Le Triomphe de la classe politique anglaise
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Le Triomphe de la classe politique anglaise

  1. 336 pages
  2. French
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  4. Disponible sur iOS et Android
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Le Triomphe de la classe politique anglaise

À propos de ce livre

Après 1970, insidieusement d'abord puis clairement avec les équipes de Tony Blair, une classe politique est apparue qui n'existe que par ses mandats. Cette classe politique, devenue autonome, est tombée dans une plus ou moins grande corruption et attire les ambitieux opportunistes les plus vulgaires. Elle est avide d'argent, habituée aux passe-droits en tout genre qui lui paraissent naturels. Elle méprise le citoyen ordinaire et elle le manifeste presque ouvertement.

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Informations

Année
2014
ISBN de l'eBook
9782368472439

II
LA CLASSE POLITIQUE ET LA DESTRUCTION
DE L’ESTABLISHMENT BRITANNIQUE

La classe politique est arrivée à envahir tout le domaine qui était censé être celui de l’Establishment à la fin du XXe siècle. Comme l’Establishment, cette classe politique occupe les parties hautes de l’organisation sociale et économique britannique. Elle fixe les normes sociales et détermine les limites entre le privé et le public. Plus encore que l’Establishment, elle forme un groupe fermé qui ne s’ouvre pas aux pensées nouvelles et aux jeunes idées. Elle modèle l’état d’esprit national et réunit les compétences qui occupent les positions importantes de l’État et de la société.
Selon Jeremy Paxman1, dans son livre Friends in High Places – description magistrale du système britannique de gouvernement, paru en 1990 –, le mot d’« establishment » a été employé pour la première fois par l’historien A.J.P. Taylor2 qui écrivait en 1953 que « l’Establishment parle avec ses propres accents ; mange ses propres plats à ses propres heures ; dispose d’un système éducatif privilégié ; pratique sa propre religion ; a même, au sens large, sa propre variété de football. Nulle part ailleurs en Europe, vous ne pourrez déceler la position sociale de votre interlocuteur d’après une courte conversation et en communiquant avec lui ». Taylord faisait de son « Establishment » l’équivalent de « La Chose », le mot qu’utilisait William Cobbett3 dans son journal militant Political Register, au début du XIXe siècle. Mais notre intention est de démontrer que la comparaison entre l’Establishment des années 1950 et « La Chose » de Cobbett ne vaut pas. En effet Cobbett dénonçait les affairistes, le patronage gouvernemental, la corruption de la presse et les collusions entre les partis, traits qui appartiennent beaucoup plus à la classe politique qu’aujourd’hui qu’à l’Establishment décrit plutôt vaguement par Taylor.
En vérité, l’Establishment existait depuis des décennies avant 1950 et il était probablement au plus haut de son pouvoir et de son influence au temps de la crise de 1936, lors de l’abdication d’Édouard VIII4. Henry Fairlie5, directeur politique du Spectator, écrivit le texte classique sur le sujet en 1955 : « Par Establishment, nous entendons non seulement les organes officiels du pouvoir – ils en font certainement partie – mais plutôt la matrice des rapports politiques et sociaux par lesquels cet Establishment exerce son autorité qui, en Grande-Bretagne – et davantage encore en Angleterre –, ne peut être comprise que si on reconnaît qu’elle est sociale. Tous ceux qui ont participé à l’exercice du pouvoir comprennent ce que j’écris si j’affirme que l’Establishment est à l’œuvre non seulement quand agissent le Premier ministre, l’archevêque de Canterbury et le Comte-Maréchal6 mais aussi des hommes moins connus comme le président du Conseil pour les Arts, le directeur général de la BBC ou même l’éditeur du supplément littéraire du Times sans compter des influences individuelles : ainsi celle de Lady Violet Bonham Carter7. »
L’« Establishment » décrit par Henry Fairlie était cimenté par une communauté d’allure, d’accent, d’origine sociale et d’éducation. Cette caractéristique vaut pour la classe politique et il est instructif de comparer ces traits communs plus en détail.

L’accent et le style oratoire

L’Establishment pratiquait l’anglais de la Reine, sorte de prononciation qui avait pris naissance au XIXe siècle et qui avait pour but d’effacer les accents régionaux. Son prestige était tel que les Britanniques qui aspiraient à une carrière politique ou qui avaient l’ambition d’une position sociale importante faisaient de grands efforts pour arriver à cette prononciation jusqu’à prendre des leçons d’élocution8. Par exemple, Edward Heath9 et John Major10, Premiers ministres conservateurs qui sortaient du bas de la classe moyenne, ont travaillé dur pour modifier leur accent malgré le coût de cet effort pour leur personnalité authentique. Or, aujourd’hui, parler l’anglais de la Reine est devenu un handicap pour qui veut faire carrière dans la classe politique.
L’anglais de l’Estuaire, défini par le linguiste David Rosewarne en 1984, est devenu l’accent ordinaire de la classe politique11. C’est une sorte de compromis qui réunit des éléments de l’ancienne prononciation et des accents locaux, d’abord ceux de l’est londonien. Il est accessible à la fois aux membres de la classe ouvrière qui gravissent l’échelle sociale et aux Britanniques qui, élevés dans des écoles privées, cherchent à manifester leur familiarité avec les modes urbaines et la culture de la jeunesse. Il s’est répandu alors que, parallèlement, les principaux partis politiques britanniques négligeaient le cœur de leur électorat dans leur effort pour conquérir le groupe central. L’anglais de l’Estuaire est utile pour masquer les origines sociales et de nombreux spécialistes croient qu’il va devenir la prononciation d’usage12.
Dans la classe politique, Tony Blair est un exemple du passage de l’anglais de la Reine à l’anglais de l’Estuaire. Edward et David Miliband, ministres qui ont de l’avenir, ont pris le même chemin comme beaucoup d’autres. Alan Johnson13, ministre qui a retenu son accent londonien natif selon la nuance de Whitehall, a pris la direction opposée. L’anglais de l’Estuaire s’entend à la Chambre des Communes sur les premiers bancs comme sur les derniers ; des pairs à vie et des pairs héréditaires l’utilisent. Dans les médias, la fonction publique et la publicité, son usage est général.
Bien que la prononciation de la classe gouvernante soit devenue plus populaire et moins aristocratique, la forme employée par les hommes est allée en sens inverse et a fait un long chemin. Les interviews données par les hommes politiques de l’Establishment dans les années 1960 et auparavant font souvent rire : c’est que les interlocuteurs parlaient sincèrement avec la fantaisie et la vivacité d’un dialogue spontané. La classe politique a délibérément renoncé à ce langage simple.
Il faut donc traiter des deux nouveaux styles, inintelligibles l’un et l’autre aux gens ordinaires, et qui séparent la classe politique des électeurs qu’elle est censée représenter. Le premier est celui qu’emploie la classe politique pour parler d’elle-même : il est opaque, relève souvent des techniques de manipulation de l’électorat et repose sur le principe anti-démocratique qu’il existe des sujets que les gens ordinaires sont incapables de comprendre ou qu’il serait trop dangereux pour eux de connaître. Dans un discours au Policy Exchange14, en mai 2007, Olivier Letwin15, chef des études politiques du Parti conservateur, décrivit, avec une opacité restée célèbre, le besoin « d’identifier les externalités que les acteurs du marché libre négligent volontiers et ensuite de chercher à créer les structures qui amèneraient la population et les organisations à inter-naliser ces externalités ». Ces formules épaisses se comparent avec l’avancée de Gordon Brown, avant les élections de 1997, sur « la théorie post-néo-classique de la croissance endogène ». Les exemples de ce langage obscur ou trompeur sont très nombreux et ils expliquent pourquoi les débats politiques sont sortis de la culture du public ordinaire où ils avaient leur place cinquante ans auparavant.
Ces propos difficiles à comprendre et se rapportant à eux-mêmes ont au moins le mérite d’être une contribution au débat politique. Ils ne l’ont plus quand les chefs politiques modernes s’adressent directement aux électeurs. L’émergence de la classe politique a coïncidé avec la vogue des petites phrases, expressions brèves et sans verbe, que l’électeur croit décoder aisément mais qui sont normalement composées pour le tromper. La petite phrase est devenue l’une des armes les plus efficaces de la classe politique ; conservateurs et travaillistes l’utilisent généreusement. Elle contraste tout à fait avec le style oratoire confus et hésitant de l’époque de l’Establishment. Comme l’a écrit Colin Crouch, spécialiste de science politique, « nous sommes maintenant habitués à entendre des politiciens qui ne parlent pas comme tout le monde mais qui s’expriment à leur manière, désinvolte et très bien préparée. Nous appelons cela “petites phrases” et cette désignation dédaigneuse nous dispense de penser à ce qui suit. Comme le langage des journaux populaires ou la littérature de parti, il ne s’agit là ni de la conversation ordinaire qu’on entend dans la rue, ni de la vraie discussion politique. Ces deux modes de communication démocratique dépassent le cadre des campagnes électorales16 ».

Le code vestimentaire de la classe politique

L’Establishment britannique a toujours eu la réputation d’imposer un code d’habillement à ses membres. Les hommes portaient des complets sur mesure, avaient des parapluies et, jusqu’à la révolution sociale des années 1960, un chapeau melon sur la tête. Les lois vestimentaires de la classe politique ne sont pas moins strictes et même parfois plus rigoureuses, sous certains aspects qui intriguent, que les conventions observées jadis par les membres de l’Establishment. Le complet est de rigueur pour les hommes, et les femmes s’habillent exactement comme les femmes d’affaires de haut niveau. Les chefs politiques sont certainement plus élégants que ne l’étaient les anciennes générations : comparez les tenues de Tony Blair ou de Gordon Brown à celle d’Harold Wilson, celles de David Cameron à celles d’Edward Heath. Les chefs de parti, à l’ère de la classe politique, attachent plus d’importance que leurs aînés à leur apparence extérieure.
Ceci est encore plus frappant si l’on s’intéresse à l’habillement de loisir. Hors de leurs fonctions, les membres de l’Establishment portaient des pantalons de velours côtelé trop amples et de vieux chandails minables. Mais la classe politique, même quand elle n’est pas dans l’exercice de ses fonctions, travaille dur pour délaisser les codes vestimentaires anciens. Pour être informels, les hommes de la classe politique gardent leur complet mais retirent leur cravate. La très curieuse disparition de la cravate dans la première décennie du XXIe siècle est ambivalente. D’un côté, un esprit d’indépendance qui rejette les habitudes traditionnelles – et, pour la classe politique qui a trouvé dans l’agitation étudiante des années 1960 la source de ses émotions et de sa moralité, c’est très significatif –, mais d’un autre côté, cette tendance à porter son uniforme officiel dans les moments de loisir qui exprime l’exact opposé : un attachement maladif aux formes officielles de comportement. Cela marque aussi la disparition de la distinction entre vie publique et vie privée qui est l’un des traits dominants de la classe politique.
Un très petit exemple de cette manière générale est fourni par le Premier ministre Gordon Brown. À la fin des années 1980 – il était alors une étoile montante du Parti travailliste – une journaliste du Daily Mirror, Fiona Millar17, se rendit dans son appartement d’Edimbourg afin d’interviewer Brown dans le décor de sa vie privée ; cependant il était habillé d’un strict complet noir. Pour les photographies, on lui demanda gentiment une tenue plus décontractée : il alla dans sa chambre et changea de cravate. L’année dernière, dans un effort pour démontrer que Brown partageait les goûts de l’homme de la rue, ses conseillers en communication convièrent des journalistes pour voir, avec Brown et dans son appartement, un match de football ; une fois de plus, il était en complet veston. En 2007, lors d’un voyage en Inde, par une chaleur étouffante, il était toujours dans son complet veston alors qu’une tenue décontractée aurait bien mieux convenu. Ce goût de l’actuel Premier ministre pour l’uniforme de l’élite au pouvoir, même dans la vie privée, est caractéristique du comportement de la classe politique
Alors que Brown est heureux de porter son complet veston chez lui, il est connu que, dans les cérémonies publiques, il ne veut pas des vêtements qu’on y porte d’ordinaire. Chancelier de l’Échiquier invité au banquet du Lord maire de Londres, il refusa de se mettre en habit, la plus soignée et la plus élégante des tenues du soir. Dans ce cas précis, Brown fait étalage de la duplicité fondamentale qui est le cœur du comportement de la classe politique dans son image publique : d’un côté la rébellion contre les coutumes établies, les traditions, les formes de contrôle social qui s’opposent à sa domination ; de l’autre, un code vestimentaire très strict dans le dessein de manifester sa propre autorité et de se distinguer du commun. Bien sûr, l’Establishment maintenant discrédité poursuivait le même but avec les robes et les perruques de la magistrature, l’exubérance des grands uniform...

Table des matières

  1. Couverture
  2. 4e de couverture
  3. Titre
  4. Copyright
  5. Avant-propos du traducteur
  6. Préface pour l’édition française
  7. Introduction
  8. I – La structure de la classe politique
  9. II – La classe politique et la destruction de l’establishment britannique
  10. III – Le désastre éthique la ruine de la morale en politique
  11. IV – Les fondements financiers de la classe politique
  12. V – L’idéologie de la classe politique
  13. VI – L’affaiblissement de l’administration
  14. VII – Le déclin du ministère des affaires étrangères et le nouveau rôle des services secrets
  15. VIII – La classe politique et les libertés publiques
  16. IX – La monarchie et la classe politique
  17. X – L’attaque contre le parlement
  18. XI – Un journalisme captif
  19. XII – La classe médiatique et la guerre d’Irak
  20. XIII – La manipulation populiste
  21. XIV – Le triomphe de la classe politique
  22. Épilogue
  23. Conclusion pour l’édition française
  24. Table des matières