Archives familiales : mode d'emploi
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Archives familiales : mode d'emploi

Récits de genèse

  1. 118 pages
  2. French
  3. ePUB (adapté aux mobiles)
  4. Disponible sur iOS et Android
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Archives familiales : mode d'emploi

Récits de genèse

À propos de ce livre

Écrire un récit de vie invite à s'appuyer sur des documents, à intégrer divers éléments d'archives publiques ou privées: carnets, journaux personnels, correspondance, articles de presse, photographies – qui peuvent être à l'origine du récit, le soutenir ou l'accompagner. Ce livre propose des analyses d'universitaires et témoignages d'écrivains, qui se penchent sur la mise en récit de ces traces familiales: de quelle manière les intégrer au récit, les transformer, comment leur redonner vie?

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Informations

Éditeur
Academia
Année
2013
ISBN de l'eBook
9782336289670

CORRESPONDANCES

Archives familiales et autobiographie dans Histoire de ma vie de George Sand

Brigitte Diaz
Histoire de ma vie paraît en feuilleton, en cent trente-huit livraisons, dans le journal d’Émile de Girardin, La Presse, du 5 octobre 1854 au 17 août 1855, mais ce ne sont que les deux tiers de l’ensemble du manuscrit qui sont publiés par cette voie. L’édition complète en vingt volumes in-octavo voit le jour avec un léger décalage temporel et s’échelonne sur toute l’année 18541. L’ouvrage connaît un grand succès dont atteste la profusion des lettres de lecteurs adressées pour l’occasion à George Sand. C’est l’aboutissement d’un projet né bien des années auparavant. Si l’on met de côté les premières allusions à d’hypothétiques Mémoires que la jeune romancière fait dans sa correspondance dès 1836, c’est en 1847 qu’elle entame la rédaction de l’ouvrage, comme l’indique la date mentionnée dans l’épigraphe : « Charité envers les autres. – Dignité envers soi-même. – Sincérité envers Dieu. Telle est l’épigraphe du livre que j’entreprends. 15 avril 1847 ».
En 1847, George Sand n’est plus une novice en matière d’écriture autobiographique qu’elle a déjà pratiquée avec une certaine assiduité sur différents supports : la lettre d’abord – sa correspondance nous fournirait une autre « histoire de sa vie » – mais aussi cette autofiction que constituent les Lettres d’un voyageur, en 18362, qui lui ont permis de parler d’elle, en « habillant [son] pauvre personnage, [son] pauvre moi, d’un costume qui n’était pas le sien », celui du vieux voyageur3. Bien avant encore, on trouve dans les écrits de jeunesse des ébauches de récits autobiographiques – notamment dans un fragment de 1829 – intitulés « Mémoires inédits », où se profile déjà le plan général de ce que sera Histoire de ma vie4.
Au cours de cette longue maturation, George Sand a eu le temps de réfléchir à la problématique du genre et à la forme qu’elle voulait donner à ses Mémoires. Révoquant le modèle rousseauiste des confessions – parce que, dit-elle, on n’a pas à se confesser à ses semblables –, elle pose dans le préambule de son récit un pacte qui se veut plus historien qu’autobiographique. Parce qu’elle se dit arrivée « à un âge de calme, où [sa] personnalité n’a rien à gagner à se produire »5 et où elle ne cherche plus « le mot des énigmes qui ont tourmenté [sa] jeunesse »6, elle préfère fonder la légitimité de son entreprise dans la représentativité7 de son histoire – « Ma vie, c’est la vôtre », écrit-elle dans Histoire de ma vie – qui la dote d’une valeur partageable par tous. Elle invente l’idée de l’autobiographie « solidaire » : solidaire, au sens où le sont, dit-elle, les existences individuelles et plus encore celles qui se tissent dans un même réseau familial8. La notion de solidarité est liée pour elle à celle d’hérédité : « L’hérédité naturelle, celle du corps et de l’âme, établit une solidarité assez importante entre chacun de nous et chacun de ses ancêtres »9. En vertu de ce principe, elle juge que « tout être humain qui présenterait [son existence] isolément, sans la rattacher à celle de ses semblables, n’offrirait qu’une énigme à débrouiller »10.
Ce postulat explique pourquoi les deux premières parties d’Histoire de ma vie, qui en comporte cinq, vont être consacrées à la « préhistoire » de George Sand, en l’occurrence l’histoire de ses parents, et plus précisément celle de sa grand-mère paternelle – Marie-Aurore Dupin de Francueil, fille naturelle du Maréchal de Saxe – et de son père, Maurice Dupin. Parmi les divers documents qu’elle a intégrés à son récit, la correspondance échangée entre son père et sa grand-mère de 1794 à 1808 occupe une place prédominante. Aussi peut-on dire que dans Histoire de ma vie, l’archive épistolaire est non seulement à l’origine du projet autobiographique, de son idée et de son désir, mais qu’elle en est aussi un des matériaux de construction essentiels.
Le goût de l’archive : se faire l’historienne de sa vie
George Sand publie donc en frontispice de son récit cet important ensemble de lettres que son père, Maurice Dupin, a adressées à sa grand-mère, Marie-Aurore Dupin, d’abord pendant la Terreur lors de l’emprisonnement de Marie-Aurore, puis durant les guerres révolutionnaires et napoléoniennes auxquelles va participer Maurice. À ce corpus très homogène, mais dont il ne reste pratiquement que les lettres de Maurice, s’ajoutent quelques lettres échangées entre Maurice et Sophie-Victoire Delaborde, la mère de Sand, et d’autres correspondants qui sont en lien avec ces personnes. Cet important préambule épistolaire a paru superfétatoire à bien des critiques du temps, qui ont ironisé sur la place surdimensionnée accordée à ces archives familiales, jugeant, comme Armand de Pontmartin, que l’ouvrage aurait dû s’appeler « Histoire de ma vie avant ma naissance »11. Dans l’incipit de son récit, Sand revendique au contraire la place fondatrice que ces lettres détiennent dans l’ensemble :
Tout ce préambule n’est à autre fin que d’expliquer pourquoi je vais rapporter une série de lettres qui, sans avoir grande apparence de couleur historique, en ont cependant une réelle. Tout concourt à l’histoire, tout est l’histoire […] Il est donc certain que les détails réels de toute existence humaine sont des traits de pinceau dans le tableau général de la vie collective. […] L’histoire de la législation se fait avec de vieux titres, l’histoire des mœurs avec de vieilles lettres.12
L’insertion dans ses Mémoires de la correspondance familiale, à côté d’autres archives privées ou publiques, répond donc à sa conception de l’Histoire. De façon très moderne, Sand plaide pour une histoire culturelle et sociale plus axée sur la collecte des témoignages individuels que sur la production de grandes synthèses : « Toute la portée, toute la vérité d’une époque, écrit-elle, n’est pas dans le récit officiel des événements généraux, tels que la guerre, la législation, la diplomatie, les finances »13. À côté de l’histoire officielle, il y a donc une autre histoire, ou plutôt d’autres histoires parallèles, privées, mais néanmoins traversées et modelées par les forces historiques. De ces existences anonymes, certains documents portent l’empreinte vivante et c’est le travail de l’historien que de les rendre publics14. Le parallèle que Sand établit constamment entre « vie générale » et « vie intime » – « La vie de l’individu n’est-elle pas le résumé de la vie collective ? »15 – l’invite à raconter sa propre histoire à la manière d’un historien, en s’appuyant sur des archives. C’est dans ce matériau anecdotique et a priori an-historique, parce que voué à la relation intime entre un fils et sa mère – en l’occurrence leur correspondance – qu’elle veut rendre sensible l’orchestration historique de leurs existences et, par contrecoup, de la sienne :
Je vais donc citer textuellement une série de lettres écrites par mon père âgé de seize ans, à sa mère, détenue aux Anglaises sous la Terreur, et j’avertis le lecteur qu’il n’y a rien de varié et rien de dramatique dans la situation personnelle que ces lettres constatent. Elles ne constatent, au contraire, que la morne situation de deux âmes déchirées de douleur. Mais elles sont datées de 94, c’est là leur valeur historique. Et, quant à leur valeur morale, on en jugera après les avoir lues. C’est un monument d’innocence, d’amour filial, et de cet état angélique de l’âme qui caractérise le véritable adolescent.16
C’est donc d’abord en tant que document que Sand légitime la présence de ces lettres, qui contribuent à fonder les pilotis historiques de l’autobiographie, au même titre que d’autres documents. Parmi ceux-là, différents textes rédigés de la main de sa grand-mère – extraits, souvenirs, anecdotes – que Sand cite et dont elle exalte la valeur de témoignage17. Sont également consignées des archives administratives, comme le procès-verbal du comité révolutionnaire de Bondy qui rapporte l’arrestation de sa grand-mère pour détention de lettres compromettantes et « délit d’enfouissement » d’objets de valeur, à la suite de quoi elle fut incarcérée du 5 janvier 1794 au 22 août 1794 au couvent des Anglaises :
Pour bien faire comprendre la gravité de cette résolution dans de pareilles circonstances, il est bon de citer ici le procès-verbal de la découverte des objets suspects. C’est un détail qui a sa couleur et dont je transcrirai fidèlement le style et l’orthographe18.
Les enjeux historiques et le désir de Sand de restituer la « couleur du temps » ne sont pas pour autant ce qui prime dans sa démarche. La construction identitaire à laquelle œuvre tout récit de vie est bien davantage concernée par la divulgation de ces archives familiales. Certes, George Sand a appris avec ses contemporains qu’il n’est pas de sujet qui ne soit inscrit dans l’Histoire, mais elle est aussi persuadée que si chacun est « le fils de ses œuvres », il est également « le fils de ses pères, de ses ancêtres, patres et matres »19. La place importante qui revient dans son récit à l’histoire de son père – via ses lettres – se justifie pleinement par sa conception de l’hérédité : « Nous apportons en naissant des instincts qui ne sont qu’un résultat du sang qui nous a été transmis, et qui nous gouverneraient comme une fatalité terrible, si nous n’avions pas une certaine somme de volonté qui est un don tout personnel accordé à chacun de nous »20. D’où la nécessité de rapporter avant la sienne l’histoire de son père, « puisqu’il est, écrit-elle, sans jeu de mots, le véritable auteur de l’histoire de ma vie »21. Il est permis, au contraire, d’être sensible à ce jeu sur les mots qui fait incidemment de son père l’auteur de ses mémoires. Sand revient à plusieurs reprises sur ce qu’elle considère être un préalable indispensable à son récit, en réaffirmant le rapport analogique qui existe à ses yeux entre histoire individuelle et histoire collective :
Ceci posé, et pour n’y plus revenir, j’affirme que je ne pourrais pas raconter et expliquer ma vie sans avoir raconté et fait comprendre celle de mes parents. C’est aussi nécessaire dans l’histoire des individus que dans l’histoire du genre humain. [...] Je raconte ici une histoire intime. L’humanité a son histoire intime dans chaque homme. Il faut donc que j’embrasse une période d’environ cent ans pour raconter quarante ans de ma vie.22
C’était déjà la même nécessité qu’elle évoquait en 1829, quand elle entreprenait, de façon ludique, ses « Mémoires inédits » :
Passons au chapitre 1er, pour suivre les règles de l’art, il faudrait faire un peu l’histoire de mes parents et même remonter à celle de leurs parents à la seconde ou la 3e génération, mais comme je n’ai pas le temps, et que je prétends finir mon ouvrage avant de dîner, je passe à ma propre histoire.23
Les archives épistolaires fondent ce récit familial qui est donné comme la condition nécessaire du récit autobiographique. On aurait pu imaginer cependant qu’au lieu de les citer in extenso, Sand en fasse une synthèse ou en tire un récit biographique. Si elle s’y est refusée, c’est d’abord pour préserver la tonalité propre de ces archives : « Je ne pense pas que cette existence eût été plus intéressante avec les ornements de la forme littéraire. Racontée telle qu’elle est, elle signifie davantage et résume, par quelques faits simples, l’histoire morale de la société qui en fut le milieu »24. La présence des lettres s’est en outre imposée à Sand, pour faire sentir les effets que leur découverte et leur lecture ont imprimés en elle. Elles ont d’abord été pour elle support et stimulation d’une mémoire forcément lacunaire :
Mais, pour mettre de l’ordre dans le cours de ma propre histoire, il faut que je continue à suivre celle de mon père, dont les lettres me servent de jalons, car on peut bien imaginer que mes propres souvenirs ne datent pas encore de l’an XII.25
Et quand les lettres viennent à manquer c’est le fil de l’histoire qui s’interrompt :
Ici se terminent les lettres de mon père à sa mère. Sans doute il lui en écrivit beaucoup d’autres durant les quatre années qu’il vécut encore et qui amenèrent de fréquentes séparations à la reprise de la guerre. Mais la suite de leur correspondance a dispa...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Au cœur des textes
  4. Titre
  5. Copyright
  6. Avant-propos
  7. CORRESPONDANCES
  8. RÉCITS ET CARNETS
  9. ÉCRIRE SANS TRACES
  10. Table des matières
  11. Adresse