LE FONDEMENT DE LA CERTITUDE DU SALUT
La certitude du salut se fonde sur l’œuvre de rédemption accomplie par le Christ en faveur du monde entier, en vertu de laquelle Dieu a acquitté l’humanité entière de tous ses péchés et l’a objectivement justifiée. Cette rédemption et ses fruits sont présentés et offerts à tous les hommes dans l'Évangile et les sacrements. Tout croyant en devient effectivement participant par la foi.
La certitude du salut, – et il faut en remercier Dieu, car malheur à nous s'il n'en était pas ainsi ! -- n'a absolument aucun fondement en nous-mêmes, ni dans notre foi, ni dans notre piété, ni dans nos sentiments, si fervents soient-ils, ni dans nos œuvres chrétiennes. Elle réside exclusivement en Christ et en ce qu’il a fait. La Bible nous présente Jésus-Christ comme le centre de l’Évangile, l’unique fondement du salut et de l’Église. Nous ne faisons pas de jeu de mots, en disant que nous sommes sauvés non parce que nous croyons, mais parce que le Christ nous a rachetés. La foi, indispensable au salut, n’est que le moyen de s’approprier ce que Jésus-Christ a fait pour nous. L’Écriture Sainte affirme :
« Ainsi parle le Seigneur, l'Éternel : Voici, j’ai mis pour fondement en Sion une pierre, une pierre éprouvée, une pierre angulaire de prix, solidement posée » (Esaïe 28 : 16).
Cette affirmation constitue une phrase-clé dans le message des apôtres. Ceux-ci ont, en effet, la conviction qu'elle s’est réalisée en Christ et en son œuvre rédemptrice. Paul la cite dans un texte où il s’en prend à l’incrédulité du peuple d'Israël qui a rejeté celui qui était venu le sauver :
« Ils se sont heurtés contre la pierre d’achoppement, selon qu’il est écrit : Voici, je mets en Sion une pierre d’achoppement et un rocher de scandale, et celui qui croit en lui ne sera pas confus » (Romains 9: 32-33).
Pierre écrit de son côté :
« Vous-mêmes, comme des pierres vivantes, édifiez-vous pour former une maison spirituelle, un saint sacerdoce, afin d’offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu, par Jésus-Christ. Car il est dit dans l’Écriture : Voici, je mets en Sion une pierre angulaire, choisie, précieuse ; et celui qui croit en elle ne sera pas confus » (1 Pierre 2 : 5-6).
Tout le monde connaît cette phrase capitale de l’apôtre des Gentils :
« Personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ » (1 Corinthiens 3 : 11).
Mais la Bible nous dit aussi pourquoi et en quoi Jésus est le fondement du salut, et donc de la certitude du salut. Le même apôtre écrit :
« Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même » (2 Corinthiens 5 : 19).
« Celui qui n’a pas connu le péché, Dieu l’a fait devenir péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice de Dieu » (2 Corinthiens 5 : 21).
De nombreux autres textes viennent confirmer cette vérité :
« Voici l’agneau de Dieu qui ôte le péché du monde » (Jean 1 : 29).
« Il a porté nos souffrances, il s’est chargé de nos douleurs ; et nous l’avons considéré comme puni, frappé de Dieu et humilié. Mais il était blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris... L'Éternel l’a frappé pour l’iniquité de nous tous » (Esaïe 53 : 4-6).
« Il est lui-même une victime expiatoire pour nos péchés, non seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux du monde entier » (1 Jean 2 : 2).
« Il y a un seul Dieu et aussi un seul médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ homme, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous » (1 Timothée 2 : 5-6).
« C’est une parole certaine et entièrement digne d’être reçue, que Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs » (1 Timothée 1 : 15).
« Le Fils de l'homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu » (Luc 12 : 10).
Ce qui importe dans ces textes, ce n'est pas de constater que Jésus est le Sauveur des croyants, mais qu'il a réellement sauvé les hommes du monde entier. Ce sont les péchés de tous les hommes qu'il a portés et expiés sur la croix. C'est pour tous les hommes qu'il a répandu son sang innocent et précieux. En mourant sur la croix, il a satisfait aux saintes exigences de la justice divine, apaisé la colère de son Père et anéanti ce qui faisait de tout homme un ennemi de Dieu, ce qui creuse un profond fossé entre le Créateur et sa créature et voue celle-ci à la réprobation et la damnation éternelles. Dieu est objectivement réconcilié avec tout pécheur. Tout a été accompli pour que tout pécheur, fût-il le plus grand, puisse s'approcher de lui et trouver grâce. Pierre va jusqu'à dire que des hommes, en « reniant le maître qui les a rachetés, attireront sur eux une ruine soudaine » (2 Pierre 2 : 1) C'est donc que Jésus est aussi le Rédempteur de ceux qui périront à cause de leur incrédulité.
D'autre part, la rédemption ou réconciliation opérée par Jésus est parfaite. Jésus a effectivement et totalement racheté les hommes du monde entier, accomplissant tout ce qui était requis pour leur salut. L'homme n'a absolument rien à faire pour se réconcilier avec son Créateur. La réconciliation n'est plus à faire, mais elle est faite. Quand le pécheur se convertit à Dieu, il ne se réconcilie pas avec lui, mais accepte d'un cœur croyant et heureux la réconciliation que le Christ a réalisée pour lui dans sa vie et sa mort, et dont les bienfaits lui sont annoncés par l'Évangile. Paul écrit :
« Nous estimons que, si un seul est mort pour tous, tous sont donc morts » (2 Corinthiens 5 : 14).
Et quand le même apôtre parle du pardon ou de la justification, il prend bien soin de montrer que l'un et l'autre remontent à Jésus-Christ et se fondent sur son œuvre sur la croix :
« Il a effacé l'acte dont les ordonnances nous condamnaient et qui subsistait contre nous, et il l'a détruit en le clouant à la croix » (Colossiens 2 : 14).
« Tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu, et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ » (Romains 3 : 23-24).
« Christ nous a rachetés de la malédiction de la Loi, étant devenu malédiction pour nous, car il est écrit : Maudit est quiconque est pendu au bois ! » (Galates 3 : 13).
L'acte d'accusation sur lequel étaient enregistrés nos péchés, n'est pas détruit par notre repentance ou notre foi ; il l'est depuis longtemps, depuis l'instant où le Christ a satisfait à la justice divine et expié notre culpabilité. Le croyant n'est pas justifié parce qu'il croit, mais parce qu'il a un Sauveur qui s'est laissé châtier pour lui. Ce n'est pas par la foi, mais « par ses meurtrissures que nous sommes guéris » (Esaïe 53 : 5).
L'Écriture Sainte ne se contente pas d'affirmer que le Christ est mort pour le monde et qu'il a expié les péchés de l'humanité. L'Évangile contient encore une affirmation beaucoup plus précise : il proclame la sentence de grâce, l’acquittement universel que Dieu a prononcé sur l'humanité entière. C'est ce qu'on appelle la justification objective. Quand le Christ est mort sur la croix, il a déclaré justes les hommes du monde entier. C'est là la véritable signification de sa résurrection. Elle constitue la preuve visible de la justification ou absolution de tous les hommes. Jésus a expié nos péchés, et sa résurrection glorieuse est, de la part de Dieu, l'affirmation souveraine qu'il est effectivement réconcilié, que le sacrifice de son Fils fut suffisant et parfait, que la justice et le salut sont là pour tous. C'est pourquoi il est écrit :
« Christ a été livré à cause de nos offenses, et est ressuscité à cause de notre justification » (Romains 4 : 25) Signalons que la traduction de Segond : « pour nos offenses... pour notre justification » est incorrecte).
« Ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice, la justification qui donne la vie s’étend à tous les hommes. Car, comme par la désobéissance d'un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l’obéissance d'un seul beaucoup seront rendus justes » (Romains 5 : 18-19).
Saint Paul n'affirme pas simplement que tous les hommes peuvent ou pourraient trouver en Jésus la justification et la vie, mais que tous, ayant été condamnés par la désobéissance d'Adam, sont réellement justifiés par le Christ. La justification qui donne la vie a été proclamée à Golgotha en faveur de l'humanité tout entière. Beaucoup de théologiens soutiennent que dans ce texte « tous les hommes » signifie « tous les croyants », car Paul lie la justification à la foi et enseigne clairement que c'est par elle que le pécheur est justifié. Mais c'est confondre la justification objective et la justification subjective. En fait, Paul ne mentionne pas la foi dans le texte que nous venons de citer, mais se contente de montrer dans un saisissant parallèle entre Adam et le Christ que, de même que le péché d'Adam a précipité l'humanité tout entière sous la condamnation de la Loi, de même l'œuvre du Christ sur la croix apporte à cette même humanité tout entière l'absolution ou la justification. « L'homme est justifié par la foi » signifie simplement que par elle il se fait offrir, reçoit ou obtient l'absolution ou la justification réalisée à Golgotha. Paul affirme la même vérité, mais négativement, quand il écrit aux Corinthiens :
« Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, en n'imputant point aux hommes leurs offenses" (2 Corinthiens 5 : 19).
Quand son Fils mourut sur la croix, Dieu lui imputa les péchés du monde entier, pour qu'il les expiât. Par là même, il a renoncé à les imputer à ceux qui les ont commis. Non-imputation des péchés et imputation de la justice du Christ sont deux termes synonymes ; ils désignent un acte unique par lequel Dieu a déclaré l'humanité libre de tout péché et participante de la justice de Jésus. Il est vrai que nous affirmons, conformément à la Bible, que l'homme est justifié par la foi, mais cette justification par la foi n'est possible que parce qu'il existe, antérieurement à la foi, une justification ou réconciliation objective de tous les hommes, un pardon et un salut qui sont là pour chacun d'eux. Nier cela revient à affirmer que la justification du pécheur est réalisée par la foi, qu'elle se fonde sur elle, ce qui n'est pas seulement contraire à l'Ecriture, mais constitue une doctrine dangereuse. Il est faux de dire que le pardon devient possible par la foi. Non, le pardon est là ; il a été rendu non seulement possible, mais réel par Jésus et son sacrifice sur la croix. La foi a pour seul effet de se l'approprier.
Il va de soi que tous ceux qui amputent d'une façon ou d'une autre l'œuvre rédemptrice du Christ, ébranlent ou détruisent le fondement objectif de la certitude du salut et obligent le croyant à chercher pour sa certitude du salut un fondement subjectif, foi, sentiments ou œuvres. C'est le cas lorsqu'on soutient que l'œuvre rédemptrice du Christ n'est pas suffisante pour le salut, qu'elle ne procure pas à elle seule tout ce qui est nécessaire pour que le pécheur soit sauvé, ou lorsqu'on affirme que cette œuvre est en soi suffisante, mais qu'elle ne concerne pas tous les hommes, que le Christ n'a pas réconcilié avec Dieu et racheté l'humanité entière. Nous reviendrons là-dessus par la suite.
L'œuvre rédemptrice de Jésus et ses bienfaits salutaires ne nous sont connus que par l'Évangile. C'est lui qui proclame aux hommes que Jésus a expié leurs péchés et leur a acquis le salut. Mais l'Évangile fait plus que proclamer le pardon et le salut : il offre ces trésors à tous ceux qui l'entendent et les invite tous à les accepter par la foi. L'Évangile est plus qu'un moyen d'information sur ce qu'a fait Jésus : il est promesse, promesse universelle et gratuite. C'est pourquoi la certitude chrétienne du salut a pour fondement ce que l'Évangile promet aux hommes pour l'amour du Christ.
L'Évangile est bonne nouvelle, la proclamation de ce que Jésus a acquis aux hommes et qu'ils sont invités à recevoir avec foi, l'annonce qu'il a accompli l'œuvre d'obéissance parfaite que nous aurions dû accomplir, et qu'il a ainsi satisfait aux exigences de son Père, ce dont sa résurrection est la preuve visible. L'Évangile annonce que Dieu a fait la paix avec les hommes et les invite à se laisser offrir ce que Jésus leur a mérité. Or, les promesses de l'Évangile sont aussi générales et universelles que l'œuvre rédemptrice du Christ. Elles s'adressent à tout homme, lui proposant personnellement le pardon des péchés et la vie éternelle :
« Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle... Celui qui croit en lui n’est point jugé, mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu... Celui qui croit au Fils a la vie éternelle ; celui qui ne croit pas auFils ne verra pas la vie, mais la colère de Dieu demeure sur lui » (Jean 3 : 16, 18, 36).
« En vérité, en vérit...