Jean sans Peur
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Jean sans Peur

  1. 464 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Jean sans Peur

À propos de ce livre

Isabeau de Bavière trame la mort du roi Charles VI et de Marguerite de Hainaut, épouse de Jean Sans Peur, afin de monter sur le trône avec ce dernier. Jean sans Peur, ivre d'ambition, jure son amour à la reine et s'allie à elle, malgré l'amour passionné qu'il voue à Odette de Champdivers. Mais le chevalier Hardy de Passavant s'oppose à leurs projets...

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Informations

Année
2018
ISBN de l'eBook
9782322144334

IV

« Acta gestaque »

En cette même nuit où Passavant se présentait au logis de Saïtano, divers personnages de l’Hôtel Saint-Pol, obéissant à la tortueuse et profonde mathématique de cette force inconnue qui assemble les éléments de drame éparpillés, exécutaient des gestes que nous devons relater à ce moment de notre récit.
En tête de ces personnages, nous devons placer le chien « Major ». Nous l’avons laissé dans le bâtiment aux pâtisseries où l’avait attiré le subtil valet stylé par Isabeau.
Ce chien de grand luxe, dans les yeux de qui ne pétillait pas cette malice qu’on voit en certains de ses confrères, outre qu’il était bête, avait aussi le tort d’être gourmand.
Grâce à sa gourmandise, Major se trouva emprisonné. Dès qu’il s’en aperçut, il se mit à bondir, à hurler, renversa des étagères où s’alignaient des pâtisseries variées, fit un vacarme extraordinaire, le tout en pure perte.
Ces hurlements et ces bonds cessèrent tout à coup. Major venait d’apercevoir sur le carreau de nombreuses friandises qu’ils avaient renversées. Il se dit alors que la prison avait du bon. En raison de sa bêtise, Major avait la gloutonnerie immodérée ; il n’était pas capable, comme la plupart des chiens, de savoir s’arrêter à temps ; bref, il eut une indigestion. On l’entendit gémir et se lamenter.
Finalement, il s’endormit du sommeil des goinfres, qui est lourd, pesant et sans rêves.
Lorsqu’il se réveilla, il faisait jour. Il vit la porte ouverte, et, la queue basse, fila rapidement non sans avoir jeté à droite, à gauche, un dernier regard – peut-être dans l’espoir de se procurer une deuxième indigestion. Il n’y avait plus rien. Il avait tout dévoré.
Major erra quelques heures dans les vastes jardins, sans même se demander pourquoi on l’avait emprisonné, et pourquoi on le relâchait. Il se demandait seulement pourquoi on l’avait gavé de gâteaux. Vers le moment où Honoré de Champdivers lui servait sa pâtée – soin que le vieux brave ne laissait à personne – Major s’introduisit dans les appartements d’Odette avec cet air d’innocente indifférence qu’ils prennent quand ils ont une faute à se faire pardonner.
Alors il alla se coucher aux pieds de sa maîtresse.
Odette, assise dans son fauteuil à dossier sculpté suivant la mode de ces temps gothiques, semblait perdue en une lointaine rêverie. Parfois un soupir gonflait son sein. Parfois aussi une larme tombait de ses yeux. Une profonde mélancolie pesait sur le front de la jeune fille. Et ce n’était pas au roi Charles qu’elle songeait, à ce fou qui, en ce moment, dormait, abattu par la crise que nous avons signalée. Elle ne songeait pas non plus à Jean sans Peur ; et pourtant elle savait maintenant que cet homme était son père et la curiosité, à défaut d’autre sentiment, eût pu porter vers lui ses rêveries. Elle ne songeait pas non plus à Passavant, – et pourtant il était présent au fond de son cœur. Elle ne songeait pas même à cette reine qui était pour elle une vivante menace de mort.
Toute la pensée d’Odette allait à Honoré de Champdivers et à la dame Margentine.
Elle avait appris à les aimer, à les respecter, ces deux êtres de bonté, de dévouement et de tendresse. Dans le fait, ils étaient tout pour elle. Eux disparus, il lui semblait que tout lui manquait à la fois de la vie.
Disparus ? Le roi l’avait affirmé : il était impossible qu’on eût attenté à leur vie. Mais une de ces mystérieuses douleurs, plus fortes que la raison et les raisons, disait à Odette que la vérité devait être plus terrible : Champdivers et Margentine étaient morts !... À ce moment, son regard tomba sur le chien. Elle tressaillit d’un faible espoir, et caressa la tête de Major en murmurant :
– Et pourtant : tu les eusses défendus, toi ?
Vers ce même moment, par une sorte d’affinité des gestes divers qui finissent par composer un événement, Isabeau se penchait vers la tigresse Impéria, et murmurait :
– C’est toi, n’est-ce pas, c’est toi qui me vengeras ?
Ceci se passait dans cette salle spécialement aménagée pour les ébats de la tigresse, vaste, sans meuble autre que cet entassement de fourrures où Isabeau se reposait.
La reine était presque joyeuse. Mais il paraît que cette joie qu’elle manifestait ne présageait rien de bon pour ses serviteurs, car un grand silence régnait dans le palais.
La reine passa cette journée tout entière en tête à tête avec la tigresse.
La nuit s’écoula sans incident digne de remarque.
C’était cette nuit où le chevalier de Passavant dormit sur le plateau du Voliard, sous la pluie, attendant l’heure de se rendre au château du duc d’Orléans.
Le lendemain matin, Isabeau de Bavière, plus joyeuse encore que la veille – et plus terrible, parut-il à ceux qui la connaissaient bien – tint sa cour et annonça que sous peu de jours aurait lieu dans son palais une nouvelle fête à laquelle elle invitait, dit-elle, tout ce qui était jeune et gracieux.
– Je ne veux pas autour de moi de figures moroses, ni laides, ajouta-t-elle. Ici, c’est le royaume de la Beauté, ici, c’est la capitale de l’amour, ici, c’est le palais de la joie.
À midi, la reine rentra dans la salle réservée à la tigresse Impéria.
Bois-Redon, capitaine des gardes, entra et dit gravement :
– Majesté, on apporte les viandes de Sa Seigneurie Impéria.
Il ne faut pas croire que le brave Bois-Redon plaisantait. On ne plaisantait avec Isabeau que lorsqu’elle le voulait. On plaisantait, on riait, on pleurait par ordre. Ces paroles du capitaine étaient l’ordinaire formule employée dès qu’il s’agissait de la tigresse favorite.
Derrière Bois-Redon se montrait un colosse habillé de vêtements en cuir épais et portant à la main une fourche en acier, à deux dents aiguës : c’était le chef des gardiens des fauves.
Derrière lui venaient deux hommes portant un large panier au fond duquel on voyait des quartiers sanglants.
Impéria se leva, le mufle tendu, les narines ouvertes, l’œil en feu.
– Qu’on remporte ces viandes ! dit froidement Isabeau.
Bois-Redon, dressé à l’obéissance passive, se tourna vers les porteurs et fit un geste. Mais le gardien des fauves, d’abord stupéfait par cet ordre, entra rapidement dans la salle, ploya le genou et dit :
– Majesté, si l’animal ne mange pas, il sera tout à l’heure impossible d’en approcher.
La reine laissa tomber sur l’homme à demi prosterné un regard de dédain sauvage, et elle prononça :
– Tu veux donc être pendu, toi ?
Le gardien des fauves se redressa, déposa sa fourche d’acier dans un coin de la salle, puis s’inclina profondément.
– La reine, dit-il, aura bientôt besoin de cette arme. Je la lui laisse.
Cette fois, Isabeau approuva d’un signe de tête. Bois-Redon, le gardien, les porteurs disparurent. Impéria, de son pas souple, marcha jusqu’à la porte, puis se tourna vers la reine et leva son regard luisant.
– Mais oui, dit Isabeau en riant, tu vas jeûner, ma belle. Je le veux ainsi. Vas-tu te fâcher ?
La tigresse commença à battre l’air de sa queue puissante, et fit entendre un grondement.
Isabeau, d’une voix calme, mais qui eût fait frissonner ceux qui l’eussent entendue et comprise, ajouta :
– Cette nuit, il faut que tu aies faim...
Puis, à coups de cravache, elle repoussa la tigresse dans la salle spéciale et ferma la porte. Elle se jeta sur son divan de peaux entassées, et, immobile, les paupières closes, les bras derrière la tête, se mit à rêver. Toute la journée, on entendit les rugissements de la tigresse.
Le soir, c’est-à-dire vers le moment où Passavant entrait dans Paris, presque aussi affamé qu’Impéria, Isabeau appela Bois-Redon.
Le capitaine entra, un peu pâle.
Pendant une longue minute, Isabeau le regarda dans les yeux. Sans doute, elle comprit ce qui se passait dans l’esprit de Bois-Redon. Elle haussa les épaules. Froidement, elle demanda :
– Est-ce fait ?...
– Oui, Majesté, répondit sourdement le capitaine. Cela n’a pas été sans mal. Mais enfin c’est fait. Le chemin est libre... le chemin, ajouta-t-il en frissonnant, qui mène à la chambre de la demoiselle de Champdivers !...
Isabeau saisit ce frisson. De nouveau son regard, d’une clarté mortelle, plongea jusqu’à l’âme de cet autre fauve qu’était Bois-Redon. Fauve, oui, mais fauve non compliqué.
Bois-Redon criminel savait à peine s’il était ou non criminel. Au fond, il n’avait qu’une pensée : obéir à la reine !... Isabeau posa ses deux mains délicates sur les robustes épaules du colosse, et on eût dit que sous ce poids à peine sensible, il était prêt à fléchir. D’une voix grave, la reine prononça :
– Tu trembles, Bois-Redon ? Tu as peur ? Dis-le.
– Oui, dit Bois-Redon, j’ai peur. C’est vrai. Jamais je n’ai eu peur ainsi.
Un sourire livide glissa sur les lèvres d’Isabeau. Elle reprit :
– Tu as peur d’Impéria ?...
– Non, gronda le capitaine, dût-elle me dévorer sous vos yeux ! Je n’ai pas peur de mourir.
– Alors ?... Voyons, parle, dis-moi toute ta pensée. D’avance, je te pardonne.
– J’ai peur de ce que nous allons faire. C’est trop horrible.
Et il se courba, tête basse, implorant ce pardon qu’on lui avait promis d’avance et sur lequel il ne comptait guère. La reine se recula. Bois-Redon trembla. Isabeau, une minute, se tût, puis :
– Eh bien, va-t-en...
– Majesté ! bégaya Bois-Redon.
– Va-t-en, puisque tu as peur. Va-t-en. Je te chasse. Que jamais plus je ne te voie devant moi. Tu vois, je te pardonne. Je ne te fais pas saisir. Je ne te fais pas jeter dans cette Huidelonne qui t’inspire tant de terreur. Je ne t’exile même pas de Paris. Je te chasse de ma présence, voilà tout. Va-t-en.
Il y eut un souffle court de bœuf qui ne veut pas se laisser assommer. Il bredouilla :
– Tuez-moi, j’aime mieux cela... Vous quitter... m’en aller... ne plus vous voir... Ah ! vous en parlez à votre aise, Majesté. Mais est-ce que c’est possible ? Est-ce qu’on peut vivre en respirant un autre air que le vôtre ? Est-ce qu’on peut vivre sans vous voir ? J’aime mieux qu’on me crève les yeux ou qu’on m’arrache le cœur, ce que vous voudrez, mais ne me condamnez pas à cela. Que suis-je, Majesté ? Un gentilhomme dont la vie date du moment où là-bas, le jour de votre arrivée en Champagne, vous avez abaissé vos yeux sur lui. Depuis, je suis votre chien. Je ne vis que ce que vous me permettez de vivre. Je mourrai quand vous voudrez. Allons, Majesté, on tue son chien quand on n’en veut plus, on ne le chasse pas.
Le colosse parlait, avec un vague étonnement de s’entendre si longuement parler. Il ne pleurait pas, mais chacun de ses accents était un sanglot.
Il y avait en lui de la stupeur, de l’effarement, de la douleur, il ne savait quoi. La reine le considéra avec orgueil. Et, en réponse à cette naïve plainte, à cette poignante lamentation du capitaine, elle se dit seulement :
– Celui-ci est bien à moi !
Et du même ton qu’elle employait pour pardonner à Impéria :
– C’est bien, dit-elle, tu resteras.
Alors le colosse eut un soupir pareil à un râle de joie. Il était bien dompté, celui-là. Isabeau reprit :
– Oui, mais plus de pâleurs, hein ? Plus de regards effarés, dis ? Plus de battements de cœur, n’est-ce pas ? Rien que de l’obéissance. Tu l’as dit, je suis tout pour toi. Si je meurs, tu meurs, est-ce vrai ?
– C’est vrai, dit Bois-Redon, d’un accent de profonde sincérité.
– Eh bien, je mourrai si cette fille vit, tu comprends ? Je ne veux pas qu’elle soit la prisonnière de Jean de Bourgogne, car moi, j’aime Jean de Bourgogne, tu comprends ?
Bois-Redon accueillit sans la moindre surprise ni le moindre chagrin cette déclaration de la reine. Au fait, que lui importait qu’elle aimât ou non ? Lui n’était que le chien.
– Majesté, dit-il en reprenant cet air de féroce candeur qui était la marque de sa physionom...

Table des matières

  1. Pages de titre
  2. I
  3. II
  4. III
  5. IV
  6. V
  7. VI
  8. VII
  9. VIII
  10. IX
  11. X
  12. XI
  13. XII
  14. XIII
  15. XIV
  16. XV
  17. XVI
  18. XVII
  19. XVIII
  20. XIX
  21. XX
  22. XXI
  23. XXII
  24. XXIII
  25. XXIV
  26. XXV
  27. XXVI
  28. Page de copyright