
- 190 pages
- French
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- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
À propos de ce livre
Lacan après avoir posé le primat du Symbolique sur l'Imaginaire, a donné par la suite de plus en plus d'importance au terme Réel, qu'il n'a cessé de cerner au fur et à mesure du progrès de son Séminaire en insistant sur l'importance de la lettre puis en procédant à la mise en place du noeud borroméen. La place qu'il lui donne rend sa construction théorique pleinement originale, comme on le voit ici, notamment dans sa confrontation à Hegel, Nietzsche ou François Wahl.
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Informations
I DU SYMBOLIQUE AU RÉEL
Y A-T-IL DU SAVOIR DANS LE RÉEL ?
Le Séminaire RSI (Leçon du 18 février) reprend la question du savoir dans le réel que Lacan avait assez longuement abordée dans le Séminaire de l’année précédente (particulièrement dans les journées du 23 avril et du 21 mai). Il écarte avec la plus grande netteté la première acception de l’expression qu’il avait envisagée longuement dans les Non-dupes errent, celle d’un savoir qu’on pourrait supposer dans la nature physique, par exemple à propos de l’attraction universelle de Newton. Lacan avait semblé donner ses chances à l’hypothèse : « Y en a [du savoir], selon toute apparence, sans quoi le Réel ne marcherait pas ». Affirmation dont on doit délimiter la portée et le champ. Mais comme le confirme la reprise de RSI, elle ne peut pas évidemment être assimilée à la conception philosophique traditionnelle du savoir d’un sujet divin qui se révèlerait dans la nature, puisque le discours scientifique moderne, comme Lacan nous permet de le penser, opère une forclusion de toute espèce de sujet.
Mais Lacan pense évidemment aussi au « savoir en quoi consiste l’inconscient », savoir qui est propre au parlêtre. Comme il le dit dans la dernière leçon des Non-dupes errent, il ne s’est jamais attaché à autre chose qu’à ce savoir, qui est proprement le savoir « à qui nous avons affaire ». Dans RSI, en revenant sur cette seconde acception, il présente assez longuement ses éléments, articulant inconscient et symptôme qu’il situe par rapport à l’écriture du nœud.
On doit donc examiner la question posée dans ces deux perspectives, tout en essayant de suivre Lacan dans son analyse et ses délimitations.
Avant de commencer je rappellerai le rôle central du savoir chez Lacan, sans m’étendre sur le rejet du terme connaissance qui renvoie à la philosophie grecque de l’épistémè, où celle-ci est pensée comme effort pour inscrire une intelligibilité propre au monde, que le travail de la raison ne ferait que révéler ; ni sur la possibilité, absurde aux yeux de Lacan, d’une « subversion du savoir ». Non seulement le savoir et sa forme élémentaire, l’articulation signifiante (« Si le savoir c’est foutu dans la connexion de deux signifiants et que ce n’est que ça… » Non-dupes errent 11 juin 1974) jouent un rôle fondamental dans sa théorisation, mais si le Séminaire des Non-dupes errent évoque ce qui serait un savoir sans sujet, en sens inverse, il ne peut y avoir aucune détermination du sujet pour la psychanalyse sans une référence à cette espèce de savoir qu’est l’inconscient : pas de sujet – tel que l’entend Lacan – sans savoir.
Notons enfin que le Séminaire RSI (Journée du 18 février) reprendra avec beaucoup de force cette idée d’une liaison nécessaire entre savoir et signifiant et donnera ainsi le coup de grâce à l’hypothèse newtonienne d’un savoir divin dans la nature.
Le savoir dans le Réel des Physiciens ?
L’affirmation de la présence du savoir dans le Réel, au sens commun du terme, peut sembler triviale, si on invoque l’instinct animal, ou aussi bien l’inconscient freudien. On peut noter d’ailleurs au passage que le behaviorisme refuse de partir de cette donnée du savoir en en restant à la donnée physique strictement observable, ce qui le condamne à une recomposition artificielle du psychisme humain, élément par élément. Le seul savoir présent, est manifestement alors celui… de l’expérimentateur.
Mais ne peut-on légitimement poser la question du savoir dans le Réel, de façon générale, à propos de la nature en tant qu’objet de la physique. Lacan nous assure : « Y en a selon toute apparence, sans quoi le réel ne marcherait pas » ?
Reprenons quelques éléments du contexte de cet énoncé.
Le savoir grec
Je note d’abord chez Lacan un refus de la manière dont Heidegger comprend la nature dans le cadre de la pensée d’Aristote (Non-dupes errent 23 avril). Lacan fait allusion au texte Die Phusis bei Aristoteles (Ce qu’est et comment se détermine la phusis – Questions 2) où Heidegger entend la phusis dans une perspective ontologique, comme genre de l’ousia, de l’être, et « chemin de la phusis vers la phusis » (je cite la traduction Fédier : « être en chemin pour ce qui s’installe soi-même en direction de lui-même en tant que ce qui est à produire » Questions 2, p. 260) ; perspective ontologique par conséquent dont Lacan nous avait dit dans la leçon précédente qu’il vaut mieux l’abandonner, d’autant plus que Heidegger dans les dernières lignes du texte identifie phusis et alètheia. Or, quelle que soit l’importance de la référence de Lacan à Heidegger, philosophe de la vérité, il est certain que l’émergence de la logique chez Aristote, qui est au cœur du Séminaire, nous place dans une orientation radicalement opposée. En outre, quand Lacan nous dit que le Réel marche selon le vœu du Maître, avec la référence au modèle du tekhnikos, de l’artisan, il va à l’encontre de Heidegger qui, dans son texte, subordonne la tekhnè à la phusis. L’émergence de l’épistèmè, de la science grecque, est bien liée au recouvrement du modèle ontologique de la phusis – même si dans la métaphysique d’Aristote le kosmos relève proprement de la phusis et non de la tekhnè.
Seulement Aristote, avec son modèle de l’artisan manifeste la limite de l’épistémè grecque, pour laquelle la question « y a-t-il du savoir dans le Réel ? », reçoit une réponse qui se situe à l’intérieur du domaine du sens. Le savoir de l’artisan (cf. aussi RSI Leçon du 18 février) est à la fois cause efficiente [il produit l’objet], formelle et finale [lui donne ses caractéristiques, qu’il a pensées préalablement, et qui orientent son activité dès le premier temps]. Et une conception théologique du monde et de la réalité, comme l’avait illustrée le démiurge platonicien, peut à partir de là s’installer dans la pensée chrétienne, sous la forme d’un ordre conçu et voulu par Dieu (cf. RSI 18 février « … quand ce n’est pas le “Nous”, eh bien ! c’est la toute puissance et la sagesse de Dieu ! »). Nous sommes en tout cas dans le « sensu » – pour reprendre le néologisme de Lacan, dans un savoir circonscrit par la sphère du sens, un savoir porté par le sens.
J’ajouterai que la logique de cette position, notamment de la philosophie qui accompagne l’épistémè grecque, me paraît s’inscrire dans le cadre de ce que Lacan appelle connaissance, où savoir et vérité restent mêlés, de sorte que malgré le rôle essentiel de l’activité de l’esprit, le savoir reste une révélation des structures préalablement posées de la réalité, où le sujet [le Nous] et le monde [le kosmos] entretiennent une sorte de relation spéculaire, de sorte que les représentations et les idées de la connaissance peuvent apparaître comme des images de la réalité.
La science moderne
La question de Lacan implique au contraire le savoir de la science moderne et exclut le savoir de l’artisan. La science émerge « le jour où du Réel on a réussi à en arracher un brin ». Les constructions proposées par la science rompent avec le cadre symbolique du possible (cf. Galilée : les légers tombent, Newton : les planètes savent où aller, la référence à la vitesse de la lumière chez Einstein a quelque chose d’un fiat lux…)
Évoquons brièvement Newton tel que le présente Blanché (La méthode expérimentale et la philosophie de la Physique, Armand Colin, 1969, p. 88-89) – je ne retiens que les deux premiers points de son analyse.
Tout d’abord selon Newton, l’attraction n’est pas une propriété essentielle de la matière. Si la force d’inertie d’une masse peut être assimilée à des propriétés telles que l’étendue et le mouvement, de sorte qu’on puisse la dire inhérente à la matière, résidant en elle, il n’en est pas de même, reconnaît Newton, de la force gravifique : elle relève d’une certitude simplement expérimentale ; et qu’elle ne soit pas intelligible, montre qu’elle dépend de la volonté arbitraire de Dieu, qui est sous-jacente à l’ordre du monde.
Mais la référence corrélative à l’action à distance pose encore plus de problèmes. Je cite RSI 18 février où Lacan explicite la pensée de Newton :
« Comment chacune des masses saurait-elle à quelle distance elle est de toutes les autres ? ». D’un côté l’expérience nous révèle indiscutablement que cette action est réelle et indubitable. De l’autre (cf. la lettre à Bentley du 25 février 1692) Newton admet que l’action à distance à travers le vide est absurde, et qu’il doit y avoir un agent qui la cause, comme il le précise, d’ordre soit matériel [il pense sans doute, selon Blanché, à sa tentative d’une théorie de l’éther], soit immatériel [et revoilà le Dieu omniscient et tout-puissant]. Cette dernière hypothèse, qui sera retenue par les disciples immédiats de Newton, aboutit à une action continue et même créatrice de Dieu dans le passage de la masse du repos au mouvement. Et on peut évoquer aussi chez Newton le Dieu éternel, infini tout puissant et omniscient qui, par exemple, a mis les étoiles fixes, autres soleils, « à une distance suffisante les unes des autres de peur que ces globes ne tombassent les uns sur les autres par la force de leur gravité ». (Scholie général de la troisième partie des Principia)
Un tel « savoir dans le Réel » émerge manifestement des difficultés mêmes de l’articulation théorique et vient occuper leur place.
La science selon Lacan
Toutefois si ce thème peut intéresser Lacan dans sa confrontation avec le savoir inconscient, il ne peut s’insérer dans sa propre conception de l’objet de la science. La science, assure-t-il, s’institue bien d’un Réel : plus précisément, là où l’épistémologie courante parle de réalité matérielle se livrant dans les sense data ou la perception commune, et dont les lois scientifiques exprimeraient les propriétés, Lacan nous dit – je cite L’objet de la psychanalyse (Leçon du 8 décembre 1965) : « Je parle de l’objet de la science, autrement dit un trou… seul le trou peut passer… pour la fonction de la cause matérielle. » Ainsi la théorie pythagoricienne des entiers bute sur ce qui lui manque, le nombre qui mesure la diagonale du carré. C’est le trou qui en quelque sorte suscite le savoir, la construction théorique jamais achevée qui s’efforce de le cerner, et ce aussi bien dans le registre mathématique que dans le registre physique, même s’il s’agit manifestement de « Réels » d’espèce différente, et même s’il n’y a pas à se référer à l’objet a dans les deux cas, puisqu’il s’agit de l’articulation théorique du discours scientifique, discours en lui-même sans sujet. Pour masquer ce trou, en tout cas, on comprend que religion et métaphysique s’en donnent à cœur joie avec la pensée ordonnatrice et les suppositions qu’elles ordonnent à l’Être, mais en ce sens le savoir dans le Réel apparaît bien comme une projection imaginaire.
Comment penser la science ?
Considérons par exemple une position contemporaine, celle de Bernard d’Espagnat, relativement à la question de l’intelligibilité du Réel cf. Physique contemporaine et intelligibilité du monde (Journées de la Fondation Laurent-Vibert – avril 2004). D’Espagnat remarque que les concepts de la science n’ont pas à se mouler sur ceux de la perception ou de la raison commune sans parler de ceux de la philosophie régnante : ce qui fait difficulté pour celles-ci ne peut être opposé à l’articulation théorique des concepts scientifiques. Il donne ainsi l’exemple de la probabilité appréciable de trouver au même endroit l’électron et le proton de l’atome d’hydrogène fondamental. Ou que le choc de deux protons dans une chambre à bulles ait pour effet la création d’autres particules, sans que la masse des protons soit affectée, cette création s’effectuant seulement à partir de leur énergie. Il y aurait là « une transformation d’une propriété d’objets en objets. » « Cela, ajoute-t-il, c’est quelque chose qui dépasse tout à fait nos concepts familiers. » Tout ceci enlève sa portée au thème du savoir dans le Réel puisque cette reconnaissance du caractère tout relatif de ces concepts « familiers », et ce refus du « réalisme naïf » des concepts « philosophiques », dissolvent la difficulté, et rendent inutile la projection métaphysique ou religieuse d’un être omniscient. Ceci ne me paraît pas du tout incompatible avec la position de Lacan.
Néanmoins D’Espagnat n’écarte pas l’idée d’une « supposition du Réel ». Devant le caractère limité et changeant des modèles qui sont censés décrire les structures de la réalité, il s’écrie : « mais alors, ce qui existe, l’être, c’est quoi ? ». On peut penser ce qu’on veut de ce cri du cœur, mais ce qui le fonde ne me paraît pas sans intérêt. Je le cite [presque] in extenso : « … nos règles scientifiques de prédiction d’observations marchent fantastiquement bien. Je ne peux me convaincre que c’est là un miracle. Je pense donc qu’il y a une cause générale. Autrement dit, un Réel qui, suprêmement, “est” ».
Que « nos règles scientifiques de prédiction d’observations marchent fantastiquement bien », c’est précisément ce que dit Lacan sous une autre forme : « … y en a du savoir dans le Réel selon toute apparence sans quoi le Réel ne marcherait pas. » Lacan reprend sa phrase avec plus de prudence dans la Leçon du 21 mai 1974 des Non-dupes errent : « … il y a du savoir dans le Réel qui fonctionne sans que nous puissions savoir comment l’articulation se fait dans ce que nous sommes habitués à voir se réaliser. ». De fait les écritures de la science ont bien réussi à accrocher le réel et à le maîtriser, puisque les expérimentations sont reproductibles. Mais Lacan évoque ensuite la question de la « pensée ordonnatrice », et de la « supposition d’être » opérée par la religion et la métaphysique, et il assure un peu plus loin qu’il en a articulé « l’impasse ». Le séminaire RSI mettra un point final à la formulation de cette impasse dans sa Journée du 18 février 1975 en parlant de la « vieille histoire du savoir dans le Réel », du « savoir immanent au Réel qu’il n’y a aucune façon de résoudre sinon à déjà l’y mettre sous la forme du Nous, sous la forme de quelque chose que le Réel saurait de ce qu’il a à faire ». On retombe ainsi dans l...
Table des matières
- Couverture
- 4e de couverture
- Copyright
- Titre
- Œuvres de hubert Ricard
- Dédicace
- Table des matières
- I – Du symbolique au réel
- II – Éthique et politique
- Parus dans la collection « Lire en psychanalyse »