Les Lieux de pouvoir au Québec
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Les Lieux de pouvoir au Québec

Marco Bélair-Cirino, Dave Noël

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  1. 254 pages
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Les Lieux de pouvoir au Québec

Marco Bélair-Cirino, Dave Noël

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Au QuĂ©bec, les lieux de pouvoir ont beaucoup Ă©voluĂ© en plus de deux cents ans de parlementarisme. Certains demeurent inchangĂ©s, comme le Parlement; certains ont disparu, comme le Conseil lĂ©gislatif; d'autres ont perdu de leur influence, comme la rĂ©sidence du lieutenant-gouverneur. De nos jours, le pouvoir bouge au grĂ© des dĂ©placements du premier ministre; la plupart du temps entre la capitale et la mĂ©tropole, dans des avions nolisĂ©s ou en limousine, le long de l'autoroute 20 ou 40. Le pouvoir est aussi fragile que les lieux oĂč il s'exerce. Il ne reste parfois aucune trace des sites marquants de l'histoire politique quĂ©bĂ©coise. Et les QuĂ©bĂ©cois sont plutĂŽt rĂ©ticents Ă  l'idĂ©e d'investir de grosses sommes pour se doter de lieux de pouvoir dignes de la fonction de premier ministre.Du Bois-de-Coulonge Ă  l'Ă©difice Price en passant le ministĂšre des Finances et l'« Élysette », cette Ă©phĂ©mĂšre rĂ©sidence officielle du premier ministre Jacques Parizeau, les journalistes Marco BĂ©lair-Cirino et Dave NoĂ«l ont arpentĂ© une vingtaine de ces lieux de pouvoir oĂč le QuĂ©bec d'aujourd'hui a Ă©tĂ© imaginĂ©. GrĂące Ă  des entretiens avec d'anciens premiers ministres quĂ©bĂ©cois et des personnes qui les ont accompagnĂ©s dans l'exercice du pouvoir, ils reconstituent des moments marquants – et parfois amusants – de l'histoire politique, tous ancrĂ©s dans des lieux dont ils sont aujourd'hui indissociables. Il y a le si bien nommĂ© « bunker », oĂč sont passĂ©s Robert Bourassa et Lucien Bouchard. Il y a la salle surnommĂ©e « la soucoupe volante », oĂč RenĂ© LĂ©vesque s'est ralliĂ© Ă  la Charte de la langue française de Camille Laurin, en 1977. Il y a aussi les lieux rĂȘvĂ©s du QuĂ©bec souverain que Jacques Parizeau imagine le temps d'une marche dans le Vieux-QuĂ©bec en compagnie d'un haut fonctionnaire.Que nous disent ces diffĂ©rents lieux sur nous-mĂȘmes et sur les Ă©vĂ©nements marquants de notre histoire? Aussi enrichissante qu'Ă©tonnante, cette visite de nos lieux de pouvoir est appelĂ©e Ă  devenir une rĂ©fĂ©rence incontournable sur l'histoire du QuĂ©bec.

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chapitre 1
L’édifice HonorĂ©-Mercier :
l’épicentre du pouvoir
Si on cherche une image concrĂšte du lieu de pouvoir politique de l’État du QuĂ©bec, c’est ici, c’est dans cette salle », lance le premier ministre Philippe Couillard (2014-2018) en nous ouvrant les portes de son bureau, le dernier Ă©tĂ© de son mandat. Le pupitre, offert par l’Union nationale au premier ministre Maurice Duplessis soixante ans plus tĂŽt, trĂŽne fiĂšrement dans la piĂšce situĂ©e dans l’encoignure nord-est du troisiĂšme Ă©tage de l’édifice HonorĂ©-Mercier. « Tous les premiers ministres, depuis, se sont assis derriĂšre ce bureau-lĂ 1 », fait remarquer l’homme politique, deux semaines avant de demander au lieutenant-gouverneur, J. Michel Doyon, de convoquer les QuĂ©bĂ©cois aux urnes le 1er octobre suivant. « C’est une Ɠuvre de bois massif. Je ne sais pas si on pourrait faire la mĂȘme chose aujourd’hui avec les armoiries en avant, et tout », poursuit-il devant des fenĂȘtres en vitre pare-balles qui donnent sur le boulevard RenĂ©-LĂ©vesque Ă  QuĂ©bec.
Deux toiles sont accrochĂ©es au mur lui faisant face. Celle de gauche provient de sa collection personnelle. Un voilier s’aventure dans une mer agitĂ©e. « Il y a toujours de la houle lorsqu’on gouverne. Ce n’est pas un fleuve tranquille. Il y a toujours des choses imprĂ©vues, des difficultĂ©s qu’on rencontre, qui sont plus importantes qu’on pensait », dit-il, quatre ans et demi aprĂšs avoir pris la barre de l’État quĂ©bĂ©cois. À droite, un pĂȘcheur de saumon tient fermement sa canne qui ploie comme un arc. Il a fait une prise. « C’est un “rush” d’adrĂ©naline », dit M. Couillard, les yeux scintillants devant Fosse Ă  saumons sur la riviĂšre Godbout de Frederick Arthur Verner (1877), peinture qu’il a empruntĂ©e au MusĂ©e national des beaux-arts du QuĂ©bec. « Ça me rappelle ce que j’aime le mieux faire, Ă  part le travail. » M. Couillard Ă©change avec les membres de son Ă©quipe autour d’une table rectangulaire placĂ©e Ă  proximitĂ© de fenĂȘtres Ă  battants. « [S’y tiennent] des discussions d’arbitrage sur les finances publiques. Des ministres viennent nous voir pour nous prĂ©senter leurs projets, les dĂ©putĂ©s [aussi] », explique-t-il.
Des photographies sur lesquelles il apparaĂźt avec des chefs politiques – Barack Obama, François Hollande, Emmanuel Macron, RaĂșl Castro – et spirituel – le pape François – sont disposĂ©es sur un meuble Ă  compartiments aux cĂŽtĂ©s du traitĂ© de thĂ©orie politique De l’esprit des lois, de Montesquieu, et de dessins d’enfants. « J’aime les dessins d’enfants parce qu’ils sont tellement spontanĂ©s », note-t-il. Des photographies de famille sont aussi posĂ©es ici et accrochĂ©es lĂ . Sur l’une d’elles, il figure en culottes courtes Ă  cĂŽtĂ© de son pĂšre. « Je dois d’ailleurs en mettre Ă  jour parce que, maintenant, on a cinq petits-enfants. » PassionnĂ© d’histoire, le chef du gouvernement attire notre attention sur un fac-similĂ© sur lequel on peut voir la signature du premier gouverneur en titre de la Nouvelle-France, Charles Huault de Montmagny (1636-1648) – « Montmagny lui-mĂȘme », souligne-t-il – ainsi que la marque de l’un des premiers colons de QuĂ©bec, Guillaume Couillard, dont il est le descendant aprĂšs onze gĂ©nĂ©rations2. « Je trouve trĂšs Ă©mouvant de voir cela. [
] Il y a une marque parce qu’il ne savait pas lire et Ă©crire. Il savait compter, par exemple. C’était un charpentier de marine ! » s’enorgueillit l’ancien neurochirurgien.
Le temps file. Son attachĂ©e de presse l’invite Ă  poursuivre la visite dans la salle voisine. Le premier ministre balaie du regard son bureau. « Ma collection de Tintin ! » s’exclame-t-il, avant de faire demi-tour. Il nous invite Ă  le suivre vers une table sur laquelle il a rassemblĂ© des albums – Objectif Lune et On a marchĂ© sur la Lune sont ses prĂ©fĂ©rĂ©s –, des figurines et des accessoires Ă  l’effigie du reporter globe-trotteur. « Les Belges, comme ils savent que j’aime bien Tintin, ils m’apportent toujours un truc. » Le chef de gouvernement et dĂ©putĂ© de Roberval reçoit les dignitaires dans la piĂšce voisine : « la salle d’entretiens », oĂč deux fauteuils encadrent un drapeau du QuĂ©bec et un drapeau du Saguenay – Lac-Saint-Jean. Le second, reconnaissable Ă  la croix grise bordĂ©e de rouge sur fond vert feuille et jaune dorĂ©, est remplacĂ© par celui de l’invitĂ© du jour. « Le visiteur, curieusement, s’assoit du cĂŽtĂ© du drapeau du QuĂ©bec », mentionne M. Couillard.
BĂąton de dynamite
L’édifice HonorĂ©-Mercier a Ă©tĂ© Ă©rigĂ© entre 1922 et 1925 pour loger des employĂ©s du gouvernement entassĂ©s dans l’hĂŽtel du Parlement, du rez-de-chaussĂ©e jusqu’aux mansardes. Conçu par l’architecte Raoul ChĂȘnevert, le nouveau bĂątiment est d’abord nommĂ© l’« annexe de la rue Sainte-Julie » avant d’ĂȘtre rebaptisĂ© « Ă©difice C » en 1937, puis HonorĂ©-Mercier en 19803. Sa silhouette rectangulaire d’un peu moins d’une centaine de mĂštres surplombe l’extrĂ©mitĂ© est du boulevard RenĂ©-LĂ©vesque. Aujourd’hui, l’immeuble fait face au Centre des congrĂšs de QuĂ©bec et aux vingt-huit Ă©tages de l’hĂŽtel Hilton, qui loge, depuis 1974, des touristes mais Ă©galement des membres des cabinets ministĂ©riels et des lobbyistes de passage dans la capitale durant la session parlementaire ou une sĂ©ance du Conseil des ministres.
Le premier ministre libĂ©ral Louis-Alexandre Taschereau (1920-1936) est le premier occupant de l’« annexe de la rue Sainte-Julie ». Il connaĂźt bien ce bĂątiment dont les plans ont Ă©tĂ© dessinĂ©s Ă  sa demande Ă  compter de 1919, alors qu’il Ă©tait ministre des Travaux publics dans le cabinet de Lomer Gouin (1905-1920). Tournant le dos au style Second Empire de l’hĂŽtel du Parlement, Taschereau adopte les lignes Ă©purĂ©es de l’École des beaux-arts de Paris. Ce style moderne sera repris au dĂ©but des annĂ©es 1930 lors de la construction des Ă©difices D et E qui abriteront respectivement les ministĂšres de l’Agriculture et de la Voirie, Ă  l’ouest du parlement.
L’édifice HonorĂ©-Mercier, oĂč se trouve le bureau du premier ministre du QuĂ©bec, a Ă©tĂ© Ă©rigĂ© entre 1922 et 1925 selon les plans de l’architecte Raoul ChĂȘnevert. Source : Dave NoĂ«l.
La carriĂšre de Taschereau aurait pu voler en Ă©clats en mĂȘme temps que l’édifice HonorĂ©-Mercier dans la nuit du 26 fĂ©vrier 1929. Alors qu’il regagne l’« annexe » aprĂšs avoir participĂ© Ă  l’étude de projets de loi privĂ©s (« bills » privĂ©s), le premier ministre dĂ©couvre un bĂąton de dynamite d’une vingtaine de centimĂštres dans l’antichambre de son bureau. L’explosif est assez puissant pour raser l’immeuble de la rue Sainte-Julie. « Le courant d’air produit en ouvrant la porte a Ă©teint la mĂšche, rapporte le correspondant du Devoir de l’époque. Quand le premier ministre fit de la lumiĂšre, il regarda autour de lui et alors seulement il aperçut par terre l’objet insolite. Il traversa rapidement la piĂšce et mit son pied sur l’explosif. » Les gardiens n’ayant aperçu aucun Ă©tranger dans les heures prĂ©cĂ©dant la dĂ©couverte, les forces de l’ordre soupçonnent un habituĂ© des lieux qui possĂšde la clĂ© du bureau. « Plusieurs personnes ont manipulĂ© le bĂąton de dynamite depuis la trouvaille, de sorte qu’il est difficile de prendre des empreintes digitales », prĂ©cise Le Devoir.
Taschereau craint de voir l’image de la province de QuĂ©bec Ă©corchĂ©e dans la presse Ă©trangĂšre. « Nous avons une population qui est heureuse, paisible et respectueuse de la loi, de la personne et de la propriĂ©tĂ© et, au loin, je suis certain que l’incident d’avant-hier soir n’ajoutera rien au crĂ©dit et Ă  la rĂ©putation de la province de QuĂ©bec », dit-il Ă  l’AssemblĂ©e lĂ©gislative durant la sĂ©ance du 28 fĂ©vrier 1929. Gardant son flegme, le premier ministre lance un avertissement : « Celui qui a voulu commettre cet attentat a manquĂ© son but. Il a pu causer de l’angoisse dans mon foyer. Quant Ă  moi, cela me laisse trĂšs froid. Les hommes passent et d’autres les remplacent, mais les idĂ©es restent. Si je disparaissais, d’autres me suivraient4. »
Lieu de délibérations et de décisions
Le premier ministre Philippe Couillard se met en marche vers la salle du Conseil des ministres. Il s’arrĂȘte quelques secondes devant un local exigu dans lequel est attablĂ© son directeur de cabinet, Jean-Pascal Bernier. « Il a plus de papiers que moi sur son bureau. [
] C’est quelqu’un de trĂšs important et de trĂšs occupĂ© », fait remarquer M. Couillard. Il salue de l’autre cĂŽtĂ© du couloir son adjointe, Ă  qui incombe la tĂąche ingrate de le « rappel[er] Ă  l’ordre » lorsqu’« [il] prend du retard ». Justement

Son pas s’accĂ©lĂšre. Il emprunte un escalier qui enlace une cage d’as...

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