Annexes
1 – Éléments de féodalité
2 – Titres de la famille Roger de Beaufort
3 – Testament de Jeanne de LAVAL
4 – Lettres patentes de François d'Alençon
5 – Le terrier de 1632 commandé par Richelieu
6 – Inauguration de la statue de Jeanne de Laval, à Beaufort-en-Vallée
Annexe 1
Éléments de féodalité
Extraits du traité des fiefs de M. Claude Pocquet de Livonnière, professeur à la faculté de droit d'Angers, 3ème édition, 1741.
Pour comprendre les coutumes provinciales et en particulier celle de l'Anjou rédigée, pour la première fois en 1437, réformée en 1508, éclaircie peu après par François Maingon, sénéchal de Beaufort, puis au XVIIe siècle, par du Pineau, conseiller au présidial d'Angers.
Des fiefs
Le fief est un héritage ou droit réel assis sur un héritage tenu d'un seigneur à foi et hommage, à la charge de certains devoirs réglés par l'acte d'inféodation ou par la coutume des lieux, et dont le possesseur a, ou peut avoir, sous lui d'autres vassaux ou sujets.
La seigneurie utile ou domaine utile passe au vassal qui peut à son gré et même malgré son seigneur, changer la superficie de son fief, pourvu qu'il ne le rende pas absolument inutile, pour le vendre, l'engager et l'hypothéquer.
Le seigneur est le possesseur du fief dominant. Le vassal est le possesseur du fief servant. Le sujet ou tenancier ou justiciable est celui qui relève « censivement » d'un seigneur ou qui est dans le territoire d'un seigneur justicier.
Différents type de fiefs.
Il y a les fiefs corporels qui consistent en héritages, terres et domaines, servant de fond, de base ou chef-lieu.
Il y a les fiefs incorporels, sans domaine, ne consistant qu'en cens, rentes et droits féodaux, ou en offices et dignités.
Il y a les fiefs de dignité ou nobles qui ennoblissaient ceux qui les possédaient, ou du moins qui les avaient possédés pendant plusieurs générations.
Il y a les fiefs liges. Celui qui doit foi et hommage lige, promet fidélité à son seigneur. En principe, cela ne s'applique que pour le roi de France. Autrement le fief est simple.
Les fiefs peuvent être possédés par des roturiers, mais à condition de payer au trésor un franc-fief, réglé à la valeur du revenu d'une année du fief, payable de 20 ans en 20 ans. Il leur faut aussi servir le Roi dans l'arrière-ban, mais cela se convertit ordinairement en taxe proportionnée à la valeur du fief.
De la foi et hommages
La foi et hommage est la présentation du serment de fidélité que le vassal doit à son seigneur. Elle est due à toute mutation de seigneur et de vassal.
Lorsque la mutation arrive de la part du vassal, celui-ci doit faire la foi et hommage en personne dans les 40 jours, à compter du jour où il est devenu propriétaire du fief servant.
Les « engagistes » du domaine royal ne peuvent recevoir les fois et hommages dus aux fiefs qu'ils possèdent par engagement. Elles doivent être faites au Roi ou à ses officiers préposés à cet effet.
Les princes apanagés peuvent recevoir la foi et hommage, à charge d'envoyer à la Chambre des comptes des copies de factions d'hommage qui leur auraient été faites – les apanages des enfants de France retournent à la couronne à défaut de ligne masculine et ne passent pas aux filles –.
De l'aveu et dénombrement
Le vassal ayant fait la foi et hommage doit donner son aveu et dénombrement, dans les 40 jours suivants. L'aveu est un dénombrement ou une description et une énumération exacte, signée devant deux notaires, de tout ce qui compose le fief servant, tant en domaines qu'en arrière-fief et censives, cens, rentes, servitudes, droits utiles et honorifiques, prééminences et prérogatives faites en détail et par le menu, avec confrontations, par tenants et aboutissants. L'aveu doit être présenté au seigneur dans le lieu ou l'hommage doit être rendu, c'est à dire au chef-lieu et principal manoir du fief.
Il y a usurpation si le vassal déclare dans son aveu un héritage qui ne fait pas partie du domaine de son fief.
Du démembrement des fiefs
Il est défendu de démembrer un fief sans l'accord du seigneur. Les fiefs dépendants des apanages ne peuvent être démembrés et sont de foi inaliénables. Les fiefs de dignité comme les duchés, pairies, comtés et marquisats ne peuvent être démembrés et sont indivisibles.
Des censives
Dans la coutume d'Anjou, il n'y a que la seigneurie féodale – fief et justice ne font qu'un –, mais il y a deux sortes de mouvance ou tenures :
- les héritages qui relèvent à foi et hommage, possédés par des vassaux, sont appelés hommages nobles féodaux ;
- les héritages qui sont possédés par des sujets ou tenanciers et en relèvent censivement ont le nom de censives ou rotures.
La mouvance féodale est plus noble mais bien plus onéreuse que la censive. Ainsi les héritages censifs sont estimés plus que les hommages – un sixième de plus –.
Les héritages peuvent changer de qualité par rapport à la mouvance, suite à des partages, par aliénation volontaire ou par convention.
Le cens est une reconnaissance de l'obéissance et de la sujétion du censitaire et de la supériorité du seigneur. C'est ordinairement une menue redevance qui peut être jointe à une grosse rente, par exemple, s'il est dû un sol de cens et un setier de blé de rente. Il peut être décidé d'un « surcens » à la première continuation du cens. Il peut être jugé que le cens est imprescriptible et la rente peut se prescrire. Le cens doit toujours être payé en espèces.
Des droits de justice
Il n'y a point en Anjou de fief sans justice, ni de justice sans fief.
De droit commun, toutes l'étendue et tout le pouvoir des justices seigneuriales sont renfermées dans les trois degrés de la justice haute, moyenne et basse. Mais en Anjou, les juridictions des châtellenies, des baronnies, vicomtés et comtés ont des pouvoirs plus étendus – art. 43 de la coutume et suivants –.
Des droits de chasse, de garenne, de colombier et d'étang
Après 1669, les seigneurs haut-justiciers peuvent chasser dans toute l'étendue de la haute justice. Tout seigneur du fief peut personnellement aussi chasser dans l'étendue de son fief et tout seigneur peut chasser sur le fief de son vassal.
Les roturiers ne possédant ni fief, seigneurie ou haute-justice ne peuvent chasser de quelque manière que ce soit.
Il est défendu de chasser à certaines périodes dans les terres ensemencées et les vignes.
Pour avoir droit de garennes, il faut avoir un domaine « hommagé » et avoir assez de terres aux environs pour pouvoir nourrir ses lapins, sans qu'ils endommagent les voisins. En coutume d'Anjou, cette quantité de terre est réglée par le vol du chapon qui est de huit vingts pas doublés de cinq pieds chacun, mesuré de tous côtés, entre la garenne et les terres du voisin.
Le droit d'avoir colombier – ou droit de fuye – de pied appartient au seigneur haut-justicier qui a censives, ou au seigneur ayant fief ou censives et 50 arpents de terre en domaine.
Il est permis à quiconque de faire un étang sur son fond, mais la coutume d'Anjou donne le droit particulier au seigneur de fief de prendre contre dédommagement par échange des terres et prés de ses sujets, pour donner à son étang une plus grande étendue, à condition que l'étang commence sur ses propres terres et que la chaussée de l'étang se ferme aux deux bouts sur son domaine.
Des rivières, droits de pêches, péages, travers …
Il y a deux sortes de rivières :
1 – Les rivières dites navigables qui portent bateaux de leur fond, sans artifices et ouvrages de mains, appartiennent au Roi et par conséquent les îles, îlots qui y croissent, le droit d'y pêcher, d' y bâtir moulins, d'y établir des bacs.
Ces rivières sont du domaine de la couronne.
2 – Les rivières non navigables ou qui ne le sont pas par art et par main d'hommes, c'est-à-dire par moyen d'écluses, portes, chaussées, etc. appartiennent au seigneur dans l'étendue de son ressort, lequel y a droit de pêche et autres.
Les droits de péage, « pontonage », travers etc. sur les rivières navigables suivent les mêmes principes.
Des droits de prévôtés
Les droits de prévôté – ou grande coutume –, espèces de droits de traites, appelés ailleurs péages, acquits, travers, n'appartiennent qu'aux seigneurs châtelains ou supérieurs. Ils leur sont dus pour les marchandises qui sont voiturées par des marchands et qui passent au travers du territoire du seigneur.
Les particuliers en sont exempts pour les choses recueillies sur leur fond ou achetées pour leurs besoins personnels. Les nobles, les gens d'églises et les écoliers n'y sont pas assujettis. A noter que les seigneurs qui lèvent ces droits sont tenus de réparation des ponts et chemins.
Nombre de rois depuis Charles VII ont aboli les péages sur la rivière Loire et ses affluents.
Des communes et des usages
Il y a des bois, prés, marais, bruyères et pâtures qui appartiennent à des paroisses et communautés d'habitants, dans lesquels les seigneurs n'ont de droit que comme premiers habitants.
Il y a des communes dont les seigneurs peuvent demander le triage ou distraction du tiers à leur profit. Il y a des bois, prés, marais et bruyères, dont la propriété appartient aux seigneurs et dans lesquels les paroissiens et habitants n'ont que le droit d'usage.
C'est le titre de concession qui fait la différence.
Des fresches ou rentes solidaires
Quand l'héritage du père chargé d'une rente se divise entre les enfants et que chacun d'eux est tenu solidairement de la totalité de la rente, cette rente solidaire est appelée fresche et le débiteur le frescheur, ou le cohéritier en coutume d'Anjou.
Le franc-alleu
Le franc-alleu est un héritage franc et libre de toute sujétion, qui ne relève d'aucun seigneur et est exempt de tous devoirs féodaux. Le franc-alleu ne peut avoir lieu que s'il est justifié par un titre.
Le possesseur d'une terre en franc-alleu est exempt de tous droits féodaux mais reste assujetti à la justice du territoire dans lequel se trouve la terre.
Des banalités
En Anjou, tout seigneur féodal ou bas-justicier peut de plein droit et sans titre particulier, avoir moulin banal et même un four banal, s'il est seigneur d'un bourg en tout ou partie.
La banalité d'un moulin consiste en trois choses :
1 – à contraindre les sujets d'aller moudre au moulin banal ;
2 – à interdire de construire des moulins dans l'étendue de la seigneurie ;
3 – à empêcher les meuniers voisins de chasser dans le territoire du seigneur.
Cela s'entend à condition que le moulin soit en état de faire de bonne farine. Trois sortes de personnes sont exemptes de la banalité du moulin : les ecclésiastiques, les nobles et le propriétaire du fonds hommagé qui y demeure.
Des corvées
Les corvées sont des journées d'hommes, de chevaux, bœufs, charrettes, etc. qui sont dues à certains seigneurs pour l'exploitation de leurs domaines ou pour leur service et utilité.
Quand les corvées sont spécifiées et déterminées, elles doivent être acquittées pour le nombre et la forme marquée dans les titres, sinon elles sont limitées par l'usage ou par le juge.
Des foires et marchés
Les seigneurs ont le grand avantage d'avoir le droit de foires et de marchés. C'est une prérogative de la justice. La coutume d'Anjou attribue ce droit aux châtelains, à l'exclusion des seigneurs justiciers.
Il est judicieux d'obtenir la permission du Roi pour établir une nouvelle foire ou marché en Anjou, dans l'intérêt public. Les seigneurs qui ont droit de foires et marchés peuvent avoir des halles pour l'étalage des marchandises et prendre à leur profit le loyer des bancs publics et étaux où se débitent les marchandises.
Des enfants exposés
La nourriture des enfants exposés – abandonnés dans les lieux publics – est à la charge du seigneur haut-justicier, dans le territoire duquel l'enfant s'est trouvé exposé.
Des notaires et des droits de sceaux
En coutume d'Anjou, le droit de sceaux et de contrats, c'est-à-dire le pouvoir de créer des notaires, est attribué aux seigneurs châtelains et autres supérieurs, à l'exclusion des seigneurs inférieurs.
Annexe 2
Titres de la famille Roger de Beaufort
Lettres patentes de Jean de Normandie en 1342
JEAN fils aîné du Roi de France ; Comte d'Anjou, et du Maine. A nos aimés et feals maitres Jean de Boubon, et Pierre de Prouillé nos Clercs et conseillers, salut. Nous vous demandons et commettons, que vous transportiez en nos Comté d'Anjou et du Maine, et appelé avec vous le Sénéchal d'Anjou, du Maine, ou son lieutenant, mille livres de rente annuelle, par nous données à notre aimé et féal Chevalier Mons. GUILLAUME ROGER, Seigneur de Chambon, frère de notre très saint père le Pape, vous le prisiez et assigniez, en la forme et manière, que donnée les y avons, et l'y en baillez la saisine et possession etc.
Donnée à la Villeneuve S. Andrieu près d'Avignon, sous le scel de notre secret, en l'absence du grant, le 27e jour de Mai, l'an de grâce 1342. Par Monseigneur le Duc en son Conseil I. Verberie.
Lettres patentes de Jean de Normandie en 1344
JEAN aîné fils et Lieutenant du Roy de France, Duc de Normandie, Comte de Poitou, d'Anjou et du Maine. A tous ceux que ces présentes lettres verront, salut. Comme notre très cher et très redouté, Seigneur et nous, par la révérence, honneur et amour de notre très saint père la Pape Clément VI qui est à présent, et aussi pour l'affection que notre dit Seigneur et nous, avons eue et avons de la personne de noble homme Mons. GUILLAUME ROGIER Seigneur de Chambon, frère germain de notre dit saint père, eussions donné et octroyé à iceluy Chevalier, pour lui ses hoirs et successeurs et ceux qui ont ou auront cause de lui perpétuellement et toujours, deux mille livres de rente à tournois, à asseoir, et lesquelles lui ont été baillées et assises sur et au chatel et chatellenie de Beaufort en valée en notre comtée d'Anjou, et en ampliant et accroissant le dit don de notre plus grande libéralité, ayons donné et octroyé au dit Chevalier, ses hoirs et ceux qui de lui auront cause perpétuellement et toujours, tout le demeurant des dits chatel et chatellenie, outre les dites deux mil livres de terres, en quelconques choses que ce soit, par la manière et les exceptions contenues en nos lettres faites sur ce : et outre ce, en accroissant notre dite grâce, ayons donné au dit Chevalier, à ses hoirs et successeurs, qui auront cause de lui noblesse et dignité de Vicomte, et les dites chatel et chatellenie, avons fait Vicontée et élevée en dignité de Viconté à toujours mais, si comme es lettres aussi sur ce fait est plus à plain contenu etc. Et pour que ce soit chose ferme et fiable à toujours, nous avons fai...