Les archives personnelles
eBook - ePub

Les archives personnelles

Enjeux, acquisition, valorisation

  1. 210 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Les archives personnelles

Enjeux, acquisition, valorisation

À propos de ce livre

Les archives personnelles font partie de ces témoignages précieux qui parlent des hommes, de leurs destins, de leurs cultures. Elles ne peuvent subsister sans notre intervention résolue pour les sauvegarder et en préserver l'héritage. Mais comment les gérer? L'ouvrage fait le point sur les guides et les ressources qui accompagnent chacun dans l'organisation de ses propres archives. Il envisage ensuite ce qui ressort de l'action collective et propose son aide aux archivistes.

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Informations

Éditeur
Academia
Année
2013
ISBN de l'eBook
9782336664231

Les archives personnelles, iroir des valeurs et des attentes de l’Occident

Une histoire culturelle et archivistique
Françoise HIRAUX
Quand on dit ‘tout est archive’, l’archive sort du territoire de l’archonte. Tout le corps social devient producteur d’archives.
(Claude Millet)
Toutes les archives sont importantes dans un monde soumis à la complexité et l’interdépendance et dans une société qui veut être démocratique1. Mais les archives des personnes exercent un tropisme fort et très particulier qui exprime, de plus en plus marqués, le souci de l’individu et la recherche d’une histoire attentive aux hommes. Les archivistes veulent les rencontrer. Commence alors l’aventure ; car le monde des archives personnelles déborde tous les cadres.

Introduction : l’acte d’une personne

L’importance attachée à la trace personnelle s’inscrit dans la longue histoire occidentale de la promotion de l’individu au cours de laquelle le christianisme, puis la sécularisation, ont posé la prééminence du sujet et de la conscience, la dignité de chaque individu et défini les droits et les responsabilités qui en résultent. Pour le dire autrement, l’individu compte aux yeux de la société et de l’intéressé.
L’individualisme contemporain est la généralisation et la figure la plus récente d’une intériorisation qui prit lentement corps. Georges Duby et Philippe Braunstein en ont retracé le long mouvement qui débuta au 12e siècle et s’affermit peu à peu au sein de la nouvelle société urbaine. Ils pointent et exposent les effets qu’ont exercés l’humanisme civique – l’homme est un acteur –, les valeurs et les pratiques des marchands – c’est le début des livres de raison –, la culture universitaire – la dispute valorise l’expression personnelle – et la pastorale des ordres mendiants qui promut la conversion des cœurs, l’oraison privée et les exercices de progrès spirituels2. La Renaissance, la Réforme protestante puis la Réforme catholique accélèrent et approfondissent le mouvement3. De Descartes à Kant4, les philosophes le portent sur le terrain de la conscience et de la connaissance : que peut un sujet ? « Quels sont ses droits imprescriptibles », demande le 18e siècle. En quelques décennies, le droit naturel, la philosophie politique, les nouvelles institutions anglaises, la Révolution américaine et la Révolution française instituent le sujet politique, citoyen né libre et égal, doté de droits fondamentaux. Peu à peu, « la modernité brisa tous les chaînons pour faire de l’individu un être libre et souverain aspirant à devenir son propre centre »5. L’individu devint aussi une totalité indivisible, corps et esprit confondus, et l’âme déserta la surnature pour s’incorporer dans l’individualité. La théorie de l’inconscient, de son côté, construisait une nouvelle réalité du sujet dont le pivot était la division d’avec soi, faite d’altérité à soi et d’opacité constitutive. Enfin, l’essence humaine perdit sa prééminence face à un modèle dynamique qui mettait au premier plan l’existence et le changement. L’humanité se produisait elle-même dans le temps et elle apprenait à se connaître à travers ce parcours en s’y réfléchissant. L’histoire sort toute de l’action des hommes et c’est l’humanité et rien d’autre qui se fait au travers de ce travail collectif. La société se détourna du passé de la tradition pour se tourner vers le futur de la production. Pour les sujets, la question ne fut plus « que dois-je faire ? », mais « que vais-je faire de ma vie ? ». L’historicité secréta une condition d’affection, de travail, de production et d’économie6.
Cette reconnaissance engageait. Le sujet religieux et moral, puis le sujet philosophique et politique furent enjoints d’analyser et d’évaluer leur conduite et de raisonner leurs projets. Le grand tournant s’amorce dès le 13e siècle sous la forme du passage à la confession privée7. Mais à côté du moi qui s’appuie sur la conscience responsable et la raison8, existe le soi. L’individu se ressent et éprouve le fait d’être, expérience vitale et singulière entre toutes. Le domaine du soi est la psyché. Tous les sentiments s’y engouffrent. La joie comme la douleur, le désir, la nostalgie, les regrets, l’orgueil comme la honte… La porte est ainsi ouverte à l’expression de la vie intérieure dans des documents d’auto-écriture.
L’individu se sent aussi inscrit dans un flux d’histoire. Pour nous en tenir à l’Occident, le récit rétrospectif de soi9, spectaculairement représenté par l’autobiographie d’Abélard, débute au 12e siècle sur le modèle des Confessions de saint Augustin, emprunte un détour lignager10 et trouve sa forme à l’époque de Dante et de Pétrarque. Un autre genre le rejoint et s’attache à la documentation et l’interprétation du présent : le commentaire. Les marchands qui conservent soigneusement les documents nécessaires à leurs affaires consignent aussi, parfois dans les mêmes registres, les événements qui jalonnent la vie de leur famille et laissent transparaître les ambitions et les tactiques.
Les livres de raison font depuis plusieurs années l’objet de l’étude attentive des historiens tant il est vrai que leur contenu est incomparable11 ils n’émanent pas des autorités mais ils indiquent comment l’individu moyen comprend l’exercice du pouvoir ; ils ne traitent ni de dogmes religieux ni de théories scientifiques mais ils reflètent leur inculturation populaire et ils exposent, au fil de recettes et d’adages, les rapport d’une société aux fondamentaux du corps et de la santé. Les productions personnelles par ailleurs constituent un des marqueurs les plus fins de l’émancipation séculaire des sujets. Elles ont aussi leur historicité : la revue Temporalités rappelle que le récit de soi a sa propre histoire et demande : « Si l’autobiographie comme roman de formation définit le genre par excellence de la modernité, quel est celui correspondant aux temporalités actuelles [marquées par la fragilisation des trajectoires] ? »12
L’écriture personnelle et familiale est réservée. La couverture du livre des Valori, à Florence, précise : « Ce livre ne peut être montré à personne. »13 L’essentiel est souligné par Philippe Lejeune : « Les journaux réels ne sont pas faits pour être publiés ou pour séduire : ce sont des actes de la vie privée, des conduites qui passent par l’écriture. »14
Actes et conduites de l’individu : les mots clef sont là. L’écriture personnelle au sens large d’un expression qui laisse une trace durable correspond à des nécessités intérieures extrêmement puissantes : « Personne ne peut me prendre mes souvenirs, et personne ne peut comprendre mon chagrin. »15 Elle accompagne les hommes et les femmes dans leur réponse au besoin vital de contenir le débordement, l’entropie ou l’excessive singularité des choses et de donner un peu de stabilité au mouvement qui les emporte nécessairement. Elle est aussi l’outil de tous ceux qui peuvent se satisfaire de vivre « simplement » (cette simplicité n’existe pas) et entreprennent d’explorer un pourquoi infini et s’engagent dans une réflexivité qui les conduit là où la vie ne mène pas, pour le meilleur (l’acquiescement à un besoin intérieur) et pour le plus dur (un certain écart, parfois l’isolement et la solitude, le renoncement à l’action simple et joyeuse). « Le propre de la réflexivité c’est d’élaborer un espace vide entre son propre chemin et les bruits de la société. »16
Rappelons-nous enfin que le geste d’écrire – au sens le plus large – demeure largement opaque pour celui qui le pose et répond, au plus profond, à des besoins et des désirs confus et non thématisés. Une anthropologie de l’écriture en temps de guerre, de grande crise et de changement de société comme le 20e siècle les a enchaînés, nous apprendrait beaucoup sur l’inquiétude qui nous habite tous, parce que devons, d’une façon ou une autre, répondre à la question du sens de notre existence.

1. La constitution en patrimoine des archives personnelles

La civilisation de l’écrit apprit la valeur principielle du document qui subsiste et en inculqua le respect17. Aussi, les archives privées ont-elles existé longtemps avant que les sociétés modernes n’entreprennent aussi de les conserver au titre de patrimoine commun18.

1.1. Le point de vue collectif et archivistique

Dès le 19e siècle, l’évidence est installée : les archives privées constituent une ressource indispensable pour la recherche19 et un bien patrimonial commun. « L’archive change de paradigme : sans quitter l’univers de l’administration de la mémoire publique, elle entre dans l’univers du sensible, de l’intime, du personnel, et se pare de leur tout nouveau prestige. »20 Le mouvement ne cesse depuis de se renforcer. « Le mot mémoire est utilisé partout et beaucoup de rhétorique l’accompagne », constatent aujourd’hui Beatrice Barbalato et Albert Mingelgrün21 qui nous invitent aussi à considérer « le mirage des archives ». Que nous dit cette attente pressante et à quel état de notre rapport à la mémoire et à l’identité correspond-elle22 ?
Vers 1970, la prise de conscience de l’ampleur et de la portée des mutations de tous ordres que connaissaient les sociétés occidentales, fit le succès du terme de patrimoine qui sortit des études notariales pour couvrir les villes et les campagnes, le matériel puis l’immatériel cependant que les transformations à l’œuvre parmi le paysage culturel favorisaient l’émergence de nouveaux métiers et la création de nouvelles instances dédiés au patrimoine. Celui-ci tirait sa puissance symbolique de la notion, proche mais d’ordre différent, de mémoire collective dont la grande séduction résultait elle-même de la rencontre des courants qui avaient façonné et habitaient la société démocratique du dernier tiers du 20e siècle23. Un consensus très large opposait la mémoire collective à l’histoire considérée comme une production savante confisquée par des spécialistes en même temps qu’un instrument d’embrigadement dont les deux guerres mondiales avaient montré l’affreuse nocivité. La mémoire, au contraire, était réputée l’affaire de tous, ce qui la rendait vraie puisqu’elle échappait aux pouvoirs par pétition de principe. On la voulait aussi émancipatrice et ses racines puisaient dans le grand socle de la modernité philosophique qui pose que l’humanité se produit elle-même et qu’elle apprend à se connaître à travers ce parcours. Mais cette historicité, à son tour, connut bien des évolutions et, dans les années 1970, chacun ne pouvait que constater le déclin des anciennes solidarités au profit d’un individualisme radical qui, par réaction, donnèrent aux collectes de témoignages des accents tout à la fois nostalgiques et contestataires24. Deux décennies plus tard, s’imposerait, dans un environnement globalisé, le paradigme de « patrimoine mondial », matériel (1992) et immatériel (2003)25.
La prise en compte publique des archives personnelles a, elle aussi, une histoire faite de l’élargissement progressif, à partir de la fin du 19e siècle, de la reconnaissance des documents définis comme « l’autre » des archives publiques. À p...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Dans la même collection :
  4. Titre
  5. Copyright
  6. Sommaire
  7. Table des auteurs
  8. Les archives personnelles, iroir des valeurs et des attentes de l’Occident
  9. Vers l’archivage total de soi ?
  10. Approcher les archives personnelles
  11. Mémoires collectives, mémoires individuelles
  12. Enquêtes sur la collecte
  13. Les réseaux d’acquisition d’archives privées au Québec
  14. Quelques aspects de la politique et des actions de Bibliothèque et Archives nationales du Québec en matière d’archives personnelles
  15. Le recueil et la gestion des papiers de militants
  16. Les archives privées et le droit
  17. La qualité des métadonnées relatives aux archives de particuliers
  18. La Commission de la protection de la vie privée et la recherche historique
  19. L’entreprise scientifique d’édition, d’exploitation, de valorisation et de communication de la correspondance d’Henri Poincaré
  20. Les archives de la Fondation Paul-Henri Spaak
  21. La mise en valeur des archives d’Auguste Viatte (1901-1993)
  22. La biographie scientifique
  23. Dans la même collection (suite) :
  24. Table des matières
  25. Adresse