Flaubert et les sortilèges de l'image
  1. 197 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub

À propos de ce livre

Realist literature—and Flaubert's novels in particular—imitate literature more than life. Yet the fact that they rewrite not only other literary texts, but also art works, has drawn little attention to date. In addition to (real or imaginary) libraries, these texts involve productively an extensive iconographic repertoire from museums, salons, churches or private collections.

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Informations

Éditeur
De Gruyter
Année
2020
ISBN de l'eBook
9783110658231

Polypes ou coraux : images et savoirs biologiques chez Flaubert

Dr. Bénédicte Percheron
Université de Rouen, histoire, Rue Chantereine 1, 76000, Rouen, France, Normandie
Prof. Dr. Gisèle Séginger
Université Paris-Est Marne-la-Vallée, laboratoire LISAA, Rue Georges-Ville 7, 75016, Paris, France
L’image du polype aquatique, appelé plus couramment corail à notre époque, a retenu l’attention de Flaubert à la fois par ses qualités esthétiques et par sa place dans les théories scientifiques de l’époque. Si Flaubert, lecteur de Chateaubriand, n’adhère pas à l’orientation religieuse du Génie du Christianisme, il a néanmoins été marqué, comme bien des écrivains de sa génération, par une conception de la nature productrice de beautés que l’art peut lui envier. On sait aussi qu’il est attiré – comme Michelet ou Quinet – par l’histoire naturelle de son époque parce qu’elle renouvelle la manière de concevoir la nature et propose de nouvelles hypothèses, qui s’opposent à la conception créationniste et fixiste jusque-là dominante dans le contexte du christianisme. Or, les polypes joueront un rôle dans les nouvelles idées transformistes ou évolutionnistes parce que leur faculté à se régénérer malgré leur organisation rudimentaire et leur forme ambigüe plaident pour une vision continuiste et dynamique du vivant.
L’objectif de cet article est donc d’étudier, dans une perspective épistémocritique, les significations et le pouvoir poétique de cette figure telle qu’elle apparaît chez Flaubert, en montrant comment l’écrivain condense des savoirs différents et fait signe vers les débats de son siècle, grâce au choix d’une image prégnante dans la pensée de l’époque. On verra que la figure du polype est représentative des discours caractéristiques d’une épistémè.

1 Le polype au cœur des débats scientifiques

Le corail a fasciné écrivains et scientifiques par sa capacité à se régénérer, par sa nature incertaine. Dans son Histoire des Animaux, rêvant de la continuité de la nature qui passe par degrés presque insensibles des êtres sans vie aux animaux, Aristote cite des formes intermédiaires dont on ne peut savoir si ce sont des plantes ou des animaux. 1 Déjà évoqués dans l’Antiquité 2 et à la Renaissance, 3 les coraux font encore l’émerveillement des naturalistes au XIXe siècle. 4 Mais tandis qu’ils appartenaient autrefois plutôt aux merveilles presque fantastiques de la nature, à partir du XVIIIe siècle ils sont entrés tout à fait dans la science grâce aux travaux des naturalistes Jean-André Peyssonnel 5 et Abraham Trembley 6 qui sont convaincus de l’origine animale du corail, alors que de nombreux auteurs de l’Antiquité jusqu’au XVIIIe siècle avaient considéré le corail comme une transition entre deux règnes de la nature ou le plaçaient parmi les plantes. 7 C’est seulement au XVIIIe siècle qu’on a fini par comprendre que le corail est l’exosquelette secrété par de petits animaux qu’on décide alors d’appeler « polypes » (ou plus rarement « hydres ») alors que jusque-là le mot « polype » (ou « polypus » en latin) désignait une pieuvre ou un poulpe. 8
La publication des travaux de Trembley, Mémoires pour servir à l’histoire d’un genre de polypes d’eau douce, à bras en forme de cornes (1744), sur l’étonnante vitalité de cette forme vivante, a été suivie d’intenses débats auxquels participèrent philosophes et scientifiques de renom : Charles Bonnet, qui voit le polype comme un état intermédiaire entre le règne animal et le règne végétal (1745), 9 Jussieu, 10 Réaumur, 11 Needham, 12 mais aussi Voltaire, et Diderot 13 qui attribue même à d’Alembert le rêve d’une surhumanité, doté de la puissance vitale du polype. En 1750, Claude Le Cat peut donc écrire : « Deux découvertes rendront principalement notre siècle mémorable dans les siècles à venir : l’électricité et les polypes d’eau douce ». 14
Par leur capacité à se régénérer lorsqu’on les coupe, les polypes semblent dévoiler le pouvoir vital de la matière elle-même. Leur hybridité défie les classifications et suscite des interrogations sur la séparation entre les règnes animal et végétal, sur le rapport entre la vie et la matière, mettant ainsi en cause la sacro-sainte séparation des trois règnes, dont on pensait encore à l’époque classique qu’elle avait été voulue par Dieu. Les polypes seront donc au XIXe siècle au centre des nouvelles réflexions sur le vivant et sur la matière, qui sortent largement du cercle scientifique – comme le cas de Flaubert nous le montrera – parce qu’elles comportent des implications philosophiques et religieuses : on le voit bien dès le XVIIIe siècle lorsque La Mettrie utilise le polype comme un argument en faveur du matérialisme (1748), 15 ce qui lui permet de transférer le pouvoir de Dieu à la nature.
Les polypes ont tout particulièrement intéressé les scientifiques qui théorisent le transformisme, l’évolutionnisme 16 et la génération spontanée. En effet, ils semblent proches de l’origine : ils forment des éponges remarquables et pourtant ils constituent « le plus bas terme de l’animalité », « plus bas encore que la monade », remarquera Félix Pouchet en 1865, dans L’univers. Les infiniment grands et les infiniment petits : ils n’ont pas d’individualité alors que « la Monade est parfaitement circonscrite et douée d’une vive locomotion ». 17 Pouchet (dont il faut rappeler qu’il a été le professeur et l’ami de Flaubert) 18 revient sur une fascination qui était déjà celle du début du siècle, aussi bien chez les scientifiques comme Lamarck, défenseur d’une nouvelle science, la biologie, 19 que chez des écrivains romantiques comme Nodier 20 ou Nerval. 21 Dans la seconde moitié du siècle, les polypes qui construisent des récifs coralliens retiennent l’attention de Lyell 22 et de Darwin. 23 Ils servent d’arguments à une pensée du temps long, indispensable à la formulation des thèses évolutionnistes. Michelet, que Flaubert fréquentera dans les années 1860–1870 a lui-même été fasciné par les polypes « faiseurs de mondes » 24 qui manifestent – dans La Mer (1861) – la puissance vitale de la matière, et il évoque les travaux de Charles Darwin sur les coraux (entre 1839 et 1844) dans La Mer 25 et ceux de Lyell dans La Montagne où il revient encore une fois sur cet être qui le fascine par la résistance qu’il semble opposer à la classification et à la division entre les règnes de la nature : « l’animal-rocher-plante ». 26

2 Le polype : de Pouchet à Flaubert

Le Muséum d’histoire naturelle de Rouen, que Flaubert fréquente dès son plus jeune âge – les familles Flaubert et Pouchet étant liées 27 –, exposait plusieurs polypes qui ressemblaient à de véritables œuvres d’art, par exemple un madrépore en Corymbe « dont la circonférence n’aurait guère pu être mieux tracée par un compas », 28 ou encore la superbe « Coupe de Neptune » (Fig. 1), que Félix Pouchet décrira en 1865, dans L’Univers comme un prodige de la nature : « Cette vraie production monumentale n’est érigée que par des myriades de polypes, frêles animaux ratatinés dans leurs trous et n’en sortant à demi que pour plonger leurs imperceptibles bras dans les flots. » 29
Fig. 1 La Coupe de Neptune. Illustration extraite de Félix Pouchet, L’Univers. Les infiniment grands et les infiniment petits, Paris : Hachette 1868, 2e édition, p. 54.
Les polypiers fascinent par leur plasticité : ce sont « les êtres les plus polymorphes du règne animal », modulables comme de la matière, en « gants de Neptune », « manchons » ou « cierges de mer ». Sans individualité, ils manifestent pourtant une organisation parfaite, si bien qu’ils sont pour Félix Pouchet – contrairement à ce ...

Table des matières

  1. Title Page
  2. Copyright
  3. Contents
  4. Remerciements
  5. Introduction Écrire d’après les arts : le Christ voilé et le cadavre de Mme Bovary
  6. La pensée-ciné : le retour d’Emma
  7. L’Éducation sentimentale et la guerre civile
  8. « J’arrange le château et la forêt de Fontainebleau. Quel travail ! » Le musée imaginaire de Flaubert dans un épisode-clé de L’Éducation sentimentale
  9. Série, événement, hantise. Le portrait du Maréchal Bugeaud dans la structure phantasmatique de LʼÉducation sentimentale
  10. Polypes ou coraux : images et savoirs biologiques chez Flaubert
  11. Odilon Redon et Bouddha – à travers Flaubert, Schopenhauer et Laforgue : Le voir, l’avoir vu – et le renoncement
  12. « La tête coupée et rayonnante de Jean-Baptiste »
  13. « Le plus beau jour de la vie » : la première communion chez Flaubert et James Ensor
  14. Flaubert et les images: Portrait de l’écrivain en iconoclaste
  15. Notice biobibliographique