
- 134 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
Fan et genger studies : le retour
À propos de ce livre
En 2017 sortait le titre Fan et gender studies: la rencontre, un premier volume qui travaillait, autour de thématiques comme les séries ou la musique, les imbrications, parfois directes, entre études de genre et études de fans. Ce second volume poursuit les réflexions autour des minorités de genre et de sexualité, des stéréotypes de genre ou de l'engagement des fans dans les mouvements sociaux féministes ou queer. Nous nous déplaçons vers de nouveaux supports: les jeux vidéo, le cinéma, la littérature et la bande dessinée. Ce second volume est enfin l'occasion pour nous de proposer une réflexion sur la place des fan studies dans les études culturelles.
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Informations
1ère partie :
FANS, LITTERATURE(S) ET GENRE
Incorporer les fans dans le comic book, l’exemple de Matt Fraction.
Nicolas LABARRE18
Introduction
Matt Fraction fait partie des scénaristes vedettes de la bande dessinée populaire, en contexte nord-américain. J’entends par là une bande dessinée née dans les années 1970, offrant aux auteurs un grand contrôle sur leur création mais restant liée aux structures de distribution classique de la bande dessinée populaire, et au comic book en particulier. Comme d’autres, son parcours l’a mené de productions indépendantes vers les super-héros populaires de Marvel (Iron Man, Thor, les X-Men, et une série très remarquée sur le personnage de Hawkeye) dans un premier temps, puis de nouveau vers l’indépendance, en faisant fructifier la notoriété acquise auprès du public comme de la critique.
Depuis 2013, Fraction publie en effet exclusivement pour l’éditeur Image Comics, et a travaillé sur trois séries avec des dessinateurs différents : Satellite Sam (2013-2015) avec Howard Chaykin, une icône de la bande dessinée indépendante des années 70 et 80, Sex Criminals (2013-) avec Chip Zdarsky, et Ody-C (2014-) avec Christian Ward19. Ces récits très différents ont pour point commun d’aborder centralement les questions de genre, dans les deux sens du terme : le genre littéraire et le genre comme identité sexuelle. Ils ont aussi en commun d’être publiés par un éditeur où les créateurs ont l’entière responsabilité de leur création, avec des frais de structures faibles, qui permettent aux titres d’être rentables à des seuils bien plus bas que chez Marvel ou DC (Beat Staff, 2015).
Cependant, là où une série Marvel ou DC bénéficie d’une image de marque forte et de l’appui d’un grand groupe transmédiatique (Disney et Time-Warner, respectivement), chaque titre édité par Image Comics doit justifier son existence par ses mérites propres, et éventuellement par le statut de ses auteurs. On le devine, les relations avec les fans jouent un rôle crucial dans cette entreprise.
Chez Image Comics, Matt Fraction met donc rapidement en place un système d’échange soutenu avec ses fans, utilisant les moyens de dissémination numériques mais aussi les comic books eux-mêmes. C’est à cette boucle d’interaction que j’aimerais m’intéresser ici, en montrant comment les comics de Fraction tressent dans leur péritexte et jusque dans leur texte un rapport constant avec les fans. Les trois séries mentionnées plus haut présentent dans ce registre une nette gradation, allant d’une interaction minimale dans le cas de Satellite Sam à un va-et-vient permanent dans et autour de Sex Criminals, et. C’est donc sur cette dernière que portera plus spécifiquement notre analyse, en nous intéressant aussi à la représentation genrée des fans dans le récit.
1. Satellite Sam, Ody-C : un rapport traditionnel aux fans
Les univers fictionnels dans lesquels se déroulent les intriguent de Satellite Sam et d’Ody-C limitent la possibilité d’intégrer la figure du fan à la diégèse. La première de ces deux séries s’intéresse à un meurtre et à ses conséquences dans l’univers de la télévision américaine du début des années 50. La seconde rejoue l’Odyssée d’Homère en la déplaçant dans un univers de science-fiction dans lequel les protagonistes sont devenues des femmes. La mise en scène du fan s’y limite par la force des choses à d’éphémères clins d’œil : dans Satellite Sam n° 4, un technicien de studio lance par exemple à propos d’un acteur distrait par le derrière d’une actrice au point d’en oublier sa réplique : qu’il «… lorgne son cul comme tous les garçons d’Amérique » (n° 4, p. 18)20.
Satellite Sam ne comporte pas non plus de dialogue avec les lecteurs dans son péritexte, qui se limite à des résumés de l’intrigue et à des annonces pour d’autres séries Image. Fraction, interrogé à ce sujet par un lecteur, a d’ailleurs semblé regretter cette option :
« – Hey Matt, je n’ai vraiment rien à dire, sinon que j’apprécie vraiment Satellite Sam, alors que tous les autres commentaires que vous recevez semblent venir de fans de Sex Criminals ou de Hawkeye. […]
– Je crois qu’il faut que je sois plus proactif pour m’adresser aux pervers, aux dépressifs et aux maniaques sexuels qui lisent Satellite Sam comme tout le reste de ce que j’écris. Peut-être que pour le deuxième arc, à partir du numéro 6, nous essaierons un courrier de lecteur. »
(« Hey Matt, I Really Have Nothing to Say Other Than… », 2014)
Ce projet de courrier de lecteur ne se matérialisera pas, et la série offre le spectacle d’une interaction avec les fans entièrement délocalisée en dehors des comic books eux-mêmes, notamment sur les différents sites et blogs animés par Fraction (mattfraction.com). Le projet, conçu comme une série « ouverte », s’achève après deux ans et 15 numéros, malgré des rumeurs de continuation reprise depuis.
Ody-C, dont le premier numéro paraît en novembre 2014, quelques mois après le message cité ci-dessus, présente une imbrication plus ambitieuse. Dès son deuxième numéro, la série réserve quatre pages à un volubile courrier des lecteurs, accompagné par des notes des créateurs sur la réalisation de la série. On reconnaît là un des mécanismes essentiels de mise en contact non seulement des fans avec les créateurs, mais encore des fans entre eux depuis les années cinquante (Pustz, 1999, p. 48). Matt Fraction et son dessinateur, Christian Ward, utilisent cet outil d’échange familier pour mettre en avant l’érudition et l’ambition de la série dans le processus d’adaptation d’un classique littéraire. Le passage des lettres physiques au courrier électronique a en la matière pour seul effet notable de diminuer le délai de réponse des lecteurs, permettant le plus souvent à un numéro d’inclure des commentaires sur celui qui l’a directement précédé.
Dotée d’une adresse de courrier électronique dédiée, annoncée dans le numéro 1, Ody-C est également munie d’un hashtag sur Twitter, #ODYC, qui semble quant à lui avoir émergé spontanément, puisqu’il ne figure nulle part dans le premier numéro. Il est utilisé très rapidement pour reproduire dans le comic book lui-même des messages publiés sur Twitter, sans commentaire ni réponse de la part des auteurs.
Le ton de ces tweets sélectionnés fait écho à celui des lettres retenues : insistance sur l’originalité de l’adaptation, éloge du dessin et de la mise en couleur de Ward, etc. La démarche est cependant nettement différente, puisque certains de ces messages ne sont a priori pas adressés aux créateurs, mais relèvent plus de discussions décentralisées autour de la série. Le message ne saurait être plus clair : Fraction et Ward s’intéressent aussi à ces échanges non-hiérarchisés et à ces appréciations spontanées, au point de les inclure dans l’œuvre elle-même. Une boucle de rétroaction prévisible et fructueuse s’engage alors, puisque certains des lecteurs cités vont dire sur Twitter leur joie d’avoir été cités, contribuant à la diffusion de la série et renforçant leur engagement vis-à-vis de celle-ci. La culmination de cette invitation des fans dans les comic books est le recrutement à partir du numéro 4 de Dany Colman, une spécialiste de lettres classiques, sur la base d’un courrier envoyé aux auteurs. Colman signe par la suite une rubrique régulière de commentaire et d’explication du socle mythologique de la série, qui atteste de la possibilité de basculer rapidement d’un statut à un autre.
Mis en place rapidement, ce dispositif d’interaction – lettres et impression de tweets sélectionnés – est maintenu au fil des 12 numéros actuellement publiés. Ces interactions sont en revanche absentes des recueils souples publiés à intervalle régulier, et qui constituent une source de revenus significatifs pour les séries Image Comics, dans la mesure où le format se prête mieux aux ventes en librairie, physiques ou en ligne. Le rapport aux lecteurs et aux fans est ainsi masqué à l’occasion du changement de format, ce qui n’a en soi rien d’inhabituel, mais paraît d’autant plus notable à la lumière des efforts déployés lors de la publication mensuelle.
Si Satellite Sam est le niveau 0 de l’interaction avec les fans dans le comic book lui-même (Fraction et Chaykin ont répondu à nombre d’interviews et tous deux participent à des conventions ou séances de signature), Ody-C propose une intégration nettement plus poussée. Malgré cette différence de stratégie, les courbes des ventes pour les deux séries sont remarquablement similaires au même point de leur publication, comme le suggère la courbe ci-dessous. La quasi-identité des chiffres de vente semble suggérer que le nom de Matt Fraction suffit à attirer environ 6 000 à 7 000 lecteurs fidèles sur un projet de long cours, mais guère plus. Contrairement à Satellite Sam, Ody-C a cependant bénéficié d’une édition reliée, qui suggère un succès de librairie légèrement supérieur ; ce léger différentiel ne s’explique pas uniquement par les efforts réalisés auprès des fans, mais ceux-ci y contribuent certainement.

Fig. 1. Ventes des comics écrits par Matt Fraction pour Image Comics depuis 2013
Au-delà des similitudes entre Ody-C et Satellite Sam, ce graphique attire l’attention sur le remarquable succès de la troisième série écrite par Fraction pour Image Comics, Sex Criminals. Il peut sembler tautologique d’affirmer que plus la série a de succès et plus elle est susceptible d’avoir des fans. Dans la suite de cet essai, je vais m’efforcer de montrer qu’au-delà de cette évidence, Fraction et le dessinateur Chip Zdarsky construisent délibérément un rapport complexe et flatteur avec les fans au sein de Sex Criminals, qui ne découle pas seulement du succès de la série, mais contribue aussi à l’expliquer.
2. Sex Criminals, de riches interactions
Des trois séries étudiées ici, Sex Criminals est la seule à avoir engendré une communauté de fans dédiés, les brimpers, une communauté de surcroît nettement féminine. Contrairement à Ody-C et à Satellite Sam, Sex Criminals se déroule en effet dans un monde contemporain, dans lequel certaines personnes reçoivent d’éphémères superpouvoirs au moment de l’orgasme. Le récit fait alterner les narrateurs de numéro en numéro, à la fois par des dispositifs de focalisation du point de vue et par un accès direct aux pensées de ces personnages, mais il a pour centre de gravité et première narratrice Suzie (Suzanne), une jeune femme travaillant dans une bibliothèque qu’elle s’efforce de sauver d’une fermeture annoncée.
L’intrigue de Sex Criminals est mise en route par sa rencontre avec Jon, qui arrête lui aussi le temps en ayant un orgasme. La série chronique l’évolution de leur relation, ainsi que leur découverte progressive d’autres personnages possédant un don similaire, sous l’œil d’une « police du sexe » autoproclamée. Ces fils narratifs ne cessent de s’entremêler, en mobilisant un riche catalogue de personnages secondaires.
Comme les deux autres séries étudiées ici, Sex Criminals accorde une large place aux questions de genre. Interrogés sur la série, Fraction et Zdarsky ont expliqué, sur un ton pince-sans-rire qu’ils avaient d’abord envisagé une bande dessinée centrée sur des « blagues de bite » (Reese, 2014 ; JR, 2015) avant de construire un récit s’intéressant aux multiples dynamiques sociales articulées autour de la sexualité. De fait, la série met l’accent sur une représentation positive et joyeuse de la sexualité, non seulement déculpabilisée mais encore source d’un pouvoir, au sens strict. À mesure que l’univers décrit s’étend, les auteurs font aussi la part des résistances, des dissonances et des différentes formes de répression qui s’opposent à cet idéal, comme une façon de reconnaître que les utopies racontent peu d’histoires intéressantes. Sur le plan générique, l’hybridation délibérée entre le récit de super-héros, un genre plutôt masculin, et la bande dessinée romantique, une étiquette que revendique occasionnellement Fraction (Ching 2017), propose un contrat de lecture délibérément hybride.
Dès le deuxième numéro, un courrier des lecteurs abondant donne à lire le lien entre les auteurs et leurs lecteurs. Le ton dominant est enthousiaste, et les lettres saluent la complexité du dispositif, le caractère politique et militant du propos politique ou encore la tendresse de l’écriture. On le devine, ce récit qui fait le lien entre le genre (littéraire) et l’intime est compatible avec la position du fan et les pratiques d’appropriation des récits médiatiques. Fraction et Zdarsky vont cependant d’emblée plus loin que dans la plupart des comic books. Ils utilisent en effet cet espace pour promouvoir d’autres modes de communication (Tumblr, Twitter, etc.), mais aussi pour adresser à leur lecteur un certain nombre de conseils sexuels – sex tips – entre humour et recommandations sérieuses. La charge intertextuelle d’une telle pratique est considérable, puisque les conseils sentimentaux et sexuels sont généralement associés à la féminité et aux publications dédiées au public féminin.
Ce choix pe...
Table des matières
- Couverture
- 4e de couverture
- Titre
- Copyright
- Remerciements :
- SOMMAIRE
- ÉDITO. Croiser fan et gender studies : entre expressions identitaires et identifications communautaires
- Fan & Gender studies : l’introduction du retour
- 1ère partie : FANS, LITTERATURE(S) ET GENRE
- 2ème partie : FANS, JEUX VIDEO & QUESTIONS DE GENRE
- 3ème partie : FANS & CINEMA
- CONCLUSION : Être soi et être académique dans les études de fans
- Collection « Passage aux actes »