L'art de devenir député et même ministre par un oisif qui n'est ni l'un ni l'autre
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L'art de devenir député et même ministre par un oisif qui n'est ni l'un ni l'autre

Essai sur la députation en France entre la Première et la Seconde République

  1. 232 pages
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  4. Disponible sur iOS et Android
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L'art de devenir député et même ministre par un oisif qui n'est ni l'un ni l'autre

Essai sur la députation en France entre la Première et la Seconde République

À propos de ce livre

RÉSUMÉ: "L'art de devenir député et même ministre par un oisif qui n'est ni l'un ni l'autre" est une oeuvre qui explore avec humour et perspicacité les rouages de la politique française entre la Première et la Seconde République. François de Groiseilliez, avec un regard à la fois critique et amusé, décortique les stratégies et les mécanismes qui permettent à un individu de gravir les échelons de la sphère politique, jusqu'à atteindre des postes prestigieux tels que député ou ministre. L'auteur, bien que se déclarant étranger à ces fonctions, offre une analyse fine et détaillée des comportements et des pratiques qui caractérisent le milieu politique de l'époque. À travers une série d'observations et d'anecdotes, il met en lumière les ambitions, les compromis et parfois les trahisons qui jalonnent le parcours des aspirants politiques. Ce livre, à la fois essai et satire, se veut une réflexion critique sur le pouvoir et ses séductions, tout en offrant un éclairage sur les transformations politiques de la France au XIXe siècle. En filigrane, l'ouvrage invite le lecteur à s'interroger sur la nature même du pouvoir et sur ce qui pousse certains à le rechercher avec tant d'ardeur.__________________________________________BIOGRAPHIE DE L'AUTEUR: François de Groiseilliez, bien que peu connu du grand public, est un écrivain qui s'est distingué par son approche satirique et analytique de la politique française. Vivant à une époque de bouleversements politiques, il a su capter l'essence des transformations qui marquèrent la France entre la Première et la Seconde République. Ses écrits, souvent empreints d'ironie, reflètent une connaissance intime des cercles politiques et une capacité à observer les dynamiques de pouvoir avec un oeil critique. De Groiseilliez a contribué à la littérature politique par sa capacité à mêler humour et analyse, offrant ainsi des perspectives nouvelles sur les enjeux de son temps. Bien que les détails de sa vie personnelle restent en grande partie méconnus, ses oeuvres continuent de susciter l'intérêt pour leur pertinence et leur profondeur. À travers ses écrits, il a laissé un héritage qui incite à la réflexion sur la politique et ses acteurs, tout en divertissant par son style incisif et son esprit mordant.

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Informations

Année
2020
Imprimer l'ISBN
9782322224722
ISBN de l'eBook
9782322263943

TROISIÈME PARTIE : TACTIQUE PARLEMENTAIRE

MÉDITATION XX. DU PALAIS-BOURBON.

La contemplation d'un monument est quelquefois un grave sujet de méditation! Dans un monument il y a souvent l'histoire de tout un pays, histoire féconde en leçons de morale et de philosophie, souvent terribles et concluantes, mais jamais comprises des peuples mêmes dont l'intérêt le plus réel serait de les mettre à profit. Regardez le Palais-Bourbon, marqué du sceau de la monarchie absolue, et qui fut la demeure du grand Condé! Ce palais est devenu l'oratoire des tribuns de la monarchie représentative! Et cependant n'a pas cessé de porter le nom de Palais-Bourbon. Quel nom pour le siège d'un pouvoir qui a décrété la déchéance des Bourbons! En vain brille en lettres d'or sur le fronton du palais ce titre fastueux : Palais de la chambre des députés, le public, les journaux, les députés eux-mêmes, continuent de dire : Palais-Bourbon, tant il est difficile de détruire tout ce que nos habitudes et nos souvenirs ont consacré!...
Bâti en 1722, le Palais-Bourbon, restauré par Gisors, s'ouvrit en 1798 pour le conseil des cinq-cents, et, après de nouvelles modifications architectoniques opérées par Poyet en 1807, reçut le corps législatif, corps si célèbre par son silence, corps prudent qui, dans l'espace de sept ans, n'a pas dit autant de paroles que la chambre actuelle en prononce dans un jour!...
Rappelons toutefois que, du vivant de ce corps muet, la France était maîtresse de l'Europe et faisait des rois de ses soldats victorieux!
Chacun sait ce que la France est devenue depuis 1814 avec l'éloquence parlementaire! C’est-à-dire qu'elle est restée ce que les alliés l'ont faite, morcelée, réduite, humiliée, flétrie sous de honteux traités!
Mais avec des chambres muettes se serait-elle relevée? Je n'en sais rien. Cependant si une chambre qui parle n'est pas plus utile qu'une chambre qui ne dit mot, à quoi bon nous laisser assourdir tous les jours de paroles vides et creuses? Vous prétendez que le pouvoir de la parole est le plus grand de tous; qu'il domine toutes les volontés, toutes les positions... Eh bien! Prouvez-le! Usez de ce pouvoir au profit de la France! Ayez moins de respect pour ceux qui vous méprisent. Pleurez sur la Pologne éteinte, mais ne cachez pas vos larmes devant ses oppresseurs.
Le corps législatif comprenait le génie de Napoléon; il savait se taire en présence d'une gloire si éloquente, n'ignorant pas que les indiscrétions de la tribune eussent pu compromettre le gain d'une bataille. Soumis au contrôle des avocats, l'empereur, sans doute, n'eût point mérité le titre de grand homme, et ces messieurs l'accusent de son peu de sympathie pour les assemblées délibérantes! Ils ne lui pardonnent pas d'avoir dit que les plus bavardes étaient les moins utiles et les plus dispendieuses à l'État...
Chose bizarre! Et qui prouve combien les prévisions de Napoléon étaient justes! Le jour où le corps législatif a osé parler, Napoléon est tombé de son trône, et l'Europe s'est ruée sur la France!...
Le Palais-Bourbon a presque toujours été en réparation, à peu près comme tous les gouvernements qui se sont succédé depuis la chute de Louis XVI.
Je ne me rappelle pas dans quelle année le toit de ce palais a failli choir sur l'assemblée législative! Rien n'est moins solide que les constructions nouvelles dont on l'a successivement enrichi; et pourtant elles n'ont été faites qu'à la plus grande gloire du système représentatif, dont; je le suppose bien, on espère la durée. Les foudres de l'éloquence parlementaire en ébranlent peut-être les bases... Depuis 1814 on a tant parlé! Tant de chambres y ont vu le jour et y sont mortes en parlant!...
La chambre introuvable a pour sa part fait assez de bruit!
L'empoignement de M. Manuel fut la cause d'un tumulte extraordinaire. Pour la première fois, le Palais-Bourbon avait vu des gendarmes dans son enceinte... C'était une parodie du 18 brumaire, un coup d'État au petit pied qui sentait l'orangerie de Saint-Cloud bien plus que le génie de Bonaparte!
Les trois cents héros de M. de Villèle, si célèbres pour avoir été comparés aux trois cents Grecs de Léonidas, contribuèrent fortement à altérer la solidité du sanctuaire par leurs trépignements et leurs cris; dont le fond était toujours le même : Aux voix!... la clôture!... ce qui Simplifiait la discussion, mais non le bruit et le vacarme; car si les trois cents criaient pour qu'on lie parlât point, cent autres criaient pour qu'on parlât!
Les braves de M. de Villèle étaient également redoutables par leur poids; ils avaient non-seulement bon dos, mais gros ventre; et si l'un était toujours bien chargé, l'autre était rarement vide! C'était un devoir et un appétit de tous les instants! M. de Villèle n'en passera pas moins pour le plus habile de tous lès ministres de la restauration. Seul peut-être il a eu l'intelligence du gouvernement représentatif; seul il a su se créer une majorité à bien moins de frais que les ministres d'aujourd'hui ont dispersé la leur!...
Depuis 1830 on n'a empoigné personne... à la chambre, et on trouve une chambre quand on veut! Moins les trois cents Grecs toutefois... ce qui ne prouve pas qu'il n'y a plus de gendarmes en France, que la représentation nationale ne crie plus, et que les ventres ont cessé de s'arrondir, bien au contraire...
A partir de la promulgation de la Charte jusqu'à la fin de cette année, trente-deux budgets ont été votés dans le Palais-Bourbon à grands efforts d'éloquence; si nous comptons un milliard par budget, ce qui est au-dessous de la vérité, nous aurons pour total trente-deux milliards, c'est-à-dire deux fois autant que Napoléon, malgré ses longues et ruineuses guerres, a dépensé dans l'espace de quinze ans, et trois fois plus que la monarchie absolue la plus prodigue peut jeter au vent dans le même nombre d'années.
Depuis 1830, c'est-à-dire depuis le véritable règne de la liberté, la science économique a surtout fait beaucoup de progrès. Le chiffre de milliard est devenu suranné; c'est comme de la vieille tragédie. Sous la restauration on voyait encore de temps à autre un budget de huit à neuf cents millions ; c'était bien modeste pour le règne des émigrés; nous ne nous en doutions pas alors; mais aujourd'hui nous ne marchons qu'avec des budgets de 1,400,000,000, de 1,500,000,000. Mais aussi le contribuable, sous ce gouvernement de publicité, ne paye qu'après avoir été éclairé par la discussion ; il sait pourquoi, comment et pour qui il paye! Il sait que le milliard, aidé de son appoint, se distribue avec ordre, que tout le monde en a sa part... Excepté lui!
Il est incontestable que les gouvernements représentatifs, et surtout les véritables, sont les plus dispendieux, par la raison probablement que ce sont les meilleurs. En toutes choses il faut payer cher ce qui est bon!
Le prince de Condé, si généreux, si simple, ne se serait jamais douté que des hommes sortis du peuple voteraient dans son palais tant de milliards, tant d'impôts, tant de charges! Autres corvées du peuple, mais corvées légales, constitutionnelles, qu'il doit subir sans murmurer!... Il eût encore moins prévu que la révolution française naîtrait d'un mécompte de cinquante-sept millions, s'il avait pu deviner que nous, en état révolutionnaire, nous, retrempés à l'air de la liberté, nous prélassons aujourd'hui sans inquiétude et sans souci dans le gouffre d'un déficit qui dépasse vingt fois cette somme!...

MÉDITATION XXI. LE PLUS BEAU JOUR DE LA VIE.

Certains philosophes, non mariés, prétendent que le plus beau jour de la vie est celui où l'on se marie... où un rayon de soleil vient effleurer votre front incliné devant les autels, quand votre main passe au doigt de votre compagne l'anneau béni, gage éternel de votre alliance. Ils peuvent avoir raison pour le plus grand nombre des mortels, pour les amateurs de dot, pour les hommes sans destinée parlementaire! Mais pour un homme politique, le plus beau jour de la vie est celui de son admission à la chambre des députés. Ce jour-là il se marie, lui, à la représentation nationale, dont il ne craint ni les coquetteries ni les infidélités; et avec laquelle est permis le divorce... Avantage que cette représentation jalouse n'accorde à personne avec la plus belle moitié du genre humain. Quel jour, pour un homme qui aime son pays et compte une nombreuse famille!... C'est assurément le plus beau jour de sa vie!...
Il se berce d'illusions, d'espérances; l'avenir le plus brillant lui apparaît sous les couleurs les plus séduisantes... c'est le plus beau jour de sa vie!...
Son cœur s'épanouit comme une fleur aux premiers rayons d'un soleil printanier! Il respire plus librement, marche avec plus d'aisance, découvre en lui un mérite extraordinaire qu'il ne soupçonnait pas et dont il est tout prêt à faire hommage à son pays. Il ne se croyait qu'un homme supérieur; mais bah!... c'est le plus beau jour de sa vie!...
Il se promet d'être un orateur... S'il ne peut être Cicéron, il sera au moins Catilina!... Pardonnez-lui, c'est le plus beau jour de sa vie!...
Il se croit arrivé dans le temple de Solon pour faire la loi, sans se douter que c'est lui qui la recevra... Ne riez pas de lui... c'est le plus beau jour de sa vie!...
Il fait étalage de son désintéressement, regarde en pitié le ministère, s'engage à rie rien accepter ni pour lui-même, ni pour ses amis, ni pour ses proches... Ne l'écoutez pas... c'est le plus beau jour de sa vie!...
Il jure d'être fidèle au roi et à la Charte constitutionnelle... Laissez-le dire... c'est le plus beau jour de sa vie!...
Dans tous ses collègues il espère trouver des amis indulgents et dévoués... Pauvre homme!... c'est le plus beau jour de sa vie!...
§ IER. - DU MOMENT OU L'ON ENTRE.
Vous n'entrez pas comme un homme ordinaire. Votre première apparition dans la chambre des députés doit être imposante et majestueuse...
Et vera incessu patuit dea...
Vous n'êtes ni dieu ni roi, mais vous êtes souverain... souverain de par le peuple; une des quatre cent cinquante-neuf parties du pouvoir parlementaire, le plus jaloux et le plus défiant, le plus timide et le plus audacieux, le plus faible et le plus fort, le plus avare et le plus prodigue de tous les pouvoirs! Souvenez-vous de votre origine; mais en voulant être noble et grave, ne soyez ni guindé ni théâtral... Vous auriez l'air d'un acteur qui vient d'étudier son rôle! Tous les regards sont fixés sur votre personne ; gardez-vous de faire un faux pas; ce serait d'un triste augure pour votre conduite politique. Vous exciteriez d'ailleurs un mouvement d'hilarité parmi vos collègues, car rien n'est plus ridicule qu'un personnage sérieux et important sans une grande sûreté de jambes! Et une fois qu'on a ri d'un député, c'est pour toujours ; il devient la victime des moqueurs!...
Trop de timidité vous rend gauche, trop d'aplomb vous fait paraître avantageux. Un nouvel élu, s'il entend bien ses intérêts et les lois du monde poli, dont pourtant on n'est pas redevable au pouvoir législatif, répond par un salut gracieux aux marques d'attention de la chambre, et ne soutient pas ses regards avec effronterie. Il laisse errer sur ses lèvres un léger sourire qu'il prolonge et nuance autant que possible, jusqu'à la fin de la séance, mais sans efforts, sans grimaces, non comme un danseur d'opéra qui remplit sa pénible tâche dans un pas de trois! Nos législateurs s'y connaissent... je vous en avertis!... Alors le nouveau confrère est le bienvenu. On augure favorablement de ses talents; on vante son air ouvert, ses manières franches! Lui se raffermit d'autant plus sur ses jambes, et sourit de joie, de bonheur et d'orgueil!...
§ II. - DU MOMENT OÙ L'ON JURE.
Il n'est ici question que du serment représentatif. Chacun sait qu'immédiatement après la vérification des pouvoirs un serment solennel est toujours exigé. Le président, d'une voix forte et sonore, se plaît a en lire la formule, ainsi conçue : Jurez-vous, etc…
Le député doit répondre sur-le-champ, et également d'une voix forte et sonore: Je le jure!... Et voila souvent ce qui arrive :
Le député ne répond pas d'abord, ou répond d'une voix si faible, si sourde, qu'il est impossible de l'entendre. Le président le prie alors de jurer plus haut. Le député reprend son serment, mais d'un ton plus bas encore que la première fois, et tout le monde se déclare satisfait... On n'a pas entendu, mais on a cru lire le serment sur les lèvres du récipiendaire... Sufficit!
Le député n'en prononce quelquefois que la dernière syllabe; mais comme il la prononce avec rondeur et fermeté, on s'imagine qu'il n'a rien omis, et il s'est borné à dire : ure! Dans un mot composé de huit lettres, la dernière consonance, qui en forme trois et en est pour ainsi dire l'âme, est sujette à tromper les plus fines oreilles. La chambre ne s'aperçoit jamais de cet innocent escamotage.
Le député a encore une singulière manière de répondre quand il sort d'un pays où l'on ne parle pas français, comme l'Alsace ou l'Auvergne. Il jure en allemand ou dans un baragouin encore plus inintelligible, de manière que personne ne comprend ce qu'il dit ; et comme il croit parler français aussi bien qu'aucun de ses collègues, puisqu'il est né dans un département français, il s'étonne des éclats de rire causés par ses paroles, et répète le serment dans son patois barbare, serment qu'il dirait une troisième fois, si on ne le suppliait de se taire.
Parmi les députés qui le prononcent dans un langage intelligible et sonore, il faut distinguer plusieurs variétés de voix, dont les intonations peuvent donner une idée assez juste de leur humeur politique!
Il y a des voix de basse-taille, des voix de fausset, des voix de baryton...
Le fameux je le jure! Sortant d'une poitrine parlementaire comme du fond d'une caverne, a quelque chose de terrible et annonce en général le mécontentement...
Roucoulé en fausset, il devient burlesque, et décèle chez le député l'apogée de la jubilation... Si le fausset est incorrect, il n'en est que plus comique!...
Le serment de baryton est un mezzo entre le fausset et la basse... Il n'a point de couleur!
Je ne blesse point la vérité en me servant de ces termes. Tous ceux qui ont assisté à la prestation du serment représentatif savent que les députés le chantent bien plus qu'ils ne le disent!
J'ai souvenance d'un député qui entonna le sien en mi bémol... comme un air de bravoure, et de la voix la plus fausse!... Je me croyais à l'Opéra-Comique... Je ne parlerai pas des voix altérées par les rhumes, les catarrhes, les asthmes, les irritations de poitrine et autres maladies draconiennes, voix qui n'articulent qu'avec effort l'impitoyable serment; ces voix, malheureusement, ne sont pas rares a la chambre, mais il faut les plaindre et ne pas en rire!
La manière de lever la main est encore un point très-essentiel. Il faut que ce mouvement soit en harmonie avec les inflexions de la voix... Si vous avez le ton bref, le mouvement sera sec et heurté; il sera mœlleux, au contraire, si vous avez du miel dans vos paroles... Mais, doux pu rude, il aura de la grâce ou de la noblesse!...
Songez que vous jurez non-seulement a la face de M. le président, mais devant Dieu et la nation!...
Cette fraction de méditation pourra être consultée quand je traiterai de l'art oratoire.
DISTINCTION GRAMMATICALE.
On dit prêter et non pas donner serment...
Ce que l'on prête on peut le reprendre, ce que l'on donne ne nous appartient plus...
Voilà pourquoi les serments sont une monnaie courante à l'usage de tous les gouvernements...
La grammaire a quelquefois plus d'esprit que tout le monde!...
§ III. - DU MOMENT OÙ L'ON S'ASSIED.
Ce moment est très-épineux. Vous venez d'entrer et de prêter serment. Tout ému de ce travail, car c'est un travail à vous faire suer sang et eau ; fier, joyeux, content de vous-même et de vos collègues, respirant deux fois la vie dans cette atmosphère sacrée, vous ne savez plus trop que devenir, que faire de tant de bonheur et de gloire! Vous êtes surtout embarrassé de vos bras, de vos jambes, de votre corps! Vous êtes encore debout et le moment de vous asseoir a sonné... Oh! Ici prenez garde!... Pourquoi cela ...

Table des matières

  1. Sommaire
  2. INTRODUCTION.
  3. PREMIÈRE PARTIE : CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES
  4. DEUXIÈME PARTIE : CAMPAGNE ÉLECTORALE.
  5. TROISIÈME PARTIE : TACTIQUE PARLEMENTAIRE
  6. CONCLUSION.
  7. Table des matières
  8. Page de copyright