CHAPITRE XI.
- CHAPITRE XII.
- CHAPITRE XIII.
- CHAPITRE XIV.
- LIVRE DIXIÈME.
- CHAPITRE I.
- CHAPITRE II.
- CHAPITRE III.
- CHAPITRE IV.
- CHAPITRE V.
- CHAPITRE VI.
- CHAPITRE VII.
- CHAPITRE VIII.
- CHAPITRE IX.
- LIVRE ONZIEME.
- CHAPITRE I.
- CHAPITRE II.
- CHAPITRE III.
- CHAPITRE IV.
- CHAPITRE V.
- CHAPITRE VI.
- CHAPITRE VII.
- CHAPITRE VIII.
- CHAPITRE IX.
- CHAPITRE X.
- CHAPITRE XI.
- CHAPITRE XII.
- CHAPITRE XIII.
- LIVRE DOUZIEME.
- CHAPITRE I.
- CHAPITRE II.
- CHAPITRE III.
- CHAPITRE IV.
- CHAPITRE V.
- CHAPITRE VI.
- CHAPITRE VII.
- CHAPITRE VIII.
- CHAPITRE IX.
- CHAPITRE X.
- CHAPITRE XI.
- CHAPITRE XII.
- FIN
- Copyright