En cas d'incendie, prière de ne pas sauver ce livre

Catherine Voyer-Léger

• Éditeur: Éditions Prise de parole
• Année: 2021
• ISBN de l'eBook: 9782897442385
• Sujet: Littérature
• Sujet: Dissertations littéraires

Le feu est pris. Nous sommes de tristes pyromanes. Devant l'urgence climatique, l'humanité en est à rapailler ses derniers mots. Dégoût. Compassion. Lucidité. À quel pouvoir prétend la parole quand la crise ravage les écosystèmes, bouleverse nos vies? Et la panique, où se loge-t-elle, dans les tripes ou dans la tête?Lucides, poétiques, intimistes ou enflammés, les douze essais narratifs de ce recueil explorent la crise climatique dans tous ses paradoxes, et témoignent des complexités de notre rapport à l'environnement. Ils interrogent aussi les capacités d'action, responsabilités, postures et angoisses des communautés et individus face au désastre.Avec des textes de Ying Chen, Céleste Godin, Dave Jenniss, Mishka Lavigne, Le R Premier, Sébastien Lord-Émard, Charlotte L'Orage, Sonya Malaborza, Laurent Poliquin, Jonathan Roy, Gisèle Villeneuve, Ouanessa Younsi.Préface de Catherine Voyer-Léger.

Moins

Mishka Lavigne

En cas d’incendie, connaître exactement la valeur des choses

combien pour repartir à neuf

les meubles

les électroménagers

les draps, les serviettes de bain, à main, les lavettes à vaisselle, les linges à vaisselle, le rack pour faire sécher la vaisselle, la vaisselle, la vaisselle pour manger, la vaisselle pour servir, la vaisselle pour boire, la vaisselle pour cuisiner, la vaisselle qui traîne dans l’armoire parce que ça sert un usage unique, les petits électroménagers (selon le site du canadian tire ça veut dire le grille-pain, la bouilloire, le robot culinaire, la machine pour carboniser de l’eau pour arrêter d’acheter de l’eau en bouteille de plastique, le moulin à café, la presse à café, l’autre presse à café – en avoir deux pour quand il y a de la visite), le séchoir à cheveux, la brosse à cheveux, l’évier, j’imagine, le meuble-lavabo, ou si ça c’est une chose qui vient avec la maison, c’est un incontournable, je ne sais pas, je l’ai quand même acheté ce meuble-lavabo

les vêtements, les vêtements d’hiver, les vêtements d’été, les manteaux, les bottes, les tuques, les mitaines, ça coûte cher s’équiper pour la tempête, le maillot de bain, les sous-vêtements, les soutiens-gorges, les bas, ça prend un certain nombre de paires de bas pour ne pas perdre ta vie à faire du lavage, les hauts sans manche, manches courtes, manches longues, les robes moyennement chic, la robe super chic portée exactement deux fois, les chandails de laine, les jeans, les bas de nylon, les lunettes de soleil, les souliers, les patins, parce que j’ai ça, oui, une paire de patins, parlant de ça, j’ai aussi un vélo, une raquette de badminton vintage qui était à ma mère, un vélo mauve lilas pas joli mais solide, une corde à danser, des poids de huit livres, des poids de cinq livres, quelques tapis de yoga, une de ces petites bouteilles que tu peux attacher à ton bras pour courir dehors, des bottes de randonnée, une tente, un sac de couchage, un tapis de sol, un canot

les choses électroniques, ordinateur, imprimante, un modem, un routeur, un téléphone, un téléviseur, des petits haut-parleurs pour que la musique résonne à tous les étages de la maison, un iPod parce que je suis old school et je n’ai jamais mis de musique sur mon téléphone, des paires d’écouteurs que je rachète encore et encore parce que je les brise, les fils pour ci mais pas pour ça, les fils pour ça mais pas pour ci, les fils orphelins, la liseuse électronique

les livres, les piles de livres, si tu devais estimer la valeur de ta bibliothèque ce serait combien me demande l’agent d’assurance, je sais pas, je dis, combien tu as de livres approximativement me demande l’agent d’assurance, je sais pas, je dis, mille? mille c’est beaucoup, il ne me croit pas vraiment, je le sens quand je le vois écrire mille sur le formulaire, combien ça vaut tout ça, je sais pas, usagé, neuf, reçu en cadeau, signé par l’autrice, ramassé en voyage, rare, pas rare, coup de cœur, pourquoi je le garde celui-là, mille, je dis avec confiance, probablement quelque chose comme mille

le divers, les lampes, les ampoules, les ventilateurs, les plantes, les pots de plantes, les tournevis, les fonds de peinture, le calendrier sur le frigo, les papiers dans le classeur, les albums photos, les décorations de noël, les brosses à dents, les ciseaux, le bâton de colle, l’agrafeuse, le rouleau de scotch tape de marque no name, les aimants qu’une amie a fabriqués, les dizaines et dizaines de stylos, les trombones, les cadres sur les murs, les dvd dans une boîte, les cintres dans le placard, la bouteille de crème pour le corps, le sac dans lequel je garde des pains de savon, la grosse boîte de bicarbonate de soude pour nettoyer le bain, le balai, l’aspirateur, la corde d’extension pour pas avoir à changer l’aspirateur de prise à...

Table des matières

• Couverture
• Page de titre
• Copyright
• En cas d’incendie, fermez les lumières
• Ce qu’on aime
• Un monde où tout se transforme
• La marche de la bête
• Celle qui reste
• Mantra
• Le doux sommeil apaisé ou l’art astucieux de la dérobade
• L’écho du monde s’entend mieux dans l’isolement
• chute libre
• Égoportrait du poète en burnout
• Homo procrastinus au carnaval pour mieux construire notre destruction
• Guilty AF
• moins