SECTION 1
LâALLIANCE RENOUVELĂE
Ă LâĂPREUVE DE LA CROIX
Le fils de Marie nâest pas un envoyĂ© comme les autres. Il a Ă©tĂ© mĂ©connu et trahi, dĂ©menti et crucifiĂ©, malgrĂ© « la bonne orientation et la lumiĂšre » quâil a rĂ©vĂ©lĂ©es ici-bas. TouchĂ© par la mort tragique de JĂ©sus, et consternĂ© par les luttes fratricides que se livrent les juifs et les chrĂ©tiens Ă son sujet, Muhammad cherche Ă comprendre. Ayant prĂȘtĂ© lâoreille aux positions rivales des uns et des autres, câest Ă la lumiĂšre de sa propre Ă©preuve, et avec toute la vivacitĂ© de son intelligence, quâil entreprend devant Dieu de mĂ©diter les Ă©critures et de retrouver la signification de cette parole sainte quâest JĂ©sus.
Le premier chapitre expose la position adoptĂ©e par le prophĂšte arabe au regard du fait central de la rĂ©vĂ©lation Ă©vangĂ©lique : la mort et la rĂ©surrection du Christ. Le coran reconnaĂźt en JĂ©sus le verbe de Dieu, et cĂ©lĂšbre son Ă©lĂ©vation avec une verve hyperbolique, sans sortir du paradoxe, ni lĂ©nifier le mystĂšre dâiniquitĂ© qui est Ă lâĆuvre dans le monde. Au fond, le livre ne tranche pas la question de savoir si JĂ©sus est le fils de Dieu que les hommes ont trahi, ou bien un homme qui sâest aliĂ©nĂ© dans lâimage de Dieu (chapitre I).
Muhammad approfondit sa comprĂ©hension du drame christique au feu du conflit fratricide qui lâoppose aux gens du livre et le met au ban de leur monde. Il affĂ»te ses conceptions thĂ©ologiques au fil des controverses et des luttes quâil soutient contre des groupes de juifs et de chrĂ©tiens, quâil accuse de trahir Dieu et de corrompre lâhumanitĂ©. Habitant son Ă©preuve avec hĂ©roĂŻsme, il sâefforce de reconquĂ©rir la visĂ©e de laquelle le judĂ©o-christianisme avait dĂ©viĂ©, ou vers laquelle il nâarrivait pas Ă sâĂ©lever. Ce faisant, le dernier prophĂšte renouvelle lâalliance avec Dieu et apporte un livre de sa part. Sans annuler les pactes prĂ©cĂ©dents, il en rĂ©capitule lâintention directrice en ouvrant largement aux hommes la voie de la rĂ©vĂ©lation (chapitre II).
CHAPITRE I
JĂSUS, FILS DE MARIE
Les questions relatives Ă la vie du Christ, sa passion, sa nature et son statut, sont Ă lâorigine de violentes controverses entre les communautĂ©s du livre. La querelle touche Ă lâidĂ©e que chaque partie se fait de Dieu et de lâexistence humaine et, partant, du culte quâil sâagit dâobserver, de la perfection Ă©thique quâil convient de poursuivre et de lâidĂ©al du monde quâil serait bon de faire advenir.
Pour sa part, Muhammad ne remet pas en cause la parole de Dieu en JĂ©sus. Il ne dĂ©livre pas une nouveautĂ© qui contredirait le tĂ©moignage prĂ©cĂ©dent, comme sâil y avait en celui-ci un dĂ©faut. Au contraire, lâenvoyĂ© arabe confirme ce que le fils de Marie a rĂ©vĂ©lĂ©. Il en redonne lâinterprĂ©tation exacte Ă la lumiĂšre de son propre chemin de croix (3:59-64). Ce faisant, il entend remettre les fils dâAdam sur la bonne voie, les « Ă©clairer sur le motif de leurs diffĂ©rends » (16:64), et rendre vĂ©ridique la nouvelle que les prophĂštes ont eu pour charge de transmettre (2:89, 2:91, 3:3âŠ).
Le prĂ©dicateur arabe dĂ©fend ses convictions sans remettre en cause le paradoxe de Dieu, ni rĂ©duire lâantinomie fondamentale qui existe entre lâabsolu de la misĂ©ricorde et lâuniversalitĂ© de la mort. Dâun mĂȘme Ă©lan, il dĂ©ploie le sens enthousiaste, prodigieux et sacrificiel du cheminement de JĂ©sus, tel quâil peut ĂȘtre apprĂ©hendĂ© dans une perspective dâespĂ©rance, et une vision dĂ©senchantĂ©e et scandaleuse de son martyre, en donnant sa pleine force au motif de la crainte. Dâun cĂŽtĂ©, il professe la vĂ©ridicitĂ© du fils de Marie, cĂ©lĂšbre son Ă©lĂ©vation au ciel, et trace une voie de rĂ©demption par la charitĂ©, la croix et la rĂ©surrection. De lâautre, il laisse entendre que JĂ©sus ait pu ĂȘtre abandonnĂ© de Dieu, ou quâil ait Ă©tĂ©, pour ainsi dire, victime de son instinct de compassion ou des dĂ©bordements de son amour. PrĂŽnant la dĂ©fiance, il restaure le bien-fondĂ© du rĂ©gime de la loi, et rend le zĂšle sacrificiel suspect.
Muhammad renvoie donc les chrĂ©tiens et les juifs dos-Ă -dos. Il blĂąme les premiers de consacrer le Christ comme un vrai dieu ; et il accuse les seconds de ne voir en lui quâun usurpateur sĂ©ditieux. Comme on le dĂ©taillera dans le prochain chapitre, le prĂ©dicateur arabe reproche aux chrĂ©tiens de prĂȘcher lâespĂ©rance aux dĂ©pens de la crainte, dâexalter la confiance au dĂ©triment de la loi, et dâordonner la misĂ©ricorde au mĂ©pris des principes de lâĂ©quivalence. Pour lui, le tort de « ceux qui se disent chrĂ©tiens » est de prĂȘcher un universalisme imaginaire et de promettre le salut pour tous, en sâen tenant Ă lâidĂ©e que lâamour est plus fort que la mort. Ă ceux qui judaĂŻsent, Muhammad fait le grief contraire : leur pharisaĂŻsme juridique, leur communautarisme Ă©triquĂ©, leur conception exclusiviste du salut, leur culte de la justice et des principes de rĂ©alitĂ©, tout cela montre bien quâils tiennent pour acquis que la mort est plus forte que lâamour. En somme, Muhammad accuse les uns de diviniser le fils de Marie, et les autres de ne pas reconnaĂźtre en lui la parole de Dieu.
Dans la tension des positions contraires, lâinterprĂšte coranique esquisse, Ă partir de lâĂ©pisode christique, la forme dâun drame cosmique, dans lequel le seigneur est obligĂ© de lutter contre des forces adverses, dans les limites incontournables de la rĂ©alitĂ© historique. Ce drame, oĂč tout serait en danger, y compris lâaffirmation crĂ©atrice de Dieu, appelle les croyants Ă sâinvestir dans un combat vital et tragique. JĂ©sus lui-mĂȘme nâaurait fait que cela : lutter hĂ©roĂŻquement au nom de Dieu, selon lâorientation qui lui Ă©tait propre, en conformant ses pensĂ©es et ses actes jusque dans la mort. Dans ce cas, la transcendance et le mal sont des termes qui sont affirmĂ©s ensemble en vue dâune nouvelle intĂ©gritĂ©. Mais cette perspective ne fournit pas la clĂ© dâune synthĂšse totalisante. Elle offre plutĂŽt le troisiĂšme terme dâun paradoxe dĂ©sormais indĂ©passable sur le divin.
DĂšs lors quâil sâoppose aux clĂŽtures dogmatiques, Muhammad refuse dâaccoler Ă JĂ©sus la qualitĂ© de fils de Dieu par nature. Au contraire, il sâemploie Ă dĂ©truire les raccourcis thĂ©ologiques en la matiĂšre, de façon Ă replacer les croyants dans lâĂ©tat de dĂ©possession oĂč le Christ se trouvait lui-mĂȘme. Câest Ă partir du silence de Dieu quâune expĂ©rience renouvelĂ©e de la transcendance peut ĂȘtre envisagĂ©e, et que le sens de la filiation divine pourrait ĂȘtre Ă©ventuellement retrouvĂ© (premiĂšre partie)8.
Aux yeux du prophĂšte arabe, il serait dĂ©lusoire et tout Ă fait prĂ©somptueux que des croyants se prĂ©tendent enfants de Dieu, sâils ne concrĂ©tisent pas leurs possibilitĂ©s rĂ©elles dans lâordre de la crĂ©ation, et ne conspirent pas Ă lâĂ©dification dâune communautĂ© humaine plurielle et fraternelle. Pour lui, lâĂ©lĂ©vation du Christ est le symbole dâune Ă©preuve de dĂ©livrance que les vĂ©ridiques sont appelĂ©s Ă reprendre et Ă Ă©largir, Ă lâhorizon dâune renaissance d'ores et dĂ©jĂ commencĂ©e. Câest Ă la faveur dâun tel engagement que la paternitĂ© de Dieu pourrait retrouver un sens dans le cadre de son secret maintenu (deuxiĂšme partie).
De façon nĂ©gative, la mise en cause de la filialitĂ© divine de JĂ©sus signifie que Dieu ne saurait ĂȘtre affranchi des attributs de lâabsurde avant lâĂ©ventuel dĂ©nouement eschatologique. Mais dans une perspective dâespĂ©rance, la contestation de la rĂ©fĂ©rence filiale ouvre la possibilitĂ© que dâautres modĂšles dâalliance Ă Dieu puissent Ă©merger. Elle sâinscrit notamment dans une stratĂ©gie qui vise Ă affranchir lâexpĂ©rience de la foi du logos phallocentrique et des schĂ©mas patriarcaux de pensĂ©e et de comportement, qui empĂȘchent la femme de participer avec son originalitĂ© propre Ă la tĂąche du tĂ©moignage (troisiĂšme partie).
LE SIGNE « JĂSUS » Ă LâĂPREUVE DU PARADOXE
Lâintention du prophĂšte arabe nâest pas de justifier la folie de la croix. Parce quâil est lui-mĂȘme subjuguĂ© par cet Ă©vĂ©nement, tout autant que scandalisĂ©, Muhammad veille Ă prĂ©server ce qui, pour lui, reste inconcevable. Sâil embrasse de façon ostensible le parti pris de la confiance, et quâil fait de JĂ©sus le rĂ©vĂ©lateur de la pensĂ©e divine, il met en mĂȘme temps lâaccent sur la crainte, dĂ©construit le discours de lâespĂ©rance, et restaure lâincognito divin. Dans le va-et-vient des considĂ©rations contraires, il situe la place du Christ dans un drame qui appelle lâhomme Ă lutter dans le sentier de Dieu. Ces trois perspectives, que nous prĂ©sentons successivement, constituent les lignes dâun paradoxe qui sous-tend lâensemble de la prĂ©dication coranique9.
La perspective de lâespĂ©rance
- La culpabilité des juifs et la véridicité de Jésus
MĂ©ditant lâĂ©vĂ©nement de la crucifixion avec toutes ses forces dâenthousiasme et de raison, Muhammad est amenĂ© Ă se demander qui a tuĂ© le fils de Marie, et qui Ă©tait rĂ©ellement ce dernier pour mourir de la sorte. Pour commencer, il adopte le point de vue des partisans de la victime, et impute lâhomicide aux juifs infidĂšles. Ceux-lĂ ont mis Ă mort JĂ©sus en manĆuvrant avec dĂ©termination et en connaissance de cause. Ils nâĂ©taient pas Ă leur premier mĂ©fait. Leur crime couronne une longue suite de transgressions et de dĂ©lits. Nâont-ils pas pris lâhabitude de « manger Ă mauvais escient le bien dâautrui » et de « prĂ©lever lâusure, alors quâelle leur est interdite » (4:161) ? Nâont-ils pas dĂ©jà « rompu leur engagement » par le passĂ©, « dĂ©niĂ© des signes de Dieu», et « tuĂ© les prophĂštes Ă contre-vĂ©ritĂ© » (4:155) ? Bref, leur trahison est ancienne, leur ingratitude prouvĂ©e, et leurs forfaits impardonnables et sans justification possible.
Si les judĂ©ens commettent des crimes abominables en toute bonne conscience, câest quâils pensent, mais Ă tort, ĂȘtre les gardiens fidĂšles de la religion. Ils sâĂ©rigent en dĂ©fenseurs de Dieu, alors quâils suivent en rĂ©alitĂ© leurs passions, outragent la vĂ©ritĂ© et confondent le divin avec des principes de lĂ©galitĂ© et de rectitude religieuse. Au fond, câest leur foi corrompue qui les perd et les rend capables des pires atrocitĂ©s (cf. le chapitre suivant).
En contraste, il est certain que le fils de Marie nâa pas agi selon son dĂ©sir, ou dâaprĂšs des idĂ©aux et des croyances humaines. Il a fait le don filial de sa volontĂ© Ă Dieu, et sâest soumis avec hĂ©roĂŻsme au vouloir de la transcendance qui lâhabite. Comme il lâaffirme lui-mĂȘme, ses paroles et ses actes lui sont inspirĂ©s par une instance infiniment supĂ©rieure Ă laquelle il demeure fidĂšle. Jusque devant la mort, il dĂ©fend la vĂ©ritĂ© qui lâillumine, acceptant en son nom de subir lâignominie du calvaire. Si JĂ©sus est alors crucifiĂ©, câest Ă la fois en raison de sa fidĂ©litĂ© Ă Dieu et par la faute dâhommes qui ont refusĂ© de faire place Ă la venue de lâesprit en eux.
Or, le problĂšme qui se pose nâest pas tant que le fils de Marie ait Ă©tĂ© mis Ă mort, mais quâil lâait Ă©tĂ© par un supplice ignominieux, que lâon rĂ©serve dâordinaire aux criminels endurcis. Sâil est vrai que JĂ©sus est le verbe de Dieu, comme le proclame avec force lâĂ©vangile, comment admettre quâil ait pu ĂȘtre persĂ©cutĂ© par des gens iniques, infatuĂ©s dâeux-mĂȘmes et triomphants ? Pourquoi celui qui sâest entiĂšrement remis Ă la divine providence est-il maudit, lapidĂ© et abandonnĂ© Ă la cruautĂ© de mains infidĂšles ? De vulgaires criminels peuvent-ils avoir rĂ©duit au silence, et anĂ©anti dans la souffrance, le tĂ©moin qui rendait audible la parole du ciel ?
Ces questions prennent une signification particuliĂšre et une acuitĂ© existentielle extrĂȘme, dĂšs lors que Muhammad et les siens se heurtent Ă lâopposition de groupes adverses, quâils se trouvent entraĂźnĂ©s dans des drames violents, et quâils sont mis devant la mort Ă cause du tĂ©moignage quâils portent au nom de Dieu. Câest dans ce contexte que le drame de la croix devient essentiel pour eux.
- LâĂ©vocation hyperbolique de la crucifixion
Tout en incriminant les juifs infidĂšles, Muhammad sâemploie Ă exalter la toute-puissance de lâamour de Dieu. Il soutient que JĂ©sus nâa pas Ă©tĂ© englouti dans la mort par de misĂ©rables pĂ©cheurs, mais quâil a Ă©tĂ© en rĂ©alitĂ© Ă©levĂ© sur le trĂŽne de la croix afin de recevoir la royautĂ© Ă©ternelle. De ce point de vue, il souligne que le fils de Marie â dont la chair Ă©tait unie Ă Dieu par lâesprit (4:171) â ne peut avoir subi le chĂątiment contre son grĂ©. Câest de lui-mĂȘme, et avec la claire conscience de son destin, que JĂ©sus sâen remet aux mains du seigneur et quâil consent Ă ĂȘtre la victime des hommes. En mĂȘme temps, câest Dieu qui lâattire Ă lui, et qui lui permet dâaller dans lâobĂ©issance jusquâĂ lâabandon salvateur. Dâailleurs, le paroxysme que reprĂ©sente la crucifixion ne relĂšve pas dâun dĂ©veloppement tardif. Il procĂšde dâune disposition prise depuis toujours, qui fait que lâexistence entiĂšre de JĂ©sus Ă©tait tendue vers lâheure de son martyr. Ă proprement parler, ce ne sont donc pas les juifs et les pharisiens qui ont immolĂ© le Christ. En dĂ©pit de leur malignitĂ© Ă©vidente, « ils ne lâont pas tuĂ©, ils ne lâont pas crucifiĂ© ! » (4:157).
En aucun cas, la passion de JĂ©sus nâest une fin. Elle est le prĂ©alable de son ascension glorieuse auprĂšs de Dieu. Sa montĂ©e en croix puis sa montĂ©e au ciel relĂšvent dâune mĂȘme bĂ©nĂ©diction. Elles sont le fait dâune action unique, qui sâaffranchit des lois du monde, et qui triomphe du pouvoir de la mort. En ce sens, la crucifixion et la rĂ©surrection gagnent Ă ĂȘtre Ă©voquĂ©es par le biais dâune seule mĂ©taphore. Câest par une mĂȘme « Ă©lĂ©vation » que le Christ est portĂ© en croix et quâil accĂšde Ă la vie Ă©ternelle (4:158) : « Lors Allah dit : "Ă JĂ©sus ! Voici que je te recouvre, tâĂ©lĂšve vers moi, et te purifie de ceux qui ont dĂ©niĂ© » (3:55)10.
Aux yeux du monde, le fils de Marie paraĂźt vaincu. Mais, en rĂ©alitĂ©, il est vainqueur de sa nature humaine, et maĂźtre de la terre. Par sa rĂ©ponse au vĆu du seigneur, et par le don total librement consenti, il permet que la volontĂ© de Dieu sâaccomplisse et que la logique de la surabondance, propre Ă la rĂ©demption, se manifeste. Câest pourquoi il convient de distinguer entre lâanecdotique et lâessentiel, entre le phĂ©nomĂšne apparent et la rĂ©alitĂ© durable, entre le temps du monde et lâĂ©ternitĂ© de Dieu. Il faut dĂ©passer le dĂ©senchantement de lâinstant des tĂ©nĂšbres, lorsque JĂ©sus est livrĂ© Ă lâinjustice par des juifs infidĂšles, pour laisser parler la voix lumineuse de lâespĂ©rance, qui exalte la puissance de lâamour de Dieu et qui certifie que JĂ©sus est vivant. Alors, Muhammad crie que le crucifiĂ© nâa pas Ă©tĂ© terrassĂ© par lâadversaire, ni englouti dans la mort. Les juifs et les pharisiens croient avoir pendu le Messie au gibet dâinfĂąmie. Ils clament avec dĂ©rision : « Nous avons tuĂ© JĂ©sus le Messie fils de Marie ». Mais ce ne sont lĂ que les vicissitudes visibles de lâici-bas. En fait, « ils ne lâont pas tuĂ©, ils ne lâont pas crucifiĂ©, mais il leur a semblĂ© ainsi (âŠ). Ils ne lâont pas tuĂ© en certitude. Mais Dieu lâĂ©leva vers lui. Dieu est trĂšs puissant et sage » (4:157-8). Si les juifs et les pharisiens sont dans lâillusion, câest parce quâils croient avoir crucifiĂ© le Christ, alors quâen vĂ©ritĂ© câest de lui-mĂȘme que celui-ci sâest livrĂ© Ă Dieu qui lâa Ă©levĂ© auprĂšs de lui.
Ainsi, le fragment du coran qui Ă©voque de la façon la plus explicite le crucifiement de JĂ©sus se rĂ©vĂšle ĂȘtre une proclamation hyperbolique de la gloire du crucifiĂ©, faite en lien avec la dĂ©nonciation des crimes et des calomnies dont les juifs infidĂšles se rendent coupables : « Aussi, pour avoir rompu leur engagement, pour avoir dĂ©niĂ© des signes de Dieu, pour avoir tuĂ© les prophĂštes Ă contre-vĂ©ritĂ©, pour leur parole : "Nos cĆurs sont incirconcis"⊠Non pas ! Seulement Dieu y a posĂ© le sceau de la dĂ©nĂ©gation, et ils ne sont pas croyants, ou si peu !⊠pour avoir dĂ©niĂ©, pour avoir profĂ©rĂ© sur Marie une immense calomnie, pour avoir prĂ©tendu : "Nous avons tuĂ© JĂ©sus le Messie fils de Marie"⊠lâenvoyĂ© de Dieu ! Ils ne lâont pas tuĂ©, ils ne lâont pas crucifiĂ©, mais il leur a semblĂ© ainsi. Ceux qui controversent lĂ -dessus sont dans le doute, ils nâont aucun savoir, ils ne suivent que la conjecture. Ils ne lâont pas tuĂ© en certitude. Mais Dieu lâĂ©leva vers lui. Dieu est trĂšs puissant et sage. Il nâen est pas un parmi les gens du livre qui ne croie en lui, avant sa mort, et qui au jour de la rĂ©surrection, ne sera tĂ©moin contre eux⊠donc, Ă cause de lâiniquitĂ© des tenants du judaĂŻsme, nous leur avons interdit des choses bonnes qui leur Ă©taient licites (âŠ) » (...