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Dans et hors de la Science
Réflexions à propos de la science et de la société
- 208 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
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À propos de ce livre
La science ne se construit pas dans la solitude. La recherche s'inscrit dans les pratiques sociales d'un milieu et d'une époque. Mais, la croissance rapide de nos sociétés a créé une scission entre nos concitoyens et les "spécialistes", perçus comme perdus dans leurs savoirs et pratiquant des rites complexes et incompréhensibles. Le "peuple" et les "élites" ont cessé de se comprendre et une méfiance réciproque est née entre ces deux catégories qui fonctionnent pourtant selon les mêmes règles.
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Informations
Les sciences
et les sociétés
La diversité des sciences
de l’homme
« Geisteswissenschaften » et Sciences humaines
Le concept de « sciences humaines », on l’a vu, est propre à la science française, il remonte à la Révolution de 1789 et s’opposait alors aux « sciences de Dieu », en pointant que ces dernières étaient nécessairement définitives et exactes, même si l’homme ne pouvait pas toujours exprimer l’infinie sagesse divine. Les sciences humaines apparaissaient alors comme plus fragiles que celles se rapportant à Dieu. Depuis la Révolution de 1789 les choses ont bien changé et le lien entre les deux groupes initiaux de sciences s’est complètement estompé.
Les appellations anciennes ont simultanément évolué et aujourd’hui on parle également des « sciences de l’homme », on complète parfois cela, comme au CNRS, en précisant « sciences de l’homme et de la société ». Puis les « sciences de l’homme » se sont aussi opposées aux « sciences de la nature », distinction qui pointe déjà dès la fin du XVIIe siècle, mais qui s’épanouira à partir du XVIIIe siècle. Selon le vocabulaire édité sous la direction de Barbara Cassin, le terme allemand de « Geisteswissenschaften » se réfère plutôt à une conception objective de l’esprit humain, et on y introduit parfois l’opposition entre « compréhension » et « explication ». Enfin, en anglo-américain, le terme anthropology est employé couramment comme équivalent de nos « sciences de l’homme », tandis que les social sciences, concernent davantage les applications pratiques de la sociologie et de l’économie, et que les human sciences se rapportent aux considérations qui concernent le vivant1
Des sciences à la recherche d’une dénomination
Ce qui apparait dans ces désignations ce sont les différences culturelles et chronologiques. Elles renvoient à une variance intrinsèque des concepts et des significations dans les sciences de l’homme à la différence très marquée avec le groupe des sciences dites exactes et même avec les sciences expérimentales. Et, en effet, les résultats sont éventuellement différents lorsqu’on choisit d’autres concepts ou simplement lorsqu’on élargit ou lorsqu’on rétrécit les concepts utilisés à des champs plus vastes ou, au contraire, moins vastes.
Il en est déjà ainsi lorsqu’on travaille au sein d’une seule communauté linguistique et dans la langue de celle-ci. Combien davantage en sera-t-il ainsi dans la mesure où la même démarche sera entreprise dans une autre communauté linguistique dont les usages diffèrent des nôtres ? Prenons un exemple dans chacune de ces deux situations. Les enquêtes démographiques consistent notamment à interroger sur le terrain des populations témoins. On passera sur le choix du terrain et des démographes ou des enquêteurs qui procèderont à l’enquête. Mais déjà il est clair que ces choix conditionneront également les résultats de la recherche en se focalisant sur une certaine culture et par l’emploi d’une langue déterminée, en supposant qu’elle soit la même que celle employée par les individus interrogés.
Une nécessité en sciences de l’homme
En Europe francophone, il y a quelques décennies, lorsqu’on entreprenait une enquête démographique concernant la fertilité on utilisait par exemple les termes de « famille », de « parents » ou de « père » et « mère » de même que celui d’« enfant » ou de « couple ». À l’époque, dans nos pays, la famille traditionnelle prévalait encore et les termes utilisés avaient encore une signification à peu près stable dans l’ensemble des pays francophones d’Europe. Il en allait aussi de même pour les différentes tranches d’âge des hommes et des femmes.
Les temps ont rapidement changé depuis ces quarante ou cinquante années qui se sont écoulées. Presque tous les termes cités dans le paragraphe précédent ont subi des modifications plus ou moins importantes à l’intérieur de leur champ sémantique. Dès lors, entreprendre ou reprendre et étendre la même étude démographique que celle réalisée il y a près d’un demi-siècle avec les mêmes questionnaires et sur le même terrain engendrerait de nombreuses erreurs dans la collecte des données et aussi dans leur assemblage et dans leur interprétation.
Des enquêtes aux résultats variables
Si nous reprenons le même exemple en réfléchissant aux deux enquêtes évoquées ci-dessus, mais en les transposant cette fois, par exemple, en Afrique Noire Subsaharienne dans des pays francophones. On aboutirait alors sur la base des mêmes questions à quatre groupes de résultats sans doute fort différents, deux en Europe et deux en Afrique Noire. Ceci se vérifierait alors que dans les quatre enquêtes les sujets interrogés seraient tous francophones et que le laps de temps entre l’enquête la plus ancienne et la plus récente est relativement bref.
Ce genre d’écart apparait encore comme bien plus important dans la mesure où à ces variations des paramètres tels que supposés ci-dessus s’ajouteraient encore des variations lexicologiques, méthodologiques et culturelles dans l’hypothèse où les enquêteurs travailleraient dans des démarches interdisciplinaires. Dans ce cas il serait essentiel de paramétrer tous les termes utilisés, de préciser le cas échéant dans chacune des langues les différences linguistiques et culturelles de chacun des termes, de vérifier si la méthodologie permet et de quelle manière d’entreprendre la démarche envisagée et dans quelles limites.
Les variations culturelles et linguistiques
Il importe de distinguer soigneusement les variations culturelles et linguistiques des approches découlant des courants multiculturalistes. Ces derniers proposent une approche surplombante de plusieurs langues et cultures, tandis que la question qui est traitée ici se rapporte au contraire à une approche plurielle qui concerne séparément deux ou davantage de cultures et de langues. Dans la première approche, les langues et les cultures sont clairement distinguées, ce qui n’est pas le cas dans la seconde dans laquelle on travaille généralement dans des milieux ou des sociétés qui sont intrinsèquement multiculturelles.
Précisons ici les différences entre le multilinguisme et le plurilinguisme. Claude Hagège, après André Martinet2, considère que le multilinguisme est une notion qui s’appliquerait uniquement aux États dans lesquels plusieurs langues ont le statut de langues officielles. Ce serait le cas, par exemple, de la Belgique, de la Suisse, du Luxembourg, etc. En revanche la notion de plurilinguisme ne concernerait que les individus qui pratiquent plusieurs langues.
Multi- et pluri-, langues ou cultures
D’une manière simple et illustrée on peut distinguer à la suite d’Atenao, une « Agence de traduction et d’interprétation professionnelles », située notamment à Aix-en-Provence (FR), « le multilinguisme c’est lorsqu’au sein d’une société coexistent plusieurs langues » et que « des individus parlent une langue et vivent aux côtés d’autres individus dont ils ignorent la langue », ainsi « par exemple, des Arméniens et des Suédois vivant en France », tandis que « le plurilinguisme regroupe les individus qui communiquent dans des langues différentes pour différentes activités : par exemple, un grec qui parlerait le français dans sa vie professionnelle, le grec en famille, et l’espagnol dans sa vie sociale du fait qu’il vit en Espagne ».
Dans la recherche, sauf dans le domaine de l’apprentissage des langues, la notion de multilinguisme et de multiculturalisme l’emporte fréquemment sur celles de pluriculturalisme et de plurilinguisme. À titre d’exemple, le dictionnaire rédigé sous la direction de Barbara Cassin, et que nous avons déjà mis à contribution à plusieurs reprises ici, ne donne aucune entrée au pluriculturalisme ou au plurilinguisme, mais uniquement au « multiculturalism », et uniquement dans sa version anglaise3, ce que judicieusement Philippe Raynaud, auteur de l’article, complète par une brève notice sur les « Cultural Studies », dénomination réservée aux États-Unis aux études culturelles des populations non anglophones du pays.
La diversité des langues et des cultures
La reconnaissance de la diversité linguistique et culturelle, les deux étant le plus souvent traités conjointement alors que la diversité des langues ne recoupe pas toujours la diversité des cultures, a fait de grands progrès dans le monde contemporain. Cependant alors que de nombreuses villes, notamment du Proche-Orient, étaient multilingues avec de très nombreux citoyens plurilingues il y a encore quelques décennies, les plurilingues contemporains sont le plus souvent des individus qui ont appris plusieurs langues au cours de leur vie. Sans doute la situation de ces villes qu’on évoquera ci-dessous était-elle relativement instable et liée à l’existence de communautés allophones, notamment juives, séfarades, pratiquant en leur sein un plurilinguisme actif. Ces communautés sans avoir totalement disparu sont devenues aujourd’hui moins visibles.
On peut citer, jusqu’il y a moins d’un siècle encore, les grandes villes du Proche-Orient étaient fréquemment multiculturelles. Leurs populations pratiquaient dans les usages quotidiens fréquemment plusieurs langues simultanément selon leurs interlocuteurs, ainsi à Istanbul vers les années 1960, il n’était pas rare de rencontrer des adultes qui parlaient couramment cinq ou six langues, il en allait de même au Caire et dans d’autres grandes métropoles, notamment dans la diaspora grecque ou dans la diaspora juive, comme à Corfou, Salonique, etc., ou au Liban et en Palestine. Dans ces villes et dans ces pays, on était de plain-pied dans des situations de multiculturalisme et les individus de pluriculturalisme et de plurilinguisme.
La diversité humaine et sa difficile gestion
La raison de cette évolution différente, peu étudiée jusqu’à présent semble-t-il, serait peut-être à rechercher dans la difficulté pour des États contemporains de gérer des communautés multiculturelles et multilingues. La gestion des droits à accorder à chaque minorité tant sur le plan de l’usage des langues que sur celui des différences et des divergences dites « culturelles » sont très nombreuses et assez souvent conflictuelles tant envers l’État central qu’envers toutes les communautés en cause inversement, si l’État est uniculturel et que les diversités linguistiques sont incarnées, si on peut dire, dans des territoires bien délimités et distincts les uns des autres, d’éventuelles diversités culturelles se superposant à des diversités linguistiques, ne rendent pas la gestion du tout plus difficile, surtout si l’État en question est de type fédéral ou confédéral.
Quoi qu’il en soit de toutes ces distinctions et des réalités qu’elles traduisent, elles soulignent à l’envi les nombreux problèmes que soulèvent les différences culturelles autant que les différences linguistiques. Elles rendent immanquablement les recherches, surtout de terrain, bien que pas uniquement, plus complexes et délicates.
Mais la diversité humaine ne s’arrête pas, bien entendu, aux variations linguistiques et culturelles. Si on prend de grands courants religieux, idéologiques ou philosophiques et qu’on les étudie à travers le temps, on s’aperçoit que le plus souvent ces courants divergent progressivement en sous-courants, la plupart du temps, rivaux les uns des autres, sinon ennemis. L’exemple qui vient aussitôt à l’esprit est aussi bien toutes les ramifications issues du christianisme, que celles, nombreuses également, s’enracinant dans le judaïsme et cela depuis bien longtemps4. Ou encore la ramification des courants issus du libéralisme, sont le socialisme, puis tous les courants issus de ce dernier jusqu’au communisme, lui-même diversifié selon les époques et les pays.
Toutes ces variations contraignent les exégèses à préciser, toujours plus finement, le sens des nuances utilisées dans chacune de ces explications religieuses ou philosophiques, etc. Ce qui rend caducs les textes écrits avant ces spécifications, ne serait-ce que parce que le vocabulaire descriptif de chacune de ces variantes modifie nécessairement l’état de toutes les descriptions antérieures.
Interprétation(s)
La variabilité des concepts est entrainée par la variation des usages, et notamment par le jeu des cultures et des langues en cause dans chaque description comme dans chaque recherche. Toutefois, indépendamment de ces facteurs toute interprétation est, comme le rappelle déjà – et cette fois à juste titre – l’étymologie du mot une négociation entre plusieurs hypothèses ou, en l’occurrence, plusieurs prix. On sait, en effet, que le mot vient du latin interpres dont le sens premier est « un prix qui se situe entre » deux ou plusieurs prix pour un objet, par exemple. L’intermédiaire en cette affaire négocie alors un prix qui sera accepté par toutes les parties, alors que les propositions et les attentes initiales s’en écartaient en plus ou en moins.
Cette notion originelle rend bien, par son caractère très commercial, comment une interprétation se constitue et prend forme. On retrouve cette acception fort ancienne lorsqu’on utilise le terme « interprète » pour désigner une personne qui traduit une conversation d’une langue dans une autre. Il est à noter d’ailleurs que si le passage d’une langue à une autre concerne un texte écrit, ce ne sera pas le mot d’« interprète » qui sera utilisé, mais bien le mot de « traducteur ». De fait, la fonction et la spécificité d’un « traducteur » sont fortement différentes de celle d’un « interprète ». C’est également le terme d’« interprète » que l’on emploie pour désigner un artiste qui joue un rôle au théâtre ou au cinéma. Ou encore un instrumentiste ou un artiste lyrique lorsqu’ils « interprètent » une pièce musicale.
La négociation du sens
Dans toutes ces situations, le rapport sémantique avec le sens premier d’une personne qui négocie un prix avec d’autres personnes est, d’une certaine façon, encore présent. Ce que toutes ces situations expriment à travers l’usage du mot « interprète » ou de mots de même origine, c’est que la réalisation d’une pièce picturale, musicale, théâtrale ou cinématographique, ou encore la transposition orale d’énoncés d’une langue dans une autre peut varier d’un interprète à une autre. Sans pour autant que les variations ne soient trop distantes les unes des autres.
De la même manière que dans l’expression de départ, un prix quelconque pour un objet, par exemple, peut éventuellement varier quelque peu d’une situation ou d’un contexte à un autre, mais sans que ces différences deviennent trop importantes, il en va de même dans les exemples repris ici. Le texte « interprété » doit rester le « même » que le texte de départ. Le prix « interprété » doit également rester « identique » pour le vendeur et pour l’acheteur, et ainsi de suite dans tous les exemples. L’écart doit donc rester « acceptable » et « raisonnable » pour que les parties puissent « faire affaire », sans qu’aucune d’entre elles n’ait ensuite le sentiment d’avoir été flouée.
Déjà chez l’émetteur et chez le récepteur
Il doit en être de même dans les « interprétations » de notions, de concepts ou d’énoncés tels q...
Table des matières
- Couverture
- 4e de couverture
- copyright
- Titre
- Quelques mots en débutant
- Des différents genres de textes
- La recherche scientifique et ses aléas
- Les sciences et les sociétés
- Quel aurait pu ou dû être le propos de ce livre ?