Notes sur l'art de shikantaza

La pratique centrale du zen Sôtô

Olivier Winghart

• Éditeur: Books on Demand
• Année: 2019
• Imprimer l'ISBN: 9782322128143
• ISBN de l'eBook: 9782322135929
• Édition: 1
• Sujet: Philosophie
• Sujet: Histoire et théorie de la philosophie

Ce livre est un recueil de notes sur la pratique zen de shikantaza (juste s'asseoir) par l'auteur ces trente dernières années. La pratique de shikantaza est très subtile et profonde, sous une apparente simplicité. Elle est décrite ici non pas par un maître ou un moine mais par un adepte laïque, avec sincérité mais sans prétention.Ce recueil fait suite à un ebook publié chez Amazon en 2015 sous le titre "Open without knowing".

Annexe

Notes de Maître Yokoyama sur des enseignements de Maître Sawaki¹⁹

Pratiquez zazen avec ténacité et vous êtes Bouddha. Sawaki sera toujours une personne pleine d’illusions. Et pourtant zazen s’infiltre goutte à goutte dans le sang de Sawaki et fait de lui un Bouddha. Quelle joie !

Roshi²⁰ parle de lui-même (son soi individuel) comme Sawaki. Selon Maître Sawaki, zazen n’est pas le moins du monde utile à l’individu. Nous faisons zazen pour zazen. Par « pour zazen », nous voulons dire que zazen utilise ce corps et rien d’autre. Ça veut dire que nous laissons ce corps en offrande à zazen. Comme il est décrit dans les « Règles pour zazen » de Maître Dôgen, nous étirons le torse, rentrons le menton, plaçons notre regard devant nous, résolus à pratiquer sans la moindre pensée que zazen prenne soin de nous. On appelle cette sorte de résolution ‘ni gain, ni satori’. C’est ce que Maître Dôgen appelle « pratiquer la voie du Bouddha pour la voie du Bouddha ».

Zazen est équivalent à l’éveil éternel du Bouddha.

On n’a besoin de rien pour faire zazen – ni stylo ni carnet. Ni satori, ni illusion ne sont nécessaires. On n’a rien besoin de prendre avec soi. C’est si vaste, si illimité que les êtres humains ne peuvent le comprendre.

[Roshi parle ici de] la forme de la non- pensée de l’assise (sans concept, sans opinion). Rien n’est si vaste et illimité que l’assise de la non-pensée. Tous les soutras [pointent vers] le satori ; le Shobogenzo²¹ également [pointe vers] le satori. Mais la forme de non-pensée de l’assise va au-delà du satori.

De même que nous ne pouvons calculer le plus grand commun multiple en mathématiques, la forme de non-pensée de l’assise est au-delà [de la compréhension] des soutras et du Shobogenzo. C’est pourquoi Roshi disait « zazen avance au-delà même du satori le plus haut ».

Les gens veulent avoir un satori comme ils veulent un jardin dans une boîte. Ce n’est pas le bouddhisme.

Ne perdez jamais de vue l’impermanence. Si vous voyez [réellement] l’impermanence, vous êtes un Bouddha à chaque expiration et un Bouddha à chaque inspiration. [Vous avez] tout là, alors. Aucune raison de penser à persévérer dans le futur.

Zazen n’est pas une voie de compétition. On devient soi-même totalement. Zazen n’est rien d’autre que de devenir soi-même.

Bien que les mots « rien d’autre que devenir soi-même » peuvent avoir une sonorité égoïste, chaque phénomène, chaque chose n’est véritablement rien d’autre que soi. Un pissenlit, qui est [un aspect] de toutes choses, est lui-même complètement un pissenlit et ne devient rien d’autre. Il a une dévotion à lui-même et à rien d’autre. Telle est la voie de toutes choses.

On ne sent jamais que l’on peut attraper zazen. On ne court jamais après zazen et on ne le fuit jamais non plus. Et on n’a rien à craindre de lui.

Ceci veut dire que l’on approche tout sans concept, sans opinion.

Le non-gain (ou mushotoku) est l’aspect le plus beau des êtres humains. Ce à quoi aspirent les Bouddhas et les patriarches est de jeter ce à quoi aspirent les personnes ordinaires.

Essayez de pratiquer zazen en croyant que vous êtes Bouddha et vous pratiquez l’activité de Bouddha. Zazen devient naturellement shikantaza. Shikantaza égale le Dharma. Zazen ‘joue au Bouddha’ – Le Bouddha pratique l’activité de Bouddha. Voilà ce qu’est shikantaza.

Ce serait très bien si les gens venaient ici pour pratiquer zazen mais malheureusement ils viennent ici parce qu’ils m’aiment bien.

Ce serait très bien si les gens venaient parce qu’ils aiment zazen mais Roshi dit qu’ils viennent le voir à cause de lui et qu’il ne peut pas y faire grand-chose. Ce n’est rien de plus que le résultat du karma. Zazen est la voie qui va au-delà du karma. Zazen n’a rien à voir avec accompli/raté, aimer/ne pas aimer, la philosophie, l’astronomie, l’art, etc. Tout cela est création humaine et résulte du karma. Ainsi il est naturel que zazen, vis à vis de cela, ne donne aucun bénéfice. Zazen n’est utile qu’à zazen. Roshi veut que tous pratiquent ce type de zazen et non pas qu’ils pratiquent parce qu’ils pensent qu’il est quelqu’un de spécial. Roshi suit véritablement la Voie au-delà de la loi de cause à effet. Il veut que les gens comprennent le sens de: « Zazen égale être Bouddha », « Zazen égale le Dharma du Bouddha ».

Dans chaque chose que vous faites, si vous le faites avec votre soi tout entier, vous serez « cette chose telle qu’elle est ».

C’est ce que Maître Dôgen veut dire par ‘sans dépendre du karma’ dans Zazen Shin (L’aiguille d’acuponcture de zazen²²)… Si l’on ne pense pas en termes de temps et d’espace, l’état de Bouddha est toujours, éternellement maintenant. Ce ‘maintenant’ éternel est la pratique du Shobogenzo. C’est pourquoi Maître Sawaki dit : « Si vous croyez en le maintenant, chacun de vous peut entrer à ce moment ».

Quand il dit « entrer à ce moment », Roshi veut dire « devenir Bouddha ».

La Voie du Bouddha est la pratique de zazen.

Pratiquer zazen veut dire faire de zazen une offrande. C’est l’expression de zazen, et donc de la Voie du Bouddha – Ce moment exprime directement le Tathagata (L’ainsi-venu) – le fond du Tathagata qui est la Nature du Tathagata, le visage du Tathagata et le corps du Tathagata.

« Manifester les aspects de la nature de Bouddha est l’expression des corps de tous les Bouddhas » -- Tel est le sens de l’éloge de zazen.

Ci-dessus, « manifester » et « expression » veulent dire apparaître. C’est le genjo [parfois traduit par vie – commentaire de l’éditeur du texte anglais] dans le Genjokoan de Maître Dôgen.

Pratiquer zazen, c’est mourir.

Ces mots de Roshi veulent dire que zazen est la mort de l’ego et ainsi on est en harmonie avec l’univers – on vit éternellement avec l’univers. Zazen est le chemin dans lequel on vit éternellement avec l’univers. Vivre éternellement avec l’univers est la voie des parents [les ancêtres].

Zazen, c’est devenir Bouddha alors qu’on est dans l’illusion.

En d’autres termes, on ne peut dire que quelqu’un qui renonce au monde (devient moine) est sans illusions. On est ordonné moine tout en possédant ses illusions.

Zazen n’est pas le chemin du monde, c’est le chemin des Bouddhas et des patriarches. Ce qui veut dire que zazen est renoncement au monde.

Tout comme la pratique de zazen est renoncement au monde, tout comme l’on renonce au monde alors qu’on possède ses illusions, zazen se pratique tout en possédant ses illusions. [De fait] zazen ne fait pas de distinction entre les moines et les laïques. Si l’on pratique zazen on est un renonçant.

Un véritable renonçant devrait porter une grande attention à shikantaza (juste s’asseoir).

Par suite chaque personne qui pratique zazen est un véritable renonçant. [Roshi dit:] « Nous devons suivre [l’enseignement] du Fukanzazengi (Les règles universelles pour zazen) et répandre cette pratique universelle de zazen ».

Même si les gens se font ordonner [et abandonnent leur vie mondaine], les illusions ne disparaissent pas. Cependant quand on fait zazen, pendant que les illusions sont là, la posture de zazen est la posture du Bouddha. Ainsi, zazen est le Bouddha qui laisse les illusions telles quelles.

Telle est la forme de zazen, c.a.d. la posture de zazen, le Bouddha. La posture de zazen n’est pas consciente de la posture de zazen mais elle est zazen.

C’est un exemple de l’au-delà de la pensée, ainsi au-delà de la pensée est Bouddha. Zazen selon mon maître [Sawaki] peut être pratiqué par tous et toute personne qui le pratique pratique la méditation de Bouddha.

Maître...

Table des matières

• Sommaire
• Préface
• Remerciements
• I. Facettes de shikantaza
• II. Réflexions autour de shikantaza
• III. En allant plus avant
• Lexique
• Bibliographie
• Annexe
• À propos de l’auteur
• Page de copyright