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Les fables de Jean de La Fontaine
Jean De la Fontaine
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Les fables de Jean de La Fontaine
Jean De la Fontaine
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Ă propos de ce livre
Le premier recueil de Fables correspond aux livres I à VI des éditions actuelles. Il a été publié en 1668 et était dédié au Dauphin. La Fontaine insiste sur la fonction éducative de son travail: « je me sers d'animaux pour instruire les hommes. »Fac-similé du manuscrit du Statuaire et la statue de JupiterLe deuxiÚme recueil correspond aux livres VII à XI des éditions modernes. Il est publié en 1678 et était dédié à Madame de Montespan, la maßtresse du roi.Le dernier recueil correspond au livre XII actuel. Il est publié en 1694, quelques mois avant la mort de l'auteur. Il est dédié au duc de Bourgogne, le petit-fils du roi.
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Informations
Livre quatriĂšme
Le Lion amoureux
à Mademoiselle de Sevigné.
Sévigné, de qui les attraits
Servent aux GrĂąces de modĂšle,
Et qui naquĂźtes toute belle,
à votre indifférence prÚs,
Pourriez-vous ĂȘtre favorable
Aux jeux innocents dâune fable,
Et voir, sans vous Ă©pouvanter,
Un Lion quâAmour sut dompter ?
Amour est un Ă©trange maĂźtre.
Heureux qui peut ne le connaĂźtre
Que par récit, lui ni ses Coups !
Quand on en parle devant vous,
Si la vérité vous offense,
La fable au moins se peut souffrir :
Celle-ci prend bien lâassurance
De venir Ă vos pieds sâoffrir,
Par zĂšle et par reconnaissance.
Du temps que les bĂȘtes parlaient,
Les lions entre autres voulaient
Ătre admis dans notre alliance.
Pourquoi non ? puisque leur engeance
Valait la nĂŽtre en ce temps-lĂ ,
Ayant courage, intelligence,
Et belle hure outre cela.
Voici comment il en alla :
Un Lion de haut parentage,
En passant par un certain pré,
Rencontra BergÚre à son gré :
Il la demande en mariage.
Le pÚre aurait fort souhaité
Quelque gendre un peu moins terrible.
La donner lui semblait bien dur ;
La refuser nâĂ©tait pas sĂ»r ;
MĂȘme un refus eĂ»t fait, possible,
Quâon eĂ»t vu quelque beau matin
Un mariage clandestin.
Car outre quâen toute maniĂšre
La belle Ă©tait pour les gens fiers,
Fille se coiffe volontiers
Dâamoureux Ă longue criniĂšre.
Le pĂšre donc ouvertement
Nâosant renvoyer notre amant,
Lui dit : « Ma fille est délicate ;
Vos griffes la pourront blesser
Quand vous voudrez la caresser.
Permettez donc quâĂ chaque patte
On vous les rogne, et pour les dents,
Quâon vous les lime en mĂȘme temps :
Vos baisers en seront moins rudes,
Et pour vous plus délicieux ;
Car ma fille y répondra mieux,
Ătant sans ces inquiĂ©tudes. »
Le Lion consent Ă cela,
Tant son ùme était aveuglée !
Sans dents ni griffes le voilĂ ,
Comme place démantelée.
On lĂącha sur lui quelques chiens :
Il fit fort peu de résistance.
Amour, Amour, quand tu nous tiens
On peut bien dire : « Adieu prudence. »
Le Berger et la Mer
Du rapport dâun troupeau, dont il vivait sans soins,
Se contenta longtemps un voisin :
Si sa fortune Ă©tait petite,
Elle était sûre tout au moins.
à la fin, les trésors déchargés sur la plage
Le tentĂšrent si bien quâil vendit son troupeau,
Trafiqua de lâargent, le mit entier sur lâeau.
Cet argent périt par naufrage.
Son maßtre fut réduit à garder les brebis,
Non plus berger en chef comme il Ă©tait jadis,
Quand ses propres moutons paissaient sur le rivage :
Celui qui sâĂ©tait vu Corydon ou Tircis
Fut Pierrot, et rien davantage.
Au bout de quelque temps il fit quelques profits,
Racheta des bĂȘtes Ă laine ;
Et comme un jour les vents, retenant leur haleine,
Laissaient paisiblement aborder les vaisseaux :
« Vous voulez de lâargent, ĂŽ mesdames les Eaux,
Dit-il ; adressez-vous, je vous prie, Ă quelque autre :
Ma foi ! vous nâaurez pas le nĂŽtre. »
Ceci nâest pas un conte Ă plaisir inventĂ©.
Je me sers de la vérité
Pour montrer, par expérience,
Quâun sou, quand il est assurĂ©,
Vaut mieux que cinq en espérance ;
Quâil se faut contenter de sa condition ;
Quâaux conseils de la mer et de lâambition
Nous devons fermer les oreilles.
Pour un qui sâen louera, dix mille sâen plaindront.
La mer promet monts et merveilles :
Fiez-vous-y, les vents et les voleurs viendront.
La Mouche et la Fourmi
La Mouche et la Fourmi contestaient de leur prix.
« à Jupiter ! dit la premiÚre,
Faut-il que lâamour-propre aveugle les esprits
Dâune si terrible maniĂšre,
Quâun vil et rampant animal
Ă la fille de lâair ose se dire Ă©gal !
Je hante les palais, je mâassieds Ă ta table :
Si lâon tâimmole un bĆuf, jâen goĂ»te devant toi ;
Pendant que celle-ci, chétive et misérable,
Vit trois jours dâun fĂ©tu quâelle a traĂźnĂ© chez soi.
Mais, ma mignonne, dites-moi,
Vous campez-vous jamais sur la tĂȘt...