
- 184 pages
- French
- ePUB (adapté aux mobiles)
- Disponible sur iOS et Android
eBook - ePub
Seconde épouse
À propos de ce livre
Rien ne prédestinait Yasmine, chef d'entreprise française vivant en Côte d'Ivoire, à accepter de vivre la polygamie. Femme moderne, divorcée et mère d'un petit garçon, elle succombe au charme d'Isat. Voici le parcours tumultueux d'une seconde épouse.
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Informations
Éditeur
Michalon éditeurAnnée
2015ISBN de l'eBook
9782347015831CHAPITRE 1
LE COUP DE FIL
Février 2012, à Abidjan
Alors que je suis en réunion avec un client important à propos de sa future campagne de communication, j’éprouve soudain une sensation étrange et inconnue. J’ai l’impression qu’une partie de moi vient de me quitter… Je m’arrête quelques secondes avant de reprendre ma présentation devant toute l’équipe. Mon portable se met à vibrer, c’est un texto de mon mari Isat : « Arrête, arrête. »
Je me demande de quoi il parle. S’est-il trompé de destinataire ? Je ne m’en soucie guère et ne réponds pas dans l’immédiat.
Isat et moi sommes mariés depuis trois ans et nous envoyons sans cesse des textos. Une centaine par jour, c’est notre moyen de communication favori quand nous sommes loin l’un de l’autre. Nous partageons ainsi nos émotions, nos réflexions, des plaisanteries, des petites choses du quotidien, qui prouvent à l’autre que l’on pense à lui, qui illuminent la journée de chacun :
– 5 h 00 : « Habibo (« mon cœur » en arabe), ça va ? »
– 6 h 00 : « Tu es réveillée ? Je pense à toi… »
– 7 h 00 : « Tu es au travail ? »
Et ainsi tout au long de la journée.
Isat me fait souvent rire, parfois sans le vouloir. Un jour, alors que je me trouve au supermarché avec ma fille, il me demande de lui envoyer une photo de notre petite Eva. Après l’envoi, il me fait une remarque qui m’amuse beaucoup :
« Ton chariot n’est pas assez rempli… »
Isat est un self-made-man libano-ivoirien, qui s’est lancé dans les affaires en 1993 en créant une entreprise de distribution. Il a pour habitude de tout acheter en gros : de quoi nourrir un régiment. Mon chariot à peine rempli l’inquiète donc quelque peu. En moins de vingt ans, il a réussi à bâtir un grand groupe industriel, très actif dans les activités maritimes, portuaires, aéroportuaires, routières et ferroviaires. En 2003, son groupe contribuait à près de 5 % des recettes douanières et fiscales de l’État.
Malgré sa fortune, mon époux reste un homme humble au quotidien. Quand nous sommes en froid, c’est toujours lui qui fait le premier pas en m’envoyant des « smileys » ou des petits cœurs, pour renouer le dialogue. Ainsi, nos disputes ne durent jamais plus de deux jours.
La réunion terminée, je décide de passer par le bureau, histoire de faire le bilan. Vers 17 heures, je me sens lasse, je m’écroule sur mon fauteuil, puis décide de rentrer chez moi.
Il est 17 h 15 quand je regagne mon domicile, à quelques minutes de mon agence, rue Lumière, en Zone 4. « La Zone 4 » est le nom d’un quartier d’Abidjan réputé pour être très animé et fréquenté par des expatriés. J’y vis depuis quelques années. J’ai choisi de m’y installer après mon divorce avec Felipe, le père de Carlos, mon premier enfant. C’était l’endroit idéal à mes yeux, ceux d’une jeune femme célibataire française d’origine libanaise de 33 ans, cherchant à vivre dans la discrétion, après une séparation. Felipe habite toujours Marcory, le quartier libanais à côté du mien, où il est impossible d’avoir une vie privée – c’est un petit village où les rumeurs circulent vite –, d’où mon envie de m’en éloigner.
En Zone 4, j’ai installé mon agence de communication, ma régie publicitaire et mon restaurant. Je vis dans une belle résidence avec piscine. Un luxe indispensable à Abidjan, où la chaleur est parfois incommodante, surtout en mars.
Dans cet appartement, j’abrite ma petite famille : ma fille Eva, qui a tout juste 7 mois, née de mon union avec Isat, et Carlos, mon fils de 7 ans, qui nous rejoint trois fois par semaine puis repart chez son père, pour une garde partagée.
Avant d’aller dans ma chambre et de mettre une tenue plus décontractée, je prends Eva dans mes bras, lui fais un câlin et la repose dans son berceau. Je retourne au salon me détendre et récupère mon portable. Une fois qu’il est chargé, je consulte mes messages, notamment ceux d’Isat. Je relis le texto énigmatique de ce matin, et m’interroge. Que voulait-il dire ? Je décide de l’appeler pour avoir des explications. Alors que je compose son numéro, mon téléphone se met à vibrer, c’est Karim, le neveu d’Isat. Je suis agacée, je n’ai pas vraiment envie de lui parler. Je ne réponds pas à l’appel, mais il insiste et, au bout d’un moment, je finis par décrocher, en soupirant :
– Allô ! Yasmine ?
– Oui, Karim…
– Yasmine, écoute euh… Je ne sais pas ce qui se passe, mon oncle a eu un problème, il a fait un malaise…
– Ah bon, un malaise ? Est-ce grave ? Où est-il ?
– Écoute, nous sommes en train de voir ce qui se passe, je te tiens au courant, me dit-il avant de raccrocher.
Je suis dans tous mes états et ne sais vraiment plus quoi penser. J’appelle mon oncle, qui habite non loin de là :
– Tu es au courant qu’Isat a fait un malaise ? Il a été transporté d’urgence à la clinique de son quartier. Tu peux aller voir ? Je n’arrive pas à le joindre.
– Attends, laisse-moi me renseigner…
Au bout de cinq minutes, je le rappelle. Mais il ne décroche plus, et je ne peux pas rester sans réponse. Il me vient alors l’idée d’appeler le médecin particulier d’Isat. Le téléphone sonne dans le vide, je tombe sur sa messagerie. Je suis dépitée. Je rappelle Karim, il me répond :
– Laisse tomber Yasmine.
Sur le moment, je ne comprends pas ce qu’il essaie de me dire. Isat serait-il mort ?
On frappe à la porte. Germaine, la nourrice des enfants, va ouvrir. C’est mon frère Jihad qui débarque, l’air tourmenté. Une amie, déjà au courant du drame, l’avait sommé de venir me voir, sans lui expliquer pourquoi.
Dans la foulée, mes cousins Nader et Radwan, mon grand frère Amir, Marie-France ma collaboratrice et confidente, Batoul mon amie ainsi que son mari, suivis d’autres proches, arrivent chez moi. Je ne les avais pourtant pas appelés.
Il est 18 h 30 et tous s’installent dans le salon. Ma tante Élodie et tati Sonia sont là aussi… Elles viennent m’annoncer officiellement la mort d’Isat ! Ils sont au courant, avant moi !
« Mais non ! C’est impossible ! Je n’y crois pas, il m’a envoyé un texto il y a quelques heures ! »
Mon frère Jihad et moi nous regardons un long moment sans rien dire.
Les femmes sont en larmes, choquées, les hommes restent silencieux, les visages sont graves. On peine tous à croire à ce décès.
Je fais des allers-retours entre ma chambre et le salon, en criant, avant de m’effondrer sur mon lit.
Le doute s’installe dans mon esprit. Je supplie alors Nader de m’emmener auprès de mon époux. S’il est mort, il faut absolument que je voie son corps pour en avoir le cœur net ! Mais personne autour de moi ne réagit. Je commence à m’impatienter. Je me mets à trembler, j’ai la migraine, des sueurs froides et du mal à déglutir. Je ne tiens plus en place, mes nerfs lâchent :
– Mais qu’est-ce qu’on attend ? Je veux le voir !
Allons-y…
La seule réponse que j’obtiens vient de Nader, très embarrassé :
– Il va falloir patienter…
– Quoi ?
L’interlocuteur de Nader au téléphone, un membre du clan E., la famille d’Isat, nous recommande d’attendre encore quelques heures avant de nous rendre à la morgue, et pour cause : la première épouse d’Isat et sa famille sont déjà sur place. Il faut respecter le protocole et, surtout, éviter que l’on se rencontre. Je suis folle de rage, ma belle-famille m’empêche de voir son corps ! Dans tous mes états, je continue d’arpenter le salon et ma chambre de long en large.
Marie-France, sentant ma détresse, se lève et se dirige vers moi, pour me réconforter. Je m’abandonne dans ses bras, paralysée. Je ne sais plus quoi faire, ni dire. Je reste silencieuse, je n’ai même pas le courage d’appeler ma mère qui se trouve à Paris.
Le monde autour de moi devient flou, je ne l’entends plus. Mon regard se fige et je me perds dans mes pensées, pendant un long moment.
Au fond de moi, une interrogation résonne : Isat est-il vraiment mort ? Cette idée me ronge, je ferme les yeux et revois son visage me souriant. Cette image me rassure et me donne à espérer, je refuse d’accepter sa mort. Et dire que nous avions rendez-vous ce soir à la maison. J’entends mon cœur battre fort. De toute mon âme, je prie : « Seigneur, faites que ce ne soit pas vrai. Isat doit rester à nos côtés. » Mon fils Carlos me dira plus tard que mes yeux étaient rougis et remplis de larmes, qui coulaient tout doucement le long de mes joues.
Je repense à notre conversation de ce matin. Nous étions en froid depuis quelques jours, la peur m’enserre à nouveau : je ne lui ai pas dit au revoir et nous n’avons pas eu le temps de nous réconcilier.
Soudainement, je reviens à la réalité : « Je veux le voir, allons-y ! Nous n’allons pas rester ici ! »
Il est 22 h 30. Après cinq heures d’attente interminable, j’enfile un pantalon noir et une chemise à manches longues, je prends mon sac et mes clés de voiture en silence et, sans l’avis de qui que ce soit, je sors de la maison pour me rendre à la morgue. Les femmes se lèvent brusquement. En me voyant sortir, elles me recommandent de prendre un voile pour me couvrir la tête, ce que je fais.
La maison se vide, toute la famille me suit. Devant la morgue, nous retrouvons les membres de la famille E., tous alignés, faisant bloc. La tension est palpable. Ils nous observent d’un air méprisant. Nader endosse le rôle de médiateur et engage une conversation avec les frères de mon mari. À ce moment-là, je réalise à quel point ces derniers, et surtout sa première femme, m’ont toujours détestée, me considérant comme une fille de passage, une distraction, et ce, malgré mon mariage avec Isat et la naissance de notre fille. En aucun cas, je ne devrais revendiquer le droit de voir sa dépouille !
Nader revient vers moi pour m’annoncer les consignes à respecter. Cinq minutes : c’est le temps qui m’est accordé pour lui dire adieu. Et selon la tradition, je n’ai pas le droit de parler au défunt, ni de pleurer, ni de le toucher. Il a déjà été lavé et doit vite être enveloppé puis enterré. Je suis en proie à un terrible sentiment d’injustice. J’ai très peu de temps à ses côtés, mais je suis apaisée de revoir mon bien-aimé.
Nader et moi nous dirigeons vers la salle du mort. Je couvre ma tête, mon cœur bat à toute vitesse, prêt à faire exploser ma poitrine. Nous poussons la porte, et quand j’entrevois le corps d’Isat, j’ai envie de crier, de me jeter sur lui pour le serrer dans mes bras. Je respire fort et me concentre pour rester digne malgré la douleur. Je m’agrippe au bras de mon cousin. La pièce, composée de petits carrés blancs, est glaciale, et l’odeur du formol insoutenable. Les frères E. encadrent le corps, assis chacun sur une chaise. Et dire que je voulais passer ce dernier moment seule avec mon tendre époux… Chaque minute compte, alors j’essaie de vivre pleinement ces derniers instants en sa présence. Enfin, je le retrouve… mon Isat. Je m’approche tout doucement. Lui si hyperactif, c’est étrange de le voir ainsi étendu, inerte. Je prends soudain conscience qu’il est bien mort.
Je sanglote doucement pour ne pas qu’on me remarque. Les cinq minutes écoulées, Nader lance un « Al fatiha » pour annoncer le début de la prière. On me fait sortir. C’est la dernière fois que je le vois. À partir de cet instant, il ne m’appartient plus, c’est un personnage public. Moi, sa plus proche confidente, je dois le laisser partir. En sortant, j’aperçois des hommes se précipiter vers la salle où la dépouille est exposée. Ses frères l’embarqueront le lendemain matin pour le Liban, sans même avoir effectué une autopsie. Isat sera enterré là-bas, dans son village, à Barich, si loin de moi, si loin d’Eva.
Toute la communauté libanaise est en alerte. Plusieurs imams font le déplacement. Les envoyés spéciaux des télévisions du Sud-Liban préparent leurs interventions en direct depuis l’entrée de la morgue.
Je m’éloigne tout doucement au bras de mon cousin, en direction de ma voiture. Durant le trajet du retour, personne ne dit mot. Il est tard, les rues d’Abidjan sont peu éclairées. Je regarde par la fenêtre sans vraiment voir ce qui se passe à l’extérieur.
Je suis sonnée, comme si j’avais pris un coup sur la tête. Mon mond...
Table des matières
- Couverture
- 4e de couverture
- Copyright
- Titre
- Dédicace
- Chapitre 1 – Le coup de fil
- Chapitre 2 – Une enfance partagée entre deux cultures
- Chapitre 3 – Une chef d’entreprise pas comme les autres
- Chapitre 4 – La rencontre avec Isat
- Chapitre 5 – Une escapade amoureuse à Paris
- Chapitre 6 – Un mariage éclair
- Chapitre 7 – Deux femmes, deux rivales
- Chapitre 8 – Un heureux événement
- Chapitre 9 – Une veuve bafouée
- Chapitre 10 – David contre Goliath
- Chapitre 11 – L’attente et l’espérance
- Remerciements
- Table des matières