Le doctorat et la recherche en création
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Le doctorat et la recherche en création

  1. 290 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Le doctorat et la recherche en création

À propos de ce livre

Cet ouvrage présente le résultat des réflexions engagées depuis 2015 par le réseau d'écoles doctorales Création, Art & Médias (Rescam) sur le doctorat de recherche rn création, et concrétisées lors de deux colloques: le premier organisé à l'université Toulouse-Jean Jaurès en 2016, le second à la Sorbonne Nouvelle en 2017. Afin de s'interroger sur cette pratique de recherche si particulière que constitue la recherche en création et sur les formats possibles des doctorats qui en résultent, les différents acteurs français et étrangers de la recherche en art, côté université et côté école d'art ont été sollicités.

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Informations

Année
2020
ISBN de l'eBook
9782336894683

1. Penser la recherche en création

Pierre-Damien Huyghe

Devenir chercheur

Qu’il soit pertinent d’associer les deux mots de recherche et de création, beaucoup l’admettent aujourd’hui. Il y a pourtant dans cette association de quoi étonner. S’il doit être question de recherche, faut-il entendre que cette recherche, dès lors qu’y seraient concernés les champs supposés de la création, aurait des traits inévitablement supplémentaires ? Mais alors comment pourrait-elle être estimée et reconnue comme recherche au même titre que tout autre ? Sa valeur n’en serait-elle pas ipso facto limitée à la reconnaissance de quelques spécialistes bientôt eux-mêmes isolés du collectif plus global des chercheurs ? Ne s’agit-il pas finalement de revendiquer un droit d’exception ? Quant à « création », depuis quand et pour quelles raisons ce terme vaut-il lui-même ? Ses déterminations historiques sont tout de même assez lourdes et, pour une part, très métaphysiques. Comment se fait-il qu’il ne paraisse pas déplacé quand en substance il s’agit d’arts ? Pourquoi ce dernier mot : « art » n’est-il pas lui-même prononcé de préférence ?
Du devenir création de l’art et de la perplexité dans laquelle me met ce devenir, je ne traiterai pas ici. Je l’ai déjà fait, sûrement pas assez, mais tout de même un peu, dans Contre-temps, de la recherche et de ses enjeux, arts, architecture, design1. Sans oublier l’idée qu’il puisse y avoir, dans le champ des arts, comme dans tout autre d’ailleurs, des particularités, mais sans non plus présupposer que ces particularités fonderaient un droit à l’exceptionnalité en matière de recherche, je consacrerai plutôt ma réflexion à une question générale, celle de savoir comment on devient chercheur. Certes cette question n’est pas tout à fait ignorée. Mais, faute d’être assez posée, elle est souvent abandonnée au sourd travail de manœuvres pragmatiques capables de modifier une situation sans qu’il en soit rendu compte et sans qu’aucun responsable n’y apparaisse clairement. Appelons cela une modernisation. Ou une réforme en douce. Je parle ici, en fait, d’un certain glissement de langage, celui qui affecte aujourd’hui la notion de « direction de recherche ». Je ne doute pas que l’expression soit encore valide : l’habilitation à diriger les recherches est toujours un diplôme dont l’obtention requiert pas mal de travail. Mais dans la pratique (je pense aux courriers d’impétrants par exemple, à tel ou tel petit document à caractère administratif aussi bien), il n’est pas rare de trouver, en substitution, l’expression d’un « cadre de recherche ». De plus en plus souvent ceux qui, voulant entamer des études doctorales, s’adressent à moi en raison de mes compétences supposées ou, plus prosaïquement, de mon statut, me requièrent à ce titre : l’encadrement. Je lis même parfois ce mot que, je l’avoue, je n’aime pas : « encadreur ». Comment une telle dérive langagière est-elle possible ? Qu’y a-t-il dans la direction qui ne soit pas au goût du jour ? S’agit-il d’une situation particulière au champ des arts ? Y a-t-il dans ce champ tout particulièrement un désir, sinon une volonté, de signifier qu’en recherche il n’y a pas de patron ? Les considérations qui suivent ne traiteront pas directement de ces questions. Mais elles devraient permettre d’en rendre à terme l’examen possible.
Dans cet esprit, je rappellerai d’abord que diriger, ce n’est pas inévitablement commander, ni même seulement, s’il m’est permis d’emprunter ce mot, manager. L’interprétation patronale de la direction n’est donc pas la seule possible. Nous pouvons tout aussi bien comprendre que ce qui est en question, c’est une orientation. Et que ce qui se discute, ou plutôt non : ce qu’il faudrait faire venir à la discussion, c’est la source et la responsabilité de cette orientation. Peut-être convient-il, dans cette affaire, de ne pas subjectiver trop rapidement. Je ne me demande pas seulement, ou pas exactement, ou pas d’abord : qui (quel sujet, quelle personne) est voué à orienter ? Non, je me demande, plus abstraitement en apparence, de façon moins surdéterminée en réalité : qu’est-ce qui, dans les faits, oriente et peut orienter une recherche ? Mais cette expression même de la question n’est pas satisfaisante dans sa formulation, car il y est présupposé (surdétermination encore) que la recherche est déjà là à laquelle il faudrait donner un sens (non pas une signification, mais quelque chose comme une perspective et un chemin). Or justement, voici la première affaire, la question de principe ou de commencement : qu’est-ce qui peut faire qu’un travail se réalise dans le sens d’une recherche ? Ou, mieux encore, davantage au fait de la dimension métaphorique du langage en la matière : qu’est-ce qui fait qu’un travail s’oriente dans la direction d’une recherche ? C’est-à-dire, en subjectivant tout de même finalement : comment devient-on chercheur ?
Pareille interrogation n’a pas toujours eu l’actualité ‒ l’importance, sinon l’urgence ‒ qui est à présent la sienne. C’est qu’en effet nous sommes dans un contexte où « recherche » est un mot exigé, obligé et, comme tel, de plus en plus inévitable quand bien même, ainsi que sûrement déjà dans tout ce que je viens de dire, il est là dans nos phrases, au cœur de nos propos et propositions, sans être explicitement étudié ni défini. D’où vient-il lui-même ? Dans quelles conditions et pour quelles raisons l’a-t-on fait valoir ? On ne le sait pas vraiment. Ce qui est sûr, c’est que des institutions, parfois seulement des parts de cursus institutionnels, qui n’avaient pas affaire à lui sont aujourd’hui sommées d’y recourir, et y recourent en effet. Il en résulte ceci que la qualité de « chercheur » est désormais susceptible de moins qu’avant dépendre d’une expérience mais d’impliquer davantage la capacité performative du langage. Il n’est pas impossible qu’il y ait recherche où l’on se sent en devoir de placer le terme, où par conséquent il est dit et où, en raison de ce jeu de langage à la fois commandé et obéi, performé sur ces deux registres, il est accepté comme valable. Ce qu’on n’examine pas assez à chaque fois qu’on admet une déclaration comme « je suis chercheur » ou « nous sommes une équipe de chercheurs », c’est ce qui se tient ou devrait se tenir en préalable de cette déclaration pour qu’elle ne se tienne pas seulement dans l’ordre d’une assertion performée. Je viens de dire ma position sur ce point : il y faut, il y faudrait d’abord une certaine « expérience ». Qu’est-ce à dire ? Je répondrai en quatre moments.
1) L’expérience dont je parle n’est pas l’expérimentation des scientifiques, mais un certain temps de vie, une traversée qu’il faudrait endurer. Si je dis ce mot : « endurer », ce n’est pas pour exclure là toute espèce de bonheur, c’est essentiellement parce qu’il est question de quelque chose qui ne va pas sans durée. Je n’insiste pas sur ce qui peut être craint dans cette durée : qu’on y perde ou qu’on ait le sentiment d’y perdre du temps. Chacun comprendra qu’il existe des forces pour s’activer contre pareille idée d’un temps qui pourrait sembler perdu. Ces forces sont économiques s’il est vrai qu’il n’est plus guère d’économie qui ne se gère ou s’administre sans impliquer une épargne du temps. Concluons-en que l’expérience ‒ le préalable ‒ dont je parle n’a guère de chance de se produire s’il faut a priori compter le temps. À une recherche qui ne ferait pas que se déclarer et se performer pour répondre au plus vite à l’obligation qu’il s’en fasse, il faut un temps de préalable qui n’est pas d’emblée économique (ou pas a priori mesuré dans le registre d’une économie). Non, ce temps doit être éprouvé.
2) Dans la période qui vient de s’écouler où se sont trouvées concernées par la recherche des institutions qui n’y étaient jusqu’alors pas vouées et/ou qui n’avaient pas le droit de délivrer des diplômes impliquant le mot (écoles d’art, écoles d’ingénieurs mais aussi entreprises, notamment par ces divers biais ou intermédiaires que sont les contrats CIFRE (Convention industrielle de formation par la recherche) ou la participation à des engagements dans des programmes d’agences nationales ou européennes), dans cette période, donc, nous avons entendu formulée l’idée qu’il y aurait un « modèle universitaire » en la matière. D’une part, cette formulation biaisait avec la réalité car, réellement, il eût été plus juste de parler, comme je viens au reste de le faire, d’un droit réservé à organiser et à sanctionner ce qui pouvait être dit recherche, et non d’un modèle à imiter. Il eût été plus juste également, et par conséquent, d’envisager dans quelle mesure il pouvait être opportun d’étendre ce droit sans toucher à sa forme, c’est-à-dire en faisant de l’institution qui le détenait une référence. Si tel n’a pas été le cas, c’est que, d’autre part, on ne voulait pas réellement dire qu’il y avait à l’université un modèle. En fait, il était davantage question de contester la validité et la viabilité de ce supposé « modèle ». En clair, on suggérait qu’une autre voie était possible et, désormais, autorisable. Il en est résulté un assez remarquable élargissement de la composition des équipes de chercheurs. Sont à présent susceptibles d’intégrer ces équipes des personnes qui, non seulement ne sont pas invitées à s’y inscrire de façon durable, mais encore n’ont pas a priori de titre à cet égard. C’est sur ce point, l’a priori du titre, que je voudrais insister. C’est une autre façon, plus institutionnelle il est vrai, de nommer le préalable ‒ l’expérience ‒ au sujet de quoi je cherche à faire réfléchir.
3) Revenons un instant au glissement terminologique que je viens de suggérer. À l’hypothèse d’un « modèle » universitaire, j’ai en effet substitué celle d’une « référence ». J’ai voulu faire entendre par là un certain impensé dans l’usage du mot « modèle ». Si j’ai procédé de la sorte, c’est notamment pour indiquer que, si ce mot devait convenir en matière de recherche, ce serait moins en raison de l’histoire de l’université que de celle des sciences. Là se trouve tout un préalable archéologique au préalable d’expérience dont, comme je l’ai annoncé, je viendrai en effet, tout à l’heure, à parler. C’est un fait qu’à un certain moment les scientifiques qui écrivaient jusqu’alors volontiers des « mémoires » et des « études » se sont mis à écrire des « recherches ». Il ne me semble pas inintéressant de rappeler ce temps de divergence des intitulés à un moment où fleurissent parmi nous nombre de syntagmes (par exemple celui « d’étudiant-chercheur » relevé récemment dans un ouvrage visant à faire un état des lieux de la recherche) et de demandes (par exemple celle, adressée en master à des étudiants de statut, de produire un « mémoire de recherche ») qui organisent au contraire la confusion des genres. Dans le glissement historique du vocabulaire, que s’est-il passé ? Le moment concerné est celui de Claude Bernard, assurément amateur du mot « recherche » dans ses écrits, même lorsqu’il n’en fait pas titre. Or, ce que signale C. Bernard, c’est qu’il ne s’agit plus seulement d’observer des phénomènes qui, pour ainsi dire, se donneraient d’eux-mêmes aux esprits sagaces, mais d’aller les chercher délibérément, de les produire même, ou d’employer des « procédés d’investigation simples ou complexes pour faire varier ou modifier, dans un but quelconque, les phénomènes naturels et les faire apparaître dans des circonstances ou dans des conditions dans lesquelles la nature ne les présentait pas ». Se trouve dans cette phrase la première définition stricte et rigoureuse de la notion d’expérimentation. Je la cite pour souligner le préalable qu’elle implique elle-même assez manifestement, celui d’un « but » en raison duquel la « nature » est menée à faire paraître des phénomènes dans des circonstances qui ne sont pas elles-mêmes « naturelles ». Ce but est ici dit « quelconque ». Le reste de l’ouvrage comporte cependant l’idée que, s’il existe, ce but, c’est parce que celui qui se propose de l’atteindre ‒ le chercheur, dirions-nous aujourd’hui ‒ s’inquiète des limites du savoir établi. Son esprit est moins curieux qu’en quelque endroit insatisfait. Le préalable dont je ne cesse d’invoquer la notion, l’expérience dont je veux traiter depuis le début de ma communication trouvent ici leur expression la plus condensée. Il s’agit de se re...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Arts & Médias
  4. Titre
  5. Copyright
  6. Sommaire
  7. Préface
  8. 1. Penser la recherche en création
  9. 2. Quels doctorats pour la recherche en création ?
  10. 3. Expériences et témoignages
  11. « Le doctorat en arts, design, mode : une exception française ? » Table ronde animée par Sarah Piovezan
  12. Les auteurs
  13. Adresse