La simplicité volontaire, plus que jamais...
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Serge Mongeau

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Serge Mongeau

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À propos de ce livre

«Quand je pense aux consĂ©quences nĂ©gatives de la sociĂ©tĂ© d'abondance, je pense Ă  la vie de tous les jours, Ă  la santĂ©, au travail, Ă  l'amour, Ă  la communautĂ©, au bonheur, Ă  tout cela qui ne s'achĂšte pas ou, quand on croit pouvoir l'acheter, coĂ»te finalement trop cher, car on doit sacrifier le meilleur de sa vie Ă  gagner de quoi le payer.Pour ma part, il y a longtemps que j'ai dĂ©couvert que "le systĂšme" – la sociĂ©tĂ© de consommation dans laquelle je vis – nous enferme, individuellement et collectivement, dans une cage qui nous laisse de moins en moins de choix vĂ©ritables et de vraie libertĂ©. Que les barreaux de la cage soient dorĂ©s ne change rien Ă  la rĂ©alitĂ© profonde de l'aliĂ©nation de ses prisonniers.»«La simplicitĂ© volontaire» s'est vendu Ă  plus de 30 000 exemplaires, le concept a fait Ă©cole et engendrĂ© un mouvement, le RĂ©seau quĂ©bĂ©cois pour la simplicitĂ© volontaire (RQSV). Ce livre a eu une grande influence sur de nombreuses personnes amenĂ©es Ă  dresser le mĂȘme constat que l'auteur sur la sociĂ©tĂ© de consommation.

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DEUXIÈME PARTIE

La vie quotidienne

CHAPITRE VI
Une alimentation qui réponde à nos besoins

DANS TOUT LE RÈGNE animal, manger est la premiĂšre prĂ©occupation, sinon la principale activitĂ©. Il en a Ă©tĂ© longtemps ainsi pour l’humanitĂ©, et mĂȘme encore aujourd’hui, des millions de personnes consacrent tout leur temps Ă  chercher leur nourriture, sans mĂȘme y rĂ©ussir adĂ©quatement. Manger est la base mĂȘme de la vie ; on se reconstruit constamment Ă  partir de ce qu’on ingĂšre ; en un an, plus de 96 % des atomes qui composent le corps sont remplacĂ©s. Les civilisations modernes et urbaines ont trouvĂ© le moyen d’assurer Ă  leurs populations une vaste disponibilitĂ© alimentaire ; mais la plĂ©thore d’aliments offerts a fait perdre la notion de leur importance : on peut facilement se procurer certains aliments et on les consomme sans se poser de questions ; on mange parce qu’il faut se nourrir, consacrant Ă  cette activitĂ© qu’on banalise le moins de temps et le moins d’argent possible.
Quand on construit une maison, si on la veut solide, on choisit des matĂ©riaux solides. Quand les aliments Ă  partir desquels nous nous reconstruisons sont de mauvaise qualitĂ©, Ă  quoi peut-on s’attendre ? Comment comprendre qu’on abandonne si facilement son alimentation Ă  des gens qui n’ont d’autre prĂ©occupation que leur profit ? Car lĂ  est l’unique fin des plus grandes industries alimentaires mondiales, celles qui rĂ©alisent les plus grosses ventes et dont les produits forment la plus importante partie du panier Ă  provisions du consommateur moyen. Ces industries exploitent les travailleurs et les terres du tiers monde, elles imposent aux agriculteurs leurs semences transformĂ©es par ingĂ©nierie gĂ©nĂ©tique, leurs engrais chimiques et leurs pesticides multiples, elles ajoutent des agents de conservation Ă  leurs produits, les « enrichissent » de vitamines artificielles, y introduisent diverses essences ainsi que du sel et du sucre en quantitĂ© pour les mettre au goĂ»t des consommateurs, en enlĂšvent les substances coĂ»teuses pour les remplacer par des huiles et autres gras sans valeur. L’industrie de la restauration rapide, dont le chiffre d’affaires croĂźt Ă  une trĂšs grande vitesse, repose sur les mĂȘmes principes : exploiter sa main d’Ɠuvre et employer des matiĂšres de qualitĂ© infĂ©rieure pour abaisser ses coĂ»ts. On fabrique aujourd’hui synthĂ©tiquement des fromages, des tomates, des fraises et quoi d’autre encore ; ces produits ainsi qu’un gras de mauvaise qualitĂ©, le sucre en quantitĂ© et des additifs multiples constituent souvent les ingrĂ©dients de base de la restauration rapide.
En AmĂ©rique du Nord, l’agriculture est devenue une industrie qui cherche constamment Ă  augmenter sa productivitĂ©. Dans un monde oĂč la famine continue d’affliger de nombreuses populations, une telle orientation pourrait paraĂźtre fort pertinente. Malheureusement, cette volontĂ© de produire davantage Ă  moindres coĂ»ts n’a absolument rien Ă  voir avec la faim dans le monde ; elle ne rĂ©pond qu’à la recherche d’un plus grand profit. Globalement, nous disposons dĂ©jĂ  d’assez de nourriture pour satisfaire toute l’humanitĂ© ; mais cette nourriture est mal distribuĂ©e, car seuls ceux qui peuvent la payer y ont accĂšs alors que d’importants surplus sont dĂ©truits, faute d’acheteurs.
De la production de masse en agriculture rĂ©sultent de nombreuses consĂ©quences. Les Ă©conomistes nous disent que l’augmentation de la productivitĂ© a permis de maintenir Ă  un niveau trĂšs bas le prix du panier Ă  provisions, en comparaison du coĂ»t des autres biens. Mais cet effet positif est vite annulĂ© lorsqu’on prend en considĂ©ration tous les effets nĂ©gatifs qui dĂ©coulent des mĂ©thodes agricoles modernes sur l’emploi, l’environnement et la santĂ©.

L’emploi

On a beaucoup enviĂ© aux cultivateurs leur vie autonome et prĂšs de la nature. Bien sĂ»r, on savait qu’ils devaient travailler de longues heures, surtout pendant l’étĂ© ; mais ils Ă©taient leurs propres patrons et fixaient eux-mĂȘmes leur rythme de travail. Or les impĂ©ratifs de la concurrence ont tout bouleversĂ©. Pour arriver Ă  produire des denrĂ©es alimentaires Ă  des prix compĂ©titifs, il a fallu adopter les mĂ©thodes les plus mĂ©canisĂ©es, celles qui Ă©pargnent le plus de main-d’Ɠuvre. Il a fallu s’équiper de grosses machines, spĂ©cialiser sa production pour faire des Ă©conomies d’échelle, utiliser les engrais et les pesticides chimiques qui s’appliquent le plus Ă©conomiquement, etc. Dans ce contexte, chaque ferme devient une entreprise requĂ©rant un capital de plus en plus considĂ©rable que les agriculteurs ne possĂšdent pas et qu’ils doivent emprunter, devenant ainsi, d’une certaine façon, des employĂ©s des banques. Ceux qui ne prennent pas cette voie n’arrivent pas Ă  produire Ă  aussi bas prix, et quelle que soit la qualitĂ© de leur production, ils ne trouvent pas d’acheteurs ; ces derniers, reprĂ©sentant des grandes chaĂźnes ou des regroupements de magasins ainsi que des industries de transformation et des grossistes, ont des exigences fort strictes qui ont peu Ă  voir avec la qualitĂ© ; ils se prĂ©occupent surtout du coĂ»t et de l’apparence, mettant sans vergogne en compĂ©tition les surplus de la Californie avec les productions locales.
En 1990, la dette moyenne des fermes quĂ©bĂ©coises s’établissait Ă  90 000 dollars ; elle Ă©tait de 50 000 dollars en 1981. C’est donc dire qu’une bonne partie des revenus de chaque cultivateur sert Ă  payer les intĂ©rĂȘts de ses dettes. Ceux qui veulent survivre dans ce systĂšme sont condamnĂ©s ou Ă  ĂȘtre trĂšs gros, ou Ă  ne compter que marginalement sur les revenus de la ferme en vivant d’un salaire gagnĂ© Ă  l’extĂ©rieur. Les petites exploitations familiales sont celles qui Ă©prouvent le plus de difficultĂ© et oĂč les abandons sont les plus nombreux ; entre 1981 et 1991, le QuĂ©bec a perdu 20 % de ses fermes. Aux États-Unis, moins de 9 % des fermes assurent dĂ©jĂ  plus de 70 % de la production agricole totale.

L’environnement

L’industrialisation de l’agriculture nĂ©cessite l’emploi de machinerie lourde qui compacte le sol et le rend plus susceptible Ă  l’érosion par l’eau. L’abattage des arbres pour faciliter les manƓuvres des machines contribue pour sa part Ă  l’érosion par le vent. L’emploi d’engrais chimiques dĂ©truit aussi progressivement l’humus qui retenait le sol et l’eau. À cause de tout cela, chaque annĂ©e une partie importante du sol de surface — celui qui permet la culture — disparaĂźt. Aux États-Unis, on calcule que tous les ans, il se perd l’équivalent de trois millions d’acres de terre productive Ă  cause de l’érosion. À ces pertes, il faut ajouter celles dues aux dĂ©veloppements urbains, Ă  la prolifĂ©ration des sites d’enfouissement et Ă  la multiplication des routes.
La spĂ©cialisation des fermes prĂ©sente des risques pour l’environnement. Comment disposer de tout ce purin de porc ou des excrĂ©ments de ces grands troupeaux de vaches laitiĂšres produits par les fermes concentrĂ©es dans une mĂȘme rĂ©gion ? Entre 1951 et 1985, le nombre moyen de vaches laitiĂšres par ferme est passĂ© de 8 Ă  41, tandis que le nombre de porcs grimpait de 12 Ă  721 ; pendant la mĂȘme pĂ©riode, le nombre d’agriculteurs manquant de superficie d’épandage pour disposer des fumiers provenant de leur ferme est passĂ© de 0 Ă  3 100 ; par contre, les engrais chimiques utilisĂ©s ont fait un bond de 120 500 tonnes par annĂ©e Ă  498 700 tonnes23. Si on n’arrive pas Ă  les retourner Ă  la terre, les dĂ©chets animaux se retrouvent dans l’eau, Ă  un moment donnĂ©. S’y ajoutent les engrais chimiques qui sont aussi entraĂźnĂ©s par les pluies vers les riviĂšres ; l’eau ainsi « enrichie » devient un milieu de croissance favorable pour les plantes aquatiques qui prolifĂšrent et consomment l’oxygĂšne de l’eau, y rendant la vie animale de plus en plus difficile. Les micro-organismes qui dĂ©truisaient les matiĂšres organiques ne peuvent plus continuer leur travail et l’eau devient de plus en plus polluĂ©e.
L’emploi croissant, dans le monde, des fertilisants chimiques Ă  base d’azote — 2 millions de tonnes en 1950, 40 millions en 1974 et une estimation de 120 Ă  300 millions de tonnes pour l’an 2000 — contribuerait d’une façon importante Ă  la rĂ©duction de la couche d’ozone qui nous protĂšge des rayons ultraviolets Ă©mis par le soleil ; les fertilisants se dĂ©gradent en effet en un gaz qui, dans la haute atmosphĂšre, dĂ©truit l’ozone.

La santé

L’usage des pesticides et des herbicides se rĂ©pand de plus en plus. Les pesticides constituent d’ailleurs un produit « idĂ©al » pour l’industrie capitaliste, car lorsqu’on a commencĂ© Ă  les employer, on est bientĂŽt obligĂ© d’augmenter les quantitĂ©s. En effet, l’emploi d’un pesticide suscite le dĂ©veloppement d’une rĂ©sistance chez les insectes ou la prolifĂ©ration d’autres insectes moins vulnĂ©rables et par la suite, il faut employer des quantitĂ©s plus grandes de pesticides pour rĂ©ussir Ă  contrĂŽler les insectes. Sur une pĂ©riode de 15 ans, l’emploi de pesticides a augmentĂ© de 140 % aux États-Unis, alors que les pertes dues aux insectes se sont accrues de 40 %. Ces substances chimiques trĂšs puissantes causent frĂ©quemment des intoxications aiguĂ«s chez les travailleurs agricoles et augmentent les risques qu’ils dĂ©veloppent un jour un cancer. Les pesticides ne se fixent pas Ă  l’endroit oĂč on les emploie ; ils se rĂ©pandent dans l’air, contaminent l’eau et demeurent souvent Ă  l’état de trace sur les fruits et les lĂ©gumes pour finir dans l’assiette du consommateur. Il y a quelques annĂ©es, les autoritĂ©s de santĂ© publique ont dĂ» recommander aux femmes de certaines rĂ©gions canadiennes de ne pas allaiter leurs enfants parce qu’elles avaient trop de D.D.T. dans leur lait. Depuis, on a cessĂ© l’usage massif du D.D.T. aux États-Unis et au Canada (mais nos industries continuent Ă  en vendre Ă  des pays comme le Mexique, qui nous le retournent dans les fraises et autres fruits que nous leur achetons !) ; on a remplacĂ© le D.D.T. par d’autres substances aussi toxiques, mais dont on ne connaĂźt pas encore tous les effets.
Les mĂ©thodes modernes d’élevage des animaux s’appuient sur l’usage croissant d’antibiotiques ; ceux-ci sont devenus nĂ©cessaires dans les Ă©levages gigantesques et ils permettraient aux animaux d’engraisser plus vite. Les Ă©leveurs emploient aussi frĂ©quemment des tranquillisants, particuliĂšrement dans les moments qui prĂ©cĂšdent l’abattage, pour Ă©viter que les animaux ne soient pas tendus et que leur chair ne durcisse. L’administration d’hormones a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© fort populaire ; interdite, elle se pratique tout de mĂȘme Ă  l’occasion. Tous ces produits chimiques contaminent la viande (surtout le gras) et peuvent avoir des effets nĂ©fastes sur les consommateurs.
Les techniques agricoles modernes provoquent la diminution de la qualitĂ© nutritive des aliments. La fertilisation des sols Ă  l’aide d’engrais Ă  base de nitrates augmente la proportion d’eau par rapport Ă  la matiĂšre sĂšche dans les lĂ©gumes. La fertilisation artificielle conduit Ă  un appauvrissement du sol en minĂ©raux assimilables, qui se retrouvent alors en quantitĂ© moindre dans les aliments ; plusieurs de ces minĂ©raux ont un rĂŽle Ă  jouer dans l’organisme. L’uniformisation des espĂšces cultivĂ©es — les producteurs ne choisissent que les variĂ©tĂ©s les plus attrayantes commercialement — diminue la diversitĂ© des apports nutritifs ; or chaque variĂ©tĂ© de tomates, de carottes ou d’autres fruits ou lĂ©gumes contient des quantitĂ©s diffĂ©rentes de vitamines et de minĂ©raux. Sur le plan de l’élevage, la proportion de gras contenue dans la viande est beaucoup plus grande ; entre 1960 et 1980, par exemple, la proportion de gras dans le poulet Ă  gril a triplĂ©.
C’est sans doute au niveau de la transformation des aliments que l’influence de la grande industrie se fait le plus sentir. GrĂące Ă  une habile publicitĂ©, mais aussi au fait que les gens consacrent de moins en moins de temps Ă  cuisiner, les aliments dĂ©jĂ  prĂ©parĂ©s connaissent une popularitĂ© croissante, Ă  la maison et au restaurant ; en consĂ©quence, la plupart des gens consomment trop de gras, trop de sucre, trop de protĂ©ines animales, trop de sel et trop peu de fibres ; de plus, ils absorbent des additifs chimiques en quantitĂ©s croissantes, en moyenne plus de 2 kilos par personne par annĂ©e !
Tous ces Ă©carts par rapport aux besoins de base se paient chĂšrement ; on reconnaĂźt maintenant que ce genre d’alimentation constitue un facteur important dans les diverses maladies de civilisation qui nous affectent — hypertension artĂ©rielle, cancer, cardiopathies. Des signaux d’alarme se font entendre au fur et Ă  mesure qu’on Ă©tablit une relation entre telle habitude alimentaire et telle maladie : on dĂ©nonce le sucre trop abondant dans nos aliments, on incite Ă  consommer moins de gras animal, le pain de blĂ© entier est recommandĂ©. Mais ces conseils fractionnĂ©s sont vouĂ©s Ă  l’échec. La petite amĂ©lioration arrachĂ©e d’un cĂŽtĂ© est vite annulĂ©e par la nouvelle transformation introduite ailleurs. L’industrie alimentaire est toujours Ă  l’affut et rĂ©cupĂšre rapidement Ă  son profit toute nouvelle tendance : les gens veulent manger moins de sucre ? On leur offre des aliments sucrĂ©s avec des Ă©dulcorants artificiels ! Le pain de blĂ© entier serait meilleur pour la santĂ© ? On trouve sur les tablettes du pain bruni Ă  la mĂ©lasse. Tant que nous nous en remettrons Ă  la grande industrie pour nous alimenter, tant que nous continuerons Ă  adopter une vision fragmentĂ©e de la nutrition, en tentant d’en combler les carences dĂ©tectĂ©es sans remettre en question l’ensemble, nous piĂ©tinerons.
Il me semble que nous sommes extrĂȘmement prĂ©somptueux en matiĂšre de nutrition. Les quelques connaissances scientifiques que nous avons acquises, grĂące aux mĂ©thodes d’analyse, nous ont portĂ©s Ă  croire que nous avions pĂ©nĂ©trĂ© les secrets de la nature et que nous pouvions la remplacer. Depuis que nous avons rĂ©ussi Ă  classer les nutriments en lipides, protides et glucides et depuis que nous avons dĂ©couvert l’importance de certains micro-Ă©lĂ©ments comme les diverses vitamines et les sels minĂ©raux, nous avons pratiquement transformĂ© les aliments en carburants utilisĂ©s pour permettre aux machines humaines de fonctionner au jour le jour. Nous y avons rĂ©ussi, Ă  brĂšve Ă©chĂ©ance : on peut aujourd’hui maintenir en vie un individu assez longtemps grĂące Ă  des liquides artificiels qu’on lui administre par la bouche ou par voie intraveineuse. On peut aussi survivre avec du pain blanc, du fromage colorĂ©, de la viande grasse, du sucre et quelques vitamines artificielles — ce qui constitue l’alimentation de base de millions de personnes dans les pays occidentaux. Mais Ă  longue Ă©chĂ©ance, que deviennent ces gens sinon les victimes des diverses maladies de civilisation ?
Les naturopathes croient depuis longtemps qu’en alimentation, « le tout est plus grand que la somme des parties ». Toute transformation des aliments entraĂźne la perte irrĂ©mĂ©diable de certaines substances ; toute manipulation risque d’ajouter des substances qui ne devraient pas s’y trouver. Des instruments d’analyse sophistiquĂ©s ont permis d’identifier les nutriments essentiels Ă  notre survie ; mais on dĂ©couvre rĂ©guliĂšrement d’autres nutriments qui ont un rĂŽle important Ă  jouer dans l’organisme, mĂȘme s’ils n’y sont prĂ©sents qu’en infime partie ; leur carence serait la cause de plusieurs malaises ou de maladies pour lesquels la mĂ©decine n’a pas d’explication. Deux chercheurs, F.M. Pottenger et D.G. Simonsen, ont fait une expĂ©rience fort significative au dĂ©but du siĂšcle. Ils ont pris deux groupes de chats qu’ils ont placĂ©s dans deux enclos adjacents. Le premier groupe a Ă©tĂ© nourri de lait cru non pasteurisĂ© et de viande crue, tandis que l’autre recevait du lait bouilli et de la viande cuite. Les premiers ainsi que leurs descendants sont demeurĂ©s en bonne santĂ©, tandis que les seconds, nourris aux aliments cuits, prĂ©sentaient de nombreux troubles physiques. DĂšs la troisiĂšme gĂ©nĂ©ration, les morts-nĂ©s Ă©taient nombreux ainsi que les chats souffrant de malformations congĂ©nitales. Les chercheurs ont Ă©galement notĂ© un effet inattendu de leur expĂ©rience : dans l’enclos oĂč Ă©taient gardĂ©s les chats nourris aux aliments crus, la vĂ©gĂ©tation poussait abondamment grĂące Ă  la fertilisation par les excrĂ©ments des chats, alors que dans l’autre enclos, la croissance vĂ©gĂ©tale n’était que moyenne24.
Au lieu de tenter d’isoler dans notre alimentation quel Ă©lĂ©ment ou quelle carence provoque tel problĂšme, comme le fait la mĂ©decine actuelle, il serait beaucoup plus appropriĂ© d’adopter une approche globale en s’efforçant de rĂ©pondre Ă  l’ensemble des besoins de l’organisme.
L’alimentation d’une personne dĂ©pend de ses propres choix, mais en mĂȘme temps des choix que lui propose la sociĂ©tĂ©. Selon le lieu de sa rĂ©sidence, on n’a pas accĂšs aux mĂȘmes possibilitĂ©s ; quand on est pauvre, les choix sont plus limitĂ©s. Et qui peut rĂ©sister entiĂšrement Ă  toute cette publicitĂ© qui nous oriente vers un type d’aliments dont nous n’avons aucunement besoin ? Tout de mĂȘme, quelque soit notre situation, il me semble que tous auraient intĂ©rĂȘt Ă  respecter les principes suivants :
1) Les aliments devraient ĂȘtre consommĂ©s aussi frais que possible. Les aliments proviennent de substances vivantes que le temps altĂšre. Tout de suite aprĂšs la cueillette s’amorcent la destruction des vitamines dans les fruits et les lĂ©gumes, l’oxydation des acides gras dans les aliments qui en contiennent et l’altĂ©ration de certains minĂ©raux qui les rend de moins en moins assimilables. En AmĂ©rique du Nord, chaque gramme d’aliment voyage en moyenne 2 000 kilomĂštres avant d’atteindre l’assiette d’un consommateur ; c’est donc dire qu’il s’écoule souvent beaucoup de temps entre la cueillette et la...

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