Les routes incertaines
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Les routes incertaines

Chroniques du Nouvel-Ontario, tome 3

HĂ©lĂšne Brodeur

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  1. 288 pages
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Chroniques du Nouvel-Ontario, tome 3

HĂ©lĂšne Brodeur

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À propos de ce livre

TroisiĂšme et dernier tome des « Chroniques du Nouvel-Ontario », « Les routes incertaines » suit le parcours sinueux d'une premiĂšre gĂ©nĂ©ration nĂ©e dans le Nord de l'Ontario, Ă  l'Ă©poque turbulente de la Seconde Guerre mondiale. Du Nord ontarien Ă  l'Afrique, en passant par MontrĂ©al, Ottawa et l'Europe, ces routes mĂšnent tantĂŽt Ă  l'ambition tantĂŽt Ă  la dĂ©chĂ©ance. L'entreprise commerciale des frĂšres Marchessault rĂ©ussira-t-elle? Jean-Pierre deviendra-t-il mĂ©decin, comme il le souhaite? Rose-Delima reverra-t-elle Donald, celui qu'elle aime mais que la vie et la culture Ă©loignent? Cette Ă©poque bouleverse les plans de ces jeunes Franco-Ontariens qui, au seuil de l'Ăąge adulte, entrevoyaient leur vie tout autrement. On suit leur parcours jusqu'Ă  l'Ă©clatement du Canada français en 1968. La parution des « Routes incertaines » dans la BibliothĂšque canadienne-française complĂšte la rĂ©Ă©dition de cette saga, « l'une des Ɠuvres les plus importantes de la littĂ©rature franco-ontarienne, tant par l'envergure que l'indĂ©niable qualitĂ© littĂ©raire ». — Doric Germain, Dictionnaire des Ă©crits de l'Ontario français.

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Informations

Année
2012
ISBN
9782894235300

CHAPITRE XVIII

À trois heures moins un quart, Rose-Delima quitta son bureau pour se rendre au Parlement. Donald devait y prononcer un discours important ce jour-lĂ  et elle tenait Ă  l’entendre. Elle suivit la foule qui s’engouffrait par les grandes portes, gravit l’escalier et s’arrĂȘta un moment dans la rotonde avant de monter aux galeries publiques. À l’extrĂ©mitĂ© de la galerie ouest, elle aperçut soudain Donald qui descendait le grand escalier de marbre avec, d’un cĂŽtĂ©, le jeune homme qui avait remplacĂ© Jean-Pierre et, de l’autre, une jeune femme blonde d’une beautĂ© remarquable.
Sans s’en rendre compte, elle quitta les rangs et, s’abritant dans l’angle d’un pilier, se mit Ă  les observer. Donald, tournĂ© vers la droite, s’entretenait avec son chef de cabinet. La jeune femme Ă©tait vĂȘtue d’un tailleur d’un vert doux qui faisait ressortir son teint rosĂ© et ses cheveux clairs, ainsi que d’un chandail ivoire sur lequel un collier de jade et d’ivoire rĂ©pĂ©tait les tons de l’ensemble. ArrivĂ©s au pied de l’escalier, ils s’arrĂȘtĂšrent. Donald se tourna vers la jeune femme et lui dit quelques mots en souriant de ce sourire tendre qu’elle connaissait si bien. Son interlocutrice lui tendit une liasse de feuilles avec un geste et un regard qui Ă©taient une dĂ©claration d’amour aussi claire que si elle avait articulĂ© les mots Ă  haute voix. Le cƓur douloureux, Rose-Delima le vit disparaĂźtre par la porte qui conduisait Ă  la Chambre tandis que ses deux compagnons montaient l’escalier conduisant aux gradins rĂ©servĂ©s aux fonctionnaires.
Un long moment, elle demeura sous le choc de cet Ă©change secret, de cette connivence qui semblait exister entre eux, puis elle se ressaisit et se mit Ă  monter l’escalier.
AprĂšs tout, Donald Ă©tait un homme sĂ©duisant. Elle n’était pas la seule Ă  l’avoir remarquĂ©. Il avait toujours exercĂ© une attirance sur les femmes.
Lentement, elle gravit les marches et s’assit dans les gradins publics. À la gauche de l’orateur, dans les loges rĂ©servĂ©es, elle vit la femme de Donald, qui Ă©tait venue pour l’occasion. Avec ses cheveux impeccablement coiffĂ©s, sa robe de grand couturier et son visage aux traits classiques, elle Ă©tait tout Ă  fait la patricienne venue, comme l’occasion le demandait, pour porter appui Ă  son mari. Presque en face, dans la section des fonctionnaires, l’éblouissante beautĂ© blonde, qui, penchĂ©e en avant, guettait l’entrĂ©e des ministres de la Couronne.
Et dans les galeries publiques, lui disait un dĂ©mon qui s’était logĂ© dans son esprit depuis la conversation avec Jean-Pierre, il y a une brune imbĂ©cile qui attend de se faire dire si elle doit aller Ă  la pĂȘche ou Ă  bicyclette. «Figurativement parlant», aurait ajoutĂ© ce dernier.
Le rite centenaire se poursuivait en bas, dans la chambre rouge et or. Elle entendit la voix de l’orateur qui disait: «The Chair recognizes the Honourable Minister of National Resources.»
Donald se leva. La belle voix grave et chaude se ïŹt entendre, dominant aisĂ©ment le chahut habituel, qui diminua peu Ă  peu.
Ce ne fut que deux semaines plus tard que Donald lui tĂ©lĂ©phona. Elle fut un peu Ă©tonnĂ©e que sa femme eĂ»t prolongĂ© son sĂ©jour Ă  Ottawa Ă  ce point, mais elle avait l’habitude d’attendre.
Comme chaque fois, lorsque la session Ă©tait en cours et que ses occupations ne lui permettaient pas de se rendre Ă  la maison de campagne, Donald l’avait envoyĂ© chercher et avait fait monter le dĂźner. Tout au long du repas, il l’avait entretenue de l’introduction de la loi qu’il prĂ©parait, de la stratĂ©gie Ă  adopter pour la faire voter en Chambre. De plus, on commençait Ă  prĂ©parer l’élection qui se tiendrait vraisemblablement dans les douze mois. Il Ă©tait trĂšs important pour lui d’obtenir une bonne majoritĂ©. S’il pouvait amener assez de votes au parti, il pourrait s’attendre Ă  se voir conïŹer un ministĂšre plus important.
Comme ils achevaient leur repas, le tĂ©lĂ©phone sonna. Il alla rĂ©pondre et, lorsqu’il revint, il dit Ă  Rose-Delima:
— L’organisateur de ma circonscription est en bas avec quelqu’un qu’il veut me prĂ©senter. Il faut que je les reçoive. Veux-tu aller m’attendre dans ma chambre? Ça ne devrait pas ĂȘtre long.
Rose-Delima jeta un bref coup d’Ɠil dans la piĂšce pour s’assurer qu’elle ne laissait rien qui pĂ»t rĂ©vĂ©ler sa prĂ©sence, se rendit dans la chambre Ă  coucher et en ferma la porte. Elle entendit arriver le garçon que Donald avait sonnĂ© pour desservir, puis l’arrivĂ©e des deux visiteurs. La discussion s’engagea. Elle ne comprenait pas ce qu’ils disaient mais, au ton des voix, la discussion paraissait animĂ©e et ne semblait pas sur le point de ïŹnir.
Autant lire en attendant, se dit Rose-Delima en ouvrant son sac Ă  main pour prendre le livre de poche qu’elle ne manquait pas d’y mettre. Il n’y Ă©tait pas. Puis, elle se souvint qu’elle avait changĂ© de sac ce matin et qu’elle Ă©tait partie Ă  la hĂąte. Les voix continuaient toujours. Elle se mit Ă  faire le tour de la piĂšce: il devait bien y avoir quelque chose Ă  lire quelque part.
Dans la petite bibliothĂšque, il n’y avait que l’Annuaire du Canada, des traitĂ©s sur les ressources Ă©nergĂ©tiques, une sĂ©rie de Hansard reliĂ©s. Le tiroir du bureau ne contenait que des dĂ©pliants publicitaires, de la papeterie et l’inĂ©vitable Bible des GĂ©dĂ©ons; l’armoire et la commode, que du linge personnel. Il restait les deux tables de chevet. Le tiroir de la premiĂšre contenait des pastilles contre le rhume et des lettres personnelles. En ouvrant le tiroir de la seconde, elle aperçut un collier de jade et d’ivoire sculptĂ©. Les genoux lui ïŹ‚Ă©chirent et elle s’assit sur le bord du lit.
Avec une clartĂ© impitoyable, elle revit la jeune femme blonde debout en face de Donald, cette complicitĂ© entre eux, et, comme chez tous les amoureux, ce sourire secret qui les isole du reste du monde. Puis, des images insupportables afïŹ‚uĂšrent: cette jeune femme, ici mĂȘme, dans les bras de Donald, dans le lit de Donald. Lui disait-il, Ă  cette rivale, les paroles qu’il lui rĂ©pĂ©tait Ă  elle dans leurs moments de tendresse: «Ma chĂ©rie, mon unique, mon oasis, la seule Ă  qui je puisse parler librement, sans crainte, que ferais-je sans toi?»
Elle pleura longuement la ïŹn de son rĂȘve. Puis, quand elle entendit les voix se dĂ©placer vers la porte de sortie, elle alla dans la salle de bains se baigner le visage d’eau froide. Elle rectiïŹa son maquillage et, sous l’impulsion du moment, alla chercher le collier et l’accrocha au bouton de porte de l’armoire Ă  pharmacie pour qu’il le voie et, surtout, pour qu’il sache qu’elle l’avait vu.
Donald ouvrit la porte de la chambre et entra en s’excusant. Il ne savait pas que cette rĂ©union se prolongerait autant, mais il Ă©tait trĂšs heureux du rĂ©sultat. Vraiment, l’homme que lui avait prĂ©sentĂ© son organisateur l’avait beaucoup intĂ©ressĂ©.
— Je me sens trĂšs fatiguĂ©e, ce soir, dit Rose-Delima. Veux-tu appeler le chauffeur pour qu’il me ramĂšne chez moi?
— Tu n’es pas malade, j’espùre?
— Non. J’ai besoin de me coucher tît, c’est tout.
— Bon, comme tu voudras, dit-il.
Se tournant, il alla appeler le chauffeur.
— Il me reste une semaine de congĂ© annuel, dit Rose-Delima lorsqu’il revint. Je crois que je vais la prendre maintenant. Il y a longtemps que Jean-Pierre me demande de l’inviter au lac des Roseaux, dans la propriĂ©tĂ© de Germain. J’ai le goĂ»t d’y aller. Je sens que l’air du Nord me fera du bien.
— Je vous envie, tous les deux. Je voudrais ĂȘtre libre d’y aller moi aussi, dit-il d’un air distrait.
Il l’aida à endosser son manteau, puis il ajouta:
— Plus j’y pense, plus je crois que c’est ce jeune homme que j’ai rencontrĂ© ce soir qui devrait s’occuper de la publicitĂ© dans ma prochaine campagne Ă©lectorale. Il a une imagination fertile, des idĂ©es neuves. Et un bon jugement, avec ça.
Le chauffeur frappa Ă  la porte.
— Repose-toi bien, Lima, dit-il en l’embrassant.
Visiblement, il Ă©tait pris par ses problĂšmes.
«Et moi, je suis comme les meubles de la chambre, confortables, utiles, familiers», songea Rose-Delima tandis que la voiture la ramenait à travers les rues brillamment éclairées de la ville.
Jean-Pierre fut si heureux lorsqu’elle l’appela qu’elle sentit le besoin de mettre les choses au point aïŹn qu’il ne se leurre pas de faux espoirs.
— Je n’ai rien dĂ©cidĂ©. Je veux simplement retourner chez nous, lĂ -bas, pour me reposer. Tu comprends?
— Certainement. Ça tombe bien. Moi aussi, j’ai besoin de me reposer, maintenant que les examens sont ïŹnis. Quand veux-tu partir?
— AussitĂŽt que possible. AprĂšs-demain, je crois. Juste le temps d’avertir le bureau que je m’absente. Si nous partons tĂŽt le matin, nous pourrons ĂȘtre aux Roseaux le soir mĂȘme.
Il se mit Ă  rire.
— Quand tu prends une dĂ©cision, ça ne traĂźne pas. Si je suis devant ta porte Ă  sept heures, ça te va?
Le surlendemain, il Ă©tait lĂ , ponctuellement, tel que promis. Ils ïŹlĂšrent sans arrĂȘt, dĂ©passant Pembroke et les derniers espoirs de trouver un restaurant avant de s’enfoncer dans la forĂȘt vierge, et ce, malgrĂ© les protestations de Jean-Pierre, que la faim tiraillait. Rose-Delima ressentait une rare impatience de quitter ces paysages trop amĂšnes du Sud, de pĂ©nĂ©trer enïŹn dans le royaume du Nord, pays de l’air pur et sec, des cours d’eau sans nombre, de la forĂȘt bruissante illimitĂ©e.
Lorsque, enïŹn, ils approchĂšrent de Mattawa, Rose-Delima, du ton d’un guide touristique, expliqua:
— C’est de ce petit bourg sur les bords de la sombre et traütre Outaouais que sont partis les explorateurs et les chercheurs d’or.
Ils Ă©voquĂšrent le souvenir des frĂšres Timmins, NoĂ© et Jules, propriĂ©taires du magasin gĂ©nĂ©ral de l’endroit, qui avaient Ă©tĂ© rĂ©compensĂ©s de l’aide qu’ils avaient l’habitude d’apporter Ă  ceux qui partaient en tournĂ©e de prospection en leur fournissant les vivres nĂ©cessaires au voyage. En 1903, Fred LaRose, qui travaillait comme forgeron Ă  la construction d...

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