Entretiens inédits avec Claude Sautet
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Entretiens inédits avec Claude Sautet

  1. 316 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Entretiens inédits avec Claude Sautet

À propos de ce livre

Réalisateur majeur du cinéma français de la Seconde moitié du XXe siècle, Claude Sautet (1924-2000) est, après sa mort, de plus en plus estimé par la critique et le grand public. Ces entretiens inédits que l'auteur, confident et ami, a enfin décidé de publier, couvrent quinze années de la vie et de l'œuvre du réalisateur. Témoignage unique d'un artiste-créateur qui se penche sur ses films et, par endroits, sur ceux de ses confrères; c'est aussi une radiographie de la société française de son époque.

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Informations

Cinquième entretien 17 avril 1982

Quand vous voulez faire un film, vous songez d’abord à un personnage précis, ou bien à une situation que vous voulez reconstituer ?
Cela tourne plutôt autour d’un personnage dans l’époque.
L’idée de départ c’est un personnage ?
Oui, et puis à partir de ce que je veux montrer du personnage, je cherche la situation et l’essaie.
Vous avez des critères pour le choix d’un personnage…
Il y a des cas où la situation est donnée par le sujet comme dans Max. Pourtant le personnage est complètement modifié par rapport à ce qu’il était dans le livre original, puisque moi j’en ai fait un grand bourgeois déclassé. Dans le livre, il était un ancien parrain.
Je parle des films qui n’ont pas été des adaptations.
Ce sont des personnages dans leur maladie d’époque.
Vous essayez d’adapter la situation au personnage.
Oui.
Et en fonction de cette situation le personnage peut changer.
Oui, c’est-à-dire qu’au départ, j’imagine un type de personnage, ce qu’il est dans la vie, ce après quoi il court, ce qu’il a raté, ce qu’il ressent, ce qu’il donne, ce qu’il reçoit, ses frustrations… Et puis à partir de là, je cherche à trouver des situations dans lesquelles je le vois placé en état de lutte avec son environnement. Et c’est à partir de là que j’imagine des situations qui le font vivre. Alors je cherche une situation qui le présente en état de vie non-artificiel. Et en plus je vais chercher des situations qui créent une tension dramatique, qui font un récit qui va de A à Z, avec un début, un milieu, une fin. À partir du moment où je suis très familier avec le personnage, je cherche… D’abord il n’y en a pas qu’un, il y en a plusieurs. Je cherche d’autres personnages. Quelques fois il y a d’autres personnages qui deviennent plus importants que le premier, et puis à ce moment, on doit déboucher sur une, deux, ou trois situations assez fortes qui font une histoire.
Mais ça vous arrive de réfléchir à un personnage, puis quand vous allez le mettre dans une situation donnée, vous trouvez que ce que vous avez pensé ne correspondait pas très bien à cette situation ?
Oui, je prends des exemples très concrets. Dans Vincent, François, Paul, le personnage de Reggiani dans le roman, était un auteur pareil au film, en panne d’écriture et il était tué en mai68 sous les barricades. Alors d’abord ça me paraissait tout à fait invraisemblable, parce que ça ne correspondait pas à mai68. J’ai décidé qu’au contraire, il n’allait pas aux barricades, il restait jusqu’à la fin de sa vie sans pouvoir écrire son roman, c’est-à-dire sans lui donner d’anecdote en plus. Et le personnage de Vincent dans le livre, se suicidait à la fin du premier chapitre. Alors je le trouvais extrêmement déprimant et son état ne faisait pas avancer le film. Je me suis dit : « mais si ce personnage qui au fond déclinait socialement ne se suicide pas, qu’il soit toujours en train de garder la tête hors de l’eau… ». J’ai discuté longtemps avec Néron cette hypothèse, c’est-à-dire d’entretenir tout le film autour de ce personnage de Vincent qui croit s’en sortir, qui n’en sort pas et puis qui descend petit à petit. Et pour remplacer l’idée de mort qui était dans le personnage, j’ai inventé un infarctus qui est un signe de mort.
Vous cherchez à définir le statut social de vos personnages, c’est important ?
Ah oui. Je reviens au cas de Vincent. On a longtemps hésité avant de lui donner une petite entreprise (une PME) en difficulté financière.
Vous faites des recherches là-dessus ? Vous allez sur le champ…
Oui on a fait des recherches, on a mis très longtemps pour se fixer sur la mécanique générale. À un moment lui dans le roman devait être garagiste, alors ça m’embêtait, je ne sais pas pourquoi ça m’inspirait pas. Alors on a cherché dans l’imprimerie… Puis en enquêtant, on s’est aperçu que ce qu’il y a le plus en France c’était des petites entreprises de mécanique générale. Personne ne connaît, mais c’est ce qu’il y a le plus en France…
Comment vous enquêtez ? Vous envoyez des assistants sur place…
Oui qui repèrent et après j’y vais, on va voir, on discute avec les types, on voit les endroits…
Vous faites ce travail habituellement pour tous les films ?
Oui, il y en a dans lesquels c’est important, quand c’est des terrains que je ne connais pas. Mais en général il ne faut pas se tromper. Ce qu’on trouve c’est ce qu’on attendait, ce qu’on cherchait. Pour le personnage de Vincent, il s’est trouvé que tous les petits chefs d’entreprise que j’ai rencontrés, lui ressemblaient. Au bord de la faillite, ils coulaient, ils se remontaient, ils se remontaient pas, ils étaient toujours criblés de dettes. C’est toujours à peu près les mêmes histoires. Et puis à ce moment-là je me suis dit : « je vais prendre Montand », parce que comme j’avais fait César et Rosalie, que c’était un type qui était très triomphant, très vainqueur dans ses affaires, ça m’intéressait de le reprendre mais dans la situation d’un type qui ne s’en sort pas. Alors je voyais bien un contraste entre son dynamisme un peu enfantin et sa vulnérabilité socio-économique. Alors à partir du moment où je me suis dit, « ça va être Montand », j’ai quand même gardé des points de César et Rosalie, parce que c’est là où l’acteur intervient, il devient lui-même un personnage et c’est un type qui a un tempérament et je le respecte.
Vous avez un penchant particulier pour les bourgeois. Vous les connaissez mieux que les autres catégories sociales ?
Ah oui, surtout les petits bourgeois.
Qu’est-ce qui les différencie des autres ?
Ce que je pense c’est que la petite bourgeoisie a une tendance à s’installer dans une vie confortable, sécurisée, qui la protège de l’environnement externe.
Dans un ouvrage important, Histoire des passions françaises, Theodore Zeldin écrit que ce qui différencie les classes bourgeoises des classes populaires, c’est la distinction dans la pensée, le langage, le comportement social, les vêtements, la façon de se tenir…
Oui c’est peut-être ça, il y a ce qu’on appelle la formation du goût. Il y a un compromis entre le conformisme et l’individualisme qui est très particulier de la petite bourgeoisie. Un conformisme qui fait qu’on est un peu dans le mood. On est un peu au courant de tout. On copie un peu ce qui vient de la grande bourgeoisie… C’est vrai. Mais ce qui me frappe surtout, c’est qu’ils sont très spectateurs de ce qui les entoure, c’est-à-dire qu’ils ne se mouillent pas beaucoup politiquement.
Vous cherchez à les distinguer au niveau du comportement, des vêtements, du langage…
Ah oui absolument, ça c’est très rigoureux. C’est cette espèce de bon goût moyen.
Au niveau des dialogues ça vous pose un problème…
Oui… Mais je m’y connais assez bien parce que j’en fais partie.
La situation professionnelle influe sur le comportement affectif.
Oui.
On remarque souvent que la rupture affective s’accompagne de déboires financiers…
Oui c’est ça. Comme ils n’ont pas beaucoup de ressources idéologiques et qu’ils essayent de vivre et de se développer dans une atmosphère sécurisée, quand les échecs les atteignent, ça met en cause la totalité de leur psychologie.
La priorité n’est-elle pas donnée au social, au professionnel, plutôt qu’à l’affectif ?
Oui, et c’est un cas très typique de l’époque qu’on a vécue, dans laquelle effectivement l’homme se réalise par la réussite de ses entreprises.
L’usure se sent de la même façon chez les hommes et les femmes ?
C’est plus les hommes. Chez les femmes il n’en est pas question. Je ne dis pas que c’est ça maintenant, je dis que c’est ça par rapport à une époque que j’ai connue. Je crois que ça va changer. Les femmes vont se trouver très souvent dans la même situation, mais à mon avis, pas de la même façon qu’un homme. Je crois qu’un homme est beaucoup plus victime de son image de représentation.
Et le processus de la faillite est incontestable…
Ah oui. Je crois que dans tous mes films, tous les types sont en faillite. Même dans Une histoire simple, le personnage de Bruno Cremer qui est ce qu’on appelle un cadre réussi a conscience d’un échec, d’être dans un compromis pragmatique par rapport à la société. La preuve en est qu’il se sent, malgré lui, responsable du licenciement puis de la mort de Jérôme.
Justement, le cas de Cremer est intéressant. C’est parce qu’il est solide dans son travail qu’il n’a pas de déboires affectifs. Il tient tête pratiquement à Romy Schneider…
Oui, exact. Mais il y a aussi un personnage qui est François, le médecin, dans Vincent. La différence entre le personnage de Georges et François, c’est que ce dernier s’est enfermé dans un carriérisme cynique et que ça se termine dans un affrontement et un échec total dans sa vie intime. Dans le cas de Cremer, ce n’est pas un échec dans sa vie intime, mais un échec dans ses rapports avec le personnage de Romy Schneider.
Il y a ceux qui sont déjà tarés ratés dès le début. Par exemple pour l’écrivain Paul dans Vincent, on ne peut pas parler de faillite parce que ce processus est déjà entamé chez lui. En revanche la chute est subite et brutale sur tous les plans pour les autres.
C’est ça, c’est-à-dire que Paul est pris dans le film au bout de sa courbe. Alors que c’est le contraire pour les autres. C’est pourquoi il trouve finalement avec sa femme une entente affective profonde…
Ou bien il se complaît dans sa médiocrité…
Oui, dans une survie résignée.
Vous cherchez des personnages qui existent dans la réalité, ou plutôt des personnages vraisemblables qui peuvent exister dans la réalité ?
C’est difficile ça. Je crois que c’est des personnages vraisemblables qui peuvent exister dans la réalité.
Si l’on prend le cas de Max, on part d’un inspecteur de police comme il y en a dans la réalité, mais petit à petit, on découvre qu’il est ex-juge pervers, maniaque sexuellement. On s’éloigne du réalisme…
Dans le cas de Max, c’est tout à fait différent. Un personnage à la limite, mais qui est vraisemblable. Exceptionnel, mais vraisemblable.
Dans la réalité on ne trouve pas de flic pareil.
Non. Rarement… mais il y en a sûrement…
Si c’était un notaire, on aurait accepté. On dit que les notaires sont très pervers dans leur genre…
Mais Max n’est pas un représentant réaliste et moyen du flic, pas du tout, il est tout à fait exceptionnel…
Par exemple dans Garde à vue de Claude Miller, le type pervers, Michel Serrault, est un notaire. Or c’est établi que les notaires sont des gens qui sont propices aux pots de vin, aux malversations…
Exact.
Et là c’est quand même un flic…
Tout à fait, mais là c’est différent. Dans Max, il y a une idée abstraite qui est plus forte au départ que la réalité du personnage.
Il n’y a pas de limite à cette stylisation. Enfin ça dépend des cas, des personnages, ça dépend des affinités personnelles…
La limite c’est une certaine logique qui finit par habiter le personnage à un moment.
Mais quelle est cette logique qui vous pousse parfois à dépouiller le personnage, à le pousser jusqu’au bout de ce qu’il veut faire, et parfois vous allez seulement l’esquisser sommairement ?
Oui, c’est juste.
Max, vous l’avez poussé trop loin, jusqu’au meurtre, tandis que les autres personnages sont à peine existants.
C’est poussé jusqu’au bout parce que c’est lié, je dirais, à son état de perversion. C’est lié à l’idée inimaginable pour toute personne normale, de rencontrer un copain et de s’en servir pour le couler et faire sa carrière quoi… C’est pratiqué par un homme qui revendique des conceptions morales extrêmement rigoureuses…
C’est peut-être parce qu’il est davantage confronté à la mort régulièrement ? D’ailleurs, il ne porte q...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Copyright
  4. Du même auteur
  5. Titre
  6. Dans la même collection
  7. Avant-propos
  8. Premier entretien 21 juin 1981
  9. Deuxième entretien 21 juin 1981
  10. Troisième entretien 21 Juin 1981
  11. Quatrième entretien 8 octobre 1981
  12. Cinquième entretien 17 avril 1982
  13. Sixième entretien 17 avril 1982
  14. Septième entretien 23 avril 1982
  15. Huitième entretien 21 octobre 1982
  16. Neuvième entretien 28 octobre 1982
  17. Dixième entretien 28 Octobre1982
  18. Onzième entretien 18 novembre 1989
  19. Douzième entretien 18 novembre 1989
  20. Treizième entretien 27 Novembre 1989
  21. Quatorzième entretien 27 novembre 1989
  22. Quinzième entretien 3 Janvier 1997
  23. Seizième entretien 3 Janvier 1997
  24. Table des matières