
- 168 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
Le silence dans l' Énéide
À propos de ce livre
Le silence, réalité fascinante et déroutante pour le philologue, est un thème majeur, mais oublié, de l'épopée virgilienne. Au fil de cette étude, le lecteur accompagnera Énée dans le parcours initiatique qui lui fait découvrir la faiblesse autant que la redoutable puissance du langage humain, seul capable de conférer l'immortalité au guerrier. Ce n'est qu'après s'être mué en maitre des silences, qu'Énée parvient à dominer pleinement sa voix autant que celle des autres...
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Informations
Sujet
Sciences socialesSujet
Sociologie1. Introduction
1.1. Présentation du sujet
« Écrilecteur ». Lorsque Pascale Hummel propose ce néologisme pour décrire l’activité du philologue (2003, p. 282), elle cerne très justement l’objet qui fascine la variété de chercheurs que nous sommes. Nous observons sans répit le langage sous tous les angles, cherchant à comprendre ses fonctionnements et à analyser la manière dont les auteurs s’en sont servi, afin de saisir au mieux leurs pensées et leur temps. Mais cet intriguant et dévorant appétit de logos gagne à se porter sur les limites de son objet, sur la réalité même d’où est issue toute parole, et vers laquelle elle retourne en définitive. Car, comme les linguistes partent des troubles de la parole pour mieux saisir son fonctionnement, je crois qu’il est judicieux de partir du « non-dit » d’une œuvre pour opposer – et finalement, mieux comprendre – ce qui y est dit par rapport à ce qui y est tu.
Le phénomène du silence fascine, depuis quelques années déjà, des chercheurs et des romanciers de tous les horizons1, avec l’idée diffuse d’une forme d’incapacité – la « Muse moderne de l’impuissance » de Mallarmé –, que celle-ci porte sur le sujet (inexprimable) ou sur le locuteur (incapable de l’exprimer). Le silence, tel qu’il se conçoit aujourd’hui, semble manifester toute la faiblesse et toutes les limites du langage humain.
J’ai choisi de relire l’Énéide de Virgile avec une attention particulière portée sur les situations silencieuses qui y sont dépeintes. De telles situations y sont remarquablement nombreuses, c’est pourquoi j’ai voulu pousser les portes que m’ouvre cette clé de lecture, jusqu’à – sans doute – y reconnaitre véritablement un élément essentiel, transcendantal : le schème du silence. Mais avant de plonger dans l’œuvre qui nous intéresse, je commencerai par définir ce terme de « silence » de façon générale.
1.2. Le silence en général
Le silence est le plus fréquemment défini en termes d’absence : selon Pierre Van Den Heuvel (1985, p. 67), c’est la « non-réalisation d’un acte d’énonciation qui pourrait ou devrait avoir lieu dans une situation donnée. Cette situation, qui est « l’ensemble des conditions psychologiques, sociales et historiques qui déterminent l’émission d’un énoncé à un moment donné du temps et en un lieu donné » […], oblige le sujet à faire acte de parole. » J’ajouterais encore que le silence, tel que je l’entends dans cette étude, doit laisser la place à un « blanc » au niveau de l’expression orale – point au niveau de la communication2. La définition de Pierre Van Den Heuvel met en exergue deux dangers qui guettent l’analyste : d’une part, spéculer à tort et à travers sur ce que l’auteur aurait voulu dire et, d’autre part, appliquer à une autre situation d’énonciation (ou d’écriture) les schémas discursifs qui lui sont familiers. Le silence est en effet par essence l’élément le plus ambigu du discours. De cette incertitude émerge ce que P. Van den Heuvel appelle « le potentiel du dicible » : « Dans l’incapacité de le formuler clairement, nous recourons à une métaphore : le silence ressemble souvent au sommeil du discours qui se repose, mais que l’on sent chargé d’une énergie au repos. C’est comme si la parole, se taisant, se mettait en état d’attente. Source d’énergie nouvelle, l’immobilité suggère alors le potentiel du dicible puisqu’on sait le silence capable de tout, de générer la parole la plus inattendue, celle qu’on craint comme celle qu’on désire : le silence peut tout dire3. » Mais l’interprétation de ce « blanc » n’est pas immédiate car, à la difficulté que pose le silence par sa nature ambigüe, s’ajoute la distance culturelle et temporelle qui nous sépare de Virgile. Edward T. Hall résume cette réalité en affirmant que « la culture cache plus de choses qu’elle n’en révèle4 » : nous y sommes chacun plus ou moins consciemment plongés et il s’agit d’en tenir compte lorsque nous prétendons interpréter ce qui nous semble « inné ».
Un moyen concret de prendre la mesure de cette distance est de considérer l’immense variété des explications que les Modernes se sont efforcés de donner à certaines situations silencieuses de l’Énéide. Prenons l’exemple de la désormais fameuse rougeur de Lavinie en 12. 64-70 : « Lavinie a entendu les mots de sa mère, les joues brûlantes inondées de larmes et embrasées d’un pourpre profond qui court sur son visage échauffé5. » Francis Cairns, en 2005, relève pas moins de huit interprétations différentes à ce blush : amour pour l’un ou pour l’autre prétendant, sentiment d’impuissance, conscience d’être la cause de conflits, etc. avant de proposer la sienne, qui se fonde sur un jeu d’intertextualité : ce serait un lieu commun de la littérature antique que de voir une jeune fille rougir lorsqu’on évoque en sa présence son mariage à venir. L’année suivante, en 2006, Crescenzo Formicola propose encore une nouvelle façon de comprendre la scène. Il se fonde pour sa part sur l’intratextualité pour soutenir que l’interprétation d’un silence peut s’avérer fautive entre les personnages eux-mêmes. Les similitudes relevées entre les vers qui décrivent Turnus et ceux qui dépeignent Didon6 montrent que Turnus, fou amoureux de Lavinie, imagine que le trouble de la princesse est causé par la passion érotique qu’elle éprouve à son égard. Mais, arguë Formicola, la pudor de Lavinie est logique, car Virgile n’aurait pu ni la faire déclarer son amour pour Turnus (elle est destinée à être la première reine de Rome7), ni un amour pour Énée, qu’elle n’a jamais vu (mais sans doute rougit-elle tout de même à l’idée de devenir son épouse8). Turnus réagirait donc avec emportement, mais également avec mécompréhension. La proposition de Cr. Formicola n’est pas meilleure ou moins valable que celle de Fr. Cairns, et ce serait une démarche appauvrissante de chercher à en supprimer l’une au bénéfice de l’autre. L’exemple du rougissement de Lavinie et de l’irréductibilité des interprétations qui sont proposées à son sujet nous permet de comprendre que Virgile utilise le silence de façon « brute ». C’est de cette façon aussi que le poète, d’après Philippe Heuzé (1985, p. 634), met les corps en mouvement : le commentateur considère en effet que Virgile ne traduit pas les gestes auxquels il confronte le lecteur. Comme dans la vie réelle, mais comme c’est rarement le cas dans un cadre artistique, l’auteur de l’épopée laisse un certain flo...
Table des matières
- Préface
- 1. Introduction
- 2. Le silence dans la préparation à l’initiation
- 3. Le silence lors de la descente aux Enfers
- 4. De la manière dont Énée use du silence et de la parole après avoir été initié
- 5. Les revenus des Enfers
- 6. Conclusion : quand se taire, c’est faire. Les silences dans l’Énéide
- Bibliographie
- Annexe :Tableaux des occurrences de silence
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