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Un bon petit diable
Contesse de SĂ©gur
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- 238 pages
- French
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Un bon petit diable
Contesse de SĂ©gur
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Citations
Ă propos de ce livre
Orphelin, Charles vit en Ăcosse chez Madame Mac'Miche, une vieille cousine avare et fĂ©roce. Pour se venger de la mĂ©chancetĂ© de cette derniĂšre, le jeune garçon imagine mille farces et astuces pour lui jouer de mauvais tours. Mais voilĂ que la cousine dĂ©cide de se dĂ©barrasser de lui, en l'envoyant dans la sinistre pension de M. Old Nick! Soutenu par Betty, la domestique, et par la douce et tendre Juliette, notre bon petit diable devra faire preuve de beaucoup de finesse afin d'Ă©chapper Ă ce terrible sort...
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Informations
Un bon petit diable
Ădition de rĂ©fĂ©rence :
Paris, Librairie Hachette et Cie, 1898.
Nouvelle Ă©dition
Ă ma petite-fille
Madeleine de Malaret
Ma bonne petite Madeleine, tu demandes une dĂ©dicace, en voici une. La Juliette dont tu vas lire lâhistoire nâa pas comme toi lâavantage de beaux et bons yeux (puisquâelle est aveugle), mais elle marche de pair avec toi pour la douceur, la bontĂ©, la sagesse et toutes les qualitĂ©s qui commandent lâestime et lâaffection.
Je tâoffre donc le bon petit diable escortĂ© de sa Juliette, qui est parvenue Ă faire dâun vrai diable un jeune homme excellent et charmant, au moyen de cette douceur, de cette bontĂ© chrĂ©tiennes qui touchent et qui ramĂšnent. Emploie ces mĂȘmes moyens contre le premier bon diable que tu rencontreras sur le chemin de ta vie.
Ta grand-mĂšre,
Comtesse de SĂ©gur
née Rostopchine.
I
Les fées
Dans une petite ville dâĂcosse, dans la petite rue des Combats, vivait une veuve dâune cinquantaine dâannĂ©es, Mme MacâMiche. Elle avait lâair dur et repoussant. Elle ne voyait personne, de peur de se trouver entraĂźnĂ©e dans quelque dĂ©pense, car elle Ă©tait dâune avarice extrĂȘme. Sa maison Ă©tait vieille, sale et triste ; elle tricotait un jour dans une chambre du premier Ă©tage, simplement, presque misĂ©rablement meublĂ©e. Elle jetait de temps en temps un coup dâĆil Ă la fenĂȘtre et paraissait attendre quelquâun ; aprĂšs avoir donnĂ© divers signes dâimpatience, elle sâĂ©cria :
« Ce misérable enfant ! Toujours en retard ! Détestable sujet ! Il finira par la prison et la corde, si je ne parviens à le corriger ! »
Ă peine avait-elle achevĂ© ces mots que la porte vitrĂ©e qui faisait face Ă la croisĂ©e sâouvrit ; un jeune garçon de douze ans entra et sâarrĂȘta devant le regard courroucĂ© de la femme. Il y avait, dans la physionomie et dans toute lâattitude de lâenfant, un mĂ©lange prononcĂ© de crainte et de dĂ©cision.
Madame MacâMiche
DâoĂč viens-tu ? Pourquoi rentres-tu si tard, paresseux ?
Charles
Ma cousine, jâai Ă©tĂ© retenu un quart dâheure par Juliette, qui mâa demandĂ© de la ramener chez elle, parce quâelle sâennuyait chez M. le juge de paix.
Madame MacâMiche
Quel besoin avais-tu de la ramener ? Quelquâun de chez le juge de paix ne pouvait-il sâen charger ? Tu fais toujours lâaimable, lâofficieux ; tu sais pourtant que jâai besoin de toi. Mais tu tâen repentiras, mauvais garnement !... Suis-moi. »
Charles, combattu entre le dĂ©sir de rĂ©sister Ă sa cousine et la crainte quâelle lui inspirait, hĂ©sita un instant ; la cousine se retourna, et, le voyant encore immobile, elle le saisit par lâoreille et lâentraĂźna vers un cabinet noir dans lequel elle le poussa violemment.
« Une heure de cabinet et du pain et de lâeau pour dĂźner ; et une autre fois ce sera bien autre chose.
â MĂ©chante femme ! DĂ©testable femme ! marmotta Charles dĂšs quâelle eut fermĂ© la porte. Je la dĂ©teste ! Elle me rend si malheureux, que jâaimerais mieux ĂȘtre aveugle comme Juliette que de vivre chez cette mĂ©chante crĂ©ature... Une heure !... Câest amusant !... Mais aussi je ne lui ferai pas la lecture pendant ce temps ; elle sâennuiera, elle nâaura pas la fin de Nicolas Nickleby, que je lui ai commencĂ© ce matin ! Câest bien fait ! Jâen suis trĂšs content. »
Charles passa un quart dâheure de satisfaction avec lâagrĂ©able pensĂ©e de lâennui de sa cousine, mais il finit par sâennuyer aussi.
« Si je pouvais mâĂ©chapper ! pensa-t-il. Mais par oĂč ? comment ? La porte est trop solidement fermĂ©e ! Pas moyen de lâouvrir... Essayons pourtant... »
Charles essaya, mais il eut beau pousser, il ne parvint seulement pas Ă lâĂ©branler. Pendant quâil travaillait en vain Ă sa dĂ©livrance, la clef tourna dans la serrure ; il sauta lestement en arriĂšre, se rĂ©fugia au fond du cabinet, et vit apparaĂźtre, au lieu du visage dur et sĂ©vĂšre de sa cousine, la figure enjouĂ©e de Betty, cuisiniĂšre, bonne et femme de chambre tout Ă la fois.
« Quâest-ce quâil y a ? dit-elle Ă voix basse. Encore en pĂ©nitence !
Charles
Toujours, Betty, toujours. Tu sais que ma cousine est heureuse quand elle me fait du mal.
Betty
Allons, allons, Charlot, pas dâimprudentes paroles ! Je vais te dĂ©livrer, mais sois bon, sois sage !
Charles
Sage ! Câest impossible avec ma cousine ; elle gronde toujours ; elle nâest jamais contente ! Ăa mâennuie Ă la fin.
Betty
Que veux-tu, mon pauvre Charlot. Elle est ta protectrice et la seule parente qui te reste ! Il faut bien que tu continues Ă manger son pain.
Charles
Elle me le reproche assez et me le rend bien amer ! Je tâassure quâun beau jour je la planterai lĂ et jâirai bien loin.
Betty
Ce serait bien pis encore, pauvre enfant ! Mais viens, sors de ce trou sale et noir.
Charles
Et quâest-ce quâelle va dire ?
Betty
Ma foi, elle dira ce quâelle voudra ; elle ne te battra toujours pas.
Charles
Oh ! pour ça non ! Elle nâa plus osĂ© depuis que je lui ai si bien tordu la main lâautre jour. Te souviens-tu comme elle criait ?
â Et toi, mĂ©chant, qui ne tĂąchais pas ! dit Betty en souriant.
Charles
Et aprĂšs, quand jâai dit que ce nâĂ©tait pas exprĂšs, que jâavais Ă©tĂ© pris de convulsions et que je sentais que ce serait toujours de mĂȘme.
Betty
Tais-toi, Charlot ! Je crois que sa peur est passĂ©e ; et puis câest trĂšs mal tout ça.
Charles
Je le sais bien, mais elle me rend mĂ©chant ; mĂ©chant malgrĂ© moi, je tâassure. »
Betty fit sortir Charles, referma la porte, mit la clef dans sa poche, et recommanda à son protégé de se cacher bien loin pour que la cousine ne le vßt pas.
Charles
Je vais rejoindre Juliette.
Betty
Câest ça et comme câest moi qui ai la clef du cabinet, ce sera moi qui lâouvrirai dans trois quarts dâheure ; mais sois exact Ă revenir.
Charles
Ah ! je crois bien ! Sois tranquille ! Cinq minutes avant lâheure, je serai dans ta chambre. »
Charles ne fit quâun saut et se trouva dans le jardin, du cĂŽtĂ© opposĂ© Ă la chambre oĂč travaillait sa cousine. Betty le suivit des yeux en souriant.
« Mauvaise tĂȘte, dit-elle, mais bon cĆur ! Sâil Ă©tait menĂ© moins rudement, le bon lâemporterait sur le mauvais... Pourvu quâil revienne !... Ăa me ferait une belle affaire !
â Betty ! cria la cousine dâune voix aigre.
â Madame ! rĂ©pondit Betty en entrant.
Madame MacâMiche
Nâoublie pas dâouvrir la prison de ce mauvais sujet dans une demi-heure, et quâil apporte Nicolas Nickleby ; il lira haut jusquâau dĂźner pendant que je travaillerai.
Betty
Oui, madame ; je nây manquerai pas. »
Au bout dâune demi-heure, Betty alla dans sa chambre ; elle nây trouva personne. Charles nâĂ©tait pas rentrĂ© ; elle regarda Ă la fenĂȘtre,... personne !
« Jâen Ă©tais sĂ»re ! Me voilĂ dans de beaux draps, Ă prĂ©sent ! Quâest-ce que je dirai ? Comment expliquer ?... Ah ! une idĂ©e ! Elle est bonne pour madame, qui croit aux fĂ©es et qui en a une peur effroyable. On lui fait croire tout ce quâon veut en lui parlant fĂ©es. Je crois donc que mon idĂ©e ...