Des Hommes et des conceptions
eBook - ePub

Des Hommes et des conceptions

Opuscule sur le propre de l'humain

  1. 146 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Des Hommes et des conceptions

Opuscule sur le propre de l'humain

À propos de ce livre

Cet ouvrage se propose de mettre Ă  jour la marginalitĂ© de l'ĂȘtre humain par rapport aux millions d'autres espĂšces vivantes: une diffĂ©rence non de degrĂ© ou de nature mais d'orientation. L'homme ne possĂšde pas tant le rire, l'art, des reprĂ©sentations ou l'idĂ©e de la mort mais des conceptions: du temps, du rire, de la famille, des noms propres, du sexe, du travail ou encore des Ăąges de la vie. Cette hypothĂšse rend aussi bien compte des points communs que des divergences entre cultures...

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Informations

Éditeur
EME Editions
Année
2015
ISBN de l'eBook
9782806627797

Introduction

Si chaque philosophe dĂ©finit Ă  sa maniĂšre la discipline Ă  laquelle il appartient - ainsi de G. Deleuze pour qui le penseur est crĂ©ateur de concepts, de Wittgenstein qui prĂ©conise l’analyse des jeux de langage, de P. Ricoeur encore qui prĂ©fĂšre dĂ©montrer la lĂ©gitimitĂ© du discours poĂ©tique, ordinaire ou scientifique par rapport Ă  un certain projet d’usage de la langue, notre dĂ©marche, plus modeste, se limitera Ă  rĂ©veiller le sens endormi de certaines notions utilisĂ©es de maniĂšre rĂ©pĂ©tĂ©e. Cette image de la philosophie sera nĂŽtre afin d’analyser un lexique et des Ă©noncĂ©s trop frĂ©quemment usitĂ©s dans les sciences de la vie aussi bien qu’en Ă©thologie lorsqu’elles abordent l’ĂȘtre humain : sociĂ©tĂ©s, cultures, conscience, anthropomorphisme, pensĂ©e, diffĂ©rences de degrĂ© ou de nature, morale et histoire chez les grands singes, conscience de la mort chez certains vivants... autant de mots et d’expressions intĂ©riorisĂ©s et diffusĂ©s frĂ©quemment lorsqu’il est question de l’animalitĂ© et de l’humanitĂ©, leur signification ainsi que leur histoire Ă©tant le plus souvent Ă©vincĂ©es voire drastiquement simplifiĂ©es. Une absence de rigueur conceptuelle rĂšgne selon nous dans certains discours. Dans la mesure oĂč tout dĂ©bat sur l’homme et l’animal met en jeu des affects qui vont de la colĂšre Ă  l’indignation, il convient de modĂ©rer l’esprit du lecteur soucieux d’entreprendre la lecture de cet ouvrage, et d’en appeler Ă  sa tolĂ©rance pour la raison suivante : toute hypothĂšse proposĂ©e concernant les points communs et/ou divergences entre l’homme et l’animal (« l’homme est un animal supĂ©rieur aux autres », « l’homme est un animal comme les autres », « il n’existe que des animaux », etc.), devrait au prĂ©alable ĂȘtre capable de rĂ©pondre prĂ©cisĂ©ment Ă  trois exigences mĂ©thodologiques. Tout d’abord, ĂȘtre Ă  mĂȘme de rĂ©pertorier la liste entiĂšre des animaux existant et ayant existĂ© (en ayant conscience de la difficultĂ© de la tĂąche puisque de nouveaux ĂȘtres vivants sont rĂ©guliĂšrement dĂ©couverts) ; ensuite, ĂȘtre capable d’analyser toutes les espĂšces en question pour comprendre respectivement leur essence (et la tĂąche est Ă  nouveau dĂ©licate puisque les chercheurs ne s’entendent pas nĂ©cessairement entre-eux – ainsi des hypothĂšses de Povinelli, Premack et Tomasello sur la thĂ©orie de l’esprit chez les grands singes) ; enfin, pouvoir comparer les donnĂ©es pour rĂ©ussir Ă  dĂ©duire les diffĂ©rences ou similitudes entre espĂšces afin de poser les conclusions qui s’imposent. Or, il se trouve que personne n’est capable de rĂ©pondre Ă  ces exigences mĂ©thodologiques. Dans cette mesure, il convient de tempĂ©rer les esprits belliqueux : n’est-il pas Ă©tonnant d’entendre dire que l’homme est un animal comme les autres quand celui qui l’énonce ignore l’existence du tarsier, du Palope du Pacifique ou de l’alpaga ? N’est-il pas Ă  nouveau curieux d’entendre dire qu’il n’existe que des animaux quand plusieurs espĂšces sont inconnues du chercheur, qui prĂ©tend avant mĂȘme de connaĂźtre l’entiĂšretĂ© du rĂ©el, dĂ©crĂ©ter a priori que tout est singulier ? Comme si, au passage, celui qui posait l’existence de l’animal n’avait pas conscience qu’un pou se distinguait d’un serpent et ce dernier du tigre, et comme si ceux qui critiquaient le critĂšre Ă  partir duquel chercher Ă  distinguer l’humain des autres espĂšces ne se rĂ©fĂ©raient pas eux-aussi implicitement Ă  un critĂšre Ă  partir duquel prĂ©tendre dire qu’il n’y a aucune diffĂ©rence (ou une diffĂ©rence de degrĂ© seulement1) - affirmations solidaires le plus souvent d’une mĂ©taphysique de la vie.
L’éternel dĂ©bat se poursuit au sein d’une alternative oĂč le vocabulaire des diffĂ©rences de degrĂ© et de nature est constamment invoquĂ©. Soit l’homme est conçu comme Ă©tant radicalement distinct des autres vivants et se trouve alors sĂ©parĂ© de ces derniers (diffĂ©rences de nature), soit il est perçu Ă  partir d’une complexitĂ© supĂ©rieure en partageant certaines de ses facultĂ©s (diffĂ©rences de degrĂ©). Ce cadre mĂ©thodologique est pourtant Ă©nigmatique pour deux raisons ; la premiĂšre, parce que l’intellectuel utilise deux concepts qui ne peuvent se rencontrer et cette opposition a donc selon lui un sens absolu. Elle est pourtant des plus relatives. Deux exemples suffiront Ă  le prouver. Dans le domaine physique en effet, des diffĂ©rences de degrĂ© peuvent produire des divergences de nature ; ainsi, l’augmentation ou la diminution de la chaleur dans un milieu ambiant peut contribuer Ă  rĂ©-hausser ou abaisser la tempĂ©rature de l’eau (diffĂ©rences de degrĂ©), mais pouvant transformer sa nature en glace ou vapeur (diffĂ©rence de nature) – l’opposition de ces notions n’est plus pertinente si on la pense absolue. Dans le domaine biologique il en va de mĂȘme : l’allomĂ©trie, qui exprime la corrĂ©lation entre la taille d’un organisme et certains de ses paramĂštres biologiques, montre que le petit ne fonctionne pas comme le grand. Ainsi, l’augmentation de la taille du cerveau (diffĂ©rences de degrĂ©) peut produire une mutation des lois rĂ©gissant certaines des rĂ©gions cĂ©rĂ©brales. Ce que S. Jay Gould a bien montrĂ© :
« La taille elle-mĂȘme dĂ©termine, dans des proportions importantes, la fonction et la structure d’un objet. Le grand et le petit ne fonctionnent pas de la mĂȘme maniĂšre. On appelle ‘allomĂ©trie’ l’étude des changements liĂ©s Ă  l’augmentation de la taille [...] il est possible que l’accroissement prononcĂ© de la taille du cerveau chez l’homme ait eu des consĂ©quences allomĂ©triques dĂ©terminantes, car les connexions neuroniques ont alors Ă©tĂ© suffisamment nombreuses pour transformer un outil inflexible et programmĂ© avec rigiditĂ© en un organe souple [...] Il est probable que la programmation du comportement n’est plus adaptative »2.
À nouveau, l’absoluitĂ© de l’opposition se trouve fragilisĂ©e. La deuxiĂšme raison qui alimente notre scepticisme vient de la conjonction pourtant inĂ©vitable entre ces deux concepts. Prenons par exemple le philosophe John Locke qui affirme que l’homme et les autres espĂšces sont capables d’établir des comparaisons et compositions d’idĂ©es selon des niveaux de complexitĂ© diffĂ©rents, l’abstraction seule plaçant toutefois une diffĂ©rence radicale entre l’ĂȘtre humain et les autres vivants3. Si on considĂšre en effet ce dernier facteur, Ă  le supposer valide, nous serions effectivement en prĂ©sence d’une diffĂ©rence de nature. Toutefois, l’auteur affirme aussi dans sa premiĂšre proposition que l’ĂȘtre humain possĂšde conjointement des aptitudes qu’il partage avec les autres ĂȘtres vivants mĂȘme s’il en a complexifiĂ© l’usage. Il faudrait dĂšs lors en toute logique penser simultanĂ©ment et une diffĂ©rence de nature et aussi des divergences de degrĂ©. Mais comment alors penser globalement l’ĂȘtre humain dans son rapport Ă  l’animal eu Ă©gard Ă  un tel contexte, qui n’est ni de degrĂ© seulement ni de nature exclusivement ?
Un certain discours Ă©thologique et officiel affirme encore qu’il n’y a pas plus d’animal gĂ©nĂ©rique que de groupe rigide chez certaines espĂšces : il existerait ainsi aussi bien des populations de singes que des singes particuliers (Sultan, Nim...) plutĂŽt que des reprĂ©sentants interchangeables de la mĂȘme catĂ©gorie. Il en est Ă©videmment de mĂȘme pour l’homme. Toutefois, ce simple constat de la diffĂ©rence qui veut interdire ce privilĂšge des cultures aux ĂȘtres humains sous prĂ©texte que la diversitĂ© est aussi prĂ©sente chez les chimpanzĂ©s et d’autres vivants, achoppe sur l’absence de clartĂ© d’un tel concept. Car il resterait en effet Ă  savoir si les diffĂ©rences sont bien du mĂȘme genre, s’il existe un concept uniforme de diversitĂ© : agriculture, Ă©criture, grooming, systĂšme de signes, danse, taille des incivises chez certaines tribus, pĂȘche aux termites et cannibalisme de certaines Esquimaux se sentant apparentĂ©s aux Dieux peuvent-ils ĂȘtre subsumĂ©s indiffĂ©remment dans la classe homogĂšne de la diversitĂ©, satisfaisant le chercheur les regroupant aprĂšs inventaire ? À ce compte en effet, et au nom de la diffĂ©rence, autant dire que le code gĂ©nĂ©tique diffĂšre d’une plante, d’un minerai, d’un roman policier, lui-mĂȘme distinct de tel autre roman policier ou des poĂ©sies et d’une coiffure Ă  la mode. Il faudrait commencer par montrer l’existence de diffĂ©rentes diffĂ©rences et Ă©claircir leurs diverses acceptions. G. Devereux affirmait que
« Le trait le plus caractĂ©ristique que tous les hommes ont en commun est leur capacitĂ© d’ĂȘtre plus diffĂ©rents entre eux qu’un lion ne peut l’ĂȘtre des autres lions »4
Une lecture superficielle raterait pourtant le sens de sa proposition puisque la diffĂ©rence Ă  laquelle il est fait ici allusion n’est pas similaire Ă  celle des animaux entre-eux, car les raisons responsables de cette diversitĂ© chez l’homme sont bien diffĂ©rentes des causes responsables des variations dans la population des lions – ce qui les rend alors en cela plus dissemblables en effet ; A. Espinas, dĂšs 1878, critiquait tout misonĂ©isme en montrant que certaines fourmis faisaient preuve d’initiative individuelle. Mais le concept de diversitĂ© mĂ©rite d’ĂȘtre interrogĂ© dans la mesure oĂč il s’agit d’une autre hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ©. N’est-ce pas ce que Condillac suggĂ©rait dans son TraitĂ© des animaux :
« C’est ainsi que l’homme nous paraĂźt plus diffĂ©rer de l’Ange, et l’Ange de Dieu mĂȘme : mais de l’Ange Ă  Dieu la distance est infinie ; tandis que de l’homme Ă  l’Ange elle est trĂšs considĂ©rable, et s...

Table des matiĂšres

  1. Introduction