TROISIÈME PARTIE
La conquête de la Maison-Blanche
Tous les quatre ans, le lundi suivant le premier lundi de novembre, se tient l’élection du président des États-Unis. Le 3 novembre 2020, tous les Américains désignent également leurs représentants, dans douze États et deux territoires (Samoa et Porto Rico) ils élisent leur gouverneur, dans 35 États leurs sénateurs. Nombre d’entre eux participent à des élections locales, et répondent en plus à des questions référendaires qui vont des lois de finances à la destitution d’un élu en passant par des amendements constitutionnels. Certains sont d’ailleurs des référendums d’initiative populaire, qui abondent dans un État comme la Californie ; leur préparation suppose un travail continu pour obtenir les signatures nécessaires afin d’amener, par voie de pétition, la question sur le bulletin de vote.
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Pléthore de questions référendaires
Il y aura eu en tout 155 questions référendaires posées lors du scrutin de novembre 2018, qui ont concerné 37 États : l’avortement, la marijuana, les armes, les programmes d’assurance maladie, les énergies renouvelables, les salaires minimums, les niveaux de taxation ont ainsi fait partie des enjeux soumis à référendum. Sur ces 155 référendums, 64 étaient issus d’initiative populaire, 62 visaient à créer de nouvelles dispositions législatives et 2 étaient des référendums de révocation de lois récemment adoptées par la législature de l’État concerné. Pour 2020, Ballotpedia en recense déjà 96, dont 88 seront soumis au vote en novembre dans 32 États. Les questions référendaires déjà approuvées pour figurer sur le bulletin de novembre touchent des enjeux comme le salaire minimum, l’usage et la légalisation de la marijuana, le contrôle des armes à feu, les amendes et les radars de vitesse, l’encadrement des élections et le secteur de l’enseignement.
Il existe 8 types de questions référendaires : les amendements constitutionnels que la législature de l’État soumet à référendum (57 en 2020), les référendums législatifs d’initiative populaire (22 en 2020), les référendums d’abrogation (4 en 2020), les projets de loi soumis à l’approbation populaire par la législature (4 en 2020), les référendums dont l’automaticité est établie par la Constitution (1), les référendums sur l’émission d’obligations (8 en 2020), les référendums définis par une commission ou une agence qui en a l’autorité en vertu de la Constitution de l’État et enfin les questions consultatives.
Voir : Conference of State Legislatures, www.ncsl.org ; Potential 2020 ballot measures, Ballotpedia, ballotpedia.org.
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Pour autant, l’élection présidentielle est au cœur et constitue l’essentiel de l’actualité. Dans le cas où le président cherche à obtenir un second mandat, on établit souvent, mais c’est discuté, une corrélation entre les indicateurs économiques et le taux de réélection du président.
Dans le cas où le président sortant ne souhaite pas ou ne peut pas se représenter, le champ est beaucoup plus ouvert. Bien sûr, le spectre de l’élection de 2000 et celui de l’année 2016 planent sur les scrutins présidentiels (puisque le président a obtenu la majorité des grands électeurs, mais pas celle des suffrages populaires), mais le processus électoral est long, l’élection présidentielle est le fruit de plusieurs années de travail pour les candidats et aucun cycle électoral n’est exempt de surprises.
Taux de chômage et élection
Le taux de chômage défait-il le président sortant ?
Depuis 1945, les présidents battus au terme de leur premier mandat faisaient tous face à une année record en matière de taux de chômage. Mais la corrélation est moins une affaire de chiffres que de perspective. En effet, l’économie américaine affiche un taux de chômage de 7,7 % en 2012 lorsque Barack Obama cherche à se faire réélire. Et il y parvient : il faut donc considérer que ce taux élevé était moindre par rapport à ceux des années précédentes – en effet la crise de 2008 a généré des taux de chômage de 9,9 %, 9,8 % et 8,6 %. En 2012, malgré un taux très élevé, la perception du public était celle d’une amélioration. Avec un taux de chômage supérieur à 13 % en 2020, on comprend donc aisément la volonté du président Trump de rouvrir l’économie rapidement pour tenter de renverser la tendance à quelques mois de l’élection de novembre 2020.
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Qui peut aspirer à la présidence des États-Unis ?
Pour se présenter à la Maison-Blanche, il faut être citoyen américain de naissance, âgé d’au moins 35 ans et avoir vécu 14 ans aux États-Unis. Ces critères peuvent paraître surannés – et injustes pour les immigrants qui peuvent y voir une citoyenneté à deux vitesses puisqu’ils sont exclus de facto de la magistrature suprême –, mais ils étaient cruciaux en 1787, alors que « la nation était jeune et que les liens patriotiques étaient faibles ».
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Être né à l’étranger peut coûter la Maison-Blanche
La question a déjà été posée plusieurs fois, puisque la Constitution impose aux candidats d’être citoyens américains de naissance, autour de la possible candidature à la Maison-Blanche d’Henry Kissinger, de Madeleine Albright ou encore d’Arnold Schwarzenegger. Tous sont nés à l’étranger et ont acquis la citoyenneté américaine par la voie de la naturalisation : la présidence leur est donc interdite. Les projets d’amendement pour changer cet état de fait n’ont jamais abouti. La question de l’éligibilité du sénateur John McCain en 2008, né sur une base navale américaine au Panama, de Ted Cruz en 2016 né à Calgary, a été soulevée : en 2008, elle a rapidement été résolue par le Sénat (résolution 511), car il était politiquement inimaginable d’exclure de la course les enfants de citoyens servant à l’étranger. Bien que ces critères soient désuets, leur existence donne souvent lieu à des débats sur la validité de la candidature de tel ou tel candidat, animés notamment par le mouvement des Birthers – ces citoyens qui ont contesté la validité de la citoyenneté de naissance tant de Barack Obama (qu’ils soupçonnent d’être né à l’étranger) que de John McCain en 2008 ou de Ted Cruz en 2016.
Il faut également avoir vécu effectivement 14 ans aux États-Unis : l’obligation de résidence ne veut cependant pas dire 14 années consécutives, puisque le président Herbert Hoover, qui avait mené une carrière d’ingénieur à l’étranger, ne vivait aux États-Unis que depuis 11 ans lorsqu’il a été élu en 1928.
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Au-delà de ces critères formels, pour pouvoir – de façon réaliste – aspirer à la Maison-Blanche, les candidats doivent accumuler très tôt soutiens et financements, parfois jusqu’à quatre années avant l’année électorale proprement dite. C’est ce que l’on appelle la « primaire invisible » : il s’agit en quelq...