La Cordelière de Portzmoguer - Corsaire du Pays d'Iroise

Georges Kévorkian

• Éditeur: Books on Demand
• Année: 2019
• Imprimer l'ISBN: 9782322134168
• ISBN de l'eBook: 9782322153824
• Édition: 1
• Sujet: Histoire
• Sujet: Histoire du monde

Débouchant en mer d'Iroise, l'armada anglaise de l'amiral Edward Howard attaque les navires franco-bretons, de la Duchesse Anne de Bretagne, commandés par le valeureux capitaine Hervé de Portzmoguer, à bord de la Cordelière, venant du port de Brest. En fin de bataille, une formidable explosion dans le ventre de la Cordelière détruit la caraque bretonne et le navire anglais Regent, tous deux enlacés et liés par des grappins.

1 – Un peu d’histoire (voir en annexe 2 : chronologie)

1.1 - Les liens par le mariage

Le jour de sa mort, le 30 août 1483, le roi de France de la dynastie capétienne, Louis XI (1423-1483) confie la tutelle de son fils Charles VIII (1470-1498), âgé de 13 ans, et le gouvernement de la France, à sa fille ainée Anne de Beaujeu, appelée aussi Anne de France (1461-1522). D’abord fiancé, en 1483, à Marguerite d’Autriche, petite fille de Charles le Téméraire² (1433-1477), Charles VIII, âgé de 21 ans, épouse, en 1491, Anne de Bretagne (1477-1514), âgée de 14 ans passés, l’héritière du duché de Bretagne à la mort de son père, François II, Duc de Bretagne, le 9 septembre 1488. Anne de Bretagne, elle-même, a du faire annuler son précédent mariage avec Maximilien de Habsbourg, futur empereur d’Allemagne. Cette union de Charles et d’Anne, voulue et soutenue par Anne de Beaujeu, vaudra au royaume de France un processus d’annexion du duché de la Bretagne.

Anne de Bretagne (source internet)

Charles VIII sera le septième et dernier roi de la succession directe de la branche des Valois de la dynastie capétienne.

C’est alors que Louis XII (1462-1515), de la branche d’Orléans succède, en 1498, à son cousin, Charles VIII, qui, dénué d’héritier, meurt accidentellement le 8 avril 1598. Bien que marié à Jeanne de France (fille de Louis XI, au physique ingrat et qui plus est, infirme, d’après certains écrits d’historiens) qu’il va répudier avec l’accord du pape Alexandre VI³, Louis XII épouse, en 1499, en secondes noces, Anne de Bretagne, alors âgée de 22 ans, veuve du précédent roi (un contrat de son mariage précédent ne prévoyait-il pas que si le roi décédait sans laisser de fils, « sa veuve ne pourrait épouser que son successeur » !).

Louis XII (source internet)

Toutefois, la Duchesse de Bretagne veille à maintenir, durant son règne, son duché indépendant, en conservant son administration. La Bretagne sera définitivement attachée à la France en 1532, sous François 1^er, (1494-1547) sacré roi de France en janvier 1515, après avoir épousé, le 18 mai 1514, Claude de France (1499-1524), fille d’Anne et de Louis XII⁴

Disons qu’Anne de Bretagne, morte, le 9 janvier1514, est donc feu la belle-mère de François 1^er. Neuf mois⁵ après sa mort, Louis XII se remarie avec Marie d’Angleterre, soeur d’Henri VIII, affermant, par cet acte, la réconciliation avec l’Angleterre. Mais, malade, il s’éteint dans la nuit du 31 décembre 1514 au 1^er janvier 1515. Commence alors le règne de François 1^er qui va durer 32 ans.

1.2 - Les guerres

Charles VIII revendique le royaume de Naples en tant qu’héritier de la maison d’Anjou. De 1494 à 1495, il se lance dans des guerres d’Italie, conquiert puis perd le royaume de Naples. Louis XII poursuit ces guerres. Il conquiert le Duché de Milan (1499-1500) et va échouer dans sa tentative de conquérir, à son tour, le royaume de Naples (1501-1505). En 1512, il perd le Milanais.

En résumé, les guerres menées par Louis XII sont marquées par des désastres subis en Italie, face aux puissances maritimes italiennes (Gêne et Venise). Cependant, un chef d’escadre français, Prégent de Bidoux (1468-1528), chevalier de Saint-Jean de Jérusalem en 1505, se distingue en participant à la défense de Gaète (Gaèta en italien, ville proche de Naples) en gagnant, le 19 juillet 1510, une belle bataille navale près de Gênes, qui néanmoins tombera le 26 août 1514. Dès 1511, une Sainte ligue s’est formée à nouveau contre la France, comme auparavant contre Charles VIII, regroupant tous les Etats italiens, à laquelle se joignent Henri VIII, le roi d’Angleterre (qui règne depuis 1509 en succédant à son père Henri VII), Maximilien, l’empereur d’Allemagne (intronisé depuis 1493 à la mort de son père, l’empereur Frédéric III) et les Suisses mercenaires.

La guerre s’engage en Manche face à l’escadre anglaise venant approcher les rivages français de l’Ouest de la France. Prégent de Bidoux, au printemps de 1513, quitte les côtes de Gênes, entre en Atlantique en passant par Gibraltar, et arrive avec ses galères méditerranéennes devant les côtes bretonnes. Il va alors mettre en déroute la flotte anglaise de l’amiral Howard, envoyé par Henri VIII en approche des côtes de Normandie et de Bretagne, et qui était sur le point d’attaquer Brest.

Carte ancienne de la pointe de la Bretagne –
Rade de Brest et pointe Saint-Mathieu-
(source : Gallica/Bibliothèque nationale – Domaine public)

La bataille a lieu en vue du Conquet (à proximité de la pointe Saint-Mathieu en Finistère et de la plage des Blancs Sablons).

L’amiral anglais, en se jetant contre la galère de Bidoux, est tué, entraînant la disparition des neuf dixièmes de son équipage.

Le roi d’Ecosse, Jacques IV, fidèle allié de la France, de son côté, est vaincu et tué à Flowden-fields (ou « Flodden Field » : nord de l’Angleterre), le 8 septembre de cette même année, provoquant l’arrêt des hostilités. Ainsi, le 7 août 1514, la paix est signée à Londres entre le roi d’Angleterre et les Français ; le mariage de Louis XII avec Marie d’Angleterre scelle cet accord.

…….

Revenons en arrière, car la flotte anglaise de l’amiral Howard s’est déjà manifestée, l’année précédente, dans une bataille navale face à une escadre franco-bretonne, également à l’entrée du goulet de Brest ; bataille où il est question d’un navire armé en Bretagne et commandé par Hervé de Portzmoguer : la Cordelière.

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²Rappelons que Louis XI s’est opposé aux ambitions de son cousin Charles le Téméraire, Duc de Bourgogne. A la mort de ce dernier, en 1477, Louis XI étendra son pouvoir en récupérant la Bourgogne et la Picardie, alors que les autres possessions de Charles Le Téméraire seront octroyées aux Habsbourg par sa fille Marie.

³ Le document du pape autorisant le mariage de Louis XII avec Anne de Bretagne est apporté au roi par César Borgia, le fils d’Alexandre VI (source : « Histoire de Bretagne »).

⁴ Anne de Bretagne donnera naissance à de nombreux enfants, fruits de ses deux mariages, mais beaucoup ne survivront pas. De son premier mariage avec Charles VIII, Anne eut 4 enfants, aucun ne survécut. De son deuxième mariage, seules deux filles survivront de ses huit grossesses : Claude de France (1499-1524) et Renée de France (1510-1575). En 1501, Claude de France, âgée de 2 ans est « fiancée », avec la Bretagne pour dot, à Charles de Luxembourg, futur Charles-Quint, lui-même âgé de un an. Mais ce projet ne verra pas le jour. Car Louis XII se rallie aux états généraux de Tours de 1506 lui demandant de marier sa fille à « l’héritier présomptif du trône ».

⁵ Pourquoi neuf mois : faut-il y voir une signification particulière ?

2 - La Cordelière

L’incendie de la Cordelière
(Bibliothèque de France)

2.1 - La construction de Marie la Cordelière

Maquette de la Cordelière, face à la mer d’Iroise

Charles VIII qui a des visées sur le royaume de Naples a besoin que sa marine se renforce pour livrer bataille en méditerranée. C’est le Duché de Bretagne qui va lui fournir les navires de combat dont il a besoin, grâce au soutien de son épouse Anne.

Les chantiers de constructions navales de Bretagne sont mis à contribution. Celui de l’anse du Dourduff, sur le bras de mer entre Carantec et Morlaix (Finistère), va lancer une magnifique caraque de 1.000 tonneaux (peut-être pas plus de 700 tonneaux ? – selon certains historiens), de 120 pieds de long, 40 pieds de large et 20 pieds de tirants d’eau, avec deux mâts principaux, le mât de misaine et le grand mât portant chacun trois voiles carrées, munie de deux « châteaux », l’un à l’avant, d’un étage, l’autre à l’arrière, de deux étages ; armé de seize pièces de gros calibre, huit de chaque bord tirant des boulets de métal par des sabords percés dans la coque, de quatorze bombardes à roues tirant des boulets de pierre, et de nombreuses petites pièces d’artillerie légère, disposées un peu partout.

Ce bâtiment porte le nom de Nef de Morlaix, appelé également la Mareschalle, mais aussi Nef de la Reine par l’implication de la reine Ann...

Table des matières

• Du même auteur
• Remerciements
• Sommaire
• Introduction
• 1 – Un peu d’histoire
• 2 – La Cordelière
• 3 – Le récit « imaginaire » d’une rescapée du naufrage
• 4 – La gloire pour Hervé de Portzmoguer
• 5 - Questions sur la date du combat naval de la Cordelière devant Saint-Mathieu et sur son caractère légendaire
• 6 – Conclusion
• Les annexes
• Page de copyright