Gardons la pêche
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Gardons la pêche

Récit d'une interruption médicale de grossesse

  1. 300 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Gardons la pêche

Récit d'une interruption médicale de grossesse

À propos de ce livre

Énergique et souriante, Camille, que ses proches appellent Milou, croque la vie à pleines dents. Elle est entourée de son mari et de ses amies et portée par un job qui la dynamise. Heureuse mère de trois enfants, elle attend un petit quatrième. Ce bébé, elle l'aime déjà et le surnomme Melba.Pourtant, un matin d'avril, l'examen échographique laisse entrevoir une malformation qui peut s'avérer lourde de conséquences pour le bébé. Milou se voit arrêtée dans son élan aussi brutalement que soudainement. Que faire? Garder cet enfant dont son mari ne veut plus? Se résoudre à se séparer du bébé?Avec franchise et non sans humour, Camille Mortier aborde la difficile question du choix, et des décisions qui en découlent lorsqu'une femme doit envisager de mettre un terme à sa grossesse. Où s'arrête l'injonction sociale, et où commence le sacrifice de soi? Doit-on suivre son intuition et aller à l'encontre de son entourage ou, au contraire, apprendre à renoncer pour le mieux de tous?Un récit résolument optimiste, qui permet de comprendre, pas à pas, ce qu'une femme peut traverser tout au long de cette épreuve si particulière qu'est l'interruption médicale de grossesse.

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Informations

Année
2020
ISBN de l'eBook
9791030217865

1

– Maman ?
Nous étions enfin le vendredi 6 avril et je maudissais la matinée sous pression qui s’annonçait, alors j’entendis ce mot sans lui accorder la moindre attention. J’étais pressée, cernée par l’appréhension, et je n’avais pas envie d’accorder du temps à mes enfants de si bonne heure. Je refusais d’écouter les garnements qui se levaient trop tôt : ils n’avaient qu’à patienter dans leur lit jusqu’à ce que 7h30 sonne.
J’étais là, plantée en face de ce fichu miroir qui me grossissait, et j’alternais devant ma poitrine rebondie un chemisier bleu et une blouse à motifs d’inspiration indienne qui cachait mon bourrelet abdominal. Il fallait que j’aie l’air sérieuse et professionnelle, mais à la fois décontractée et bien dans ma peau. J’étais une nana plutôt naturelle : autant j’adorais porter des robes à froufrous, autant je ne portais que rarement des bijoux. L’objectif pour moi, c’était d’être coiffée en trois gestes et habillée avec la première tenue qui me tombait sous la main.
En enfilant mon jean quasi neuf, je remarquai qu’il avait déjà des traces blanches aux genoux et que je devais en choisir un autre. Je pestai à nouveau, n’écoutai pas le « Maman ? » qui récidivait dans la pièce voisine et conclus que, de toute manière, les femmes se mettaient elles-mêmes sous pression : qu’avais-je besoin d’être jolie aujourd’hui ? Personne ne me reprocherait ce satané bouton à la base du nez ou mes cheveux en bataille.
– Mâman !
L’intonation de Maïa avait changé et se faisait plus insistante.
J’enfilai une première paire de bas, que je filai instantanément. Une seconde, que je trouai à nouveau, ce qui m’énerva passablement. Une troisième, trop chaude pour cette belle journée printanière, mais qui avait le mérite de résister à mes gestes maladroits et précipités. Je glissai mes pieds dans mes chaussons élimés mais confortables, en attendant de les compresser, juste avant de sortir dans la rue, dans une paire d’escarpins bleu nuit qui me feraient mal au talon.
– Mââman !
La voix de Maïa se faisait chaque fois plus pressante et je sentais monter en moi une tension qui raidissait mes articulations. Chacun de mes muscles était en effervescence. J’étais seule pour gérer nos trois enfants en bas âge car Marco n’avait rien trouvé de mieux que de fixer rendez-vous à son collègue dès potron-minet afin de fuir au mieux l’organisation houleuse des matins trop pressés. En temps normal, m’occuper seule des enfants le matin ne me posait aucun problème, mais aujourd’hui j’aurais apprécié qu’il fît un effort pour me donner un coup de main. Si j’avais sollicité son aide, il m’aurait épaulée, mais j’en avais marre de lui demander constamment de penser à l’organisation familiale. Puisque me seconder n’était pas naturel pour lui, je préférais assumer seule. Comme d’habitude, je devais me débrouiller et jongler avec mes trois vies : de mère, d’épouse et de femme active. Ce vendredi était un jour particulièrement anxiogène puisque j’allais être inspectée devant ma classe de 1ère12. J’étais professeur de français au lycée Marie Curie et je me félicitais alors d’enseigner dans un des trop rares établissements scolaires qui portaient le nom d’une femme. Sans être une féministe endurcie, j’avais trop conscience du statut précaire qu’avait obtenu la femme dans la société moderne et des efforts que nous devions toutes faire pour que le travail de nos paires soit autant reconnu que celui des hommes.
Perdue dans mes pensées, j’appliquai machinalement du mascara sur mes cils clairsemés et jetai un coup d’œil satisfait à mon image apprêtée. J’étais dorénavant prête à affronter monsieur Ywszedybel, mon inspecteur, et il ne me restait plus qu’à préparer mes trois enfants pour leur journée d’école et de crèche.
– Mamaaann !
– J’arrive, ma louloute ! Tu es réveillée ? Tu veux que je vienne t’aider à sortir du lit ?
À ce moment-là, j’aurais aimé pouvoir ouvrir mes classeurs et relire le cours que j’allais faire devant mon inspecteur, mais je devais mettre ma vie professionnelle en pause une petite heure pour gérer ma vie familiale. En avançant jusqu’à la chambre de ma fille, je m’adressai à Maïa d’une voix douce dans le but de la faire patienter, juste le temps de ramasser un vêtement rose qui traînait par terre et un livre déchiré qui n’avait rien à faire là. Je m’énervai toute seule face au capharnaüm qui régnait constamment dans cette maison. J’entrouvris la porte, souris à ma Poupée d’amour, me glissai dans la pièce et filai ouvrir les volets. Le jour plongea jusqu’à Maïa qui fit une moue exquise pour éviter les premiers rayons de soleil qui l’éblouissaient. J’adorais quand elle clignait ainsi de l’œil en relevant le côté gauche de sa lèvre fine. Ma Princesse se redressa dans son lit à barreaux, engoncée qu’elle était dans sa gigoteuse en coton blanc, et m’adressa un sourire à croquer. Je sentis mon cœur se gonfler d’amour. Je m’approchai de Maïa pour la délivrer de son sac de couchage encombrant. Je me plaçai entre la fenêtre et ma fille afin de la protéger des rayons agressifs du matin par mon ombre bienfaitrice, lui caressai les cheveux et la pris dans mes bras. Comme à son ordinaire, Maïa s’enquit de son biberon « Biron de lait ? » d’une voix aiguë et ascendante, puis répéta « Maman ? » sept fois consécutives, avec l’insistance d’un bébé de dix-neuf mois qui n’a que quelques mots à son actif mais compte bien se faire comprendre grâce à sa détermination sans faille.
– Qu’as-tu, ma puce ? Tu veux me dire quelque chose ?
Maïa me fixa d’un regard incisif, prit sa respiration et lança fièrement un « T’aime, Maman ! » plus sincère que tous les bouquets de roses rouges vendus par le fleuriste du coin. Après cette déclaration expéditive, ma fille enfouit vivement ses joues rebondies entre mon cou et mon épaule droite et me prodigua un câlin aussi touchant qu’envahissant. Elle me serra de toutes ses forces frêles et étala au passage un reste de morve dans mon cou. L’effet de cette effusion d’amour fut immédiat et violent : à fleur de peau depuis le matin à cause de mon inspection à venir, je sentis mes joues rosir de plaisir et mon cœur s’emplir d’un souffle de bonne humeur. En un quart de seconde, ma fille m’avait donné plus de vitalité que n’importe quelle pilule de Guronsan survitaminée. Je m’envolai vers la chambre des mes aînés portée par le vent d’une énergie nouvelle.
Avant de pénétrer dans leur chambre, je fis un crochet par le salon pour y déposer Maïa sur le canapé. Je lui proposai un biberon de chocolat à température ambiante et pris quelques secondes pour savourer la combinaison de mes trois vies. Je pensai à ma collègue Maud qui à trente-six ans n’avait ni mec ni enfant et qui, ce matin, inspectée elle aussi, pouvait tout à loisir prendre son temps et se concentrer sur la journée à venir. Maud était libre, certes, mais personne d’aussi délicieux que Maïa ne lui avait susurré des mots d’amour à l’oreille pour la gaver d’audace dès le matin. Je goûtai avec délectation la course matinale dans laquelle je m’engageais et enveloppai Maïa d’un regard tendre.
–  Marius, Myrtille, mes petits Ours En Peluche, il faut vous réveiller.
Marius et Myrtille se réveillèrent de bonne humeur, prêts à affronter une dure journée scolaire au cours de laquelle ils apprendraient à se débrouiller comme ils pouvaient avec une langue française bien compliquée et des mathématiques encore plus complexes. Ils filèrent s’installer aux côtés de Maïa et attendirent, lovés dans les coussins confortables du salon, leurs biberons de lait.
Pendant qu’ils déjeunaient, je ne pus malheureusement pas leur accorder le temps que j’aurais aimé partager avec eux. Je me rendis près de la salle de bain, attrapai une chaussette fuchsia qui traînait au sol et fis trois pas pour la jeter dans le bac à linge sale. Je ratai mon tir, me baissai pour ramasser la socquette et la reposer soigneusement sur la pile de linge à laver d’où elle glissa inexorablement pour achever sa course sur le parquet du couloir, à tout juste trois mètres de là où elle était à 7h32. Je réalisai le nombre de gestes que j’avais effectués pour rien et me jurai, la prochaine fois, de traiter les chaussettes perdues avec moins de déférence. Je déplacerai d’un coup de pied désinvolte les vêtements usagés jusqu’au coin de couloir appelé pompeusement « buanderie ». Du bac de linge propre, j’extirpai une tenue pour chacun des enfants et entrepris de les repasser rapidement, ce que je fis d’un geste précis et efficace.
À 8h18, les trois enfants furent habillés et prêts pour partir en classe. J’enfilai à chacun d’eux un blouson mi-saison, chaussai mes escarpins de cuir et attrapai les cinq sacs dont la famille avait besoin pour passer une journée ordinaire : mon sac à main minimaliste, mon sac de cours, le cartable rigide de Marius, le sac à dos léger de Myrtille et le baluchon de Maïa. Je soufflai un grand coup pour prendre conscience qu’une partie non négligeable de ma journée était déjà effectuée et claquai la porte que je ne fermais jamais à clé.
Maman, on est en retard aujourd’hui ?, demanda Myrtille sans même me regarder.
– Non, ma chérie, nous ne sommes pas en retard, mais pas en avance non plus, alors avance !
Je sanglai Maïa dans sa poussette, accrochai mon barda volumineux aux poignées et poussai l’engin tout en ayant conscience que, de profil, je devais avoir une allure comique, les fesses ainsi pointées vers l’arrière à cause des sacs pendus qui m’empêchaient de me tenir droite. J’imposai à la troupe une marche rapide qui convenait d’ailleurs parfaitement à Marius, ce sale gosse intrépide qui ne demandait qu’à courir en tête du convoi et que je regardai d’un air amusé.
Après avoir franchi le portail de l’école des Petits Rosiers, j’embrassai rapidement mon fils et accompagnai Myrtille jusque dans sa classe. Après avoir fait un dernier coucou à Myrtille par la fenêtre, j’empoignai la poussette de Maïa et marchai d’un pas déterminé vers la crèche des Gommettes. Là, la petite courut à son casier pour poser son baluchon. Je saluai chaleureusement Isabelle et Patricia, les deux auxiliaires de puériculture à qui je confiais ma fille les yeux fermés, et confirmai que je viendrais bien chercher Maïa à 16h30. Je cherchai cette dernière du regard, mais elle était déjà partie jouer avec Côme et Georges, ses deux inséparables copains, sans me dire au revoir. Confiante, je quittai la crèche et pensai enfin à la journée éprouvante qui m’attendait.

2

Alors que je trottais comme à mon habitude plus vite que tous les autres piétons sur le trottoir, je sentis progressivement le stress monter en moi. Je marchais précipitamment, je doublais tout le monde, je slalomais entre les obstacles humains et les irrégularités du trottoir : j’avais besoin de cet excès de vitesse pour extérioriser la pression que j’avais en moi depuis le réveil et que je canalisais p...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Copyright
  4. Titre
  5. Dédicace
  6. 1
  7. 2
  8. 3
  9. 4
  10. 5
  11. 6
  12. 7
  13. 8
  14. 9
  15. 10
  16. 11
  17. 12
  18. 13
  19. 14
  20. 15
  21. 16
  22. 17
  23. 18
  24. 19
  25. 20
  26. 21
  27. 22
  28. 23
  29. 24
  30. 25
  31. 26
  32. 27
  33. 28
  34. 29
  35. 30
  36. 31
  37. 32
  38. 33
  39. 34
  40. 35
  41. 36
  42. 37
  43. 38
  44. 39
  45. Remerciements