1.
La compassion,
exaltation de l’empathie
« Vieillir, c’est passer de la passion à la compassion. »
Albert Camus,
écrivain et philosophe français
(1913-1960)
La compassion est une notion spirituelle, parce qu’elle vous permet de vous stabiliser dans le moment présent. Comme la méditation, la compassion peut vous transcender.
Lorsque la méditation est difficile, il reste l’option de la compassion. Penser que vous voulez apaiser les souffrances des êtres vivants est déjà un premier pas vers la générosité. L’énergie bienveillante de cette pensée positive fera écho et vous le constaterez avec les synchronicités.
Dans le film Cloud Atlas, plusieurs destins se croisent durant cinq siècles. Ceux qui les vivent se retrouvent d’une vie à l’autre, naissant et renaissant successivement. Les conséquences de leurs choix respectifs façonnent un futur jusqu’à ce qu’un seul acte de compassion change le cours de l’Histoire. Ce film nous rappelle que nous sommes tous connectés.
« Hier encore, ma vie suivait un cap déterminé. Aujourd’hui, ce cap a changé. Hier encore, je me serais cru incapable de faire ce que j’ai fait aujourd’hui. Ces forces qui souvent redessinent l’espace et le temps, qui façonnent et altèrent tout ce que nous croyons être, commencent bien avant notre naissance et perdurent longtemps après notre mort. Nos vies, nos décisions, comme des trajectoires quantiques, ne se comprennent que dans l’instant. Chaque point d’intersection, chaque rencontre, suggère une nouvelle direction potentielle. » (Isaac Sachs dans le film Cloud Atlas, interprété par Tom Hanks)
Si, par le passé, la compassion était rattachée aux textes religieux, elle n’en était pas moins une source d’inspiration pour tous ceux qui voulaient faire le bien et sauver les innocents. Souvent comparée à la pitié, elle est bien plus que cela.
La compassion exprime le courage de s’effacer pour laisser apparaître la conscience de l’humanité.
De la Passion à la compassion
À travers l’histoire de Jésus, dans la religion chrétienne, il est question d’un homme capable de communiquer avec Dieu. Sa puissance empathique ira jusqu’à savoir et déclarer sa mort prochaine d’une façon des plus terribles. Et c’est ce qui se passa : il fut trahi, humilié, torturé, condamné puis crucifié. Les évangiles nommèrent ces moments de supplice « la Passion du Christ ». Ce terme utilisé dans la religion nous paraît être aux antipodes de la passion telle que nous l’entendons dans la société, à savoir un amour immodéré pour un objet, pour quelque chose ou pour quelqu’un. Pourtant, cette souffrance a permis à Jésus de ressusciter. Jésus avait une véritable passion pour le vivant et c’est la combinaison de la violence qui lui fut infligée et de l’amour exalté pour la vie qui lui donne le pouvoir suprême de revenir ici-bas.
Avant la religion chrétienne, Jésus était un homme « comme les autres », passionné par la compassion, peut-être plus que la normale par rapport à son époque. En tout cas, c’est ce que le temps et l’histoire retiendront (entre autres) de lui.
La violence que nous nous infligeons et que nous déversons aux êtres vivants + l’amour passionnel que nous leur portons nous poussent à exprimer notre compassion. Nous sommes, en réalité, un mélange entre le Bien et le Mal, et il n’est pas nécessaire d’appartenir à une religion pour le savoir. En 2012, une étude menée par l’Université de Nottingham dévoile que les personnes athées montrent plus de compassion que les personnes croyantes. D’après les conclusions de l’étude, les personnes religieuses font passer les gens de leur communauté avant les autres. Cela ne signifie pas qu’ils ne font pas preuve de compassion, mais qu’ils seraient enclins à favoriser ceux qui appartiennent à la même religion. Les personnes athées, en revanche, vont avoir de la compassion pour un panel plus large, englobant les personnes croyantes et les personnes athées. Il manque cependant une composante à cette étude : c’est que la compassion, tout comme le bonheur, est contagieuse ! Tout se rejoint, car la compassion se diffuse grâce à l’empathie. L’empathie et la compassion qui font effet ensemble et en même temps réalisent un formidable mouvement de solidarité, comme on a pu le voir lors des rassemblements après les attentats.
Les actes de compassion vous permettent aussi de vous ancrer dans le moment présent. Si vous les appliquez quotidiennement, vous allez ressentir ces instants d’ouverture, ces dialogues avec votre âme de plus en plus souvent. Lorsque vous êtes en joie d’avoir accompli une mission d’amour, vous envoyez un message d’espoir énergétique. Cela peut être aider une personne âgée à traverser la rue, donner un euro ou deux avec un immense sourire à ceux qui n’ont que le choix de vivre dans la rue, réconforter avec votre lumière les personnes qui demandent de l’aide. Vous n’avez pas besoin de parcourir le monde pour l’appliquer, vous n’avez qu’à sortir de chez vous et prêter attention à ceux qui souffrent. Et il y en a beaucoup !
C’est en diffusant de la bonté que vous allez sortir la société de l’asphyxie.
En ce qui me concerne, la méditation m’a guidée sur le chemin de l’Éveil, mais ce qui a transcendé mon mental a réellement été la culture de la bonté, de la gentillesse, de la tendresse, de la prévenance et de la bonhomie. En étant simplement dans l’honnêteté de la bienveillance avec l’Autre, sans avoir peur, vous pourrez communiquer avec votre conscience. Cela commence par un sourire qui veut dire : je te respecte, je te reconnais, tu fais partie de cet univers et je salue ton âme. Un sourire, c’est à la fois rien et c’est à la fois la force de l’espoir. Les personnes en dépression n’arrivent plus à sourire naturellement. Malgré tout le mal qui les ronge, il suffit qu’une personne leur offre un généreux sourire pour que naisse l’envie de répondre par la même chose. Quand on est en dépression, on n’a plus envie de rien, et le fait même de sourire est un challenge ; alors, imaginez lorsqu’une personne dépressive parvient à sourire grâce à l’attention que vous lui portez ! C’est un sentiment absolument fabuleux. Vous l’avez aidée à gravir une étape dans la guérison, vous avez été dans la compassion en la libérant de sa torpeur.
De la compassion à une nouvelle vie
« C’est parce que j’ai souffert que je peux t’accompagner. » Il est important de qualifier la nature de la souffrance de l’autre pour être en mesure de lui apporter notre énergie bienveillante. Si vous-même n’avez pas ou très peu vécu la douleur, le fait même d’aider va être faussé par votre ego. Quand nous reconnaissons la souffrance, la compassion pour autrui est puissante et efficace.
Je l’ai vécu, et le job de la compassion a été de me faire prendre conscience qu’une nouvelle vie m’attendait.
Deux mois après le décès de mon père, je me remettais doucement dans le rythme de la ville. J’étais encore déconnectée de la vibration de la société et je souffrais du manque physique de mon papa. Sa voix me manquait, son humour me manquait et je me sentais seule. Il était 16 h et je marchais dans la rue de Rennes dans le VIe arrondissement, en essayant vainement de me distraire avec les vitrines des boutiques.
Alors que l’horrible boule de tristesse commençait à monter dans ma gorge, surgit devant moi une femme habillée tout en noir, d’une soixantaine d’années. Son visage affichait un froncement grave e...