Prévenir l'islamophobie et la fanatisation islamiste

Elie Saad

• Éditeur: Books on Demand
• Année: 2017
• Imprimer l'ISBN: 9782322100057
• ISBN de l'eBook: 9782322124077
• Édition: 1
• Sujet: Théologie et religion
• Sujet: Religion

La violence au nom de la religion cherche à faire peur. Analyser, comprendre et prévenir cette culture du chaos et de la mort est une nécessité sociale. Ce recueil aide à diffuser les idées qui permettent de lutter contre l'islamophobie, véritable fond de commerce de la pensée intégriste, et cherche à déconstruire le processus de la fanatisation islamiste. Ce livre s'adresse à tous ceux qui souhaitent rayonner une culture de la vie face à la théologie du chaos, dans le respect des croyances et de la liberté de conscience.

I- ISLAMOPHOBIE,
FANATISATION ET
VIOLENCE

PEUR DE L’ISLAM ?

OBJECTIF : Comprendre la différence entre croyances
religieuses et projet politique

Contexte : Lyon, juillet 2006. Antoine, chrétien libanais, est invité dans la famille de son associé Olivier. Ce dernier lui fait part de sa peur à la lecture d’un article qui concerne l’islam.

Chez Alexia et Olivier, le repas continuait tranquillement. La discussion s'engagea sur l'islam en Europe. Olivier dit avoir lu récemment un article qui lui faisait peur.

– L'auteur parle de la dimension politique de l'islam que les Occidentaux ont du mal à saisir. Il explique la division du monde selon l'islam en deux catégories ou dyar : dar al-harb ou « maison de la guerre » et dar al-islam ou « maison de l'islam ». Et selon cette théorie, les musulmans qui sont dans des pays non-musulmans sont dans dar al-harb et ont le devoir de transformer cette terre en dar al-islam.

Antoine écoutait en tournant son verre entre ses doigts et Olivier développait l'article.

– Selon les démographes, si le taux de fécondité chez les Françaises musulmanes se maintenait, l'islam serait la première communauté en France voire en Europe d'ici 2075. Par conséquent, tous les fondements sociopolitiques de l'Occident, comme la laïcité, la démocratie, les droits de l'homme, la responsabilité citoyenne et la liberté religieuse, seraient, peut-être, remis en question. Un communautarisme croissant pèserait progressivement dans les décisions politiques, juridiques économiques et sociales en faveur de l'islam. Actuellement, beaucoup de pays musulmans sont sujets aux conflits internes, quand ils ne sont pas en guerre avec d'autres pays. Ils n'offrent pas de modèle de gouvernement démocratique et ils ne servent pas d'exemple de respect des droits de l'homme et des libertés religieuses…

Un tel discours ne laissait pas Antoine insensible. Il faisait écho à ses anciennes peurs. Il en voyait le risque et comprenait la crainte d'Olivier. Mais si, aujourd'hui, il avait pu dépasser ses peurs, c'est parce qu'il percevait un autre visage de l'islam à travers la famille Salloum très éloignée de ces préoccupations démographiques ou politiques. Les discussions qu'il avait eues avec des musulmans avaient fortement renforcé et approfondi sa foi chrétienne.

– C’est vrai, aujourd’hui en Europe, on ne connaît pas forcément l'islam et on n'approfondit pas assez la foi chrétienne qui a marqué l’histoire de l’Occident voire l’a déterminée. Quand tu ne te connais pas assez, et que tu ne connais pas non plus celui qui est en face de toi, ni comment chacun va évoluer dans le temps, surgit nécessairement l'inconnu qui fait peur. Mais quand tu sais qui tu es et que tu t'intéresses à l'autre, les choses seront différentes. Tu pourras transformer la crise en chance.

Silence chargé de réserves face à l’irruption inhabituelle de la foi dans ce sujet politique.

Un chrétien libanais peut sentir davantage les problèmes des minorités au Moyen Orient. Olivier aimerait savoir comment des pays entièrement chrétiens au septième siècle sont devenus entièrement musulmans aujourd'hui.

– L'histoire des pays islamisés ne se résume pas en quelques mots, répondit Antoine en posant son verre. Ce serait imprécis. De même, pour les motivations ou les contraintes qui ont poussé certains peuples du pourtour méditerranéen à changer de religion. Est-ce la peur ? Le statut social des non-musulmans ? Les impôts ? Le désir d’être de la même religion que le conquérant ? Le manque de profondeur dans les croyances religieuses ?...

Type de raisonnement énervant pour Olivier qui rétorqua :

– Mais ce processus peut se reproduire en Europe aujourd'hui par le changement démographique ! Non ?

Insistance et inquiétude.

– Olivier, penses-tu vraiment que, pour construire dar al-islam en Europe, les musulmans français ou européens sont prêts à changer, détruire et sacrifier les fondements des sociétés occidentales qui leur ont permis de s'installer, de devenir citoyens et de bénéficier d'organisations socio-économiques bien développées ?

Silence et regard dubitatif d’Olivier. Puis, Antoine poursuivit.

– Crois-tu personnellement qu'ils ont réellement le désir de reproduire des structures politiques, économiques et sociales identiques à celles de leurs pays d'origine qui sont des « maisons de l'islam » mais qu'ils ont quittées voire fuies à cause des guerres, des injustices, du manque de libertés, de la corruption ou de la pauvreté ?

– Je ne sais pas ! Mais cela rejoint aussi des peurs que je ne suis pas le seul à exprimer ! Les vidéos de conversion à l'islam fanatique de certains européens montrent bel et bien un islam actif en Europe et qui refuse les valeurs occidentales. On n’est plus dans le schéma d’immigration économique ou de demande d’asile politique qui sont des devoirs de solidarité entre les humains, mais dans celui de la transformation active de l’Europe par l’islam.

*

Antoine avait entendu parler dans sa jeunesse du Père Afif Osseiran (1919-1988). Il était d'une famille libanaise musulmane bien connue et qui avait un rôle politique important. Et Afif était devenu un religieux chrétien. Il connaissait également Ahmad Farès al-Chidiac (1804-1887), un journaliste et romancier chrétien qui était devenu musulman. Tout cela correspondait au cheminement spirituel de chacun. Il n'avait jamais entendu de propagande à ce sujet pour monter qu'une religion progressait plus que l'autre ou attirait plus d'adeptes.

Les vidéos de conversion d’occidentaux à l'islam montraient une nouveauté par rapport à ce qu'il avait connu au Liban. Produites par des islamistes, elles leur servaient de vecteur de propagande, d’outil de pression sur les nouveaux convertis pour qu'ils prouvent sans cesse leur foi. Elles constituaient un catalyseur qui poussait à un prosélytisme très actif, au maintien de la rupture avec le milieu familial..., et surtout un frein qui bloquait tout retour en arrière en matière de foi sous peine de châtiment pour les apostats.

Antoine comprenait l'inquiétude d'Olivier, mais ce que montraient les vidéos sur les sites des islamistes n'était pas forcement la réalité mais de la propagande.

– Les conversions des musulmans existent aussi, dit-il. Il y a ceux qui deviennent agnostiques, comme ceux qui rejoignent d'autres religions. Ils sont également très nombreux dans ce sens.

– Mais pourquoi ne les voit-on pas sur des vidéos ? interrogea Olivier.

– Tout simplement parce que la conversion est une histoire de foi, de liberté de conscience et non de propagande pour chauffer les esprits. L'islam fanatique utilise ces vidéos pour avoir le soutien financier de quelques fondations musulmanes. Ainsi il fait parler de lui au détriment des musulmans modérés.

– Mais cela me fait peur !

– Justement, la peur est un piège. L'auteur de l'article que tu as lu, me semble-t-il, a peut-être peur de l'islam et s'interroge, d'une part, sur les liens entre l'islam et la politique, et, d'autre part, sur les liens entre les musulmans d'Europe et ceux des autres pays musulmans. Mais tant que l'on a peur de l'islam, on ne peut pas avoir un regard objectif sur son impact social, et on fait le lit des idées des islamistes.

– Le risque est réel et la peur est humaine.

– D'accord. Mais quelle est la solution ?

Olivier regarda Alexia comme s'il cherchait de l'aide. « Oui, quelle est la solution ? » se demandait-il. Devant ce silence instantané au milieu de la discussion, Antoine prit une gorgée de vin et continua.

– Alors, Olivier, quelle est la solution ?

– J'avoue que je ne sais pas trop !

– C'est vrai que l'on n'a pas de solution miracle mais le dénouement ne peut pas être du même niveau que l'inquiétude. Les islamistes savent bien se servir de la peur pour recruter des musulmans qui se sentent victimes de l’islamophobie. Ainsi, ils développent des sentiments bipolaires : de frustration et d'injustice, d'un côté, de supériorité et d’avoir droit, de l'autre.

Petit sourire ironique de désaccord.

– Tu me les montres comme de fins psychologues qui influencent la vie des autres !

– Non, des manipulateurs qui maîtrisent bien leur jeu qui n'appartient pas forcément au registre religieux.

Antoine raconta.

« J'étais dans le bus et à côté de moi, il y avait deux hommes qui parlaient arabe. Visiblement l'un d'eux avait été débouté d'un emploi. « Ces mécréants t'ont refusé le travail car tu es musulman et l'islam leur fait peur. Or l'islam est salam, (paix) et toi tu n'as jamais fait mal à une mouche. Qu'Allah te fasse justice ! », disait l'un sur un ton de colère. Puis ils ont changé de discussions et ils en sont venus à la politique. Le même a repris en riant : « Tu vois comment les frangins en Afghanistan fichent la trouille aux Américains et à leur alliés. Nous les écraserons avec l'aide d'Allah !

« Ils n'avaient aucun signe distinctif pour dire qu'ils étaient islamistes, ajouta-t-il. Mais la teneur du discours ne trompe personne. Rien qu'avec ces deux exemples concrets et quotidiens, sur le travail et le commentaire de l'actualité, on voit combien les islamistes savent exploiter les registres de l'irrationnel et de la peur. Ils savent susciter des comportements irréfléchis qui peuvent faire peur par la brutalité de leurs réactions… »

Olivier renchérit.

– J’ai encore plus peur maintenant des musulmans !

– Non, l'islam, les islamistes et les musulmans ne sont pas des réalités identiques. Personnellement, l'islam ne me fait pas peur. Mais il faudra aider les musulmans à éviter les pièges des projets politiques des islamistes en développant le recours à la raison et au sens critique.

– J'avoue que c'est une question complexe, intervint Alexia. J'ai peur que les musulmans ne s'adaptent pas aux sociétés laïques où la législation vient du peuple et non des principes religieux !

*

Antoine tentait de sortir du discours de la peur, mais ne trouvait pas de solution. La peur est mauvaise conseillère. Ses références religieuses le lui rappelaient. L'évangile de Matthieu commence par le message de l'Ange à Joseph : « N'aie pas peur… ». Jésus l'avait dit. Le pape Jean-Paul II l'avait martelé. Pour lui, ne pas céder à la peur est donc l'attitude de base pour comprendre l’autre et bien analyser la réalité… Aucune formulation n'était satisfaisante. Il décida finalement de dérouler le scénario qui faisait peur à Olivier et de le questionner là-dessus. Il posa son couvert et argumenta.

– Supposons que l'islam soit devenu majoritaire en France en 2075 et qu'il souhaite organiser un référendum sur le choix de la Charia comme référence légale. Penses-tu qu'en matière d'héritage, les femmes musulmanes françaises iraient choisir la Charia qui leur donne la moitié d'un héritage ou la loi française qui traite à égalité les hommes et femmes ? De même pour la liberté d'expression ? La liberté de conscience ? L'esprit critique ? Le divorce ? La garde des enfants ? La polygamie ? Le châtiment corporel ? La valeur de témoignage d'une femme ? ...

Un petit temps de réflexion.

– J'avoue que c'est impossible d'en arriver là, car il y a d'autres religions et des non-croyants aussi ! reprit Alexia. Mais tout de même, cela fait peur aujourd'hui de voir que certaines femmes musulmanes...

Table des matières

• Dédicace
• Sommaire
• OBJECTIF ET METHODE
• AVANT-PROPOS
• I. ISLAMOPHOBIE, FANATISATION ET VIOLENCE
• II. LE FAIT RELIGIEUX : NOUVELLE APPROCHE EN LIEN AVEC L’ACTUALITE
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