Un désir d'achÚvement
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Un désir d'achÚvement

Réflexions d'un héritier politique

Alexandre Poulin

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  1. 200 pages
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Un désir d'achÚvement

Réflexions d'un héritier politique

Alexandre Poulin

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Qu'est-ce qu'un jeune QuĂ©bĂ©cois qui avait deux ans au rĂ©fĂ©rendum de 1995 et qui a participĂ© au printemps Ă©rable en 2012 peut avoir Ă  dire sur la condition politique quĂ©bĂ©coise? Pour Alexandre Poulin, ce qui relie les deux Ă©vĂ©nements, c'est la question de la culture. Les Ă©lites politiques et mĂ©diatiques insistent beaucoup sur la crĂ©ativitĂ© et le rayonnement des artistes au QuĂ©bec et dans le monde entier, mais trĂšs peu sur la culture comme « lieu » d'enracinement et d'Ă©mancipation, au sens que lui donne le sociologue Fernand Dumont.Se dĂ©couvrant soudain hĂ©ritier d'une histoire qu'il n'a pas choisie, Alexandre Poulin dĂ©nonce l'art de la demi-mesure dans l'imaginaire politique quĂ©bĂ©cois. S'il ajoute sa voix aux nombreuses critiques d'un QuĂ©bec inachevĂ© et dĂ©politisĂ©, il le fait en millĂ©nial attachĂ© Ă  sa nation. Les appels, Ă  gauche comme Ă  droite, pour une deuxiĂšme rĂ©volution tranquille rĂ©sonnent Ă  ses oreilles comme une rĂ©pĂ©tition de l'histoire, un refus de la grande politique qui seule permettrait de donner une assise forte Ă  la culture.Alexandre Poulin soutient que la gĂ©nĂ©ration des millĂ©niaux est la derniĂšre Ă  pouvoir se poser la question du projet politique apte Ă  perpĂ©tuer une culture quĂ©bĂ©coise vivante en AmĂ©rique. Entre inquiĂ©tude et dĂ©termination, mĂ©moire et conquĂȘte, le jeune essayiste rĂȘve d'audace, pasde tranquillitĂ©.

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Informations

Ce pays, qui n’est pas « sans bon sens », vous aurez Ă  le porter comme on porte un enfant dans ses bras, en tenant la tĂȘte haute.
Fernand Dumont
prologue
Génération 2012
Toute ma vie, je me suis senti comme si je ne me connaissais pas, comme si je ne m’assumais pas.
Alexandre SoubliĂšre
Je suis nĂ© en 1993 dans une bourgade de la Beauce, oĂč les arbres cĂŽtoient le ciel, l’embrassent et souvent l’ensevelissent. J’ai atteint l’ñge de dix-huit ans en 2012, dans l’ignorance du QuĂ©bec, de son histoire, de ses traditions. Parfois, je me rendais avec mes parents dans sa capitale du mĂȘme nom pour les FĂȘtes de la Nouvelle-France ; une occasion de me dĂ©guiser. NaĂźtre Ă  cette Ă©poque, c’était apercevoir un soleil fuyant dĂšs la naissance. Ma gĂ©nĂ©ration est arrivĂ©e en fin d’aprĂšs-midi ; François Ricard disait des baby-boomers qu’ils sont nĂ©s « au matin du monde1 ». Si je suis nĂ© en fin de journĂ©e, c’est que ce devait bientĂŽt ĂȘtre le soir ; le temps Ă©tait suspendu, les certitudes aussi, les possibilitĂ©s ouvertes. Ce soir-lĂ  mĂšnerait nĂ©cessairement au temps des grandes paroles, des dĂ©cisions importantes, des choix Ă  faire dans la sociĂ©tĂ©. De quelle envergure serait-il ? L’enfance est tendresse, innocence, pure tranquillitĂ© ; elle ignore les tourments qui la menacent, les promesses qui pĂšsent sur elle, les difficultĂ©s qui l’environnent. En 2012, prĂšs de vingt-cinq ans s’étaient Ă©coulĂ©s depuis la fin de la RĂ©volution tranquille, et ses promesses fondaient comme neige au soleil. NaĂźtre dans cette sociĂ©tĂ©, c’était subir les consĂ©quences d’un malentendu historique qui prenait l’allure d’un drame conjugal. J’ai dĂ©cidĂ© d’écrire ce livre pour aller Ă  la rencontre du QuĂ©bec, de son identitĂ© et de son histoire. Avant que je m’intĂ©resse Ă  ce sujet, je n’aurais jamais pu deviner l’ampleur des difficultĂ©s Ă  ĂȘtre du QuĂ©bec.
AprĂšs une tragĂ©die originelle, la ConquĂȘte, deux solitudes avaient Ă©tĂ© contraintes de s’épouser et d’emmĂ©nager sans nuit nuptiale, sans le moindre accord sur quelque sujet que ce soit, sans le moindre langage commun hors celui de l’indiffĂ©rence ou du mĂ©pris. Un peu avant ma naissance, le divorce entre les deux nations fondatrices du Canada Ă©tait une option probable. Contre toute attente, les deux parties Ă©taient parvenues Ă  une forme d’entente en 1987. Le QuĂ©bec, depuis toujours menacĂ© de disparition, allait ĂȘtre reconnu comme « sociĂ©tĂ© distincte » avec l’accord du lac Meech. « L’honneur et l’enthousiasme » Ă©taient les mots d’ordre : une signature historique allait rĂ©concilier le QuĂ©bec et le Canada.
Mais la parole donnĂ©e n’a pas Ă©tĂ© respectĂ©e. C’est ce que ma gĂ©nĂ©ration a appris. L’accord du lac Meech est devenu caduc en 1990 parce que les parlements du Manitoba et de Terre-Neuve ne l’ont pas ratifiĂ©, malgrĂ© leur engagement Ă  le faire dans les dĂ©lais prescrits. Notre plaie collective s’est rouverte aussitĂŽt. La plaie Ă©tant bĂ©ante, nous devions cette fois-ci refermer et soigner notre blessure Ă  nos propres conditions. La souverainetĂ© se trouvait Ă  portĂ©e de main. « Il faudra toujours se rappeler que l’avenir du QuĂ©bec ne se dĂ©cidera plus jamais Ă  Terre-Neuve, au Manitoba ou ailleurs ! L’avenir du QuĂ©bec, Ă  compter de maintenant, sera dĂ©cidĂ© au QuĂ©bec par les QuĂ©bĂ©coises et les QuĂ©bĂ©cois ! » C’est ce qu’avait dĂ©clarĂ© le cĂ©lĂšbre comĂ©dien Jean Duceppe le 24 juin 1990 sur l’üle Sainte-HĂ©lĂšne. Tout le QuĂ©bec avait bu ses paroles en croyant que l’avenir lui donnerait raison. Rien n’était certain, mais tout Ă©tait possible : l’espoir qui renaissait Ă©tait celui de la reconquĂȘte. Deux fils du peuple s’affrontaient par-delĂ  la riviĂšre des Outaouais, l’un du Saguenay, l’autre de la Mauricie : Lucien Bouchard et Jean ChrĂ©tien. La promesse de Duceppe est passĂ©e Ă  la trappe.
Toujours en 1993, les Canadiens de MontrĂ©al remportaient la coupe Stanley. Pour un peuple vaincu, cet Ă©vĂ©nement, dĂ©nuĂ© de consĂ©quences politiques, reprĂ©sentait une victoire compensatrice. Quelques mois aprĂšs le dĂ©filĂ© de la rue Sherbrooke, j’ai ouvert les yeux sur le monde. Un an plus tard, en 1994, un gentilhomme issu d’une bonne famille d’Outremont, Jacques Parizeau, prenait les commandes du gouvernement, notre radeau qui naviguait dans des eaux incertaines. Au fil du temps, de nombreuses gĂ©nĂ©rations se sont agrippĂ©es Ă  ce radeau dans l’espoir d’arriver Ă  bon port : un dĂ©sir d’achĂšvement traverse l’histoire du QuĂ©bec. Cette dĂ©marche est celle de la libertĂ© et de l’inscription de notre culture sous une forme politique. La souverainetĂ© des dĂ©doublements ministĂ©riels et de la rentabilitĂ© commerciale ne pouvait pas nous porter bien loin. Selon le mot de Jean Larose, il s’agissait d’une « souverainetĂ© rampante2 ». En pleine mer, les conditions Ă©taient dĂ©favorables, le mauvais temps s’abattait sur nous. Il devenait essentiel de toucher terre et de trouver une issue qui nous permettrait d’avoir un logis Ă  notre mesure. On disait de Parizeau qu’il connaissait une voie sĂ»re pour trouver la terre ferme. Pour un peuple de cultivateurs, l’échec du deuxiĂšme rĂ©fĂ©rendum sur la souverainetĂ©, en 1995, allait ĂȘtre une terrible sĂ©cheresse.
Le fait de n’avoir pas transposĂ© son existence sur le plan politique laisse des traces. Ma gĂ©nĂ©ration a grandi avec le spectre de Jacques Parizeau. Sa dĂ©mission prĂ©cipitĂ©e Ă  titre de premier ministre, dĂšs le lendemain de la dĂ©faite rĂ©fĂ©rendaire, a illustrĂ© la propension des QuĂ©bĂ©cois Ă  la dĂ©faite. J’ai grandi avec cette dĂ©mission et cet Ă©chec au-dessus de ma tĂȘte. Son affirmation selon laquelle le camp du Oui a Ă©tĂ© battu Ă  cause de « l’argent et des votes ethniques » m’a longtemps fait l’effet d’un couteau sous la gorge. Si cette dĂ©mission a donnĂ© un dur coup au mouvement souverainiste, la dĂ©claration de Parizeau a plombĂ© la sociĂ©tĂ© quĂ©bĂ©coise tout entiĂšre d’une mauvaise conscience qui ne s’est pas estompĂ©e. En bon dĂ©mocrate, Lucien Bouchard, l’autre chef des troupes du Oui, s’est empressĂ© de reconnaĂźtre la dĂ©faite rĂ©fĂ©rendaire auprĂšs de ses troupes, comme si perdre au bingo Ă©tait de la mĂȘme facture. Il fallait tout simplement se rĂ©jouir du grand exercice dĂ©mocratique qui venait d’avoir lieu. Les QuĂ©bĂ©cois avaient encore une fois prouvĂ© qu’ils Ă©taient profondĂ©ment dĂ©mocrates et pacifiques. Pourquoi tendons-nous Ă  minimiser nos dĂ©faites, voire Ă  les oublier ? Aux yeux de plusieurs de nos contemporains, la ConquĂȘte de 1760 serait une simple date, un changement de rĂ©gime au mieux. L’Union de 1840 ne serait que le prĂ©lude Ă  l’obtention du gouvernement responsable, huit ans plus tard. Lambton n’est-il qu’un village de l’Estrie ? Le caractĂšre dramatique de certains Ă©vĂ©nements qui ont ponctuĂ© notre vie politique est gommĂ© dans l’enseignement de l’histoire.
Le mĂ©nage avant le retour de l’hiver
Tout laissait croire que l’aprĂšs-1995 serait une Ă©poque morne. En ce qui me concerne, j’étais trĂšs jeune, je marchais Ă  peine. Le temps pressait pourtant. L’insalubritĂ© de la maison QuĂ©bec Ă©tait telle, disait-on, qu’une autre dĂ©cennie Ă  ne rien faire en saperait les fondations. Avant le retour de l’hiver, le temps Ă©tait au mĂ©nage pour Lucien Bouchard, devenu chef du Parti quĂ©bĂ©cois et premier ministre en 1996. On racontait qu’il avait renoncĂ© Ă  sa chambre Ă  coucher et que, comme Popa et Moman dans La Petite Vie, il dormait sur un lit pliable, rangĂ© sous son bureau Ă  l’heure oĂč la Vieille Capitale se rĂ©veillait. Si Lucien Bouchard dormait dans son bureau, au terme d’un mĂ©nage rigoureux des finances publiques, il a fini par se dĂ©partir de sa vadrouille et de son vinaigre. Cet exercice s’accordait difficilement avec les « conditions gagnantes » qu’il Ă©voquait alors. En Ă©tant obligĂ©s de se serrer la ceinture, comment les QuĂ©bĂ©cois pouvaient-ils avoir envie d’embrasser la libertĂ© politique ?
Sede vacante, Bernard Landry a remplacĂ© Lucien Bouchard aprĂšs un conclave sans cardinaux, c’est-Ă -dire sans avoir passĂ© le test du scrutin gĂ©nĂ©ral. Cela a-t-il eu pour effet de produire un pontificat sans Saint-Esprit ? Landry ne voulait pas se mettre en quĂȘte d’un nouveau cap pour notre radeau sans avoir « l’assurance morale » de voir poindre la terre ferme au loin. Des Ă©lections gĂ©nĂ©rales ont eu lieu deux ans aprĂšs son Ă©lection Ă  la tĂȘte du Parti quĂ©bĂ©cois et sa dĂ©signation comme premier ministre. Ce fut un Ă©vĂ©nement dĂ©cisif pour la suite de notre monde. Plus jamais les souverainistes ne prendraient durablement le pouvoir, si on fait abstraction de l’intermĂšde du gouvernement Marois (2012-2014). Lors des Ă©lections de 2003, camĂ©ras, microphones et appareils photo ont assailli le candidat Bernard Landry. « Audi alteram partem ! » a-t-il dit un nombre incalculable de fois. Venu des Cantons-de-l’Est, un quadragĂ©naire agitant sa toison, Jean Charest, qui parlait sans cesse du systĂšme de soins de santĂ©, a remportĂ© la victoire. En effet, la santĂ© devait devenir notre seul projet collectif. Audi alteram partem ? Les QuĂ©bĂ©cois n’allaient plus Ă©couter que les autres pendant une pĂ©riode indĂ©terminĂ©e, redevenant peu Ă  peu pĂ©riphĂ©riques Ă  eux-mĂȘmes alors que la RĂ©volution tranquille devait consolider leur existence.
Les annĂ©es « Tacherest », ou l’enracinement du statu quo
Mon enfance était derriÚre moi. En 2003, je me souviens du sourire de Jean Charest au débat des chefs. Ce sourire est ma premiÚre image...

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