Écrire au fĂ©minin au Canada français
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Écrire au fĂ©minin au Canada français

Johanne Melançon

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Écrire au fĂ©minin au Canada français

Johanne Melançon

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Issus d'un colloque tenu Ă  l'UniversitĂ© Laurentienne de Sudbury en 2008, les articles ici rĂ©unis abordent l'Ɠuvre de neuf Ă©crivaines: Antonine Maillet, France Daigle, HĂ©lĂšne Brodeur, Anne Claire, Tina Charlebois, AndrĂ©e Christensen, Marguerite Andersen, Gabrielle Roy et Simone Chaput. Les textes sont organisĂ©s selon un parcours gĂ©ographique - d'Acadie en Ouest, en passant par l'Ontario - et auraient pu ĂȘtre regroupĂ©s selon les thĂšmes suivants: une parole fĂ©minine qui participe au changement social; l'affirmation d'un «je» fĂ©minin contemporain; le rapport de soi Ă  l'autre; et la transformation du mythe en rapport avec les figures fĂ©minines. Plusieurs Ă©tudes examinent Ă©galement l'aspect intimiste des Ɠuvres, en lien avec l'autobiographique et le mĂ©moriel. Treize chercheurs, tous spĂ©cialistes de la littĂ©rature du Canada français, signent ces articles.

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Informations

ÉCRIRE AU FÉMININ EN ONTARIO FRANÇAIS

HÉLÈNE BRODEUR : ÉTUDE DU TEMPS ET DE L’ESPACE DANS LES CHRONIQUES DU NOUVEL-ONTARIO 68

Beatriz Mangada
Universidad AutĂłnoma de Madrid
Je ne voulais pas faire une Ɠuvre d’historienne, mais de mĂ©moires au pluriel.
Annie Ernaux
Recueil de mĂ©moires, tĂ©moignage personnel, rĂ©cit rĂ©trospectif, vĂ©ritĂ© et fiction, ces notions, Ă©voquĂ©es dans les paroles d’Annie Ernaux Ă  l’occasion de la parution de son dernier roman, Les annĂ©es, nous servent de citation incipitielle pour convoquer la figure et l’Ɠuvre d’une autre romanciĂšre francophone, HĂ©lĂšne Brodeur, qui sans vouloir faire une Ɠuvre d’historienne a voulu, elle aussi, faire parler la mĂ©moire du peuple franco-ontarien. Ainsi, dans ce recueil d’écritures au fĂ©minin au Canada français qui veut donner la parole Ă  celles qui l’ont prise pour participer Ă  la construction de l’histoire littĂ©raire de leur rĂ©gion et de leur pays, nous proposons une rĂ©flexion sur les Chroniques du Nouvel-Ontario d’HĂ©lĂšne Brodeur, car cette romanciĂšre est pour l’Ontario ce qu’Antonine Maillet est pour l’Acadie ou Gabrielle Roy pour les provinces de l’Ouest, Ă  savoir une voix de femme emblĂ©matique de la littĂ©rature canadienne69.
Parmi les nombreux aspects d’analyse qu’offre ce triptyque, nous nous arrĂȘterons cette fois-ci Ă  deux vecteurs structuraux de la narration rassemblĂ©s dans le titre mĂȘme de la trilogie : le temps et l’espace. Une premiĂšre Ă©tude plus analytique de la dĂ©rive Ă©nonciative tissĂ©e autour du toponyme Ontario nous permettra de rĂ©flĂ©chir Ă  la transformation et aux changements de cette rĂ©alitĂ© et de cet imaginaire spatial et identitaire. Alors qu’une approche plus interprĂ©tative de la coordonnĂ©e temporelle nous offrira la possibilitĂ© de nous intĂ©resser Ă  l’écriture rĂ©sultant de l’interfĂ©rence entre la construction fictionnelle d’un temps propre au rĂ©cit, la mise en place d’un ancrage contextuel faisant revivre plus d’un demi-siĂšcle d’histoire et la matiĂšre biographique, qui se livre Ă  une Ă©criture de mĂ©moires au pluriel.
HélÚne Brodeur et la littérature franco-ontarienne
Aborder la figure d’HĂ©lĂšne Brodeur, c’est aussi rĂ©clamer une brĂšve considĂ©ration du contexte littĂ©raire d’insertion. Signalons sommairement que les annĂ©es 1980 marquent l’affermissement et l’épanouissement de la littĂ©rature franco-ontarienne, qui dĂ©sormais s’approchera davantage de la population française de l’Ontario. La crĂ©ation en 1973 des Éditions Prise de parole Ă  Sudbury permit Ă  l’époque la publication d’ouvrages franco-ontariens. Pendant la dĂ©cennie suivante, l’accĂšs Ă  l’histoire et Ă  la culture de cette communautĂ© se transforme en projet politique. L’État prend alors la relĂšve d’une lutte tranquille entreprise par une collectivitĂ© qui avait reçu jusqu’à prĂ©sent l’appui constant de l’Église. En mĂȘme temps, le discours scientifique tente de dĂ©finir une nouvelle identitĂ© surgie au fil des Ă©vĂ©nements sociaux et politiques70. Des institutions, des moyens de communication et la crĂ©ation de tout un rĂ©seau de recherches dans le domaine de l’histoire, l’éducation et le folklore sont mis en place Ă  ces fins. La littĂ©rature franco-ontarienne s’érige alors en matiĂšre de nombreux ouvrages71, tandis que la vie culturelle et artistique de cette communautĂ© va se manifester Ă  travers de nombreuses productions artistiques. Dans le domaine qui nous occupe, c’est-Ă -dire le roman, RenĂ© Dionne rappelle que, de la mĂȘme façon que les poĂštes du Nord de l’Ontario consolident et proclament leur identitĂ© dans leurs compositions poĂ©tiques, un nombre considĂ©rable de romanciers feront de mĂȘme en puisant dans les racines historiques. Plusieurs noms et ouvrages doivent ĂȘtre citĂ©s : celui de Lucille Roy, qui retrace dans L’impasse (1981) la quĂȘte identitaire d’un jeune Canadien français qui doit choisir entre le Canada, le QuĂ©bec et la France ; celui de Pierre-Paul Karch, qui Ă©voque dans BaptĂȘme (1982) la vie d’un petit village dans les annĂ©es 1930 ; ou encore La vengeance de l’orignal (1980) de Doric Germain, dans lequel il remĂ©more le passĂ© du Nord de l’Ontario. Pour le critique RenĂ© Dionne, ce roman, ainsi que la trilogie d’HĂ©lĂšne Brodeur, peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme les seules tentatives sĂ©rieuses de recrĂ©er fictionnellement les origines de l’identitĂ© franco-ontarienne Ă  travers l’histoire. En effet, c’est par l’entremise de la fiction littĂ©raire que les Chroniques du Nouvel-Ontario invitent le lecteur Ă  voyager dans le passĂ© et Ă  redĂ©couvrir l’évolution de la sociĂ©tĂ© franco-ontarienne de 1913 Ă  1968 ; une Ă©vocation jalonnĂ©e de rĂ©fĂ©rences historiques qui dĂ©voile une recherche approfondie de la part de l’écrivaine.
Ontario : la dĂ©rive Ă©nonciative d’un imaginaire spatial
Du point de vue du lecteur europĂ©en, un des thĂšmes les plus attrayants et trĂšs souvent prĂ©sent dans les Ă©crits littĂ©raires canadiens, et par consĂ©quent dans nos trois romans objet d’étude, est sans doute l’importance des grands espaces dans l’imaginaire des habitants du continent nord-amĂ©ricain. SpatialitĂ© et identitĂ© se rencontrent dans la pensĂ©e de Ronald Bordessa :
Canadian literature has greatly concerned itself with questions of identity. It is hardly surprising (if Frye has correctly specified the peculiarity of Canadian riddle) that it has elaborated these questions in spatial terms. Identity is referential : in the European case, to time (genealogy, heritage, inheritance) ; in the Canadian case, to space (exploring, settling and transforming). The land and the landscape are metaphor for Canada and central preoccupations of its writers 72.
Ainsi, la projection et la recrĂ©ation fictionnelle de la fondation et de l’acceptation d’une identitĂ© spatiale que nous trouvons dans les trois textes de la trilogie d’HĂ©lĂšne Brodeur rĂ©clament un jeu complexe de mĂ©canismes linguistiques fort intĂ©ressants tels les chaĂźnes anaphoriques et les rĂ©seaux isotopiques, qui reflĂštent l’évolution d’un espace immense dont l’acceptation passera par un processus d’adaptation et d’assimilation.
Dans son article « Aspects de l’imaginaire spatial : identitĂ© ou fin des territoires », le gĂ©ographe canadien Gilles SĂ©nĂ©cal rĂ©flĂ©chissait aux rapports entre des concepts tels que territoire, identitĂ© ou imaginaire spatial et remarquait que toute territorialitĂ© n’est pas Ă©ternelle, que s’ensuivent des phases de « dĂ©territorialitĂ© » et de « reterritorialitĂ© ». Il reprenait Ă  son tour la pensĂ©e d’un autre gĂ©ographe, Albert Gilbert, pour qui l’analyse du discours permet de rendre compte des lieux en privilĂ©giant les reprĂ©sentations, les sens ainsi que la maniĂšre de structurer l’espace73.
AppliquĂ©es au domaine de la littĂ©rature franco-ontarienne et plus spĂ©cifiquement au premier ouvrage d’HĂ©lĂšne Brodeur, les pensĂ©es de Gilles SĂ©nĂ©cal et d’Albert Gilbert ouvrent une voie de recherche Ă  la fois riche et intĂ©ressante, car, si la problĂ©matique de la perception spatiale a fait l’objet de nombreux travaux, notamment chez les QuĂ©bĂ©cois et les Franco-Manitobains74, ceux-ci visaient plutĂŽt une approche thĂ©orique laissant de cĂŽtĂ© l’analyse littĂ©raire. Et pourtant, ce rĂ©cit rĂ©trospectif, Ă  mi-chemin entre les chroniques et le roman historique, se veut un retour au passĂ© pour revivre le changement de la sociĂ©tĂ© franco-ontarienne depuis 1916 jusqu’en 1968, nous offrant ainsi la possibilitĂ© d’analyser l’évolution de la reprĂ©sentation linguistique de l’espace au cours des diffĂ©rentes Ă©tapes de l’histoire de cette jeune rĂ©gion. Ce processus d’acceptation des grands espaces comme nouvelle patrie gĂ©nĂšre des mĂ©canismes d’énonciation bien diffĂ©rents du premier au troisiĂšme volet de la trilogie et tisse autour du toponyme Ontario un nombre considĂ©rable de chaĂźnes anaphoriques et de rĂ©seaux isotopiques trĂšs significatifs rendant comprĂ©hensible le passage de « cette immensitĂ© » ou de « ce paysage inhumain et apparemment sans limite » de La quĂȘte d’Alexandre vers « c’était sa patrie » ou « nous les gens du Nord » des Routes incertaines.
Il faudrait rappeler que le phĂ©nomĂšne de l’anaphore a Ă©tĂ© largement abordĂ© par la linguistique textuelle. Surtout par Francis Corblin, qui, dans son ouvrage IndĂ©fini, dĂ©fini et dĂ©monstratif, constructions linguistiques de la rĂ©fĂ©rence, propose un parcours trĂšs intĂ©ressant Ă  travers ces trois dĂ©signateurs, tout en Ă©bauchant l’importance de ces opĂ©rations linguistiques de reprise dans la construction de chaĂźnes de rĂ©fĂ©rence dans le discours. Cet aspect, il le dĂ©veloppera plus tard dans Les formes de reprise dans le discours, anaphores et chaĂźnes de rĂ©fĂ©rence, oĂč il s’intĂ©resse Ă©galement Ă  ces formes capables d’assurer un effet de reprĂ©sentation et une certaine cohĂ©rence sĂ©mantique.
Pour cet auteur, on peut Ă©tablir une distinction claire entre dĂ©signation rigide – nom propre et pronom personnel –, Ă  Ă©viction totale, et dĂ©signation contingente – constituĂ©e par des descriptions identifiantes de groupes nominaux anaphoriques, des dĂ©monstratifs et des indĂ©finis –, qui assure un effet de profusion. En tant qu’expressions linguistiques se rĂ©fĂ©rant au mĂȘme personnage ou Ă  un mĂȘme Ă©lĂ©ment du texte, ces deux types de dĂ©signations deviennent alors des constituants de chaĂźnes anaphoriques qui, sous forme de reprise, vont permettre de faire avancer le texte par un effet de continuitĂ© dans la reprise du dĂ©jĂ  connu, ou bien par l’introduction d’un nouveau point de vue.
Dans une visĂ©e plus large, celle de la sĂ©mantique dite « interprĂ©tative », François Rastier va au-delĂ  et considĂšre ces chaĂźnes anaphoriques comme des isotopies spĂ©cifiques construites Ă  partir des prĂ©somptions que le lecteur confirme au fur et Ă  mesure qu’avance sa lecture, ce qui vient complĂ©ter le sens attribuĂ© par Francis Corblin : maintien ou reformulation d’une dĂ©signation. L’interprĂ©tation d’un texte peut alors ĂȘtre conçue comme le rĂ©sultat de deux dĂ©marches complĂ©mentaires. D’une part, l’analyse des diffĂ©rentes opĂ©rations anaphoriques et de la construction de celles-ci dans un ensemble plus dynamique qui parcourt le texte permet d’aboutir Ă  une saisie plus enrichie des personnages ou d’autres aspects des romans littĂ©raires. Et d’autre part, le texte offre Ă©galement une deuxiĂšme interprĂ©tation qui tient compte des isotopies qui tissent le fond sĂ©mantique d’un texte et assurent sa cohĂ©rence en mĂȘme temps qu’elles provoquent un certain effet de reprĂ©sentation.
Par ailleurs, Daniel ApothĂ©loz insiste Ă©galement sur le fait que n’importe quelle Ă©tude de l’anaphore pourrait ĂȘtre enrichie davantage si l’on tenait compte des facteurs contextuels susceptibles d’incider sur le choix des anaphoriques ; et il avoue qu’il y a tout un travail Ă  faire Ă  partir de cette nouvelle considĂ©ration de l’anaphore comme Ă©lĂ©ment dynamique qui, plutĂŽt qu’assurer la cohĂ©sion, garantit la progression du texte.
AppliquĂ©es aux Chroniques du Nouvel-Ontario, ces thĂ©ories nous permettent d’envisager et d’expliquer l’évolution conceptuelle et dĂ©signative d’un espace « inhumain et apparemment sans limit...

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