LâĂCOSOPHIE OU LA SAGESSE
DE LA NATURE CHAPITRE PREMIER
Ma relation avec la nature
JE SUIS UN HOMME MODERNE. Je vis dans une civilisation de plus en plus urbanisĂ©e oĂč je peux rĂ©pondre Ă tous mes besoins physiques en me rendant dans lâun ou lâautre des innombrables Ă©tablissements de commerce ou de service Ă ma disposition. Jâaurais fort bien pu passer toute ma vie Ă me vĂȘtir sans jamais voir un animal qui fournit le cuir ou la laine dont sont fabriquĂ©s les vĂȘtements; Ă me nourrir sans toucher une motte de terre; Ă mâĂ©merveiller devant les belles peintures de paysages sans avoir dâautres contacts avec la campagne que par les films ou les photos. Je serais un citadin normal. Normal? Oui, au sens de «dans la moyenne», «dans la norme», «comme les autres». Mais est-ce bien de cette façon quâun ĂȘtre humain peut le mieux vivre? Est-ce ainsi quâil peut sâĂ©panouir pleinement?
Je suis un homme moderne, mais jâai eu la chance de pouvoir, tout au long de ma vie, nouer des liens avec la nature. Cela nâa pas Ă©tĂ© le fruit dâune dĂ©cision rationnelle: mes contacts avec la nature rĂ©pondaient Ă un besoin profond, instinctif et jamais assouvi. Est-ce Ă la suite de cette frĂ©quentation assidue que je pense comme je pense aujourdâhui? Ou est-ce parce que jâavais dĂ©jĂ cette conscience que jâĂ©prouvais ce besoin? Je ne saurais dire.
Alors quâaujourdâhui nous sommes forcĂ©s de revoir nos relations avec lâenvironnement â cette nature qui nous fournit notre air, notre eau, nos aliments, nos vĂȘtements et nos abris â, je cherche comme tant dâautres Ă comprendre ce qui nous a menĂ©s lĂ oĂč nous nous trouvons, au milieu de cette crise «environnementale» sans pareille. Et je me demande si une bonne part de la rĂ©ponse ne se trouve pas dans le fait que dans nos sociĂ©tĂ©s industrialisĂ©es, la plupart des gens nâont plus de contacts avec la nature et sâen trouvent dĂ©naturĂ©s. SĂ©parĂ©s de la nature, ils deviendraient des sortes de tumeurs ou de corps Ă©trangers dâune Terre rĂ©gie par des lois naturelles. Mais nâallons pas trop vite et commençons par essayer de comprendre ce qui nous lie Ă la nature. Et tout dâabord, ma relation avec la nature.
Jâai vĂ©cu ma tendre enfance dans le nord de la ville de MontrĂ©al, Ă jouer sur lâasphalte et le bĂ©ton. La cour de la maison oĂč jâhabitais, au rez-de-chaussĂ©e, Ă©tait envahie de mauvaises herbes et nous ne lâutilisions pas; le sol Ă©tait constituĂ© de mĂąchefer et dâautres matĂ©riaux de remplissage. Ă quelques rues plus au nord, il y avait le CollĂšge AndrĂ©-Grasset et tout Ă cĂŽtĂ©, un bois marĂ©cageux dâarbustes divers. Jây allais rarement, surtout au printemps pour couper des «minous», bourgeons de saule dont ma mĂšre faisait des bouquets. Ă partir dâun certain Ă©tĂ© â je devais avoir sept ou huit ans â, mon pĂšre loua un chalet Ă Repentigny-les-Bains, sur le bord de la riviĂšre LâAssomption. CâĂ©tait tout prĂšs de MontrĂ©al et câĂ©tait au bout du monde: chemin de terre, espace, riviĂšre oĂč nous nous baignions tous les jours et forĂȘt qui commençait Ă dix mĂštres de la maison. Je devins «coureur des bois». Je connaissais tous les sentiers, je me faisais des passages secrets qui me permettaient dâaller plus vite et de voir sans ĂȘtre vu. En fait, ma forĂȘt nâĂ©tait, comme je le dĂ©couvrirais bien des annĂ©es plus tard, quâune assez Ă©troite bande de terre boisĂ©e entre deux champs cultivĂ©s. Je nây Ă©tais jamais trĂšs loin, mais tout de mĂȘme assez pour me sentir en dehors de la civilisation.
Je lisais beaucoup, en particulier les livres de la collection Signes de piste qui racontaient des histoires de scouts, la plupart du temps perdus dans la forĂȘt. Je revivais leurs aventures pendant lâĂ©tĂ©.
Jâavais dix ans quand nous sommes dĂ©mĂ©nagĂ©s Ă CitĂ© Jardin, un dĂ©veloppement domiciliaire pas trĂšs loin du Jardin botanique. Nous avons alors cessĂ© dâaller passer nos Ă©tĂ©s Ă Repentigny, mais dorĂ©navant, jâallais avoir accĂšs Ă la nature Ă lâannĂ©e. Ă quelques centaines de mĂštres de chez nous se trouvaient de grands terrains vacants parsemĂ©s de petits boisĂ©s. Je mây suis rapidement retrouvĂ©, avec des copains ou trĂšs souvent seul, parce que les amis consacraient plus de temps Ă leurs devoirs scolaires que moi. Je me construisais des abris, faisais des feux; je continuais Ă revivre mes romans. Mes lectures sâĂ©taient enrichies de livres techniques sur la nature: survie en forĂȘt, astronomie, identification des arbres et des plantes. Un jour, jâai vu apparaĂźtre des piquets dâarpentage dans «mon» domaine; jâappris quâon voulait y faire un golf. Avec les copains, nous avons entrepris une campagne de sabotage pour empĂȘcher que le projet ne se rĂ©alise: «ils» nâavaient pas le droit de nous enlever notre coin de nature! Le soir, nous enlevions systĂ©matiquement les piquets dâarpentage; ils rĂ©apparaissaient quelques jours plus tard et nous les ĂŽtions Ă nouveau. Mais les travaux se sont quand mĂȘme poursuivis et nous avons perdu notre domaine. Lâhiver, nous le rĂ©cupĂ©rions; mais lâĂ©tĂ©, il fallait maintenant aller plus loin pour trouver la vraie nature: au bois des PĂšres, Ă lâest de la maison des Franciscains et de la rue Lacordaire.
Le bois des PĂšres contenait de nombreuses mares et marĂ©cages. Pendant toute mon adolescence, jây suis allĂ© seul. Les Ă©tangs mâont toujours attirĂ©; au premier abord, câest de lâeau «morte», fangeuse et odorante. Jâaime ces odeurs et, dĂšs quâon sâarrĂȘte un peu et quâon observe, on se rend compte que tout cela grouille de vie: dans lâeau et tout autour. Libellules, oiseaux divers, araignĂ©es dâeau et autres patineurs, grenouilles et tĂȘtards, Ă©crevisses et parfois rats musquĂ©s sâĂ©battent autour et dans lâeau. Je mâĂ©tais confectionnĂ© une cache en joncs prĂšs dâun des Ă©tangs et souvent, jây venais pour quelques heures. Ă lâabri des regards indiscrets, je me dĂ©shabillais et me laissais chauffer au soleil, Ă©coutant, observant, nageant. Jâadorais me baigner ainsi, entiĂšrement nu dans cette eau chaude. Je lâai fait souvent, lĂ et ailleurs, dans des eaux douteuses que les autres Ă©vitaient; jamais je nâai Ă©tĂ© malade.
Câest Ă la mĂȘme Ă©poque que jâai eu mes premiers contacts avec le jardinage. Mon pĂšre amĂ©nageait les abords de notre maison et dĂ©couvrait les joies de la culture des fleurs et des lĂ©gumes; mais il travaillait seul et ne nous intĂ©grait pas Ă ses travaux. Câest au Jardin botanique que jâai dĂ©couvert le programme de jardins dâĂ©coliers auquel je me suis inscrit. Les jeunes pouvaient y cultiver, sous la direction dâun jardinier expĂ©rimentĂ©, un petit potager. Je me souviens encore comme si câĂ©tait hier de la touffeur de la serre dans laquelle on avait semĂ© les plants de tomates destinĂ©s Ă nos potagers; nous y avons appris comment les transplanter. Depuis, chaque fois que jâentre dans une serre, je me retrouve Ă cette Ă©poque.
Je frĂ©quentais beaucoup le Jardin botanique; chaque samedi, on y projetait des films scientifiques pour les jeunes; câĂ©tait avant la tĂ©lĂ©vision⊠Jâassistais rĂ©guliĂšrement Ă ces projections. Une partie de mes Ă©conomies passait Ă mâacheter des livres au centre de documentation du Jardin botanique. Quelques annĂ©es plus tard, pendant une de mes crises de dĂ©tachement, jâallais faire don de toute cette bibliothĂšque.
Le CollĂšge Sainte-Croix, oĂč jâai fait mon cours classique, mâa mis en contact avec ce fameux scoutisme sur lequel jâavais tant lu. Ma dĂ©termination est venue Ă bout de lâopposition de mes parents Ă mon inscription au mouvement. Je ne sais trop pourquoi ils Ă©taient contre. Je mây suis plongĂ© sans retenue â ce qui mâa valu maintes «retenues» parce que jâen nĂ©gligeais mes Ă©tudes. Jây ai appris Ă mieux connaĂźtre la nature et Ă voir la forĂȘt comme une alliĂ©e oĂč, avec un peu dâingĂ©niositĂ© et quelques connaissances, on peut toujours rĂ©ussir Ă rĂ©pondre Ă ses besoins fondamentaux; les Indiens le font bien depuis des centaines dâannĂ©es. Sans doute avais-je des aptitudes, car de lâĂ©lĂšve, je suis bientĂŽt devenu lâun de ceux qui initiaient les autres aux secrets de la nature et de la survie en forĂȘt. Le scoutisme mâa aussi ouvert Ă la notion de service, Ă la solidaritĂ©.
Une fois mon cours classique terminĂ©, jâai dâabord optĂ© pour la prĂȘtrise; mais avant mĂȘme de mettre les pieds au sĂ©minaire, jâavais abandonnĂ© mon projet. Ne sachant trop quelles Ă©tudes choisir â il ne pouvait ĂȘtre question de commencer Ă travailler aprĂšs un cours classique â, jâai consultĂ© un orienteur professionnel qui, Ă ma grande surprise, mâa conseillĂ© les Ă©tudes mĂ©dicales. Pourquoi nâai-je pas pensĂ© alors Ă la biologie, Ă lâagronomie ou Ă une autre des sciences de la nature? Lâorienteur me disait que jâavais deux traits dominants: le social et le scientifique, et il croyait que les professions qui me permettraient la jonction des deux seraient la mĂ©decine et lâenseignement. La deuxiĂšme me disant moins que rien, jâai optĂ© pour la mĂ©decine.
Alors que jâaurais dĂ» ĂȘtre emballĂ© par les diverses matiĂšres qui Ă©taient enseignĂ©es au dĂ©but du cours de mĂ©decine â lâanatomie, lâhistologie et surtout la physiologie, qui explique le fonctionnement du corps â, je nây ai pas trouvĂ© grand intĂ©rĂȘt. Ătait-ce Ă cause de la maniĂšre dont câĂ©tait enseignĂ© ou de lâatmosphĂšre de bachotage qui rĂ©gnait Ă la FacultĂ©? Sans doute les deux. Nous Ă©tions constamment en examen et il fallait Ă©tudier pour rĂ©ussir ces examens et non pour apprendre. Ce nâest que plusieurs annĂ©es plus tard que jâai trouvĂ© Ă mâĂ©merveiller du fonctionnement de lâorganisme humain, de tout organisme vivant en fait. Et une fois les sciences de base terminĂ©es, ce fut encore pire: nous nâentendĂźmes plus jamais parler de nature, mais uniquement dâinterventions artificielles: pharmacologie, chirurgie, radiologie, diĂ©tĂ©tique mĂ©dicale⊠Le tout se termina par lâinternat qui se faisait entiĂšrement Ă lâhĂŽpital, ce milieu coupĂ© de la sociĂ©tĂ©, de la vie et de la nature.
Ma pratique en tant quâomnipraticien ne fut pas meilleure que ma formation. Le milieu trĂšs dĂ©favorisĂ© oĂč je mâinstallai mâobligea cependant Ă utiliser fort parcimonieusement les examens de laboratoire, les radiographies et mĂȘme les mĂ©dicaments: les gens nâavaient pas dâargent pour payer ces choses. MĂȘme la maniĂšre dâassister les femmes dans leurs accouchements sâen trouvait complĂštement transformĂ©e: lâhĂŽpital Ă©tait trop cher (câĂ©tait avant lâassurance-hospitalisation), alors les accouchements se faisaient Ă domicile. Les femmes qui avaient une assurance ou un peu dâargent accouchaient dans de petits hĂŽpitaux privĂ©s, ce qui ne diffĂ©rait pas tellement du domicile, sauf pour le post-partum pendant lequel elles avaient droit Ă des soins infirmiers.
Les accouchements demeurent le plus beau souvenir de ma pratique: ces heures parfois longues dans lâintimitĂ© du foyer, cette collaboration intime qui se dĂ©veloppait immanquablement et surtout, ce miracle de la nature qui se reproduisait constamment. Bien sĂ»r jâai eu peur quelquefois, mais si peu souvent. Et jamais la nature ne nous a fait faux bond. Un seul accouchement auquel jâai participĂ© sâest terminĂ© tragiquement, par le dĂ©cĂšs du bĂ©bĂ©, et câest lâunique accouchement qui avait eu lieu dans un hĂŽpital rĂ©gulier; le triste dĂ©nouement Ă©tait imputable Ă un radiologiste qui avait mal fait son travail.
Câest Ă Saint-Hubert, sur la rive Sud de MontrĂ©al, que jâai pratiquĂ© en tant que mĂ©decin. Mon bureau Ă©tait installĂ© dans ma maison. DĂšs que jâai emmĂ©nagĂ© Ă cet endroit, je me suis fait un potager que jâai ensuite agrandi dâannĂ©e en annĂ©e. Je me suis lancĂ© intuitivement dans la culture biologique. Pour moi, cela allait de soi: pourquoi employer des engrais artificiels, des herbicides ou des pesticides quand on peut se dĂ©brouiller avec ce que la nature nous offre? Dans la nature, il nây a pas tous ces produits artificiels et pourtant, il y a abondance de plantes diverses. Jâai expĂ©rimentĂ© et jâai commencĂ© Ă lire et Ă apprendre, en particulier en mâabonnant Ă la revue amĂ©ricaine Organic Gardening and Farming. Les rĂ©sultats ne se sont pas fait attendre: des fruits et des lĂ©gumes frais, dĂ©licieux, Ă portĂ©e de la main et Ă coĂ»t minime. Je nâĂ©tais pas conscient Ă ce moment des avantages quâun tel mode de culture pouvait comporter sur le plan de la valeur alimentaire. Depuis, jâai beaucoup lu sur le sujet et je sais maintenant que non seulement les aliments biologiques ne contiennent pas de rĂ©sidus toxiques des produits chimiques de lâagriculture industrielle, mais en plus, ils apportent une plus grande variĂ©tĂ© et une plus grande quantitĂ© de micronutriments â vitamines et minĂ©raux. Depuis mon premier potager, je nâai jamais cessĂ© de jardiner.
Ma pratique mĂ©dicale a Ă©tĂ© de courte durĂ©e: deux annĂ©es. TrĂšs vite, jâai dĂ©couvert quâavec ce que jâavais appris, je ne pouvais pas aider les gens comme jâaurais voulu, en profondeur, en allant aux sources de leurs problĂšmes. Comme la plupart de ces problĂšmes me paraissaient socioĂ©conomiques, jâai dĂ©cidĂ© de retourner Ă©tudier pour tenter dâacquĂ©rir les connaissances qui me permettraient dâagir efficacement, en aidant les gens Ă sâorganiser pour se prendre en charge et sâoccuper eux-mĂȘmes de leur sort. Je me suis inscrit Ă un nouveau cours dâorganisation communautaire qui dĂ©butait Ă lâĂcole de Service social de lâUniversitĂ© de MontrĂ©al. Par la suite, jâai travaillĂ© en planning familial.
DĂ©jĂ , Ă lâĂ©poque, la question de lâ«explosion dĂ©mographique» Ă©tait Ă lâordre du jour. Le Centre de planning familial du QuĂ©bec, que je dirigeais, nâa pas tardĂ© Ă sâimpliquer sur le plan international. Jâai donc Ă©tĂ© appelĂ© Ă participer Ă divers stages et confĂ©rences hors du QuĂ©bec. Jâai eu lâoccasion de voir du pays, comme on dit, et de dĂ©couvrir dâautres climats, dâautres peuples et dâautres paysages. Jâai pris conscience que la nature nâĂ©tait pas que mon arriĂšre-cour: elle peut prendre des visages infinis, toujours plus beaux les uns que les autres. Parce que jây suis restĂ© plus dâun an, jâai pu apprĂ©cier tout particuliĂšrement le Chili. Pendant quelques mois, jâai eu la chance dâhabiter sur la cĂŽte, dans une maison qui surplombait le Pacifique. Je me remettais alors dâune hĂ©patite et ma convalescence me forçait Ă lâinactivitĂ©; que dâheures jâai passĂ©es Ă regarder dĂ©ferler les vagues dans la baie du village et combien je me suis extasiĂ© devant le coucher du soleil sur lâocĂ©an, Ă©vĂ©nement qui, jour aprĂšs jour, nous attire irrĂ©sistiblement sans jamais nous lasser.
JâĂ©tais au Chili pour Ă©tudier et pour Ă©crire. Jâavais entrepris un travail sur les liens entre capitalisme, impĂ©rialisme et contrĂŽle de la population. Plus jâavançais dans ma recherche, plus je devenais convaincu que ce nâest pas la croissance de la population (le nombre dâĂȘtres humains sur la Terre) qui menace notre environnement, mais plutĂŽt le style de vie de cette population. Bien sĂ»r quâil y a des limites au nombre dâĂȘtres humains que peut hĂ©berger et nourrir la planĂšte. Mais ce nombre est loin dâĂȘtre atteint si les humains savent trouver la sagesse de sâextirper de la course Ă la consommation dĂ©jĂ bien entreprise; par contre, ce nombre est dĂ©jĂ trop Ă©levĂ© si nous continuons, dans les pays industrialisĂ©s, Ă augmenter notre consommation et Ă entraĂźner dans notre sillage le reste du monde qui nâaspire Ă rien de moins que lâAmerican way of life. SâĂ©vertuer Ă stopper les naissances sans modifier nos orientations globales risque de nous conduire Ă une aggravation de la situation actuelle: moins dâenfants signifie aujourdâhui moins de coĂ»ts pour les besoins essentiels comme lâalimentation, mais lâĂ©conomie ainsi rĂ©alisĂ©e est affectĂ©e Ă une autre consommation plus coĂ»teuse en ressources et potentiellement plus polluante.
De retour au pays, je me suis impliquĂ© dans le Centre local de services communautaires (CLSC) de mon coin. Jâen suis bientĂŽt devenu le directeur gĂ©nĂ©ral. On parlait beaucoup plus de santĂ© que de maladie dans les CLSC de lâĂ©poque et câest ce qui mây avait attirĂ©. StimulĂ© par ce climat, jâai entrepris une rĂ©flexion en profondeur sur la santĂ©. Jâai participĂ© Ă plusieurs groupes de travail sur le sujet, jâai Ă©crit nombre dâarticles et finalement jâai dĂ©cidĂ© dâabandonner le CLSC pour me consacrer Ă plein temps Ă la recherche et Ă lâĂ©criture. Quelques annĂ©es plus tard, jâavais terminĂ© la synthĂšse de mes idĂ©es sur la santĂ© et je publiais coup sur coup Vivre en santĂ©, Survivre aux soins mĂ©dicaux et Adieu mĂ©decine, bonjour santĂ©. Certes, je nâai rien inventĂ©; mais Ă lâĂšre de la technologie, des interventions mĂ©dicales audacieuses et de la consommation phĂ©nomĂ©nale de mĂ©dicaments, ma conception de la santĂ© dĂ©tonne et dĂ©concerte par sa simplicitĂ©. Ce que jâavais constatĂ© chez mes patients â en fait, quâils Ă©taient malades Ă cause des conditions dans lesquelles ils vivaient â Ă©tait lâĂ©vidence mĂȘme; nous ne naissons pas avec toutes sortes de dĂ©fauts de fabrication qui se manifesteront irrĂ©mĂ©diablement au cours des ans. Si nous avons tant de problĂšmes, câest que nous ne respec...