La FrontiĂšre
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La FrontiĂšre

Une fiction prémonitoire sur le futur conflit de 1914-1918

Maurice Leblanc

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La FrontiĂšre

Une fiction prémonitoire sur le futur conflit de 1914-1918

Maurice Leblanc

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À propos de ce livre

Une frontiĂšre source de nombreux conflits....des tensions entre un pĂšre et son fils....et un Ă©vĂšnement tragique qui survient sur la frontiĂšre... La frontiĂšre entre la France et l'Allemagne est ici le thĂ©Ăątre d'un roman historique chargĂ© de suspens et de rebondissements, comme seul le crĂ©ateur d'ArsĂšne Lupin savait les Ă©crire.Nous sommes en 1910. Quarante ans ont passĂ© depuis la dĂ©faite de la France Ă  Sedan et l'annexion de l'Alsace-Lorraine par l'Allemagne. Pourtant, Morestal, maire et conseiller de Saint-Elophe dans les Vosges, rĂȘve toujours de revanche et examine chaque jour de chez lui la frontiĂšre avec l'Allemagne, prĂȘt Ă  en dĂ©coudre. Lorsqu'une nuit le pĂšre Morestal disparaĂźt en patrouillant Ă  la frontiĂšre, l'incident prend rapidement un tour aussi dramatique qu'imprĂ©vu...La FrontiĂšre est un vĂ©ritable roman prĂ©monitoire car publiĂ© en 1911, il anticipe certains Ă©vĂ©nements qui vont prĂ©cipiter l'Europe dans la guerre de 1914/1918. Evidemment la dĂ©claration de guerre n'est pas sujette Ă  cet Ă©pisode, mais c'est la confrontation entre les esprits belliqueux et les pacifistes qui est ici analysĂ©e avec justesse par Maurice Leblanc.

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Informations

Éditeur
Books on Demand
Année
2019
ISBN
9782322135998
Édition
1
DeuxiĂšme partie

I

Suzanne Jorancé poussa la barriÚre et pénétra dans le domaine du Vieux-Moulin.
Elle Ă©tait vĂȘtue de blanc, toute fraĂźche sous un grand chapeau de paille d’Italie dont les brides de velours noir pendaient sur ses Ă©paules. La jupe courte dĂ©couvrait ses chevilles dĂ©licates. Elle marchait d’un pas rapide, en s’aidant d’une haute canne Ă  bout ferrĂ©, tandis que sa main libre froissait des fleurs qu’elle avait cueillies en route et qu’elle laissait tomber distraitement.
La paisible maison des Morestal s’éveillait au soleil du matin. Plusieurs croisĂ©es Ă©taient ouvertes, et Suzanne aperçut Marthe qui Ă©crivait, assise devant la table de sa chambre.
Elle appela :
– Je puis monter ?
Mais, Ă  l’une des fenĂȘtres du salon, Mme Morestal apparut et lui fit un signe impĂ©rieux :
– Chut ! taisez-vous !
– Qu’y a-t-il donc ? dit Suzanne aprùs avoir rejoint la vieille dame.
– Ils dorment.
– Qui ?
– Eh ! le pùre et le fils.
– Ah ! dit Suzanne... Philippe...
– Oui, ils ont dĂ» rentrer tard, et ils se reposent. Ni l’un ni l’autre, ils n’ont encore sonnĂ©. Mais, dites donc, Suzanne, vous ne partez donc pas ?
– Demain... ou aprĂšs-demain... Je vous avoue que je ne suis pas pressĂ©e.
Mme Morestal la conduisit jusqu’à la chambre de sa belle-fille et demanda :
– Philippe dort toujours, n’est-ce pas ?
– Je suppose, dit Marthe, on ne l’entend pas...
– Morestal non plus... Il est pourtant « du matin », lui... Et Philippe qui voulait vagabonder Ă  l’aube ! Enfin, tant mieux, le sommeil leur fait du bien, Ă  mes deux hommes. À propos, Marthe, vous n’avez pas Ă©tĂ© rĂ©veillĂ©e par les coups de feu, cette nuit ?
– Des coups de feu ?
– Il est vrai que votre chambre est Ă  l’opposĂ©. C’était du cĂŽtĂ© de la frontiĂšre... Quelque braconnier, sans doute...
– M. Morestal et Philippe Ă©taient ici ?
– Oh ! sĂ»rement. Il devait ĂȘtre une heure ou deux... peut-ĂȘtre davantage... Je ne sais pas au juste.
Elle reposa sur le plateau la thĂ©iĂšre et le pot de miel qui avaient servi au dĂ©jeuner de Marthe, et, par manie d’arrangement, elle mit en ordre, avec de mystĂ©rieux principes de symĂ©trie, les affaires de sa belle-fille et les objets de la chambre que l’on avait pu dĂ©placer. Tout bien fini, les mains immobiles, elle chercha des yeux un motif qui l’autorisĂąt Ă  rompre cette cruelle inaction. N’en dĂ©couvrant aucun, elle sortit.
– Comme tu es matinale, dit Marthe à Suzanne.
– J’avais besoin d’air... de mouvement... D’ailleurs, j’avais averti Philippe que je viendrais le chercher. J’aimerais voir avec lui les ruines de la Petite-Chartreuse... C’est ennuyeux qu’il ne soit pas encore levĂ©.
Elle semblait déçue de ce contretemps qui la privait d’un plaisir.
– Tu permets que je finisse mes lettres ? lui dit Marthe en reprenant sa plume.
Suzanne flĂąna dans la piĂšce, regarda par la fenĂȘtre, se pencha pour voir si celle de Philippe Ă©tait ouverte, puis s’assit en face de Marthe et l’examina longuement. Elle nota les paupiĂšres un peu fripĂ©es, le teint inĂ©gal, les menues rides des tempes, quelques cheveux blancs mĂȘlĂ©s aux bandeaux noirs, tout ce qui annonce les petites victoires du temps sur la jeunesse dĂ©faillante. Et, levant les yeux, elle se vit dans une glace.
Marthe surprit son regard et s’écria avec une admiration que n’altĂ©rait aucune envie :
– Tu es magnifique, Suzanne ! Tu as l’air d’une dĂ©esse triomphante. Quel triomphe as-tu remportĂ© ?
Suzanne rougit, et, gĂȘnĂ©e, elle prononça au hasard :
– Mais toi, Marthe, on croirait que tu es prĂ©occupĂ©e...
– En effet... peut-ĂȘtre... avoua la jeune femme.
Alors elle raconta que la veille au soir, se trouvant seule avec sa belle-mĂšre, elle lui avait dit les nouvelles idĂ©es de Philippe, l’esprit de ses travaux, son projet de dĂ©mission, et sa volontĂ© irrĂ©vocable d’une explication avec M. Morestal.
– Eh bien ?
– Eh bien, dĂ©clara Marthe, ma belle-mĂšre a bondi. Elle s’oppose absolument Ă  toute explication.
– Pourquoi ?
– M. Morestal a des troubles au cƓur. Le docteur Borel, qui le soigne depuis vingt ans, ordonne qu’on lui Ă©vite les contrariĂ©tĂ©s, les Ă©motions trop fortes. Or, un entretien avec Philippe pourrait avoir des suites funestes... Que rĂ©pondre Ă  cela ?
– Il faut que tu avertisses Philippe.
– Certes. Et lui, il devra, ou bien se taire et continuer une existence intolĂ©rable, ou bien affronter, et avec quelle angoisse, la colĂšre de M. Morestal.
Elle se tut un moment, puis, frappant la table de ses deux poings :
– Ah ! s’exclama-t-elle, si je pouvais prendre tous ces ennuis-lĂ  pour moi, et protĂ©ger la paix de Philippe !
Suzanne sentit toute sa violence et toute son Ă©nergie. Aucune douleur ne l’eĂ»t effrayĂ©e, aucun sacrifice n’eĂ»t Ă©tĂ© au-dessus de ses forces.
– Tu aimes beaucoup Philippe ? demanda-t-elle.
Marthe sourit :
– Le plus que je peux... Il le mĂ©rite.
La jeune fille Ă©prouva une certaine aigreur, et elle ne put s’empĂȘcher de lui dire :
– Est-ce qu’il t’aime autant que tu l’aimes ?
– Dame, je crois. Moi aussi, je le mĂ©rite.
– Et tu as confiance en lui ?
– Oh ! pleine confiance. Philippe est l’ĂȘtre le plus droit que je connaisse.
– Cependant...
– Cependant ?
– Rien.
– Mais si, parle... Ah ! tu peux m’interroger sans crainte.
– Eh bien, je pensais à ceci... Suppose que Philippe aime une autre femme...
Marthe Ă©clata de rire :
– Si tu savais comme Philippe attache peu d’importance à toutes ces questions d’amour !
– Admets, pourtant...
– Soit, j’admets, dit-elle, affectant d’ĂȘtre sĂ©rieuse. Philippe aime une autre femme. Il est fou de passion. Et alors ?
– Alors, qu’est-ce que tu ferais ?
– Ma foi... tu me prends au dĂ©pourvu.
– Tu ne divorcerais pas ?
– Et mes enfants ?
– Mais, s’il voulait divorcer, lui ?
– Bon voyage, M. Philippe.
Suzanne rĂ©flĂ©chit, sans quitter Marthe des yeux, comme si elle Ă©piait sur son visage une trace d’inquiĂ©tude, ou qu’elle voulĂ»t pĂ©nĂ©trer jusqu’au fond de sa pensĂ©e la plus secrĂšte.
Elle murmura :
– Et s’il te trompait ?
Cette fois, la pointe porta. Marthe tressaillit, touchĂ©e au vif. Sa figure changea. Et elle dit, d’une voix qui se contenait :
– Ah ! cela non ! Que Philippe s’éprenne d’une autre femme, qu’il veuille refaire sa vie sans moi, et qu’il me l’avoue loyalement, je consentirais Ă  tout... oui, Ă  tout, mĂȘme au divorce, quel que soit mon dĂ©sespoir... Mais la trahison, le mensonge...
– Tu ne lui pardonnerais pas ?
– Jamais ! Philippe n’est pas un homme Ă  qui l’on peut pardonner. C’est un homme conscient, qui sait ce qu’il fait, incapable d’une dĂ©faillance et que le pardon n’absoudrait pas. D’ailleurs, moi, je ne pourrais pas... non... en vĂ©ritĂ©, non.
Et elle ajouta :
– J’ai trop d’orgueil.
La parole fut grave, prononcĂ©e simplement, et rĂ©vĂ©lait une Ăąme hautaine que Suzanne ne soupçonnait pas. Devant la rivale qu’elle attaquait, et qui la dominait par tant de fiertĂ©, elle Ă©prouva une sorte de confusion.
Un long silence divisa les deux femmes, et Marthe prononça :
– Tu es mĂ©chante, aujourd’hui, n’est-ce pas, Suzanne ?
– Je suis trop heureuse pour ĂȘtre mĂ©chante, ricana la jeune fille. Seulement, c’est un bonheur si Ă©trange ! J’ai peur qu’il ne dure pas.
– Ton mariage...
– Je ne veux pas me marier ! dĂ©clara Suzanne avec emportement... Je ne le veux Ă  aucun prix J’ai horreur de cet homme... Il n’y a pas que lui au monde, n’est-ce pas ? Il y en a d’autres... d’autres qui m’aimeront... Moi aussi, je suis digne que l’on m’aime... et que l’on m’offre sa vie !...
Il y avait des larmes dans sa voix, et un tel accablement sur son visage, que Marthe eut envie de la consoler comme elle le faisait en pareil cas. Pourtant elle ne dit rien. Suzanne l’avait blessĂ©e, non point tant par ses questions que par son attitude, par une certaine ironie de l’accent, et par un air de dĂ©fi qui se mĂȘlait Ă  l’expression de sa douleur.
Elle prĂ©fĂ©ra couper court Ă  une scĂšne pĂ©nible dont le sens lui Ă©chappait, mais qui ne l’étonnait pas trop de la part de Suzanne.
– Je descends, dit-elle, c’est l’heure du courrier, et j’attends des lettres.
– Ainsi donc, tu me laisses ! dit Suzanne d’une voix entrecoupĂ©e.
Marthe ne put s’empĂȘcher de rire.
– Ma foi, oui, je te laisse dans cette chambre... à moins que tu ne refuses d’y rester...
Suzanne courut aprĂšs elle et, la retenant :
– Tu as tort il suffirait d’un mouvement, d’un mot affectueux... Je traverse une crise affreuse, j’ai besoin de secours, et toi tu me repousses... C’est toi qui me repousses, ne l’oublie pas... C’est toi...
– Entendu, dit Marthe, je suis une amie cruelle... Seulement, vois-tu, ma petite Suzanne, si c’est l’idĂ©e de ce mariage qui te dĂ©traque Ă  ce point, il serait bon d’avertir ton pĂšre... Allons, viens, et calme-toi.
En bas, elles trouvùrent Mme Morestal, un plumeau à la main, un tablier autour de la taille, et livrant le combat quotidien contre une poussiùre qui n’existait, d’ailleurs, que dans son imagination.
– Vous savez, maman, que Philippe fait toujours la grasse matinĂ©e ?
– Le paresseux ! Il est prùs de neuf heures. Pourvu qu’il ne soit pas malade !
– Oh ! non, fit Marthe. Mais tout de mĂȘme, en remontant, j’irai voir.
Mme Morestal accompagna les deux jeunes femmes jusqu’au vestibule. Suzanne s’éloignait dĂ©jĂ , sans un mot, avec sa figure des heures mauvaises, comme disait Marthe, lorsque Mme Morestal la rappela.
– Tu oublies ton bñton, petite.
La vieille dame avait saisi le long bùton ferré et le retirait du porte-parapluies. Mais, tout à coup, elle se mit à bouleverser les cannes et les ombrelles en marmottant :
– Tiens, c’est assez drîle...
– Qu’y a-t-il, demanda Marthe ?
– La canne de Morestal que je ne retrouve pas. Elle est toujours ici cependant.
– Il l’aura peut-ĂȘtre posĂ©e ailleurs.
– Impossible ! Ce serait la premiùre fois. Et je le connais Comment se fait-il ?... Victor !
Le domestique accourut.
– Madame ?
– Victor, comment se fait-il que la canne de monsieur ne soit pas là ?
– Pour moi, madame, j’ai idĂ©e que monsieur est dĂ©jĂ  sorti.
– Sorti ! Mais il fallait me le dire... je commençais Ă  m’inquiĂ©ter.
– Je viens de le dire à Catherine.
– Mais pourquoi supposez-vous ?...
– D’abord, monsieur n’a pas mis ses bottines à la porte comme d’ordinaire... M. Philippe non plus...
– Quoi ! fit Marthe, M. Philippe serait sorti Ă©galement ?
– Et de trùs bonne heure... avant que je ne me lùve.
Malgré elle, Suzanne Jorancé protesta :
– Mais non, ce n’est pas admissible...
– Dame, reprit Victor, quand je suis...

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